Il fut un temps où les simulations de rallye marquaient le paysage comme des mètres étalons de la puissance des machines et de la progression des développeurs dans la maîtrise de la 3D. Mais depuis la génération précédente, les Colin McRae sont devenus des DiRT et les WRC se sont enchaînés, perdant peu à peu de leur saveur et laissant surtout les amoureux de la discipline dénués de véritable champion de la simulation. Alors en confiant son dernier opus à Kylotonn en lieu et place de Milestone, Bigben essaye de mettre sa série sur de nouveaux rails. Reste à savoir si ce sont les bons, et si WRC 5 est capable de faire face à une concurrence qui revient en forme.
Le vrai WRC
WRC 5 possède, comme son nom l'indique, la licence officielle de la World Rally Championship et vous propose donc de participer aux championnats de la fédération. Ainsi, vous retrouvez l'intégralité des équipes officielles de la saison avec leur design et leur voiture respective, pour un total de 51 équipages répartis sur 3 catégories: JWRC, WRC-2 et WRC.
Même chose du côté des lieux d'épreuves puisque vous pouvez rouler sur chacune des 13 destinations disponibles, de Monte Carlo à Mexico, en passant par l'Australie, l'Allemagne, la Suède, la Finlande , etc. Néanmoins, les 300 km de tracés de spéciales seront eux issus de l'imagination des développeurs, avec tout de même un certain respect des ambiances et des types de reliefs. Toutes les surfaces sont d'ailleurs représentées, à savoir l'asphalte, la terre, la neige, la glace, le sable et le gravier. De quoi goûter à tous les plaisirs et toutes les techniques qu'offre cette discipline.
Et comme WRC 5 vise clairement l'e-sport, vous avez même la possibilité de concourir en parallèle des épreuves de rallye de la saison 2016. Moyennant l'achat d'un DLC (ou carrément du Season Pass), vous pourrez donc vous mesurer aux meilleurs joueurs du monde, dans des épreuves à peu près similaires à celles des véritables pilotes. Un passage à la caisse est néanmoins obligatoire , ce qui dénote un peu avec ce que font les autres jeux de course. Ok, il y a quelques épreuves supplémentaires incluses (7 nouvelles spéciales dans le premier DLC à 8 euros), mais ça tombe en même temps que le championnat de France de Forza Motorsport 6, qui lui est gratuit.
Au menu
L'accueil de WRC 5 est sobre et légèrement daté, à la limite de l'austérité, mais ses menus ont l'avantage d'être clairs et bien organisés. Vous me ferez le plaisir de passer directement par les options afin de calibrer le jeu auquel vous allez jouer. On y trouve de quoi régler la difficulté, les commandes, l'affichage et le son (c'est aussi là que l'on trouve la gestion du profil et les crédits). Au niveau du gameplay, vous allez pouvoir influencer votre conduite avec une aide au freinage et une aide à la stabilité. La première est à proscrire si vous voulez mon avis, puisqu'elle vous empêche de partir en dérapage à volonté. La seconde est plus ou moins utile pour ceux qui ont tendance à appuyer comme des dératés sur l'accélérateur et offre surtout un avantage indéniable face au chrono. A ces deux aides s'ajoute la possibilité de régler les dégâts (avec une influence plus ou moins forte sur la conduite), le pilotage en manuel ou en automatique et le niveau général des concurrents. Si je puis vous donner un seul conseil, c'est celui de mettre les dégâts au moins au niveau moyen, avec influence sur votre voiture, et ce afin de vous apporter un minimum de drama lors des courses et de justifier la présence du garage dans la carrière.
Que vous jouiez à la manette ou au volant, WRC 5 vous propose un beau niveau de configuration des commandes. D'abord la possibilité d'affecter n'importe quelle fonction à n'importe quelle touche, mais aussi de régler avec une certaine précision les différentes sensibilités et zones mortes. De ce côté, rien à dire, c'est simple et ça permet d'obtenir la nervosité et la précision que l'on aime, dans les limites des capacités du jeu évidemment. Reste le niveau des vibrations (ou de l'éventuel retour de force), qu'il faut absolument mettre à 100% si vous voulez avoir un minimum de ressenti en course.
