Ce dimanche, avant l'ouverture de l'E3, j'ai eu l'opportunité de découvrir en exclusivité française le prochain Zelda, à venir sur Wii U et Nintendo NX en 2017. Pendant près de deux heures, en compagnie d'Eiji Aonuma, j'ai pu m'immerger dans une aventure aux proportions aussi épiques, qu'aux sensations uniques. Celui qu'il faut désormais officiellement appelé Breath of the Wild ambitionne de renouveler en profondeur la formule Zelda, entre douce tradition et profonde révolution. Impressions...
Après des années d'attente fiévreuse, parsemées d'embûches et de reports... nous y sommes. La salle s'éteint. Une douce voix féminine résonne : "Link réveille-toi". Le monde s'illumine. Gigantesque. Majestueux. Un horizon à perte de vue. Des montages, une citadelle, des forêts qu'on sent humides. Des colosses rôdent au sommet d'une montage, des daims s'abreuvent auprès d'un lac. Des abeilles butinent. Quelques accords de flûte de pan et de piano accompagnent la mélodie du vent. Il fait bon vivre en Hyrule. La nature à l'état brut.
A des encablures de ces jeux où les mitrailleuses hurlent et le dub-step vrille les tympans, Zelda Breath of the Wild impose sa différence dans le calme et une certaine élégance, véritable invitation à l'exploration, à la contemplation. L'épopée s'annonce déjà sauvage et définitivement inspirée par l'esprit d'un Hayao Miyazaki, avec un esprit visuel comme réalisé à la "gouache". De l'aveu même d'Eiji Aonuma, concepteur du titre, le monde dépeint ici s'annonce 12 fois plus massif que celui de Zelda Twilight Princess. Un dézoom sur la carte suffit à donner le tournis... d'autant qu'aucun chemin n'est désormais tracée. Vous voici face à vous-même, à vos choix, à vos envies de découverte.
Le réveil du héros
Au calme (avant la tempête du salon), Gamepad en main, j'ai pu découvrir deux démos distinctes. Mais commençons par l'histoire... Dans un sanctuaire plongé dans l'obscurité, une voix féminine résonne, une première pour la série :
Link, ouvre les yeux. Ouvre les yeux.
Sortant de 100 ans de sommeil, notre héros s'éveille, ne portant alors qu'un simple caleçon. Un instant plus tard, vous récupérez le Sheikah Plate, sorte de Gamepad servant d'inventaire et permettant d'afficher l'imposante carte. Deux coffres renferment des habits... que vous aurez le choix de porter, ou d'enlever à votre guise. Une volée de marches plus tard, voici Link à l'extérieur. La lumière brûle la rétine, le monde s'ouvre à vous. Le logo s'affiche délicatement alors que l'on découvre un paysage grandiose fait de montagnes brumeuses, de forêts verdoyantes, et de citadelles en ruines...
Un vieil homme vous attend en contre-bas, et s'ensuit une brève discussion au coin du feu. Les enjeux sont posés. Et quand il s'agira de révéler des tours et apprendre qu'une créature lugubre est en train de regagner ses forces, menaçant l'équilibre du monde, l'aventure n'aura fait que débuter.
A la question de savoir, comment s'inscrit cet épisode dans la timeline de la saga, Eiji Aonuma nous aura précisé que son t-shirt (qui arbore le logo Sheikah d'Ocarina of Time) pouvait être un intéressant indice... et qu'il nous laissait imaginer pourquoi Link se réveillait d'un sommeil de 100 ans.
L'appel du renouveau...
Ce Zelda porte en lui les graines de l'innovation. Avec cet épisode, Eiji Aonuma souhaitait réellement bouleverser les codes de la série, tout en retrouvant le plaisir et l'excitation de l'exploration initiale, comme à l'époque où nous avions découvert le tout premier Zelda sur NES...
Je voulais vraiment réaliser un nouveau Zelda, différent dans son approche, dans son esprit.
