Nioh débarque en exclusivité sur PS4 le 8 février dans toutes les bonnes crèmeries de France et de Navarre, et j'ai pu m'essayer très longuement à la version finale, non sans difficultés et moult "Game Over", pour finalement vous livrer mon verdict sur ce jeu tant attendu par une frange délicieusement masochiste de joueurs du monde entier...
Une véritable arlésienne, ce Nioh. Annoncé à l'E3 2005 comme étant une exclusivité PS3, il aura parcouru bien du chemin avant de parvenir dans les lecteurs Blu-ray de nos PS4 rutilantes. Au commencement, le bébé est imaginé au sein de la maison mère Tecmo Koei, et Nioh devait alors être un "banal" J-RPG, bien classique, nous comptant les aventures de William, sosie officiel de Géralt de Riv mais aussi marin Anglais et personnage historique réel, venu se perdre au Japon pour y faire éclater ses talents de Samouraï. Mais les choses ont mal tourné et le projet, bancal au possible, fut non pas annulé mais transféré dans les mains d'un autre studio : Omega Force, qui l'aurait alors transformé en Musô, spécialité maison du créateur de la fameuse série des Warriors (Orochi, Samurai et Dynasty).
Mais comme j'ai récemment pu le dire dans le test de Fate/Extella, faire un bon Musô, ce n'est pas automatique... comme nous l'a d'ailleurs récemment montré le studio en nous pondant un "Berserk Wariors" pas forcément mémorable. C'est probablement ce qui à dû arriver à ce projet maudit à l'époque, puisqu'après quelques années de développement, Nioh, n'arrivant pas à satisfaire les exigences des pontes de Tecmo Koei, change encore d'équipe de développement et repart à zéro, cette fois chez des cracks du beat'em all et du jeu de baston (mais aussi de volley-ball) : la Team Ninja.
Et c'est ce sulfureux studio qui va prendre la décision, il y a quelques années, en pleine hype Dark Souls, de transformer totalement Nioh pour en faire un titre prêt à marcher sur les pas de la série d'Hidetaka Miyazaki, avec pour but avoué de s'engouffrer dans la brèche et, pourquoi pas, d'en ouvrir d'autres grâce à son univers japonisant au possible. Et après quelques essais d'autres studios dans le domaine, dont le peu glorieux Lords of the Fallen, c'était osé. Bref, Tecmo Koei à t'il eu raison de déposer son bébé dans les mains expertes de son studio le plus doué pour les jeux d'action ? Et cette filiation "Souls" a-t-elle été un fardeau pour Nioh ou une véritable motivation ? C'est ce nous allons voir tout de suite.
La course folle du Gaijin
La première chose que l'on remarque en observant l'univers global du titre, tout du moins sa direction artistique, c'est que l'on ressent fortement la passage de Nioh par plusieurs studios avant d'atterrir dans l'ancienne boîte du papa de Dead or Alive et Ninja Gaiden, Tomonobu Itagaki. En effet, comme me le confiait le nouveau boss, Yosuke Hayashi, Omega Force était toujours à l'oeuvre, pour tout l'aspect historique du jeu. Nioh se déroule dans un Japon Féodal envahi par les démons, ce qui n'empêche pas les seigneurs de guerre locaux de s'entredéchirer à grands coups de lances et d'épées. Et ces généraux qui ont la force de 1000 hommes, n'allez pas les chercher trop loin, ce sont bien les mêmes personnages historiques que l'on peut retrouver dans tous les meilleurs Musô du monde. Et le design des personnages est inclus. Ce qui veut dire que visuellement parlant, nous sommes vraiment en plein Warriors Orochi. Oubliez donc les nymphettes des autres productions de la Team Ninja, et dites adieu à Ayane et son décolleté affriolant. Mais je vous rassure : le Chara-design est globalement réussi, que ce soit pour les héros, mais aussi les héroïnes et les monstres. Boss inclus.