Quant aux réglages d'affichage, c'est du tout bon. Chaque élément de l'ATH peut être activé ou non, de même que les positions des caméras intérieures et extérieures peuvent être plus ou moins éloignées. Idem du côté du paramétrage du son, qui offre un volume indépendant pour l'ambiance, la voiture et le copilote, ainsi qu'un ajustement léger du timing des informations données par ce dernier Et le bonheur, c'est que tous les éléments des réglages de maniabilité, d'affichage et de son peuvent être modifiés en course, via le menu pause. Un exemple que tous les jeux devraient prendre.
Au départ
Les modes solo et multijoueur sont séparés dès l'introduction et ne communiquent d'ailleurs pas entre eux. En clair, pas de social et donc pas de défis entre joueurs. À l'intérieur de la partie solo, on retrouve le mode carrière, la spéciale rapide, le rallye rapide (un enchaînement de spéciales et de rallyes au choix) et en bonus une école de rallye pour apprendre à maîtriser les bases du jeu. Cette dernière ressemble aux permis de Gran Turismo et l'on vous propose une série d'épreuves chronométrées impliquant de respecter un tracé avec parfois des obstacles, dans un véhicule imposé. Bien qu'ayant un fonctionnement assez "à l'ancienne", cette section permet vraiment d'acquérir les techniques à appliquer en course et sur toutes les surfaces. Et si vous n'êtes pas du genre à retourner à l'école, sachez quand même que certaines de ces épreuves vous seront conseillées avant les séries correspondantes dans la carrière. Un bon moyen de réviser pour plonger en confiance dans le grand bain.
Côté carrière, c'est vraiment du classique. Vous commencez en Junior, avec une voiture imposée, et tentez de passer en catégorie supérieure au fil des saisons. Au départ, 3 équipes vous proposent un contrat et chacune a ses propres demandes quant à la réalisation d'objectifs. 2 données sont importantes pour les contenter : le résultat au classement et l'état de la voiture en fin de course, avec un impact sur le moral des troupes et sur l'efficacité de l'équipe si vous ne respectez pas leur équilibre prudence/performance. De votre réussite dépendra la qualité des contrats qui vous seront proposés en fin de saison. Mais ça s'arrête là pour l'interaction avec vos coéquipiers. Si vous voulez modifier quelques réglages sur votre voiture avant le départ, ce sera sans le moindre conseil ni la moindre indication de ce que vous faites réellement.
On enchaîne donc les courses, organisées par journées, avec la possibilité de réparer pendant la nuit. Ça veut dire qu'une journée contenant 2 ou 3 spéciales vous imposera très clairement de faire attention à votre voiture si vous ne voulez pas finir avec la boite en rade et bloquée en troisième, les pneus complètement morts et les freins qui ne réagissent plus. De plus, le temps de réparation étant super limité, une voiture totalement détruite ne pourra pas repartir entièrement rénovée le lendemain matin. Il va donc falloir faire des choix ou bien doser pour ne pas avoir d'accidents et surtout ne prendre des risques que là où ça reste à peu près raisonnable. Sinon, c'est la galère assurée. Bien sûr, suivant le niveau de difficulté sélectionné, vous aurez la possibilité de refaire une spéciale ratée, voire de reprendre au dernier checkpoint, avec un nombre plus ou moins limité de tentatives. Et de fil en aiguille, vous devriez sans problème passer dans la catégorie au dessus. Si ce n'est pas le cas, sachez qu'il est tout à fait possible de modifier la difficulté en cours de saison. Le jeu reste donc accessible pour ceux qui ne veulent pas trop se prendre la tête ou vraiment retord pour les tendus du volant.
Le mode multijoueur en ligne est tout aussi classique et pas vraiment en phase avec les standards actuels. Vous pouvez rejoindre une partie ou en créer une, participer à un enchaînement de courses avec des potes et basta. Et comme il s'agit de rallye, pas de contact mais une simple comparaison finale des temps réalisés. Dommage que ce mode ne permette ni de défier ses amis, ni d'organiser de vrais événements. Reste la possibilité de jouer à plusieurs sur une seule console, en local. Mais attention, pas d'écran splitté à l'horizon. Vous pourrez jouer à tour de rôle, avec une seule manette ou un seul volant.
En course
Le pilotage dans WRC 5 est assez intuitif mais très permissif, même avec toutes les aides désactivées. En gros, on ne vous pénalisera pas trop d'appuyer sur l'accélérateur comme un dératé en sortie de virage ou d'appuyer à fond sur le frein alors que vos roues sont déjà braquées. Ca reste agréable et accessible mais le manque de profondeur est évident. Ceux qui aiment l'esprit Sega Rally et veulent aller un peu plus loin s'y retrouveront, ceux qui recherchent un vrai simulateur passeront leur chemin car WRC 5 ne sais pas faire.