Parmi les nouveautés, on retrouvera par exemple deux petites jauges au bas droit de l'écran. L'une affiche le bruit émis par Link en se déplaçant, et peut faciliter l'infiltration, une autre de chaleur indique quand l'elfe doit se couvrir pour se réchauffer (les montagnes enneigées semblaient intimidantes), ou au contraire se dévêtir (les déserts déraisonnablement chauds).
Dans Skyward Sword, on pouvait plonger entre les mondes, mais les joueurs demandaient : "qu'y a-t-il entre ses univers ?". Alors on s'est dit qu'il fallait bâtir un monde plus gigantesque. On a aussi permis à Link de planer, ce qui rappelle Skyward et permet de progresser plus vite car les distances sont désormais énormes. Vous allez beaucoup courir, grimper, nager... et réussir à marier tout cela de manière fluide a pris beaucoup de temps.
Si les fondamentaux sont là, tout le reste a ainsi profondément évolué. L'aspect RPG s'étoffe dans des proportions jamais atteintes par la série. Link devra chasser, cuisiner, manger, se vêtir, se réchauffer, récupérer des équipements, des armes, les améliorer... Les inspirations (comme celles de Monster Hunter) sont multiples, mais paraissent raisonnablement bien digérées.
L'un des premiers chocs demeure la sensation de liberté éprouvée. Dès le début, il n'y a pas de chemin indiqué. Pour pouvoir progresser, Link peut sauter (il y a désormais un bouton de saut !), escalader n'importe quel mur ou arbre, planer, nager, ou encore abattre des arbres avec votre hache.
Une aventure en plein air
Avec Breath of the Wild, le sous-titre lui même est différent de ce qui se pratique habituellement dans la série. En effet, pour une fois, il ne reprend aucun élément lié à un personnage, ou à un objet-clef de l'aventure. De l'aveu même d'Aonuma, il aura requis plusieurs mois de réflexion. Ici, c'est Hyrule, ce monde tombé en ruines où la nature à repris ses droits qui constitue l'âme de l'aventure. Le "Monde" est le personnage principal, vivant, sauvage, diversifié, avec de multiples inspirations à l'animation japonaise, comme avec cette sensation de "gouache" pour dépeindre l'univers et le style graphique.
Au classique terme "Open World", Eiji Aonuma préfère d'ailleurs celui de "Open Air" pour qualifier ce Zelda. Une dénomination qui vient directement de la technique française de peinture dit "en plein air", où il s'agit de poser son chevalet dans la nature, de s'immerger dans l'univers que l'on dépeint, se poser pour en prendre le pouls. La musique aussi reflète cette inspiration différente. Comme il n'y a pas de chemin tracé, les mélodies doivent constamment s'adapter à vos actions de manière dynamique. La décision a alors été prise de laisser la part belle à quelques accords de piano qui apportent une douceur bucolique à l'ensemble.
Pour la première fois dans un Zelda 3D, on pourra ainsi retrouver l'esprit du premier Zelda, révolutionnaire à l'époque, où le plaisir réside dans la sensation de se perdre, de visiter le monde, limite en errant de-ci, de-là. La démo de l'E3 contient 4 sanctuaires, mais il faudra en compter une centaine au final. Ils contiendront de nombreux puzzles, dont la plupart pourront être résolus de diverses manières. D'ailleurs, si vous ne parvenez pas résoudre les énigmes, pas de souci, vous pourrez y retourner ultérieurement. A noter que des donjons plus classiques, avec des Boss parfois fort imposants seront aussi présents.
Le cycle de la vie
Dans Breath of the Wild, le cycle jour/nuit se déroule de la manière suivante : 1 heure sur Hyrule correspond à une minute dans notre vie. 24H en 24 minutes donc. Evidemment tout cela a des conséquences. Par exemple, la nuit, vos ennemis vont se coucher. Si vous êtes prudents, et ne faites pas de bruit en vous accroupissant, vous pourrez ainsi les surprendre et vous en débarrasser en un seul coup.
