On dit d'un écrivain qu'il écrit finalement toujours le même livre. Si cette réflexion ne s'applique évidemment pas au travail d'un sous-scribouillard dans mon genre, avec Pro Evolution Soccer ces deux dernières années, j'ai eu matière à écrire plus ou moins la même chose avec des mots différents. Il en sera de même avec cette critique de PES 2013 : du progrès, du plaisir, mais PES reste second dans son genre, la simulation de football.
Alors que la session de jeu à laquelle m'avait convié Konami à Londres m'avait peu emballé, au contraire de la matinée que j'avais passée à jouer à FIFA 13 au Parc des Princes, c'est sans beaucoup d'envie que j'insérais le disque de la version finale de PES 2013 dans la console, pour me forger un avis définitif. Et là, par surprise, une musique résonnant dans les menus du jeu me sort de mon engourdissement : Michel Teló - Ai Se Eu Te Pego. Étonnant non ? Pas tant que ça en fait au regard de ce nouveau PES qui propose aussi tous les stades de la Liga espagnole modélisés, vibrant au son des chants de supporters qui vont bien, et bien entendu toujours la Copa Libertadores. Fort d'un amour jamais démenti en péninsule ibérique et en Amérique du Sud, contrairement à bien d'autres contrées qui ont changé pour FIFA, le jeu de Konami semble prendre soin de son public fidèle et latin. Une gentille attention qui fera plaisir à tous (même si l'on se demande si le reggaeton est vraiment un cadeau), ajoutée à une Ligue des Champions toujours présente de manière officielle. Malheureusement, encore une fois, avec EA qui bloque les licences, pas de Budensliga et seulement deux équipes allemandes disponibles (le Bayern et Schalke 04) et à l'exception de Manchester United, on trouvera cette année encore en ligue anglaise North London (Arsenal), Man Blue (Manchester City) ou encore Merseyside Red (Liverpool)... Enfin, ces noms fantaisistes, depuis le temps, on les connait, ce qui n'est pas le cas des contrôles qui changent cette année.
La loi 3 du football
Les trois piliers de la simulation japonaise sont cette année les suivants : sensation de liberté dans le contrôle des joueurs, identité de jeu immédiatement reconnaissable pour les cadors du ballon rond et intelligence artificielle renforcée, pro-active. Premier point positif pour PES 2013, ils se vérifient tous en jeu, même s'il convient d'y mettre des bémols. La liberté de mouvements est assurée par des nouveautés subtiles comme la possibilité d'appréhender un contrôle en appuyant sur "R2" au moment précis où l'on reçoit le ballon ou encore par le biais de une-deux entièrement manuels où l'on pourra déplacer son coéquipier en course. Et c'est en fait tout le jeu qui se fait en manuel par la pression maintenue du bouton "L2", une petite flèche apparaissant alors autour de votre joueur pour bien appréhender cette prise en main qui permet la plus grande précision mais demande aussi une certaine dose de talent. Cette manière de jouer si elle permet en effet d'avoir un contrôle complet sur ses mouvements, fait quand même un peu effet de béquille à un moteur de jeu qui surprend toujours un peu, autorisant certaines collisions ou passements de jambes inexistants ou du moins étranges. De toute manière, l'entrainement sera nécessaire et c'est d'ailleurs sur ce mode de jeu qui permet de se familiariser avec les nouvelles mécaniques que nous allons nous attarder. Si les défis du mode entraînement étaient vraiment sympas dans PES 2012, dans PES 2013, celui-ci est raté et laborieux. Un comble alors que beaucoup de choses changent dans cette mouture, le "L1 + Carré" mutant par exemple cette année en "R2 + Carré". Les manipulations à apprendre sont mal expliquées et parfois contradictoires d'un écran à l'autre, la musique des menus à se coller une balle dès qu'on a entendu sa boucle minable de 20 secondes se répéter plus d'une minute et l'exercice n'est parfois réussi que dans des conditions étonnantes. Bref, rien ne donne vraiment envie d'y revenir pour s'améliorer. Dommage, il faudra apprendre à la dure, en mode solo ou directement face à des adversaires en ligne.
"Moi, je suis Zlatan, et toi, t'es qui, p... ?"
Le contenu pour cela n'a pas bougé et on a toujours le droit à une certaine mise en scène dans le Ligue des Master. Si comme expliqué plus haut, les joueurs britanniques et allemands feront un peu la tronche (de toute façon, ils jouent au jeu de la concurrence), les amoureux du Brésil pourront se réjouir de voir toutes les équipes du championnat officiellement présentes. De quoi se familiariser avec le style du fantasque Neymar... Reproduire le style des grands joueurs est un des sérieux chantiers sur lequel Konami s'est attelé cette année et force est de reconnaître que le résultat est réussi. Robben, Benzema, Kagawa, Iniesta, Balotelli, Ganso, Messi, Cristiano Ronaldo et plus d'une cinquantaine de cracks rappellent habilement dans leurs courses et animations ce qu'ils sont dans la vie. C'est aussi le cas pour leur modélisation mais sorti de ces privilégiés, les visages du reste du monde footbalistique font un peu peur à voir et c'est un vrai pas en arrière que fait PES sur ce point, pourtant réputé sur sa modélisation des faciès. Là où la série pêchait déjà lors des dernières éditions, c'est sur l'IA des coéquipiers et leur propension à offrir des solutions. Les choses ont évolué, le jeu est plus lié, en partie par un jeu de passes que l'on ressent moins sur rails, mais ne vous attendez pas à être bluffé par la vista de vos coéquipiers ou le génie géométrique de vos avants-centre. Les mains se lèvent souvent pour donner une impression de soutien, là où il n'y en a aucun, le joueur en question n'ayant même pas encore entamé sa course. Bref, si les attaques sortent un peu au fur à mesure des éditions récentes de leur apathie, PES 2013 ne saurait encore (mais alors vraiment pas) cette année rivaliser avec FIFA 13. Il en est de même pour les commentaires assurés par Grégoire Margotton et Darren Tulett qui, s'ils sont sympathiques ne collent pas vraiment de manière dynamique à l'action, devenant vite agaçants. Heureusement, la physique de balle reste au top même si le bruit dans le cuir reste très exagéré.
PES 2013, sur lequel SeaBass a fait l'impasse pour se consacrer au futur de la série, devrait marquer la fin d'un cycle pour la série de Konami, celui d'une licence qui a perdu de sa superbe face à un concurrent devenu ogre à l'arrivée des consoles HD. L'équilibre est aujourd'hui trouvé et si cette version 2013 est la plus aboutie et la plus agréable des ces dernières années et constitue ainsi un bon jeu de foot, elle est encore loin derrière le FIFA annuel, mais demeure tout à fait honorable pour ceux qui n'ont jamais lâché PES. Si avec cette édition 2013, un chemin de gameplay cohérent semble enfin tracé, le défi à relever pour la prochaine version de la simulation japonaise sera énorme : il ne s'agira plus simplement de surpasser sa propre lignée mais bien de se mettre au niveau, voire même, de dépasser la concurrence. Pari difficile et côte favorable à EA Sports mais comme le dit si bien Lilian Thuram "tout est possible dans le football".