Dying Light suscite depuis longtemps autant d'espoir que de crainte. Le cursus de son créateur, Techland, pouvait laisser penser qu'il ne s'agirait que d'un Dead Island au Moyen-Orient. Ok, mais si, technologie et choix de gameplay aidant, la formule trouvait un nouvel équilibre ? Si elle faisait peur pour les bonnes raisons ? Alors, peut-être tiendrait-on un jeu de survie en monde ouvert à ne pas négliger...
Le soleil vient de se coucher. Une fois de plus, je n'en ai fait qu'à ma tête. Je n'ai pas écouté l'appel radio et ai préféré continuer à déambuler dans les rues de Harran pour l'explorer plus en profondeur. Et par amour du loot. Maintenant, on n'y voit plus rien. L'abri le plus proche me paraît bien loin. La lampe torche ? Trop dangereux. Je progresse à tâtons. Et il surgit. Le zombie qui trahit ma position est là, prêt à mâcher ma jugulaire. Je le repousse, le tranche en deux. Trop tard : plusieurs chasseurs sont à mes trousses. Ils frappent fort, ceux-là. Des Vigoureux, très rapide aussi, les rejoignent. Je file comme le vent, évite les obstacles, grimpe sur les voitures puis les toits, réussis tous mes bonds, y compris sur quelques têtes. Un dernier. Je me raccroche de justesse. Me voilà près de la Tour, les lampes UV repoussent mes poursuivants, c'était moins une. La nuit, les règles changent. La peur s'installe. L'excitation avec. On se régale. Dying Light y devient délicieux.
Keep the Faith
On a tous en tête les sensations procurées par Mirror's Edge. Une légèreté, une fluidité dans les mouvements dont peu de jeux en vue subjective peuvent se targuer. En arrivant dans la ville de Harran, mise sous quarantaine pour cause de prolifération de morts-vivants, on imagine pas que, suite à un prologue d'une incroyable lourdeur, on va pouvoir revivre le même type d'émotion à l'échelle d'un monde ouvert. Et pourtant. Les développeurs sont parvenus à implémenter un système de parkour d'une efficacité redoutable. Les touches assignées à la course et au saut, qui répondent sans accroc, ouvrent sur des trésors de liberté. Aussi bien pour atteindre des hauteurs vertigineuses que pour faire des cabrioles à toute allure, juste pour le plaisir ou lors de courses-poursuites chargées en adrénaline, c'est un vrai bonheur. Et la pratique, qui amène de l'expérience, permet de s'offrir des compétences bienvenues dans le domaine de l'agilité. De quoi renforcer encore la joie que l'on a à gambader dans la peau de Kyle Crane. Lorsque la glissade, le coup de pied sauté, le bond avec appui sur ennemi et surtout le grappin, qui s'accroche partout mais se voit limité dans son utilisation, deviennent accessibles, on prend plus de risques, on kiffe, on commence à croire qu'on voit dans la Matrice... jusqu'à ce qu'un plongeon mal négocié ou une horde ne vienne calmer nos ardeurs.
Ma cité va craquer
La cité en elle-même (deux quartiers, des favelas et une vieille ville aux ambiances assez différentes qui présentent de nombreux immeubles et recoins à explorer), soumise à un chouette cycle jour/nuit, se montre tout à fait ravissante. A l'exception d'intérieurs qui se répètent vite, on n'a rien à redire sur son apparence - peut-être un peu plus sur le moteur, qui a parfois le hoquet. C'est somptueux, fin, ça baigne dans des effets qui renforcent encore davantage une immersion chouchoutée par une excellente bande son et des bruitages propres à vous faire sursauter quand il le faut. Et cela se prête parfaitement à des parties de cache-cache et des missions un peu plus musclées. Harran ne manque guerre de zombies et d'humains (aux attitudes souvent suicidaires) prêts à en découdre. De ce côté, les parents de Dead Island n'ont pas eu à trop se fouler. Ils ont des noms charmants comme Vigoureux, Démolisseurs ou Enflés. On les a vus partout : ils sont génériques et lents, rapides et agressifs, gros et armés, TRES gros et capables de vous lancer des rochers, vous explosent à la tronche, vous crachent un truc verdâtre, il y a aussi des enfant qui vous assomment de leurs cris... Rien de très nouveau. Et on dénombre beaucoup de clones - bien faits, mais clones quand même. Reste que les ridiculiser ou les pulvériser, en profitant d'une bonne localisation des dégâts, reste un bonheur complet.
