Rares sont les joueurs de plus de vingt ans, à ne pas faire une place de choix à The Legend of Zelda : Ocarina of Time, dans leur panthéon vidéoludique personnel. Encensé par la critique à sa sortie, érigé en jeu culte par tous depuis, le premier Zelda de la Nintendo 64, peut-être le meilleur de la saga, revient aujourd'hui sur Nintendo 3DS. Mais si beaucoup gardent de cette aventure épique un souvenir impérissable, ce jeu sorti en 1998 peut-il encore faire office de référence en 2011 ?
Ce test est une republication de la critique originellement parue le 2 Juin dernier.
L'histoire d'Ocarina of Time, vous la connaissez déjà. Soit parce que vous avez vécu cette épopée il y a quelques années, soit parce que vous avez déjà joué à un Zelda, une saga qui, il faut l'avouer, à quelques rares exceptions, propose toujours le même schéma narratif, fait de temples de l'eau, du feu, de la forêt, etc., ainsi que de la quête de la mythique Triforce. Cette fois, c'est grâce à son désormais célèbre ocarina magique que Link, le héros du temps, devra passer d'une époque à l'autre, afin de triompher des puissances maléfiques.
Tronc Legacy
Petit garçon blond, sans fée, contrairement à tous les enfants du village Kokiri où il demeure, notre jeune Hylien à tunique verte est promis à un destin national comme dirait l'autre. C'est le vénérable Arbre Mojo, le gardien de la Forêt, qui en confiant le garçon aux bons soins de la petite fée Navi, lui révélera sa véritable dimension : il est le héros providentiel, l'élu des dieux, celui qui doit sauver Hyrule, aidé par la princesse Zelda et bien d'autres alliés, du maléfique Ganondorf. Ce cavalier noir, venu de l'Ouest, chef de la tribu des Gerudos, veut s'emparer de la sainte Triforce, cet artefact divin capable d'exaucer le voeu de celui qui la possède... Et le père Ganon, ce qui l'intéresse, c'est d'avoir une sombre forteresse avec des pics, du papier peint noir aux murs et de ne plus croiser que des goules en allant chercher son pain... De la réussite de votre quête, dépend donc le sort d'Hyrule et de ses habitants...
De la restauration d'une oeuvre d'art...
Vous le sentez bien le souffle épique là ? Eh bien figurez-vous que celui-ci, en treize ans, n'a aucunement perdu de sa puissance dans Ocarina of Time 3D. Et même, ne tournons pas autour du pot cent sept ans (dans Zelda, on les casse les pots !), Ocarina of Time sur 3DS sublime encore l'expérience originale. Tellement de choses étaient déjà présentes en 1998 me direz-vous : les musiques épiques, la profondeur de jeu, un gameplay innovant, des Boss mémorables, plein de quêtes annexes, des donjons tortueux, des personnages charismatiques et attachants, et point d'orgue de l'époque, la sensation que procurait la traversée de la plaine d'Hyrule sur le dos d'Épona... Que ce Zelda était en avance sur son temps ! L'ambition des équipes de Nintendo de donner au monde d'Hyrule toute sa dimension 3D, était à l'époque un gigantesque défi, qu'ils ont relevé avec le brio que l'on sait. Alors que pourrait-on vouloir rajouter à un chef-d'oeuvre, quand celui-ci est déjà tellement abouti ?
Eh bien comme pour un tableau qu'on restaure afin de corriger les quelques dégâts infligés par le temps, Nintendo s'est contenté de rehausser graphiquement son titre, de le faire profiter de l'ergonomie de sa 3DS et de permettre aux joueurs une fois l'aventure originale, de découvrir la Master Quest, l'histoire principale aux donjons remaniées et surtout plus difficiles. Ocarina of Time 3D n'est pas un remake, ce n'est pas une refonte en profondeur qui a été effectuée avec ce titre, mais bien quelques détails qui ont été revus avec subtilité afin que cette aventure épique se présente sous son meilleur jour en 2011. Une opération cruciale car comme on le sait le diable se cache toujours dans les détails, et qui nous permet de l'affirmer aujourd'hui sans sourciller : beaucoup de titres qui sortent actuellement ne tiennent même pas la comparaison en terme d'intérêt, face à ce jeu de treize ans d'âge, subtilement rafraîchi aujourd'hui.
