Annoncé depuis belle lurette, Silence arrive enfin sur PC/Mac, PS4 et Xbox One, avec deux ans de retard sur l'annonce initiale. Il était particulièrement attendu par les fans de jeux d'aventure point'n click, puisqu'il fait suite à l'un des premiers jeux marquants de Daedalic, Les Chroniques de Sadwick, tout en arborant un style très différent et ma foi fort alléchant... Mais son ramage se rapporte-t-il à son plumage ?
Commençons par l'évidence : Silence est un jeu tout simplement splendide ! Chaque "tableau" de cette aventure propose des décors absolument magnifiques, où les couleurs explosent et où les détails impressionnent. C'est un régal de tous les instants, du début à la fin. Ces environnements mélangent des artworks soignés et des éléments 3D, qui nous surprennent de qualité lorsqu'ils s'animent, tandis que les personnages (eux aussi en 3D) s'y fondent sans jamais jurer. Bravo au grand manitou du jeu, Marco Hüllen, réalisateur mais aussi artiste complet qu'on retrouve à peu près dans toutes les catégories des crédits. On lui doit déjà Les Chroniques de Sadwick, mais cette fois le style est franchement différent. C'est une suite qui se réinvente beaucoup, dans la forme d'ailleurs comme dans le fond.
Il était une fois...
L'univers dans lequel vous emmène Silence est celui d'un joli conte pour enfants. Le genre de féerie qui vous absorbe et vous emmène loin, dans une aventure à la fois excitante et attendrissante, réussissant presque à vous tirer une petite larme... Mais tout commence dans le monde réel, où la guerre fait rage. Noah, personnage principal des Chroniques de Sadwick, désormais adolescent, emmène sa petite soeur Renie dans un bunker pour se mettre à l'abri d'un gigantesque bombardement qui menace de détruire la ville. Dans ce lieu réduit, incrédule, la petite fille ne semble pas complètement mesurer la gravité de la situation, acceptant volontiers les diversions de son grand-frère protecteur (dont vous venez de prendre le contrôle), qui lui raconte une nouvelle fois ses aventures, celle du clown Sadwick dans le monde imaginaire de Silence qu'il a jadis traversé. Renie sourit, mais le bruit sourd des bombes se rapproche. Bientôt le choc de l'explosion, la destruction de leur abri et la pénombre. Quand Noah reprend ses esprits, Renie a disparue. En s'extirpant des débris, il part à sa recherche et se retrouve dans un lieu étrange mais familier... Vous voilà de retour à Silence.
Cliquer pour sauver Renie
Ce petit prologue, qui vous permet de découvrir rapidement les contrôles et le gameplay, est ainsi l'occasion à la fois de faire connaissance avec les nouveaux personnages, mais aussi d'assister à un très habile récapitulatif de l'histoire du premier épisode. Si avoir déjà parcouru Les Chroniques de Sadwick peut être un bon point, ce n'est donc absolument pas nécessaire pour apprécier cette suite.
Comme dans tout point'n click qui se respecte, Silence propose une jouabilité traditionnelle qui vous demande, dans chaque nouvelle zone, d'explorer le décor pour y trouver des éléments utilisables ou combinables, et ainsi progresser en résolvant de petits casses-têtes. Sur PC, on déplace simplement le curseur sur les éléments, tandis que sur consoles on s'en rapproche et on utilise le stick droit pour éventuellement choisir l'un des éléments qui nous entoure avant de cliquer. L'originalité ici, c'est qu'on peut souvent passer d'un personnage à l'autre et donc d'un lieu à l'autre, tandis que la petite soeur ou le grand frère sont à tour de rôle accompagnés du super-mignon Spot, petite créature verte qui a le pouvoir de se gonfler ou de s'aplatir pour aider ses amis à résoudre toute sorte de situation.
Et c'est facile...
Que vous soyez ou non un vieux briscard du genre, vous vous rendrez compte assez rapidement que Silence ne dresse pas des murailles de difficulté sur le chemin de son aventure. Loin de là. À vrai dire, il apparaît que tout a été simplifié pour ne pas frustrer... le jeune public auquel il voudrait s'ouvrir ? Probablement. Toujours est-il que, par exemple, toute notion d'inventaire a purement et simplement disparue. Si vous ramassez un objet, c'est pour qu'il soit immédiatement utilisé dans le tableau où vous vous trouvez (ou celui situé juste à côté). On ne se sent jamais non plus stoppé dans son élan par une véritable énigme longue et retorse, tout est assez évident, même s'il faut parfois de poser quelques minutes pour trouver l'autre solution évidente à laquelle on ne pensait pas au début. Bref, mis à part deux blocages que j'ai expérimenté pour des raisons de mauvais placement de mon personnage dans le décor (très frustrant !), j'ai enchaîné les 5 ou 6 heures de jeu sans jamais affronter une réelle difficulté.
Un beau voyage
C'est forcément un point qui chagrinera les aficionados du point'n click, mais je dois dire que si l'on accepte de voir Silence pencher plus du côté du narratif que du tord-méninges, l'aventure reste franchement belle et agréable à parcourir. D'abord parce que les énigmes, aussi faciles soient-elle, sont tout de même variées dans leurs situations et restent assez sympas, mais surtout parce que l'histoire transporte sans jamais lasser, rondement menée autour du personnage de Renie qui à elle seule devient vite le point fort du jeu. Candide et délicieusement insouciante, la petite fille est tellement attachante, tellement charmante, qu'on prend un plaisir réel à aller au bout avec elle, dans une aventure sans véritable fausse note, si ce n'est celle d'être trop courte. On aurait aimé rester à Silence plus longtemps avec elle, mais aussi avec les quelques personnages secondaires, réussis eux-aussi mais qu'on ne côtoie que trop peu. On pourra également reprocher au jeu sa conclusion, un peu trop cousue de fil blanc et un brin maladroite dans sa mise en scène, alors même que le jeu est surprenant plus d'une fois à ce sujet au cours de l'aventure. Elle reste belle malgré tout.
Qu'est-ce quelle dit Renie ?
Silence est un jeu d'aventure qui, malgré ses défauts, m'a donc beaucoup plu. Si ses développeurs ont à ce point simplifié le gameplay, se basant plus sur la narration et l'atmosphère très réussis de cette petite histoire, je me dis que c'est certainement pour pouvoir être joué par de jeunes enfants... Et j'ai justement eu très envie de partager ce "conte interactif" avec mes enfants, tout du long. En ce sens, je trouve vraiment dommage qu'en dehors des doublages anglais et allemands, il faille se contenter de sous-titres. Ce sera mon dernier petit bémol !