Dans une époque où le jeu vidéo a désormais aussi sa place dans les musées, c'est sur console portable, à l'intérieur d'une petite cartouche, que Nintendo propose de visiter le sien. Irremplaçable dans cette tâche, gardien de l'esprit d'une entreprise qui vient de fêter ses 125 ans et responsable des précédents jeux Smash Bros., la gestion de ce patrimoine est confiée une nouvelle fois à Masahiro Sakurai. Opiniâtre et perfectionniste, le directeur de ce musée virtuel propose avec Super Smash Bros. sur 3DS ce qui est certainement l'une des explorations de patrimoine les plus ludiques qui soit.
Si Smash Bros. a réussi à faire valoir assez des qualités qui en font un bon jeu de combat pour convaincre les esthètes du genre d'en faire un des titres joués à l'EVO, il semble évident avec cette version 3DS que l'intérêt ne s'arrête pas au jeu pur, mais bien à ce qui l'entoure et forme un tout indispensable pour n'importe quel joueur qui aurait, un jour, eu un petit faible pour le savoir-faire et la philosophie Nintendo. Il n'est question que de ça dans Super Smash Bros. : du pur jeu vidéo, une démonstration de plaisir ludique. Pas de récit, pas d'expérimentations, d'autres s'en chargent et s'en chargeront, mais une science du jeu à un niveau de sophistication extrême pour quiconque partage un peu de cette culture commune qui unit ceux qui ont passés des heures et des jours devant un écran, une manette en mains.
Les grands plats dans la petite console
Si Super Smash Bros. se joue sur des écrans jumeaux et sans manette à proprement parler, et alors que l'on attend avec impatience la version Wii U d'ici la fin de l'année, un constat réjouissant s'impose d'emblée : non, cette version 3DS n'est pas un apéritif, un petit en-cas en attendant le gros morceau sur console de salon. Généreux, peaufiné dans les moindres détails, époustouflant compte tenu des capacités de la 3DS, Super Smash Bros. est un "gros jeu" à part entière, qui crie en permanence aux passionnés combien il les aime. En solo comme en multi, ils le lui rendent bien déjà, par les éclats de rire et les noms d'oiseaux qui fusent joyeusement au bout de quelques minutes de jeu.
Sur la piste, des étoiles plein les yeux
Une capacité à générer de la bonne humeur qui n'est pas une nouveauté pour ceux qui connaisent déjà leur Smash sur le bout des doigts grâce à Melee ou Brawl. Super Smash Bros. pioche d'ailleurs dans les épisodes précédents : niveaux déjà connus et Final Smash similaires à ceux déployés dans les jeux précédents sont ici réutilisés. Mais ce serait sans compter sur les niveaux inédits propres à cette version 3DS (25 sur 34, tous jouables également en mode Destination Finale, sans objets donc) et la quinzaine de nouveaux personnages qui va avec, avec trois variantes pour le Mii à créer soi-même, en boxeur, bretteur ou tireur. On compte parmi les arrivants dans SSB4 la présence des mascottes Capcom et Bandai Namco, Mega Man et Pac-Man, mais aussi d'anciens comme de récents personnages, à savoir le Villageois d'Animal Crossing, l'entraineuse de Wii Fit ou encore Little Mac de Punch-Out!!. Si le casting "classique" (au total, en comptant les combattants secrets, la sélection s'effectue entre 51 personnages), n'a que peu changé dans ses capacités et attributs, avec un peu plus de vitesse pour untel et un peu moins de puissance pour un autre, tous les nouveaux personnages sont intéressants à jouer, proposant toujours une idée de jeu amusante. La rigidité de Mega Man et la palette de pouvoirs empruntés aux boss de sa propre série, s'accordent bien avec la puissance brute d'un Little Mac tant qu'il est sur le plancher des vaches. On apprécie aussi les "postures" offensives ou défensives de Palutena ou encore la faculté de Shulk, héros de Xenoblade Chronicles, épée Monado en main, de privilégier par exemple sa puissance d'attaque en compensation d'une perte défensive. Définitivement, tout ceux-là, ils fallait les inviter.
Un festin et du rab sans fin
Mais la fête ne s'arrête évidement pas au prestige et à la bonhommie des invités. Blindé d'activités, Super Smash Bros. est pensé pour ceux que rien ne rassasie. En plus du mode Smash, personnalisable dans les moindres détails, arène inépuisable pour le jeu à plusieurs, le mode "arcade" classique, où l'on affronte (seul ou à deux) différents adversaire jusqu'à Créa-Main et ses redoutables formes diverses, propose plusieurs chemins à la difficulté plus ou moins élévée, alors que de base, à la manière de Kid Icarus : Uprising, on choisira le niveau d'intensité de son parcours. On pourra aussi affronter chronologiquement, selon leur année de naissance, toutes les mascottes du jeu dans le mode "All-Stars", encore une fois en solo ou accompagné. Tout cela rapportant or et trophées, une quête chronophage pour les complétistes, collection de statuettes, de musiques, stats en tout genre, appelle à toujours plus d'implication. Faire voler le sac de sable à coup de batte de baseball ou une bombe dans un erzatz d'Angry Birds, fataliser 10, 100 ou à l'infini des Mii donne des crampes aux bras, les heures de jeu passant à vitesse grand V. Ce qui tombe bien car la durée de jeu fait partie des défis à débloquer, équivalent de ce qu'on trouve ailleurs et que l'on appelle alors "Trophées" ou "Succès". L'Emissaire Subspatial de la version Wii ayant tiré sa révérence, c'est à travers "l'Aventure Smash" que l'on tabassera des ennemis tirés des différentes séries dont sont issus les héros du casting, jusqu'à quatre chacun sur sa console, afin de récolter des capacités pour son Mii, classées en catégories de "force", "défense" et "vitesse". Des attributs que l'on pourra aussi donner au casting de mascottes pour faire son Ike ou son Yoshi à sa façon, encore plus balèze en attaque ou plus vif que l'éclair. Et puis il y a les nouvelles invocations, les nouveaux objets, pour encore plus de folie en match, dans des joutes qui restent toujours très lisibles, même s'il y a un petit "mais".
Plus grand que l'écran
Toujours fluide, visuellement superbe, poussant les capacités de la 3DS dans des retranchements que l'on n'imaginait pas, Super Smash Bros. souffre un peu de la petitesse de l'écran de la 3DS au format classique, surtout lors de certains dézooms nécéssaires à la lisibilté de l'action. Plus facile à glisser dans la poche, on lui préférera donc la 3DS XL pour un confort de jeu optimal, la 3D n'altérant en rien l'expérience de jeu et ne la magnifiant pas non plus. Autre petit détail : le stick. En effet, le disque du joystick de la 3DS manque parfois un peu de précision. On peut heureusement désactiver le saut sur celui-ci pour le conserver sur X et Y et être plus sûr dans ses mouvements. Car entre fluidité des animations, précision au pixel près et, cette fois, contrairement à Brawl, aucune latence en ligne, on peut difficilement accuser le jeu dès lors que l'on tombe dans le vide. Cerise sur le gâteau, le StreetPass est certainement l'un des plus intéressant de la console, avec ces petits combats de billes sumos, copié-collé d'un titre populaire sur smartphones au Japon et qui trouve naturellement sa place ici. Au final, la question s'inverse : la version Wii U aura-t-elle le même niveau d'excellence que cette intouchable version 3DS ? En tout cas, on pourra échanger des personnages entre les deux versions et se servir de sa console portable comme d'une manette pour sa Wii U... Vivement le deuxième service.