Après un Wiimake boisé, voire sentant méchamment le sapin pour cause de brouille entre Nintendo et Camelot Software Planning, le studio nippon à l'origine des Mario Tennis depuis la N64 revient enfin sur le court, pavé d'ailleurs de bonnes intentions. Un ace en perspective autostéréoscopique ? Voyons ça...
Dès l'intro, une musique épique, presque moyenâgeuse nous rappelle que l'illustre Motoi Sakuraba se charge des compositions à chacune des excursions sportives de Mario chez Camelot. Un choix d'autant plus judicieux que les moutures portables de Mario Tennis et Mario Golf avaient hérité de modes RPG fort bien fichus, discipline où notre studio a un tout petit peu d'expérience (vous savez, Shining Force, Golden Sun). Hélas il faudra se passer de ce genre d'aventures dans ce cru 3DS, même si certains aspects en sont conservés à travers les Miis, nous y reviendrons plus tard... La liste des modes solo se limite donc aux exhibitions (en simple et double avec toutes les options nécessaires), aux mini-jeux et aux tournois, ce qui n'est déjà pas si mal. En effet les compétitions se répartissent en deux "Opens" au challenge très progressif, composés chacun d'un quatuor de tournois qui fleurent bon le Royaume Champignon. A la clé, des objets à déverrouiller, la version "étoile" des différents personnages (comprenez survitaminée), et surtout le niveau de difficulté Légendaire, mais nous n'en sommes pas encore là.
A l'école des champignons
On commence par un cours express à l'école de tennis, destiné avant tout à se familiariser avec la "nouvelle façon de jouer", optionnelle hein ! Cette méthode consiste à incliner la console sur un axe vertical pour viser, tandis que les frappes s'effectuent par le biais de l'écran tactile. Deux configurations sont d'ailleurs au programme, l'une avec l'ensemble des coups (automatique, slice, lift, plat, lob et amorti), et l'autre restreinte à trois (automatique, lob et amorti) pour les débutants super malhabiles. Encore que sa pratique ne soit pas vraiment aisée, car même si la 3D stéréoscopique est logiquement désactivée d'office en raison de son incompatibilité avec les mouvements, la caméra rapprochée ne s'avère pas idéale en terme de lisibilité. Enfin, les déplacements gérés par la console et l'absence de feedback inhérent à l'écran tactile amoindrissent les sensations. Alors l'idée a le mérite d'innover, ou éventuellement de rendre hommage au tout premier Mario Tennis sur Virtual Boy en reprenant son angle de vue, mais on a vite tendance à retourner aux bonnes vieilles habitudes. Et tant qu'on y est, virons également illico l'option qui permet de changer de caméra avec le gyroscope, assez embistrouillante...
Nouvelles perspectives ?
Bon, nous voilà enfin confortablement installés pour profiter de ce rendu en relief, sur des courts forcément colorés et plutôt jolis. Entre les reflets sur les pierres rutilantes du château de Bowser, les grains de sable des dunes de Wario ou les planches de bois de la jungle de Donkey Kong, ces changements de surface sont agréables, tant à l'oeil qu'à jouer. Tout juste aurait-on apprécié quelques éléments interactifs supplémentaires dans l'environnement. Seul le Dôme Galaxie apporte un peu de fantaisie, avec ses revêtements qui varient de part et d'autre du filet, synonymes d'avantages ou de handicaps à la manière des items de Mario Kart (et du hasard pas très arbitraire qui va avec). A noter enfin l'espace conséquent autour du court, particulièrement appréciable en double, même s'il faut plisser un chouïa les paupières pour bien distinguer la balle. Comme celle-ci laisse toujours une traînée de couleur en fonction de l'effet, on a heureusement aucun mal à la suivre, sachant qu'en cas de doute, un ralenti en gros plan inspiré du "Hawk Eye" montre précisément le point d'impact.