Et c'est vraiment dommage, parce que l'on sent qu'il y a de l'idée dans le modèle physique. Les surfaces sont assez bien retranscrites, les transferts de masse sont bien là (bien qu'un peu exagérés), la nervosité à l'accélérateur est présente, mais sous la manette c'est flou et ça manque de sensations, de contact. Et si les options de sensibilité sont efficaces, elles ne le sont pas assez pour nous donner l'impression d'être au volant d'un monstre de puissance, prêt à partir en sucette au moindre écart. Et c'est encore pire au volant. De ce côté, je peux l'affirmer sans aucun doute : le jeu n'a pas été développé pour ce périphérique mais à peine adapté dans un second temps. Les vibrations sont inappropriées (quand elles existent), les retours de force ne correspondent pas à ce qu'on voit à l'écran et la direction (légèrement assistée) n'offre pas la précision que l'on est en droit d'attendre. Surtout que sur les 4 modèles testés (du Thrustmaster, du Logitech et du Fanatec), il a systématiquement fallu passer par les réglages pour obtenir quelque chose de jouable, sans jamais avoir l'efficacité et le rendu voulus. En termes de plug and play, on a vu mieux.
De plus, on peut vraiment regretter l'impact quasi nul de la pluie sur notre conduite. Bien loin des flaques de Forza 6, seuls quelques trous d'eau (du genre bien profonds) imposeront au mieux un ralentissement, mais jamais une véritable perte d'adhérence. Pour le reste, la terre ne passe pas vraiment en boue, la neige ne se glace pas et l'asphalte ne glisse pas vraiment plus mouillé que lorsqu'il est sec. Bref, on n'y croit pas vraiment.
A l'écran
La modélisation extérieure des véhicules est plutôt réussie. Les carrosseries ne sont pas trop anguleuses et les détails sont plutôt bien rendus, même si un aspect assez plastique se dégage de l'ensemble. A l'intérieur, c'est moins reluisant : le niveau de détails est très bas et les textures utilisées vraiment pauvres. Seule la vue de capot rend vraiment bien, avec des effets d'ombres et de réflexions vraiment réussis, quelle que soit la luminosité.
Malgré un aspect légèrement daté, WRC 5 respecte assez bien les différents lieux visités et offre un panel varié de paysages. De denses forêts sablonneuses, des cols de montagne vertigineux, de belles étendues de glaces ou de jolies routes méditérranéennes, il y en a pour tous les goûts et certains passages sont vraiment très réussis. Malheureusement, l'inégalité des rendus est omniprésente. On passe d'un virage où le soleil vient joliment jouer avec les arbres à une ligne droite terne aux textures mal définies. On s'extasie devant le reflet de la glace au soleil pour la trouver anormalement mate avec l'éclairage de nos phares. Les ombres et les effets volumétriques (comme le brouillard ou les projections de terre) sont assez réussis, mais ne compensent pas toujours cette 3D légèrement floue, voir grésillante.
Et puis sur consoles, l'optimisation complètement ratée, même 3 mois après sa sortie. L'image se déchire violemment en 2 à chaque virage, suivant une médiane horizontale, avec plus ou moins de décalage en fonction de la distance des objets. Et au même moment, tous les détails lointains qui se mettent à vibrer l'espace d'une demi seconde, parfois moins. De quoi bien gâcher l'expérience en augmentant radicalement la fatigue des yeux. De même, la course de nuit qui offre un pauvre spectacle vide de sensations, avec une lumière qui plope sur des textures mal calibrées.
Reste une ambiance sonore réussie, avec un intérieur de cockpit faisant la part belle aux bruits de tôles, aux sifflements de moteurs, aux amortisseurs fatigués et au contact des pneus sur le sol. En vue extérieure, les pétarades du pot d'échappement se mêleront au différents contacts de votre voiture, que l'on parle de la surface ou de la végétation. De ce côté là, rien à redire, vous allez en prendre plein les oreilles. Seul petit détail : la voix du copilote qui est presque trop claire pour être vraie, offrant au joueur une précision de données que le vrai conducteur n'a jamais.