Et dans tout ça, Géral... euh pardon, William, se bat pour lutter contre d'obscures forces en marche pour la conquête du monde, mais aussi pour sauver son amie retenue prisonnière... Et ce, bien que The Witcher soit sorti 3 ans après l'annonce de Nioh. Si ce pitch de départ est bien plus concret que celui de Dark Souls, tout en étant soutenu par quelques cinématiques en début et fin de chapitre, au final la narration est aussi touffue que dans les jeux de From Software. Les briefing des missions se résument souvent à une seule page à lire, sans véritable indication de vos objectifs, et bien qu'agréables à suivre, les tribulations de William dans les différentes régions du Japon sont somme toute très classiques, en versant dans le scénario manichéen sur fond de démons et de guerre civile. En tous cas, l'ambiance globale est vraiment très réussie, on ressent vraiment le folklore japonnais, que ce soit dans la représentation des "onis", mais aussi dans des décors très travaillés. La partie sonore fait elle aussi preuve de talent, tant au niveau des musiques que des bruitages. Et si la présence de doublages originaux japonnais ET anglais pourra surprendre au départ, le tout est bien joué, la traduction Française des menus n'étant que du bonus.
Revenons également en quelques lignes sur les petits easter eggs que l'on pourra trouver ici et là (je suis sûr d'avoir revécu une scène de Resident Evil 4 !), et j'en aurais assez dit sur l'univers de Nioh. Maintenant, place au coeur de ce test : le gameplay ! Et on va voir que si c'est toute la société Tecmo Koeï dans son ensemble qui à influé sur la direction artistique, on va évidemment retrouver tout plein de Dark Souls, agrémenté de tout un tas d'éléments appartenant sans équivoque à la Team Ninja...
Un bon Dark Souls ?
Commençons tout de suite par évoquer ce que Nioh a vraiment pris à Dark Souls, pour répondre directement aux questions que doivent se poser tous ceux ayant un jour retourné un From Software. La première mécanique de base que l'on peut retrouver dans ce Dark Souls-like, c'est la gestion des feux de camp et de l'expérience. Si l'on meurt, on abandonne son XP durement gagnée, au sol, à l'endroit même de notre mort, et on se retrouve devant le dernier autel devant lequel on à prié. Il faut alors tenter de récupérer son précieux sans mourir, sinon, il disparaîtra à jamais dans les limbes du ragequit et de la frustration d'avoir fait tout ça pour rien. Car oui, l'autre principe de base de Dark Souls repris ici, c'est cette terrible exigence avec le joueur. Le challenge n'est pas impossible, il est juste particulièrement corsé. Le moindre mob pouvant vous envoyer ad-patres au premier excès de confiance ou à la première erreur d'inattention (ou alors vous êtes tombé dans un piège, mais ça c'est une autre histoire).
Les combats épiques contre des boss variés, aussi bien au niveau de la taille que du design, sont aussi au programme, et ici il faudra bien souvent tâtonner pour trouver la faille, qu'elle soit dans l'esquive, les dégâts élémentaires ou l'utilisation d'items du niveau en question. À ce propos, si la garde est bien présente, les sensations en combat sont plus proches d'un Bloodborne que d'un Dark Souls : l'esquive est bien plus pratique que la parade. Cette dernière consommant beaucoup d'endurance, elle vous laisse bien souvent essoufflé, à la portée de l'attaque du premier ennemi venu ! Le jeu se montre malgré tout plus accessible qu'un Souls pour le novice, puisqu'il propose un vrai didacticiel nous en apprenant plus sur les nombreuses subtilités du titre.
Le online est là lui aussi. Avec uniquement de la coop pour l'instant, le PvP devant arriver sous peu (comme nous l'avait confié Mr.Hayashi lors de son interview). En tous cas, les possibilités de build de perso sont très intéressantes, que l'on veuille jouer un tank, un danseur ou encore un magicien. Ajoutez à cela les postures dont je reparlerais plus tard, et vous avez de quoi vous créer un héros sur mesure. Pour l'instant, avec tout ce que je viens d'écrire, les fans de Souls sont en terrain connu, et pourtant Nioh propose son lot de différences. À commencer par le level design. Si Dark Souls proposait un monde semi ouvert en mode Metroid-Vania, ici il n'est est point question. Les arènes sont découpées en différents stages, forcément plus linéaires que dans un Souls, mais très tortueux et proposant de nombreux raccourcis à déverrouiller près des autels de prière. Cette pseudo linéarité des arènes, ont la doit justement au découpage sous forme de niveau. À partir d'une carte du Japon, vous allez choisir votre mission, principale ou secondaire, et vous retrouver téléporté sur les lieux du crime. On ne ressent donc pas tout le gigantisme d'un Lordran ou d'un Yarnam, et si l'exploration est bien présente dans Nioh, force est de constater que le level design global, malgré des décors très réussis, et même certaines mécaniques originales pour arriver au bout, n'a pas la force et l'homogénéité de celui d'un Souls. Et ce malgré les ascenseurs qui se déclenchent en marchant sur une dalle au sol. Donc oui, pour répondre à la question de départ de ce paragraphe : Nioh est un bon Dark Souls-like. Ce qu'il fait, il le fait bien, et on prend plaisir à souffrir en explorant son univers. Et ce d'autant plus que ce n'est pas les seuls arguments que le jeu a à faire valoir...