L'effet rétro
La série n'a par conséquent rien perdu de son accessibilité légendaire, au contraire, on perçoit quelques ajustements qui viennent lustrer les rouages de ce gameplay déjà tellement bien huilé. Parmi ceux-ci, on remarque le lissage du système de frappe. Plus besoin à présent d'une seconde pression sur le bouton pour imprimer un surcroît d'effet, son intensité dépend du temps de charge. Résultat, tout semble encore plus naturel, on retrouve rapidement ses marques, et ses sensations. Attention, pas celles des versions portables, aussi excellentes soient-elles ! Non, d'emblée on pense à la mouture N64, la meilleure en somme, épurée des "Power bidules" qui ont foutu le bazar par la suite. A ce sujet, la présence des trois courts standards de cet épisode ne tient sans doute pas du hasard... Un doux parfum de nostalgie plane lors des premiers échanges, nonobstant les angles sensiblement réduits et un punch plus prononcé. Et question contrôles à proprement parler, on constate plusieurs évolutions majeures.
Plus de contrôle(s)
La frappe à plat a désormais son bouton attitré (il fallait appuyer sur A et B en même temps auparavant), le quatrième bouton de façade étant alloué au coup "automatique". Bigre, qu'est-ce donc que cette chose incongrue qui vous intrigue - j'en suis sûr - depuis sa discrète incursion dans le second paragraphe ? Tout simplement la touche de (super) tolérance de ce Mario Tennis Open, puisque l'on réalise ainsi "automatiquement" le coup optimal, du moins théoriquement. Et n'allez pas croire qu'il s'agisse toujours d'une super patate dans les gencives ! Les érudits de Mario Tennis savent que son gameplay repose sur un principe plus ou moins discutable de "pierre feuille ciseaux" rapporté aux effets. Par exemple, mieux vaut exécuter une frappe à plat lorsque l'on reçoit une balle liftée, et à l'inverse lifter une balle qui arrive slicée.
Un slice tranchant
Dans cet opus, ce phénomène devient visible : un cercle coloré apparaît à l'endroit où l'on est censé taper dans la balle, indiquant par la même occasion le coup opportun à exécuter. Quand on y parvient, l'effet de la balle est décuplé, de sorte qu'un slice prend une trajectoire incurvée qui la fait sortir complètement des limites du court, avant de revenir prestement dedans (et vice versa selon l'angle). Si l'on réussit malgré tout à aller chercher cette balle ô combien vicieuse, éventuellement à l'aide d'un plongeon (via le bouton R), cette frappe s'accompagne d'une puissance accrue capable d'envoyer valdinguer notre pauvre joueur, qui reste en prime groggy un bref instant. Ces super frappes, aux incidences variables selon l'effet, remplacent les "Power Shots" des précédents épisodes, et on ne s'en plaindra pas. Non, absolument pas.
Fair play
Certains tennis(wo)men du dimanche (voire des jours fériés) les regretteront peut-être quand même, parce que ces coups délirants s'inscrivaient dans la démarche festive des Mario Tennis, tout en ajoutant des spécificités supplémentaires aux personnages. Néanmoins ils devenaient nuisibles à terme pour les joueurs assidus, sans parler des puristes, en raison de leur récurrence, du fait qu'ils cassaient le rythme des échanges, des imprécisions qui en résultaient, et par dessus tout, de leur trop grand poids sur l'issue des points (heureusement qu'ils étaient désactivables en exhibition). Dans le cas de Mario Tennis Open, ces super frappes ne font que caricaturer la réalité. S'il existe bel et bien des lifts lourds et étonnamment bondissants - demandez à Rafael Nadal - il est plutôt rare qu'un joueur utilise sa raquette en guise de frisbee pour aller chercher une balle lointaine, banane ou pas, non ?
Parcimonie et anticipation
Cela dit, le système introduit par Mario Tennis Open n'est pas non plus à l'abri des critiques. Compte tenu de leur efficacité, les super frappes tendent à dicter la tournure des échanges, d'autant plus fâcheux que les coups "suggérés" manquent quelque peu de pertinence : Alors qu'il est logique de se fendre d'un amorti à proximité du filet, la fréquence des lobs proposés quand l'adversaire se trouve au fond du court a de quoi laisser dubitatif. C'est là qu'entre miraculeusement en jeu le savoir-faire de Camelot en matière de design. En clair, il faut user mais pas abuser de ces super frappes, sous peine qu'elles soient anticipées par l'adversaire. Une bataille tactique qui reflète finalement ce qui se passe réellement sur un court, et que maîtrise l'IA à merveille. Le niveau de difficulté le plus élevé donne sacrément du fil à retordre, tout en adoptant des comportements cohérents, oserais-je dire crédibles d'un point de vue tennistique.
