Milestone sort coup sur coup deux jeux de sports mécaniques en ce début d'année. Après un Monster Energy Supercross assez peu convainquant, voici deux roues de plus, mais toujours de la boue et du cross, avec Gravel. Les italiens sauront-ils sortir de l'ornière pour proposer un bon jeu de course ? On démarre les moteurs et on se jette dans la mêlée.
Pas évident de se faire une place au soleil au pays des jeux de course. Entre Gran Turismo, Project Cars 2 et Forza, peu d'autres studios ont les moyens de faire face à ces grosses cylindrées. Heureusement, Gravel se positionne sur un créneau qui n'est pas ou peu exploré par ces canons des jeux de courses sur consoles. Il propose uniquement du hors piste ou au pire du Rallye Cross et reste sur le terrain de la pure arcade. Les intentions sont bonnes.
Un contenu de passionnés
Gravel n'a peut être pas les moyens de Turn 10 ou Polyphony, mais Milestone a tout de même investi de façon assez conséquente dans des licences réelles pour proposer un panel de voitures assez large. Si le thème général du jeu est bien le hors piste, il y a différentes façon de l'aborder et les catégories de véhicules en témoignent.
On retrouve des légendes comme la R5 Turbo, la Ford RS200, aux côtés de marques plus contemporaines mais non moins étonnantes, avec par exemple Dacia, présente avec une version Baja du Duster. Il faut également citer la présence de Porsche en standard, même si un pack de voitures supplémentaire de la marque de Stuttgart est d'ors et déjà présent en DLC (payant). Les monstrueux Trophy Trucks ne vont évidement pas se conduite de la même façon qu'une petite voiture de Rallye. En tout, ce sont 47 véhicules qui sont proposés une fois que l'ensemble des écuries seront débloquées (elles ne sont pas disponibles de suite).
Leur modélisation est assez sommaire et on est loin de la précision qui est mise en avant chez la concurrence. Les bas de caisse par exemple ne sont que des plaques grises, la ligne d'échappement n'est même pas visible. Même constat pour des tableaux de bord plutôt grossiers. Bienvenue dans les années 90... En revanche, leur aspect évolue plutôt bien avec des déformations en fonction des dégâts (qui peuvent ne pas être que cosmétiques) et de la boue ou de la poussière qui vont maculer les différentes livrées proposées. Cette inégalité n'est que la première d'une série qui va souffler le chaud et le froid sur la qualité globale de Gravel.
Tour du monde auto
Le même éclectisme se retrouve au niveau des tracés et des lieux de compétitions "Off Road Masters", l'épreuve qui constitue l'épine dorsale du jeu. Ce mode carrière se décline en de multiples courses avec des concepts déjà éculés. Des tracés sur circuits fermés avec surfaces mixtes ou 100% terre, des trajets façon spéciales de Rallye ou encore Baja, des courses classiques, contre la montre ou passage de portes. Pour être complet, ajoutez-y de l'élimination au tour par tour (le dernier est à chaque fois éjecté au bout d'un décompte). Bref, il y a tout ce qu'il faut avec des modes de jeux connus depuis maintenant bien longtemps.
Le mode Smash Up est en revanche complètement raté. Il consiste à traverser des panneaux qui vont changer d'icônes de façon aléatoire sur un tour ou un trajet chronométré. Ces icônes ne seront jamais les mêmes et elles ne respectent pas les trajectoires idéales à pendre. Il est donc particulièrement frustrant de devoir réaliser le meilleur temps dans ces conditions. Si c'est le mauvais panneau qui est touché, la voiture est littéralement stoppée net. D'autant que la possibilité de revenir en arrière qui sauve des autres frustrations éventuelles dues au jeu ne sont pas utilisables ici (alors qu'elles le sont en contre la montre... allez comprendre).
Les différentes surfaces à rouler apportent beaucoup de variété, car c'est un véritable tour du monde que propose Gravel. De la terre ou de la boue (sous la pluie) pour la Namibie, de la neige au Mont Blanc, du sable fin sur les plages du pacifique, un public déchaîné dans le stade de Los Angeles. Ce sont en tout 16 lieux qui sont proposés avec différents tracés (plus de 10 sur certains). Il y a largement de quoi faire et même du français avec le circuit de Rallye Cross de Lohéac.
