Après Fez sur Xbox Live Arcade et Journey sur PSN, deux monuments du jeu (plus ou moins) indé, j'étais super bien disposé pour m'attaquer à Datura, un autre titre soutenu par Sony Santa Monica Studios comme le dernier thatgamecompany. Ca avait l'air tout à fait dans le ton du jeu un peu barré, ou en tout cas atypique, avec le potentiel d'être marquant. J'ai vite déchanté.
Vous vous éveillez dans une ambulance, aux côtés d'une infirmière qui porte plus d'attention aux écrans des appareils branchés sur vous qu'à vous-même. Ni une, ni deux, vous saisissez le drap qui vous couvre de votre main virtuelle, le repoussez, puis arrachez les electrodes. L'infirmière vous colle alors une seringue de sérénité liquide dans le corps, et vous sombrez... pour vous éveiller dans une forêt automnale mystérieuse. Votre PS Move en main, vous salivez à l'idée de découvrir un univers et une histoire tels que les blockbusters calibrés n'en offrent que trop rarement. Malheureusement, vous comprenez bien vite qu'il s'agit d'un véritable purgatoire pour votre personnage... comme pour vous-même.
Quand le gameplay pue, tout pue
Autant on peut jouer à des jeux assez moches pourvu que ceux-ci proposent un gameplay correct, et une histoire béton, ou un gameplay béton et une histoire correcte (ou les deux béton), autant un jeu magnifique avec une histoire géniale dont le gameplay est raté aurait mieux fait de sortir sous une autre incarnation que celle d'un jeu vidéo. Le pire, c'est lorsque l'injouabilité chronique d'un titre empêche presque de le parcourir. Datura n'échappe que de peu à cette seconde catégorie, mais s'inscrit parfaitement dans la précédente. En vue subjective, on y manipule une main virtuelle au PS Move (ou au SIXAXIS), mais aussi tout le reste : déplacements, vue de caméra, objets et mécanismes. Le problème, c'est que l'ensemble fonctionne très, très mal. Il faut maintenir le bouton "croix" pour pivoter sur place, maintenir le bouton principal enfoncé pour avancer (très, très lentement) dans la direction pointée par le Move, pomper la gâchette pour avancer un peu plus vite, et surtout ne pas espérer pouvoir faire efficacement deux choses en même temps.
Qui suis-je, où vais-je, dans quelle étagère ?
A force de galérer au Move à jouer debout en faisant de grands mouvements pour réussir à y voir quelque chose ou à placer la main virtuelle où l'on veut dans l'espoir de déclencher ce qu'il faut à l'écran, on parviendra à trouver et à manipuler certains éléments de cette mystérieuse forêt (trouver une cruche, puis la remplir à tel endroit, la vider à tel autre, pour obtenir une clef pour ouvrir telle porte, etc.) pour lancer certaines séquences dans la "réalité". Ces séquences confronteront le joueur à un choix moral basique (par exemple, scier la chaîne des menottes, ou le bras du flic inconscient ?) qui influencera l'atmosphère de la forêt lorsque vous y reviendrez. Au total, les plus habiles plieront tout cela en 2 heures de temps, avec le sentiment d'avoir passé plus de temps à luter contre un gameplay pourri qu'à découvrir une histoire à la narration typiquement jeu vidéo, et au ton délicieusement barré. Car en vérité, ne cherchez pas de cohérence particulière aux puzzles, de sens caché dans l'ensemble, ce n'est qu'un agencement vaguement cryptique d'éléments qui n'ont décidément pas grand chose de génial.
Bref, Datura correspond finalement à ce qu'on pouvait en attendre, sachant qu'il a été conçu par les mêmes auxquels on doit la démo Linger in Shadows. Il y a un souci évident d'esthétisme, d'ambiance, et une volonté certaine d'aborder la narration interactive d'une manière intéressante, mais le résultat reste un vibrant échec tant il est poussif, pénible à manipuler, et finalement insatisfaisant en termes d'expérience comme d'histoire.