Mine de rien, ça fait 17 ans que South Park a débarqué sur nos écrans télé. Les adaptations en jeux vidéo ne sont pas légion et sont généralement mauvaises. Il était temps qu'un bon titre rende ses lettres de noblesse, ou plutôt ses lettres d'infamie, à la célèbre série anarcho-libérale pipi-caca. Voici donc South Park : Le Bâton de la Vérité, le RPG, sur PC, PS3 et Xbox360, quasi pas censuré, bitches.
Oh, qu'avons-nous là ? Un gros épisode de South Park de 20h environ (un poil plus pour finir toutes les collections et chercher les easter eggs), rempli à 80% de fan service, avec un scénario débile, mais basique, en toile de fond. Le plus surprenant là-dedans, c'est qu'Obsidian, connu pour KOTOR 2, Neverwinter Nights 2, Fallout New Vegas, Alpha Protocol et bientôt Pillars of Eternity, ait choisi un style totalement JRPG (jeu de rôle japonais). On retrouve les combats au tour par tour typique d'un vieux Final Fantasy, les attaques à rythmer, l'absence de choix de dialogues... Ainsi que les éléments de gameplay qui se rajoutent au fur et à mesure de la progression, ce qui débloque de nouvelles zones à explorer ou permet d'atteindre des trésors jusque là inaccessibles. Ah, vous avez tout de même droit de choisir votre classe de personnage et de customiser votre look, mais guère plus (pas de stats, par exemple) ! C'est vraiment du JRPG.
Remarquez, ce n'est pas si surprenant que cela. C'est l'univers South Park : les consoles sont reines. Les joueurs PC, ce sont les gros porcs suintant devant leurs écrans. Ce sont eux qui passent leur nolife sur des RPG occidentaux (et aux MMO).
You're gonna have an easy time
Je sonne un peu vexé, là ? Non, non, rassurez vous, pas du tout, au-delà des gags et du WTF général du Bâton de la Vérité, je me suis bien amusé avec les mécanismes JRPG de South Park, bien que la difficulté se soit montrée bien faible. Pensez à démarrer le jeu en "difficile" ! En l'état, les consommables étaient vraiment trop nombreux et puissants, et maintenir sa santé haute en permanence, ou même ressusciter son compagnon tombé au combat dans le pire des cas, s'est révélé carrément trop facile. L'équipement est assez sympa à gérer, mais là encore ça aurait pu être plus tendu : on achète quelques pièces d'armure ou armes de temps en temps, mais sinon l'argent ne sert quasiment à rien, sauf le placer des fois à la banque, annnnnd it's gone. Peut être l'économie du jeu a plus d'importance en mode difficile ? Reste les collections (looks, equipements...) pour vous encourager à dépenser, si c'est votre truc.
Tout oser
Vous démarrez donc votre nouvelle vie, muet et amnésique, comme le nouveau glandu de South Park, alors que toute la population infantile de ce joyeux trou perdu s'adonne à un jeu de rôle grandeur nature ayant pour but la possession du Bâton de la Vérité. Il semble que vous ayez un passé houleux, et clairement vous n'êtes pas un garçon comme les autres : votre faculté à vous faire des amis Facebook et votre maitrise de la magie du pet sont hors norme.
Votre premier ami sera Butters, paladin au service du grand sorcier Cartman du clan humain. Après quelques missions pour ce gros lard, vous aurez l'occasion d'aider un peu le Seigneur Elfe Juif Kyle, avant de vous décider pour une faction. Tout cela sur fond d'enlèvement extra-terrestre et d'invasion de zombis nazis. Inutile d'en dire plus, vous découvrirez le reste vous-mêmes. On retrouve sans problème l'humour graveleux de South Park dans des passages super crades, le bête et méchant, avec par exemple le génial Al Gore, et la satire, notamment avec les quêtes chez les filles.
Inédit sur consoles et PC
A son niveau, South Park : le Bâton de la Vérité en devient d'ailleurs fascinant. La série avait déjà eu un effet choc à la télé quand elle avait débarqué, mais ce n'était pas non plus du jamais vu sur ce média. En jeu vidéo, il doit bien y avoir des exemples, mais... non, je ne les trouve pas. Je ne me souviens pas d'un truc aussi barré, aussi extrême dans son délire. On se rend compte à quel point le reste de la production est souvent aseptisée. On peut dire que les fans ne seront pas déçus ! Et cela malgré un peu de censure sur les versions console : les fameuses scènes avec des sondes anales et des avortements, disponibles sur PC (et bientôt sur YouTube, probablement). J'aimerais bien comprendre la raison de ces coupes. Ça doit être politique. Car franchement, il s'agit d'une goutte d'eau dans un océan de 18+ ! Pour moi, cela n'a pas de sens.