Breath of the Wild mise aussi sur des réactions physiques parfois spectaculaires. Vous pourrez ainsi mettre le feu à la prairie, et voir les flammes ravager les lieux au bon vouloir des bourrasques de vent. Bien sûr, on peut aussi toujours couper de l'herbe, mais il y en a tant, qu'il ne faut pas vous attendre à en voir surgir des tonnes de ruppies, la fameuse monnaie Zeldienne.
Dans sa quête, Link pourra aussi rencontrer des adversaires particulièrement imposants. Et je ne parle pas de Boss. J'ai ainsi croisé un golem, au moins 3 fois plus grand que notre héros, sur lequel il fallait grimper à la manière d'un Legolas... ou de Shadow of the Colossus.
Attention cependant, car vous pourrez désormais briser vos armes les plus fragiles. Mais rassurez-vous, vous pourrez en récupérer de nombreuses en vous servant de rondins de bois, ou d'autres éléments à votre portée. A l'image d'un RPG traditionnel, vous trouverez aussi des armes avec des capacités augmentées et... il y aurait encore tant à décrire !
Un allier inattendu
Vous vous souvenez de D-Dog dans Metal Gear Solid V ? Eh bien sachez que Link pourra être escorté par... Link Loup de Twilight Princess ! Comment ? Eh bien en utilisant son amiibo. D'ailleurs si vous avez fini le donjon inédit de TP HD, Link Loup arrivera avec l'ensemble de ses coeurs. Sinon, il ne disposera que de 3 coeurs. Et quand ils seront épuisés, il disparaîtra... n'étant alors pas disponible avant 24h. A noter que pendant cette présentation exclusive, Nintendo nous a dévoilé 3 nouveaux amiibo.
- Link archer
- Link avec sa capuche sur Epona
- Le Gardien avec des tentacules ajoutables
En route vers la Nintendo NX !
Forcément, avec un titre aussi ambitieux, la Wii U souffre quelque peu, technologiquement parlant. Si la vue porte diaboliquement loin, on notera un peu d'aliasing, et un frame rate pas toujours très stable. Rien ne dramatique très honnêtement, mais c'est certain : nous avons hâte de voir ce que nous réservera la version Nintendo NX. D'autant qu'elle sortira simultanément avec cette mouture Wii U. Toute considération technique mise à part, la direction artistique se révèle quant à elle brillante. Élégante, rafraîchissante, en somme habile synthèse d'un Twilight Princess et Skyward Sword.
Pour conclure, on s'étonnera en revanche de constater que le Gamepad n'est pas tant sollicité qu'on aurait pu l'imaginer, pour ses fonctionnalités exclusives en tout cas. Pourquoi ? Tout simplement car le jeu sera aussi directement jouable avec le Pro Controller. J'ai évidemment posé la question concernant la version NX, mais ce n'était visiblement pas encore le moment. Hormis la confirmation qu'il s'agira de la même aventure, il faudra faire preuve d'encore un peu de patience...
Face au chaos et à la violence qui frappe la plupart des jeux présentés à l'E3, The Legend of Zelda : Breath of the Wild fait figure d'oasis, d'apaisante et fascinante respiration. A l'heure du premier bilan de ce reveal de gameplay, je dois confesser avoir vécu un moment assez unique. Nintendo prend ici des risques, ose renouveler la série, et impose déjà cet épisode comme le projet le plus ambitieux de la firme de Kyoto depuis bien longtemps. A-t-il les épaules et le génie pour détrôner le mythique Ocarina of Time de la mémoire collective des joueurs ? Seul l'avenir nous le dira... mais il prouve déjà qu'en parallèle de l'arrivée de la NX, 2017 pourrait bien être l'année Nintendo !
PS : pour en apprendre et voir plus, je vous donne RDV dans la soiére
pour mes impressions en vidéo.