Les Off Road Masters sont ponctués de duels (cinq en tout) que l'on débloque au fil des courses. À chaque fois, il s'agit de faire mordre la poussière à un autre pilote qui a l'air très très méchant dans ses vidéos de présentation. Ces dernières sont particulièrement kitsch et on ne rentre jamais vraiment dans cet univers creux, qui essaie de rendre compte de l'intensité d'une compétition. Les commentaires du speaker de la Gravel TV sont d'ailleurs très plats et redondants.
Des soucis d'équilibrage
La difficulté du titre en mode normal est globalement correcte. Il ne faut pas commettre d'erreurs majeures pour espérer terminer en tête. À chaque victoire, ce sont trois étoiles qui sont ajoutées au tableau de chasse du joueur et les défis en tête à tête, ainsi que les nouveaux challenges, sont débloqués selon le nombre d'étoiles engrangées. Ainsi, si 180 étoiles sont à gagner pour les 60 courses, il ne faut en avoir réellement que 120 pour défier le dernier pilote de la saison et "terminer" le jeu.
Et c'est heureux, car certaines courses sont particulièrement pénibles. Outre le mode Smash Up dont nous avons déjà parlé, les courses en Trophy Trucks sont plus délicates. Alors que la plupart du temps l'IA se comporte de façon assez égale, ses performances sont bien meilleures avec ces monstres qui savonnent dans tous les sens. Il faut énormément jouer avec l'accélérateur pour garder de la motricité et gagner en efficacité.
Les comportements des voitures sont d'ailleurs globalement réussis, avec ces Trophy Trucks très lourds et chargés d'inertie et des petites voitures bien plus nerveuses. L'équilibre entre dérapages spectaculaires et trajectoires tendues est à trouver en permanence et c'est ce qui rend la conduite intéressante à défaut d'être réaliste.
La voiture en carton
Encore une fois une ombre va s'ajouter à ce tableau à priori positif. Alors que l'on arrive à sentir assez bien la voiture et à gérer l'adhérence changeante au gré des différentes surfaces, il peut arriver que l'on décolle tout à coup comme une fusée en heurtant un simple buisson. Dans le même registre, se servir d'un mur ne pourra parfois poser aucun souci, à moins d'avoir activé les dégâts. Même en poussant les options de réalisme à fond (antipatinage et correction de trajectoire en moins par exemple), on est sorti régulièrement de l'immersion par des comportements irrationnels. Avec son positionnement arcade, on pourrait l'excuser, mais ces errements sont dûs à un manque d'optimisation et non à des choix délibérés.
L'IA est assez agressive et n'hésite pas à pousser pour passer, mais il semble que les effets des collisions soient bien plus importants sur la voiture du joueur, que sur celles contrôlées par la machine. Même constat en ce qui concerne leurs capacités d'adhérence qui semble supérieure en virage.
Vous l'aurez compris, avec Gravel, on est bien plus dans les galets de gravière que sur du sable fin. Même s'il possède quelques beaux atouts et pas mal de générosité, il y a trop de petites choses qui viennent déranger. Un peu à l'image du menu principal qui ne revient jamais sur la catégorie en cours, alors qu'on vient précisément d'en terminer une course. Il manque tout simplement un peu de raffinage à tout cela. Ce n'est pas le mode multijoueurs qui rattrape la chose, il ne permet aucun réglage préalable et se contente du strict minimum avec du contre la montre pour tout ce qui peut être asymétrique. Alors que tous les autres jeux misent grandement sur le côté jeu en ligne, Gravel fait presque totalement l'impasse en restant scotché à des standards de la décénie précédente.
Gravel est assez bon pour satisfaire un amateur de jeu de courses qui pourrait aussi attendre de l'essayer en seconde main. Mais probablement pas assez bon pour attirer aussi facilement un joueur occasionnel qui a déjà un classique du genre dans sa ludothèque. Gravel est un peu comme le calembour de titre de ce test ; plutôt tiède.