Chacun son style
Evidemment, Mario Tennis Open a une interprétation des styles de jeu un poil de moustache particulière. Si les joueurs complets et puissants appliquent la stratégie escomptée, les défenseurs sont bizarrement attirés par le filet. Il s'agit en fait de serveurs volleyeurs légèrement plus facétieux, façon Fabrice Santoro. Les vrais défenseurs qui campent sur la ligne de fond se trouvent dans la catégorie vitesse, voire technique en version "contreur", sans oublier la ruse, l'illustration d'un penchant à brouiller les cartes. Là réside toute la force de ce gameplay et des oppositions de style qu'il engendre. Par exemple, un Bowser passe souvent son temps à envoyer des missiles de gauche à droite, repoussant ainsi son adversaire à l'arrière du terrain. Pour donner le coup de grâce, notre "brutosaure" pourra alors malicieusement planter un amorti derrière le filet... ou claquer une énième ogive dans un coin si l'adversaire s'était rué vers le filet par anticipation ! Si tant est que son adversaire ne casse pas le jeu avec des successions d'amortis, de slices et de lobs, une tactique bien connue des "crocodiles".
Moustache et authenticité
Irions-nous jusqu'à qualifier Mario Tennis Open de réaliste ? Quand même pas, les fautes sont quasi inexistantes, et quelque peu suspectes lorsqu'elles surviennent, à l'instar des interventions de la bande du filet. De même les balles prises en demi-volée s'avèrent un chouïa trop faciles à réaliser, quand on sait à quel point il est délicat de se fendre de tels coups en vrai. N'empêche que les fondamentaux du tennis sont là, dès que l'on prend un peu de recul par rapport à l'habillage "mariolé". Dans l'absolu, ce Gameplay parvient exactement à ce que l'on attend d'un Mario Tennis, en l'occurrence un véritable jeu de tennis, accessible, qui peut se permettre de prendre quelques libertés par rapport à la réalité. Encore fallait-il qu'il ne parte pas complètement en vrille, à vouloir faire du grand spectacle (ou fournir des features clinquantes à vocation marketing). Justement, cet opus se contente ainsi d'extrapoler avec intelligence sur les principes de ce sport, afin d'y ajouter sa propre touche.
Travailler en s'amusant
Reste à donner les moyens aux néophytes d'apprivoiser la subtilité de ce Gameplay, dont la maîtrise nécessite un sérieux entraînement, et ce dans la joie et la bonne humeur. C'est l'un des rôles des mini-jeux, étape incontournable de tout Mario Tennis qui se respecte. Le "Défi Anneaux", résolument plus fun en duo avec un(e) pote, fait son retour aux côtés de nouvelles épreuves plus ou moins originales. La "Halte aux Plantes" a notamment des airs de déjà vu, bien que les plantes piranhas crachent ici des boules d'encre qui éclaboussent l'écran. Plus dépaysants, les "Echanges Galactiques" consistent à faire un maximum d'échanges et à récolter des étoiles en face d'un Luma, son côté du terrain étant divisé en 4 cases qui disparaissent alternativement. En dépit de la mélodie de Super Mario Galaxy, on a franchement connu plus enthousiasmant dans le genre, surtout que la lisibilité pêche parfois.
Super Mario Tennis
A l'opposé, le "Super Mario Tennis" s'imposera certainement comme la trouvaille de cette itération 3DS. Il s'agit de taper la balle contre un mur (oui on connaît ça), sur lequel défilent les niveaux de Super Mario Bros. Néanmoins ils ne sont pas là que pour la décoration, puisque l'objectif se résume à gagner des pièces et à allumer les ennemis de façon à arriver au bout du stage avant que le temps ne soit écoulé. Et les power-ups sont naturellement de la partie, avec le champignon pour faire grossir la balle et la fleur de feu afin de maximiser les dégâts. Pour couronner le tout, ce mini-jeu peut être pratiqué en duo sur 4 niveaux distincts du solo, le mur devenant alors translucide, pour un effet littéralement hallucinant en 3D stéréoscopique ! Attendez, ce n'est pas fini, car ces activités sont récompensées par des pièces, histoire de se payer les tonnes d'objets (plus de 200) qui viennent remplir les étals de la boutique au fil des victoires (et des défaites).
