Un milliard de dollars de chiffre d'affaire en deux ans ! Voici la manne colossale générée par la série Guitar Hero. Une véritable success story et un appel à surfer sur ce qu'on peut qualifier de phénomène aussi bien ludique, qu'économique. Ne vous y trompez pas. Les trois principaux éditeurs mondiaux Activision, Electronic Arts et Nintendo sont d'ailleurs les premiers à tenter aujourd'hui de s'octroyer la plus crémeuse des parts. Si les gamers ont jusqu'à présent joué le jeu, pour la première fois depuis 2005, le marché de la musique virtuelle semble en perte de vitesse. Simple bémol ou premier couac ?
Depuis 2005, le marché des jeux musicaux n'a cessé de croître. Mais n'oublions pas que ses débuts n'ont pas été aussi percutants. En effet, malgré un franc succès au Japon grâce à la gamme Bemani, le Guitar Freaks de Konami n'a jamais su s'imposer en Occident. Et pourtant, c'était bien lui l'inventeur de la guitare en plastique, en 1998 ! Trop précurseur. Pas assez rockstar aussi, la sélection musicale restant beaucoup trop japonaise à l'époque.
Dix ans plus tard, le visage du jeu vidéo a bien changé. Jeux traditionnels et expériences numériques cohabitent. Ainsi, en cumulant les ventes des deux leaders du genre, Guitar Hero et RockBand, on frise les 30 millions d'exemplaires vendus dans le monde... en un temps record ! Colossal. Si Activision mène clairement la danse avec Guitar Hero (et ses 21 millions d'exemplaires !), pas étonnant que chaque éditeur décide de se lancer sur ce marché aussi porteur que fructueux. Wii Music, Lips, Singstar, Rock Revolution... de Nintendo à Electronic Arts, en passant par Sony et Konami, chacun désire convaincre.
Problème : après des années d'euphorie musicale, le phénomène semble connaître un premier ralentissement. Dans quelle mesure ? Laissons parler les chiffres en provenance des Etats-Unis... Ainsi, sur ce territoire, alors que Guitar Hero III s'était écoulé à 1,39 millions d'exemplaires lors de sa semaine de lancement, Guitar Hero World Tour aurait enregistré 534.000 ventes, comme l'atteste ce graphique. Si ces chiffres restent stratosphériques, ils reflètent une réalité économique. Guitar Hero III avait ainsi généré 115 millions de dollars de recettes en une semaine de vente. Cette année, World Tour a dû se contenter de 65 millions de dollars sur la même période. La concurrence de Rock Band 2 est féroce, avec déjà près d'un million d'exemplaires vendus aux USA.
David Carlson, vice-président exécutif de l'enseigne GameStop s'exprime à ce sujet :
"La catégorie globale des jeux musicaux est en très bonne santé, et nous prévoyons qu'elle sera populaire tout au long de cette fin d'année. Mais comme chacun le sait, elle n'est pas aussi robuste qu'elle l'était l'an dernier."
Le cas Wii Music et son démarrage proche du flop, tout du moins pour un titre aussi important aux yeux de Nintendo (moins de 500.000 ventes monde depuis son lancement il y a un mois... soit moins que Wii Fit rien qu'aux Etats-Unis en une semaine), serait-il un autre signal des difficultés à faire tout et n'importe quoi avec la musique numérique ? Pire encore pour Rock Revolution de Konami. Première semaine de vente aux USA (toutes consoles confondues) : 8.300 exemplaires écoulés ! Et deux fois moins la semaine suivante. Le fiasco total et définitif. Attention, qui dit jeu musical ne signifie donc plus forcément carton dans les charts. Les joueurs n'ont jamais été aussi avertis. Ils désirent le meilleur. A noter aussi que la plupart de ces jeux vendus avec des packs d'instruments à près de 200€ pourraient aussi faire les frais de la crise économique. Maintenant que de nombreux joueurs sont équipés en guitare en plastique, seront-ils prêts à racheter de nouveaux packs d'instruments ? L'avenir des jeux musicaux ne se joue-t-il pas sur la distribution de nouveaux morceaux via PSN ou Xbox Live ? Un phénomène de lassitude ou de saturation s'installerait-t-il pour des jeux qui en sont parfois à leur 7ème version en 3 ans ? Faire le mariolle dans son salon a-t-il fait son temps ?
S'il est trop tôt pour parler de retournement de tendance, il est certain que la dynamique semble doucement s'essouffler. S'agit-il d'une accalmie ou d'un atterrissage en douceur ? Il est probablement trop tôt pour tirer des enseignements définitifs. Le mois de décembre détient en son sein un début de réponse.
(chiffres NPD/VG Chartz)