C'est OK, c'est batte dans ta gueule
Les points d'XP concernent également des arbres de compétences pour se renforcer physiquement, martialement, apprendre un peu la furtivité et la maîtrise de pièges environnementaux, et se montrer encore plus habile dans le domaine du crafting. La fabrication et l'amélioration de nouvelles armes ou de potions à partir d'éléments ramassés un peu partout se montre bien fichue. Tant mieux : elle est indispensable à une progression sans cheveux blancs. Des lames, marteaux, planches en bois, battes, grenades ou shuriken, qui semblaient presque rebondir au début de l'aventure, gagnent en efficacité. On devient un maître des pièges. On colle des éléments à son arsenal. Les pétards utilisés pour faire diversion font place aux vraies pétoires... certes dévastatrices, mais qu'il vaut mieux employer dans les lieux fermés. A ciel ouvert, le moindre bruit attire toujours les monstres les plus balaises. Le corps à corps, qui oblige à gérer son endurance et à avoir toujours de quoi faire face à une usure assez prononcée des armes, est bien fait. Les coups portent, le résultat est bien crade, gore à souhait. On pourra grimacer non sans trouver ça fun, comme devant un bon film d'horreur. Il faut donc, quand on se sent assez vaillant, en profiter, en hésitant pas à faire quelques tours chez le marchand ou l'intendant pour garder ce qu'il faut dans son inventaire.
Here comes a new challenger
La multiplicité des possibilités dans un environnement gigantesque et à l'architecture parfaitement efficiente au niveau de l'exploration s'accompagne d'une vraie solidité en termes de contenu. La trame principale est consistante (environ 20 heures de mon côté), se laisse suivre, même si on a du mal à ne pas voir en Rais, le grand vilain, un méchant comme on a déjà pu en voir dans les deux derniers Far Cry... et même si la V.F., à base de répliques mal jouées et pas synchrones, se révèle abominable. Les missions sont nombreuses et s'accompagnent de défis et challenges plus ou moins variés, avec de la course, du nettoyage, pas mal de serrures à crocheter, de fripouilles à trépaner ou de recherche d'objets spécifiques à l'aide d'un "spider sense" qui les met en surbrillance. La bonne nouvelle, c'est qu'il est parfaitement possible de vivre ceci à plusieurs. Une bonne connexion, avec amis ou via le matchmaking, et voilà que quatre joueurs vont pouvoir, par exemple, se fader des zones fermées et très dangereuses. Ou encore affronter des Chasseurs incarnés par d'autres joueurs désireux d'envahir notre partie. Via le mode "Be A Zombie", pour peu que vous ouvriez vos chakras, des inconnus peuvent s'incruster et déclencher un mode nocturne ô combien flippant et cohérent avec l'ensemble du jeu : vous devez détruire leur 5 nids, ils doivent vous buter 10 fois. Ils sont ultra rapides, sentent votre corps tout chaud et peuvent effectuer des piqués. Vous pouvez les cramer à l'ultraviolet. Un excellent jeu du chat et de la souris en multi, qui s'ajoute à un ensemble certes perfectible mais solide. Très solide.
Pas aussi barré qu'un Dead Rising ou que Dead Island, Dying Light n'en demeure pas moins jouissif. Son approche "réaliste", avec des combats au corps-à-corps presque douloureux à regarder et des armes plutôt crédibles, ainsi que la liberté de mouvements qu'il procure permettent de parcourir son monde avec le sourire au lèvres... ou avec le stress le plus intense, suivant l'heure à laquelle notre avatar erre dans les rues de Haran. Et qui l'accompagne (Benny B !). On craignait un énième jeu de zombies, nous voilà avec un défouloir, un générateur de sensations fortes, sacrément réussi.