Après avoir magnifié par deux (ou trois) fois l'immersive sim avec Dishonored et Prey, les lyonnais d'Arkane s'apprêtent à changer de génération avec Deathloop, leur nouvelle licence dévoilée sous les acclamations d'un public chaud comme la braise lors de feu-l'E3. Proclamé jeu le plus attendu de l'année 2021 par votre serviteur en décembre dernier, c'est peu dire qu'il nous tardait de découvrir plus en détails cet univers en forme de boucle, de celles qui font tourner les têtes.
À ceux qui auraient réussi l'exploit de passer jusqu'ici à côté, rappelons brièvement que la nouvelle licence d'Arkane nous plonge dans le col roulé de Colt Vahn, un assassin bien embêté, puisque perpétuellement coincé dans une boucle temporelle, de celles expérimentées par un certain Phil Connors il y a quelques décennies de cela. Pour se sortir de ce bien mauvais pas où la mort n'est qu'un éternel recommencement, une seule solution s'offre à lui : mettre à bas huit cibles, les Visionaries, au moins aussi dangereux. Mais pour mener à bien cette mission, il va falloir du... temps, et quelques morts plus ou moins subies, cela va sans dire.
Le code a changé
C'est en compagnie du réalisateur Dinga Bakaba et du directeur artistique Sébastien Mitton que nous avons pu découvrir le début de cette aventure à la première personne, qui s'ouvre sur une séquence digne d'un James Bond, avec transitions renversantes et chanson à thème à l'appui. "C'est encore le début de la fin, un déjà-vu dans ce jeu de survie qui jamais ne finit" : cette séquence introductive au doux parfum de seventies annonce la couleur, et permet d'étaler la direction artistique du titre, singulière et renversante à plus d'un titre.
Le dixième art succède rapidement au septième, alors que le pauvre Colt se réveille à nouveau d'un nième trépas, oubliant au passage tout ce qu'il s'est passé dans la précédente boucle. Mais ce prologue abrupt ne laisse que peu de temps à notre héros malgré lui, obligé de cesser ses questionnements identitaires alors que s'affichent en surimpression des messages énigmatiques, mentionnant un mystérieux code. Lequel ? Et quand bien même, à quoi peut-il servir ? "Je ne connais pas le putain de code !" rétorque Colt, alors qu'il se découvre immédiatement une propension à manier les armes à feu, comme un certain XIII en son temps.
Le nord par le nord-ouest
Heureusement, la comparaison s'arrête là, et l'on découvre avec un certain émerveillement les premiers environnements extérieurs de Deathloop, composés de roches rougeâtres saturées, et qui permettent de profiter d'un éclairage diablement efficace. Malheureusement, l'heure n'est guère à la contemplation, puisque Julianna, l'antagoniste dévoilée en même temps que le jeu, nous invite à bouger fissa notre éternel popotin, car il y a du pain sur la planche.
Quelques sauts et bruits de cuir plus tard - le manteau de Colt est très expressif au casque -, nous voici aux environs d'une villa sur pilotis que pourrait occuper n'importe quel grand méchant issu de l'oeuvre de Ian Fleming : du papier peint orangé à motifs aux écrans rondouillards d'un plastique douteux, tout fleure bon le flower power, et les codes esthétiques de l'époque.
TP en MP
Mais il est grand temps de passer à l'action : pour s'infiltrer, Colt peut profiter d'une batterie de pouvoirs hérités des précédentes productions d'Arkane, à commencer par la téléportation qui envoie désormais valdinguer les adversaires, la gravité et le relief se chargeant du reste. Dans le même ordre d'idées, l'un des nombreux pouvoirs - les Trinkets - à équiper permet de faire léviter la piétaille adverse durant quelques instants, ce qui laisse le temps de les propulser dans le vide, contre un mur, ou de leur envoyer une grenade collante dans les pattes, avant d'admirer le résultat.
En revanche, les phases de gunfights manquent peut-être encore d'un soupçon d'impact, d'un je-ne-sais-quoi qui renforcerait l'impact visuel des déflagrations, et qui donnerait la sensation de ne pas combattre des PNJ trop malléables. La variété de pétoires promet tout de même une belle quantité d'approches et témoigne d'un soin apporté jusque dans leurs moindre détails, comme avec ce chargeur qui permet de balancer une poignée de balles n'importe comment, et de laisser la technologie faire le reste. De là à imaginer qu'Arkane espère ainsi favoriser l'infiltration et l'exploration aux phases bourrines d'un FPS classique, il n'y a qu'un pas. Mais quand même.
Break d'entrée
La palme du pouvoir le plus alléchant revient sans doute au Nexus, qui relie entre eux des ennemis proches : il suffit alors d'un unique headshot pour se débarrasser du groupe, un joli rapport qualité-prix. Malheureusement, les gunfights assez brefs (Deathloop semble opter pour des dégâts proches du réel, et les adversaires croisés n'ont donc rien de sacs à PV) finissent par avoir raison de nous, et à l'instar d'un rogue-like des familles, le jeu nous pousse à retrouver notre carcasse sur le lieu du trépas, histoire de récupérer les bonus et Trikets qui y étaient associés.
Qu'importe : Colt a pu récupérer quelques précieux indices sur sa cible, et il convient dès lors de se rendre au bon endroit au bon moment pour espérer faire mouche : découpé en quatre zones (Complexe, Updaam, Rocher de Fristad et Baie de Karl) et quatre moments de la journée (matin, midi, après-midi et soir), le jeu prend en réalité des airs du puzzle-game, puisqu'il faudra à terme réussir à descendre les huit Visionaries en une seule journée, ce qui implique de connaître leurs motivations, et trouver autant de moyens de les rapprocher pour gagner du temps. Fidèle à ses dernières productions, Arkane laisse ainsi bien des libertés au joueur pour se frayer un chemin.
Et ça continue encore et encore
Le premier exemple qui nous est ici donné est celui d'Aleksis Dorsey, un mondain que l'on pourra tout aussi bien abattre d'une balle en pleine tête une fois identifié, ou le faire tomber dans une trappe, pour un indéniable supplément de classe. Si l'on préférera garder la surprise sur les éléments qui nous ont permis d'en arriver là, les approches s'avèrent nombreux, tout comme les surprises, et il y a fort à parier que le jeu profite d'une rejouabilité encore plus profonde que les deux épisodes et demi de Dishonored, ce qui n'est, vous en conviendrez, pas peu dire.
ON L'ATTEND... EN COMPTANT LES JOURS !
Difficile de ne se pas se montrer débordant d'enthousiasme après avoir découvert les premières minutes de Deathloop. En plus de profiter d'une esthétique visuelle et sonore qui vous happe en un instant, la nouvelle licence d'Arkane Lyon s'annonce d'une richesse ludique et narrative assez folle, qui nous amènent à ce triste constat, empreint d'amertume : le jeu n'arrivera que le 14 septembre prochain sur PC et PlayStation 5. Que c'est loin.