Coups de putes entre amis
Si vous n'aimez pas South Park, passez votre chemin, bien entendu. Sauf si vous voulez découvrir les aspects sympas du RPG d'Obsidian. La progression de votre classe (guerrier, mage, voleur ou juif) est plutôt simple et agréable : on améliore tranquillement quelques attaques spéciales qui se débloquent au fur et à mesure. En avançant dans le jeu, vous gagnerez de nouvelles fonctions et des magies qui ont un impact dans les combats, mais qui permettent surtout d'interagir avec le décor. Ainsi, tirer sur certains objets, péter sur des flammes, frapper des obstacles, etc., provoquera parfois des dégâts ou des réactions en chaîne qui tueront des ennemis avant même que vous ayez à enclencher un affrontement avec eux. Il suffit d'observer les alentours... On peut aussi distraire quelques cibles, pour les éloigner du chemin ou les attirer dans un piège. Et dans le domaine des déplacements, quelques gadgets vous offriront le don de vous téléporter ou encore de vous rétrécir. De quoi la jouer fine !
Dance Dance Pugilat
Cela dit, les combats ne lassent pas trop : vous contrôlez votre personnage avec un seul compagnon au choix parmi une petite liste (là encore, il faut débloquer du monde), et il est nécessaire d'attaquer ou de parer au bon moment pour faire des dégâts. Attention, c'est très actif et conséquent : si vous ne suivez pas cette partie "action QTE", somme toute aisée à quelques exceptions près, vous allez morfler ou bien foirer totalement vos attaques. Petite note : cet aspect est plus facile au pad qu'au clavier/souris, alors que c'est l'inverse pour d'autres éléments du jeu. À vous de voir : South Park gère très bien les deux si vous avec un pad Xbox360 sur PC. Pour en revenir aux combats, vous vous amuserez un peu avec les synergies entre les différents effets (en sang, étourdi, écoeuré, énervé, etc.), mais là encore si vous jouez en mode "normal", n'espérez pas non plus concocter des tactiques super avancées, ça ne sera pas nécessaire.
Réalisation haute fidélité
Globalement, je ne me suis pas ennuyé avec South Park : le Bâton de la Vérité, même si le challenge n'était clairement pas au rendez-vous. Je le redis : démarrez le jeu en difficile ! Le scénario aurait pu être un poil plus intéressant, et l'ensemble manque peut être de vraie nouveauté par rapport à la série. Mais je pinaille, South Park reste un magnifique concentré de débilité. Côté gameplay, on regrettera aussi l'absence de combat avec plus d'un compagnon et des boss sans mécanismes particuliers. Les rouages habituels des JRPG ne laissent pas beaucoup de place à la surprise... Quant à la technique, eh, c'est de l'animation et des graphismes South Park, hein ! Tout tourne très bien. L'interface est assez moyenne, on aurait pu avoir bien mieux. Et les décors sont parfois difficilement navigables, mais là encore je cherche la petite bête. Le vrai défaut ? L'insupportable système de sauvegarde en checkpoints. Je déteste.
Un mot sur la localisation ?
Quand on voit "un rouleau de pâtisserie" traduit "anneau de pétrissage", on se pose des questions, mais l'ensemble est correct. Les sous-titres ne sont pas toujours faciles à suivre, comme prévu. Cependant, cela concerne surtout les vannes lancées ici et là par les personnages (quand on ne s'y attend pas), plus que les dialogues importants liés à l'histoire. De toute façon, pas le choix.
Bien cool, ce gros épisode de 20h de South Park. C'est à peu près ce qu'on en attendait, sans surprise. La seule condition est d'aimer la série de Trey Parker et Matt Stone, forcément, le reste du jeu se mettant au service de leur univers avec simplicité, voir un peu paresseusement. Au final, jamais autant de gras n'aura été aussi frais, si vous visualisez un peu ce que je veux dire (mais je ne vous le conseille pas). Et maintenant, quoi ? Ça donne envie de DLC et d'autres contenus épisodiques écrits par ces auteurs branques ! Pourquoi ne pas faire plus de petites quêtes originales, d'une ou deux heures, pas trop chères ? Moi, je prends.