Le jeu indépendant doit être prêt à tout pour percer, mais il est rare que des titres tentent de tout bouleverser pour se faire remarquer. Le résultat peut être intéressant, mais un peu bancal. Prenez Gods Will Be Watching par exemple, avec ses thèmes adultes, ses conflits moraux, son style point&clic retro, son scénar SF/métaphysique, son gameplay purement gestion... Que dire de cet OVNI au final ?
Pourrez-vous empêcher Xenolifer de commettre un acte terroriste irréparable ? En tant que membre de l'E.C.U.K., sorte de bras armé de la confédération, vous savez que leur cause est juste : la libération des races extra-terrestres tenues en esclavage par les humains (qui décidément ne changent pas au fil des siècles...), mais leurs méthodes sont tout simplement inexcusables. D'abord infiltré au sein de Xenolifer, votre situation évolue rapidement après le piratage d'un labo spatial pour récupérer les données d'un virus mortel : le Medusea. Heureusement, vous êtes le légendaire Sergent Burden, qui survit toujours à toutes les embrouilles... Et effectivement, il y a quelque chose de bien étrange par rapport à votre personnage. La vraie histoire reste clairement posée sur les épaules de cet homme mystérieux.
Pixel à vifs
Gods Will Be Watching propose un scénario en six chapitres, offrant la plupart du temps un huis clos avec une belle galerie de personnages (soldats, scientifiques, hackers, terroristes...) Les situations sont souvent très tendues et pour en sortir vivant, il faudra que vous, en tant que leader, preniez les bonnes décisions. Gods Will Be Watching est donc avant tout un jeu de gestion, du temps et des ressources. Dans le premier chapitre par exemple, lors du piratage dans le labo, vous devez empêcher les otages de paniquer ou de se rebeller, tout en aidant le chef de Xenolifer, Liam, à hacker le terminal (via le technicien Shaman qui gère aussi la sécurité du réseau contre un informaticien de la base). Votre ami Jack, un espion comme vous, s'occupe de repousser la force d'intervention, en négociant ou en attaquant. Chaque action ou décision fait avancer le temps, vous ne pouvez pas être partout à la fois. Forcément, ça va partir en vrille quelque part, le tout étant de s'en sortir sans trop de casse.
Le poids de Burden
Le deuxième chapitre vous demande de rester en vie pendant 22 jours de torture, en jonglant entre votre résistance physique, les informations lâchées, ou les mensonges bien placés. Ensuite vient une autre situation, avec des variations de mécanismes, mais toujours cette idée de gestion générale des priorités. Parfois des gens meurent. Mais bizarrement, on peut les retrouver au chapitre suivant. C'est étrange, très étrange. Ce scénario, qui aurait pu être pondu par le fils de Jodorowsky et Philip K. Dick, est intrigant, vous le remarquerez bien vite. Cette ambiance stressante et le style pixelArt sont deux grandes forces de ce titre hors du commun, mais attention, le gameplay très spécifique et l'immense difficulté peuvent plomber l'ensemble assez facilement.
Incompatibilité
Gods Will Be Watching est jouable en mode original ou facile. Le premier est incroyablement dur. J'ai pleuré des larmes de sang, sans même réussir à terminer le chapitre I. Il y a très peu d'indications claires dans le gameplay : il faut observer chaque détail (et notamment les animations des personnages), évaluer tous les risques et définir ce que vous pouvez faire et ce que vous devez sacrifier. Après une vingtaine d'essais infructueux, vous pensez bien que votre éthique est réduite à peau de chagrin. En mode facile, vous perdrez aussi ! Mais avec quelques essais, ça passera.
Le choix entre ces deux approches est une véritable torture, car le défi offert par Gods Will Be Watching est excitant. On VEUT y arriver, même si on rage quand les probabilités sont contre nous (certaines actions ont un pourcentage de réussite, qui peut gâcher une planification minutieuse...) Mais c'est aussi un jeu d'aventure que l'on souhaite découvrir. Ne pas avancer d'un iota dans l'histoire est terriblement frustrant. D'autant plus que chaque chapitre peut vraiment traîner en longueur ! Une grosse difficulté, dans un titre comme FTL où le scénario n'a pas d'importance, passe beaucoup mieux que pour ce genre là. Bien entendu, vous pouvez toujours profiter de l'histoire en « facile », puis recommencer en « original » pour le challenge (et les succès, encore plus chauds à atteindre !)
Une difficulté intermédiaire n'aurait pas été de trop pour Gods Will Be Watching, qui reste plaisant à jouer en facile, et d'une violence inouïe en « original ». Je suis assez fan du gameplay, que j'aimerais retrouver à petite dose dans d'autres titres. Baser tout un jeu dessus est un peu osé, on n'échappe donc pas à une certaine répétitivité, facilement contrée par l'ambiance mature, le scénario, la galerie de personnage, le PixelArt, les musiques... On a même droit à une VF correcte (à part quelques textes manquants et l'absence d'apostrophes). Pour 9 euros dans Steam, c'est une aventure carrément valable, mieux qu'un stage de management !