Ninja !
Car oui, comme je vous l'annonçais un peu plus tôt dans ce papier, en plus d'avoir utilisé les codes de la série Dark Souls pour son bébé, la Team Ninja à aussi utilisé sa propre expérience dans le domaine du jeu d'action, histoire de proposer sa vision personnelle de la chose. Les combats sont donc beaucoup plus nerveux, dynamiques et techniques que dans un Souls. L'aspect le plus frappant étant les postures que l'on peut adopter avec son arme, comparables à une "stance" de jeu de combat : médiane pour un mode standard, haute pour frapper plus fort et plus loin, basse pour être plus rapide. À vous d'adapter cette dernière en fonction de l'ennemi qui vous fait face, afin de répondre au mieux au problème posé. Autre grosse subtilité, digne d'un beat'em all sorti tout droit de chez Platinum Games : la possibilité de recharger son endurance plus rapidement à la fin d'un combo, en appuyant sur le bon bouton au bon moment. Les nombreux et très exigeants affrontements n'en deviennent que plus grisants, et pour achever son ennemi, Nioh à hérité d'une feature tout droit sortie de Ninja Gaiden : les démembrements ! Autre élément emprunté aux aventures de Ryu Hayabusa : la possibilité de charger un "Ninpo", qui donnera accès à de très forts dégâts élémentaux pour son arsenal, en fonction du familier qui nous accompagne. Et avec la possibilité d'utiliser plusieurs armes aux caractéristiques très variés, nous sommes vraiment en présence d'un titre de grande qualité dans sa composante "action". On ressent vraiment tout le travail effectué par la Team Ninja à ce niveau.
Du côté de la gestion du loot, Nioh se démarque aussi très fortement de son aîné : tout au long de l'aventure on récolte énormément de nouveaux équipements ! On se croirait presque dans Diablo, tant la quantité d'objets récupérés est faramineuse ! L'influence du jeu de Blizzard se ressent aussi dans les composantes en ligne, puisque ces dernières sont grandement simplifiées par rapport à un Souls, et il sera bien plus facile de retrouver ses potes pour rouler sur les boss en coopération. Car oui, si jamais vous coincez, le joker de l'appel à un ami est une excellente alternative, tant le challenge du jeu s'en ressent. Le premier attire le boss pendant que le second va l'attaquer dans le dos... J'ai ainsi pu assister à de véritables scènes de démembrements dans les règles de l'art, sans que votre ennemi puisse riposter ni se défendre ! Mais ce n'est pas tout, d'autres fonctionnalités sont aussi présentes, comme par exemple un multijoueur asynchrone, ou l'on pourra rejoindre une faction (et récupérer un bonus statistique !) pour tenter de récolter un maximum de "gloire" et ainsi faire triompher son camp. Ajoutez à cela une durée de vie faramineuse, dans les canons du genre (voire même plus si l'on vise le trophée de platine), avec ses multiples défis et sa rejouabilité à base de missions de plus en plus complexes et difficiles, et nous sommes vraiment en présence d'un titre qui réussit tout ce qu'il entreprend, de ses mécaniques Dark Souls-like (avec un bémol sur le level design) en passant par ses aspects RPG, action, et bien sûr son exigence de tous les instants. D'autant plus que le jeu se montre visuellement très attractif, même sur un ancien modèle de PS4, et propose de choisir entre des graphismes plus fins ou, c'était mon choix, un framerate constant à 60 images/seconde qui ne souffre d'aucun ralentissement, seules quelques animations d'ennemis au loin n'étant pas au niveau.