Alors que Beyond : Two Souls est attendu pour la fin de l'année sur PS3, David Cage a profité du DICE 2013 pour proposer 9 points-clefs permettant à ses yeux, au jeu vidéo de grandir. Baptisé "Le Syndrome de Peter Pan : l'industrie qui refusait de grandir", voici les éléments exposés lors de sa conférence.
L'homme divise. Forcément, ses propos détonnent dans une industrie où finalement rares sont ceux à réellement partager leurs points de vue... au-delà du simple "jeu". Ces propos sont aussi parfois pris comme une négation de ce que d'autres développeurs font. Ou tentent de faire. Dépassionnons tout cela.
A y regarder de plus près, et si David Cage n'essayait pas sciemment d'agiter les choses, en remettant en cause de manière parfois délicieusement provocante certains acquis pour espérer générer des réactions et collectivement élever le débat ? Au-delà des stériles luttes d'égo ou des queurelles de systèmes et de gameplay.
L'homme l'a ainsi exprimé à de nombreuses reprises, il aime ce média, mais le trouve encore diablement infantile. Une industrie du jeu vidéo souvent trop engoncée dans ses habitudes et ses certitudes.
Pour le créateur de Heavy Rain, notre média reste à l'état adolescent. Il a besoin de s'affranchir de certaines idées préconçues l'empêchant de franchir un cap. L'empêchant de s'épanouir totalement... comme le cinéma a pu le faire. Kotaku a assisté à la présentation. Voici une synthèse des éléments abordés.
1. Créer des jeux pour tous : il est temps d'inventer des expériences interactives pour les adultes.
2. Changer nos paradigmes.
En tant qu'industrie, nous devons décider que la violence et la plate-forme ne sont pas là seule issue. Nous sommes dans une industrie où, si le personnage principal n'a pas de revolver, les designers ne savent pas quoi faire.
3. L'importance du sens : qu'avons-nous à dire ?
David Cage invite les créateurs à oser aborder dans leurs jeux des sujets de société, des sujets qui touchent les joueurs directement dans leurs vies. Parler de politique, traiter le sujet de l'homosexualité. Utiliser le média jeu vidéo pour faire réfléchir et laisser une emprunte sur eux.
4. "Devenir accessible : focalisons nous sur l'esprit, pas sur les pouces !"
Pour le fondateur de Quantic Dream, il est important de donner vie à des jeux qui ne se concentreraient pas uniquement sur la dextérité des joueurs, mais davantage sur leurs décisions. Dernier exemple en date de cette démarche, le "multi-récompensé" The Walking Dead. Preuve qu'oser moins de gameplay et plus de sens peut aussi intéresser les joueurs.
5. Apporter d'autres talents.
6. Etablir de nouvelles relations avec Hollywood.
De plus en plus de titres utilisent de véritables acteurs. Mais pour David Cage il est temps de franchir un nouveau cap. De faire se rencontrer des spécialistes du cinéma, ces façonneurs d'histoires linéaires, et des game designers pour créer une nouvelle manière de raconter des histoires.
7. Changer nos relations avec la censure.
C'est un fait, la censure ne traite pas de la même manière le cinéma et le jeu vidéo. Pour David Cage, le fait que le média soit interactif ne le rend pas plus dangereux. Pour lui, le jeu vidéo souffre de la même censure que celle qui frappait Hollywood dans les années 50. Et de souligner dans le même temps combien l'extrême violence de certains titres dévoilés à l'E3 2012 l'avait choqué.
Parfois nous allons trop loin et nous comportons comme des adolescents stupides. Nous devrions arrêter cela.
8. Le rôle de la presse, des testeurs aux critiques.
Pour David Cage, il existe deux types de presse. Celle qui essaye d'analyser l'industrie, de la comprendre. Et celle qui se contente de donner des 5/10, sanctionnant un bug ou un problème de caméra. "Je ne pense pas que ce soit de la presse. Où sont les analyses ?" Et d'appeler à la naissance d'un équivalent des Cahiers du Cinéma...
9. De l'importance des joueurs.
David Cage le souligne, acheter un jeu est une sorte de vote. Un acte militant.
Acheter des titres médiocres, et vous en aurez encore plus. Acheter des jeux excitants et ambitieux, et vous en aurez plus.
Bilan. Le jeu vidéo est désormais une industrie. Les comportements des joueurs sont scrutés. Analysés. Et alors que la crise perdure, les achats sont forcément déterminants. Au-delà de ce qui se dit sur les forums de passionnés, ce sont les volumes de ventes qui font ou défont l'avenir du jeu vidéo.
N'oublions pas qu'il n'y a jamais une seule voie. Et que c'est aussi en parvenant à discuter et confronter ses différentes opinions que le jeu vidéo pourra mûrir, dans la diversité. Voici la vision de David Cage. Aux autres créateurs de participer maintenant au débat... en espérant qu'ils le souhaitent.