En 2010 sortait NieR sur PS3 et Xbox 360. Le dernier jeu de feu Cavia (Drakengard, Bullet Witch...) était passé relativement inaperçu aux yeux du grand public, la faute - en partie - à une réalisation d'un autre âge. Les moins regardants sur la technique y avaient néanmoins trouvé un action-RPG d'exception et l'ont érigé au rang de culte. Sept ans après, poussé par un marketing très aware, voici NieR Automata, spin-off réalisé lui aussi par Yoko Taro et produit à nouveau par Yosuke Saito... mais avec en soutien un studio capable d'apporter tout ce qui a manqué à l'original : PlatinumGames. Une collaboration couronnée de succès ?
Republication de notre Test import du 27 février 2017.
La version japonaise de NieR Automata proposait d'office la langue française (et bien d'autres : anglais, italien, espagnol et allemand) pour les sous-titres et les menus du jeu. Les doublages, eux, étaient au choix en Japonais ou en Anglais. Eh bien cette version européenne est identique en tout point, proposant donc exactement les mêmes choix et options. Aucune différence ! |
Ci-dessous notre test import originel réalisé à l'époque à partir d'une version import japonaise PS4 fournie par notre partenaire nin-nin-game.com.
QU'APPORTE LA PS4 PRO ? J'ai un écran 4K :
J'ai un écran 1080p :
Notre avis : NieR Automata a fait un choix, celui de la fluidité, presque jamais mise à mal sur les deux versions de la console de Sony. Cela au prix d'une résolution moindre. Ainsi, faire tourner le jeu de Square Enix sur PS4 Pro ne vous permettra pas d'en profiter en 4K glorieuse si vous disposez d'un téléviseur proposant cette résolution, et, s'il dispose bien de textures plus détaillées, d'un motion blur sympathique et de quelques effets de lumières améliorés, il y apparaîtra simplement assez pixelisé et scintillant. Sur un écran Full HD, il se montre en revanche d'une grande netteté avec un antialasing bien appliqué. |
11.945 après Jésus-Christ. On découvre que l'Humanité a été chassée de la Terre il y a plusieurs milliers d'années par une race extra-terrestre et ses hordes de robots. Ce qui reste de nous est à l'abri sur la Lune et compte sur une armée d'androïdes de l'organisation YoRHa pour mettre fin à l'exil. Après plusieurs tentatives infructueuses, il semble que l'espoir de récupérer notre habitation naturelle soit permis... Tout commence alors que 2B, le soldat humanoïde d'apparence féminine que l'on incarne, part en raid contre une usine planquant un gigantesque robot Goliath. Son unité décimée, elle va trouver en 9S, un éclaireur resté sur place, un allié de choix. Et ce pour une durée bien plus longue qu'escompté.
2B free or not 2B
Le moins que l'on puisse dire, c'est que NieR Automata nous prend par surprise dès le début. Après avoir posé les bases de l'univers post-apocalyptique dans lequel le joueur va s'aventurer, plutôt que de le propulser sur le terrain pour batailler épée en mains, le titre ouvre sur une séquence... de shoot them up. Scrolling horizontal, vertical, mode twin stick et vue à la Space Harrier, tout y passe. Toujours très "manic" dans leurs approches, les différentes sections forcent déjà à faire preuve de dextérité pour exterminer les contrevenants et esquiver les dizaines de boulettes qui envahissent l'écran. Une manière - qui interviendra d'autres fois par la suite - de prévenir qu'il ne sera jamais question de relâcher son attention. Chose qui se vérifie lorsque les combats "classiques", qui composent la majeure partie de NieR Automata, surviennent.
Les connaisseurs de beat them all made in PlatinumGames comme Bayonetta 2 ou Metal Gear Rising : Revengeance - dont il se rapproche énormément - ne pourront faire autrement que de se sentir à la maison. Contrôles simples et répondant au poil, souplesse des esquives, nervosité des enchaînements et fermeté des combos, variété en jonglant avec la pression et avec les changements d'arme à la volée ou l'utilisation du pod pour les attaques à distance : c'est merveilleux à jouer, splendide à regarder, précis, souvent épique lorsque l'affrontement implique un nombre important d'ennemis (on peut aller jusqu'à plusieurs dizaines) ou des bestioles de taille colossale. Et avec un peu de pratique, notamment au sujet de la maîtrise du verrouillage, on peut devenir la star d'authentiques ballets martiaux, auréolés de la classe des animations de 2B et de la sensation de puissance qui accompagne chaque coup porté. De quoi faire oublier le côté un peu bancal et répétitif du jeu original ? Complètement. Même si l'on peut craindre que l'intensification des vagues adverses - qui ne cesseront d'évoluer avec le temps - ne fasse sombrer le tout dans la monotonie, on nous offre, en plus du feeling inimitable, de quoi varier les plaisirs à mesure que l'on progresse.
Paranoid Android
Avec des composantes RPG solidement ancrées et une grande place accordée à l'exploration, NieR Automata nous laisse bien évidemment parler argent et profiter de tas d'objets à ramasser, récupérer sur des carcasses bien chaudes, dans des coffres ou grâce à la pêche - retravaillée et d'une simplicité enfantine. Utiles à la revente, ces items doivent aussi être conservés en vue de faire évoluer le niveau d'un arsenal grandissant, avec des lames très diverses, des lances, des gantelets, voire même un bâton de bois. Il faudra donc ne pas négliger les allers-retours dans des zones précises, pour espérer le respawn pouvant mener à l'obtention d'une peau de bête ou d'une perle manquante.