Mii Tennis
Ce Mario Tennis Open puise en effet son endurance du côté des Miis, et par extension dans sa dimension multijoueur. L'équipement obtenu sert ainsi non seulement à personnaliser son joueur, mais aussi à en améliorer les caractéristiques pour briller lors des matchs en local ou en ligne. Saluons d'ailleurs la possibilité de jouer à plusieurs avec une seule cartouche, malgré une liste de modes un peu restreinte dans cette configuration. Un reproche qui concerne également les modes en ligne, réduits au strict minimum avec des parties rapides ou longues, face à des amis ou des adversaires aléatoires. Ces derniers s'intègrent dans un classique système de classements mensuels, accompagnés de médailles. La méthode a fait ses preuves, toutefois on croise les doigts pour que d'éventuels tournois et autres évènements spécifiques (moins confidentiels que les sympathiques "DSinParis") soient proposés par la suite. D'autant que l'on ne peut affronter que des joueurs Européens, dommage après les expériences sans frontières d'un Mario Kart 7.
StreetPassing Shot
En l'état, les matchs en ligne constituent en tout cas une excellente motivation pour acquérir les objets vendus à prix d'or au magasin. Car les modifications entraînées par l'équipement sont clairement perceptibles, de sorte qu'elles se montrent déterminantes quant au style de jeu que l'on souhaite privilégier, et à son style tout court. Certains objets ont ainsi des propriétés plus ou moins esthétiques que l'on jalousera chez un camarade qui les a obtenues, surtout si ce "mystérieux" Mii est arrivé sur notre console via le StreetPass. On peut alors l'affronter dans l'optique de glaner des pièces en enchaînant les victoires, ou coopérer pour tenter d'exploser le score du défi anneaux, l'IA se basant sur son niveau en ligne (pas question de lui piquer son matériel au passage, précisons-le). Alors bien sûr, cela ne pallie pas totalement à l'absence de mode RPG, notamment pour ceux qui se concentrent avant tout au solo.
Un RPG sans histoire ?
D'un autre côté, cette intégration des Miis a la même mission : se façonner un personnage pour les parties à plusieurs. Certains se souviendront sans doute que c'était déjà le principal intérêt de l'opus Game Boy Color une fois l'aventure terminée, avec ses personnages à transférer par le biais du fameux Transfer Pack. Et c'eut été un comble que le cru GBA n'en dispose pas, compte tenu de l'infrastructure requise pour jouer à deux (une cartouche par personne et un câble Link). Il va sans dire que l'on se serait volontiers lancé dans une nouvelle épopée tennistique aux quatre coins du monde, comme le suggérait l'intro de ce Mario Tennis Open soit dit en passant. Néanmoins au regard de son ouverture multijoueur, cette bien nommée itération portable se rapproche beaucoup de ses consoeurs sur consoles de salon, auxquelles on ne reprochait aucunement de manquer de RPG. Après tout, Mario Kart n'en a pas non plus. Et pour cause, l'essentiel de Mario Tennis Open tient à son Gameplay, un pur bonheur en solo, et plus encore entre "aMiis".
Après une course au sensationnel plutôt néfaste pour la petite balle jaune, Mario Tennis Open revient à une relative sobriété qui n'est pas sans rappeler l'opus N64. Cet épisode n'en reste pas moins ambitieux, puisqu'il se risque à exploiter les technologies de la 3DS. Si l'implémentation du gyroscope et de l'écran tactile peinent à convaincre, l'affichage en relief apporte une sophistication bienvenue à ces courts aux environnements un tantinet trop statiques. Toutefois sa principale avancée réside dans les fonctionnalités sans fil, très complètes.