Du côté des compétences, pas d'arbres se débloquant avec les niveaux accumulés. Juste un circuit dont il faudra surveiller le nombre de slots pour insérer des puces aux applications plus ou moins utiles suivant son style. Vous ne souhaitez pas déambuler avec l'affichage de la carte, n'avez aucun intérêt à savoir combien de points de vie vous ôtez, savez parfaitement où se déroule votre prochaine mission ? Vous préférez avoir plus de points de vie, miser sur la résistance, la vitesse, bénéficier d'une stase temporelle en cas de dérobade ou simplement parer ? Ça se module. À la main ou de façon automatisée (trois profils : équilibré, attaque et défense). Mais croyez-nous, il sera plus intéressant de mettre le nez dedans et de faire un tour par les fusions à la boutique dédiée. Avec les quatre difficultés proposées (dont une dernière qui vous fait revenir à la case départ sur UNE SEULE touchette), cela permet clairement de se faire un périple à la carte (mère), bien dosé. Et même de se faire sauter sur commande. À noter qu'il faudra faire très gaffe à ses décès, l'équipement restant attaché au corps tombé, il ne faudra pas se louper et ne pas céder aux sirènes de la résurrection offrant un allié supplémentaire en combat. Du moins lorsque vous aurez bien avancé.
Club Bizarre
NieR Automata n'est pas que corps à corps intenses et mitraillages en tenue sexy. Le monde ouvert sans chargement (sauf en cas de téléportation) que va fouler 2B a aussi vocation à vous faire voyager - courir, bondir, planer et s'accrocher avec aisance dans une ville en ruines, un désert, un parc d'attraction, une forêt... Et suivre une histoire. Des histoires, plutôt. Outre une trame principale blindée de surprises - avec impact sur le gameplay, au passage - abritant des personnages hauts en couleurs et volontiers décalés, et qui ne révélera sa véritable saveur qu'en acceptant quelques redites et des phases très "cassage de quatrième mur" misant sur votre patience et votre acceptation d'un certain degré de douleur, il y a évidemment des quêtes à dénicher au hasard ou à accepter dans les lieux de "vie". Avec un point de départ parfois anodin, elles ouvrent, au choix, sur d'abominables tragédies, des incompréhensions, des moments mignons ou simplement délirants.
Ceux qui ont pu se plonger dans le premier volet (auquel il n'est pas nécessaire d'avoir joué, même si les références ne manquent VRAIMENT pas) ou les Drakengard retrouveront là l'empreinte de Yoko Taro. Sous le vernis d'un univers simpliste et manichéen se cachent des nuances, des interrogations concernant la condition humaine, l'attachement à l'autre, la dévotion aveugle, l'emploi de la violence. Et ça touche assez juste la majorité du temps, avec toujours la tonalité qui peut, comme la caméra, passant parfois de la 3D libre à une 2D fixe chargée de vous faire prendre conscience de votre situation désespérée avec plus d'insistance, changer en un instant. Parfois à cause de vous, d'une vérité qu'il aurait mieux valu cacher. NieR Automata se révèle un jeu bipolaire tantôt poétique, contemplatif, paisible, tantôt furieux, incontrôlable, dérangeant - avec des rebondissements choquants et des scènes qui enchaînent direct au foie et uppercut. Dans tous les cas, le bateau va tanguer. Vous allez même être retourné pendant les 20 à 30 heures nécessaires pour voir le bon bout et comprendre les tenants et aboutissants d'un scénario raconté et mis en scène avec maestria - en nous impliquant de fort belle manière.
Dans le haut du paNieR
Reste à aborder la question de la réalisation, plus qu'épineuse dans la production de 2010. Au moins, on peut dire que l'on est dans une bonne moyenne. On concédera volontiers que les lieux à visiter (et à re-re-re-re-visiter) sont souvent vides (ce qui peut sembler logique dans un monde ravagé), qu'on a, par instants, sous la chaleur des explosions, l'impression d'évoluer sur PS3... Bref, on n'est pas face à une beauté fatale comme peut l'être un Horizon : Zero Dawn. NieR Automata affiche, en plus d'une fluidité à toute épreuve, un charme fou, une élégance qui le place au-dessus du lot. Une question d'esthétique, de design, d'identité, qui fait oublier un mur un peu crado, des distances d'affichage pas top et autres effets d'escalier inappropriés.
En guise de touche finale de cet action-RPG qui s'autorise à sortir des clous plus d'une fois, il y a la musique. Keiichi Okabe n'avait manifestement pas envie de se reposer sur les lauriers, acquis à juste titre sur NieR. Il donne le dernier coup de polish à une atmosphère fantastique en livrant une fois encore une partition remarquable, totalement cohérente avec l'univers dépeint. Les instrumentalisations traditionnelles et synthétiques à plusieurs couches, quelques fois soutenues par des choeurs entêtants, s'emploient sur des compositions de très, très grande classe. Mention spéciale aux morceaux impliquant la très apaisante voix d'Emi Evans, qui nous berce une fois de plus dans une langue fictive... aux accents français encore plus marqués. Transition toute faite pour évoquer la qualité de la localisation (les textes, nombreux, et sous-titres pouvant être en langue de Molière). Elles est assez exemplaire, à quelques accents inadéquats près. Et vu la place occupée par notre pays dans cet épisode, encore heureux.