Nouveau visage pour une nouvelle vie
Alors justement, déterminons sur quels points précis du jeu, les équipes en charge de ce projet ont injecté quelques doses de botox. Globalement, le titre est bien plus beau que sur N64, les textures sont plus détaillées, plus colorées, l'ensemble a vraiment été réhaussé. Les modèles de personnages sont les mêmes qu'en 1998 mais ils ont tous subi un sacré lifting. Pas de polygones disgracieux ou " d'effet brouillard", typique de la 64 bits de Nintendo. Rassurez-vous, le jeu est joli, sans évidemment impressionner techniquement comme il avait pu le faire à l'époque. Non, ce qui impressionne, c'est la nouvelle bouille de Link et des principaux protagonistes de l'aventure. Un soin tout particulier a été apporté au visage du héros, adulte ou enfant, à ses animations et à son apparence en général. En fait, ce Link sur 3DS ressemble quasiment trait pour trait à celui que l'on trouvait, encore une fois, gamin ou jeune adulte, dans Super Smash Bros. Melee, sur GameCube. Quant à Zelda, Malon, Saria, toutes ces jeunes filles possèdent de petites trombines bien plus avenantes, expressives et mignonnes que sur N64. Quant à Ganondorf, il a toujours une sale tronche et un gros nez, mais moins polygoné.
Les atouts de la 3DS
Autres nouveautés de cette version 3DS : l'affichage 3D, la gyroscopie et l'interface tactile, bien entendu. Gardez en tête ces innovations dans l'ordre dans lequel je vous les ai données, en considérant que celui-ci est croissant en terme d'intérêt. La 3D donc, si elle rend le jeu un peu plus coloré, un peu plus joli et offre quelques effets de profondeur assez sympathiques, rend parfois l'action un peu illisible (votre position doit être parfaite pour éviter un dédoublement d'image) et surtout, génère un scintillement plutôt désagréable. Ce n'est pas vraiment inhérent à Zelda mais bien à cette technologie, à mon sens. Cependant, sur un titre comme nintendogs+cats où l'on joue exclusivement avec la 3D plein pot, dans OoT, c'est majoritairement sans cet artifice que l'on progresse, pour plus de confort. Surtout que la 3D et le gyroscope ne font pas vraiment bon ménage... Voici un réflexe qui deviendra assez vite naturel : bouger votre console pour observer, pour tirer à l'arc, pour pointer votre grappin. Et puis, si ça vous fatigue, le stick est toujours là. Enfin, l'écran tactile est véritablement le gros plus en terme d'ergonomie de cette version 3DS. Plus besoin de manipulations fastidieuses dans les menus, hop, en deux touches, vous équipez votre masse, vos bottes de plomb, votre tunique Zora, votre string panthère. Si vous avez joué à la version DS de Chrono Trigger ou encore à Okamiden, vous avez déjà une idée précise de ce que le tactile peut apporter en terme de confort de jeu. Du coup, jouer de l'ocarina en appuyant sur les touches affichés à l'écran, c'est méga cool et ça se fait les doigts dans le nez si j'ose dire...
"Héros du temps" n'est décidément pas un titre vain...
Donc, le jeu est la tuerie qu'il était déjà en 98 en terme de profondeur de jeu, d'aventure, d'univers, les génies mentaux de chez Big N ont eu l'idée de mettre un coup de polish sur ce qui pouvait paraître défraîchi et l'interface tactile rend le tout encore plus confortable. Constat idyllique ? Ben oui, mais comme je suis le genre de type qui passe trois heures à choisir l'exemplaire qui n'est pas corné quand il achète un magazine en kiosque, j'ai relevé quelques micro lacunes liées à l'âge du titre. Il s'agit du maniement d'Épona et de la sensation de vie que l'on ressent dans ce monde d'Hyrule. Disons que depuis notre première traversée des plaines menant au château de la princesse, un certain John Marston nous en a fait faire des kilomètres en canasson et la belle jument de Link parait du coup un poil rigide dans son maniement, et cette plaine d'Hyrule un peu vide. Ce qui nous ramène à la sensation de vie. C'est vrai que l'univers de ce Zelda n'est pas aussi foisonnant que certains plus récents, chaque PNJ ne semble pas vaquer à ses occupations comme dans certaines productions actuelles. Mais bon, comme de toute façon ces productions lui doivent tout à OoT, comme par exemple, le cycle jour / nuit , et qu'avec le nombre de quêtes annexes (la chasse aux Skulltulas, aux esprits, le commerce des masques, la recherche des grandes fées travelos...), il y a peu de chances que vous vous sentiez seul, et ce n'est donc pas moi qui tiendrai le couteau pour tuer le père ! Certains regretteront peut-être le fait que la Master Quest ne soit pas immédiatement disponible, auquel cas on leur répondra que replonger dans cette épopée fantastique, treize années après, est d'une manière nostalgique, assez formidable.
Prenez donc toute la mesure du chef-d'oeuvre qu'est The Legend of Zelda : Ocarina of Time, en vous y replongeant treize ans après sur 3DS et en constatant qu'il aura juste suffi de quelques retouches graphiques et du confort tactile proposé par la 3DS, pour que celui-ci s'impose de nouveau comme une référence absolue. Si vous avez déjà joué au jeu sur N64, vous retrouverez toute la majesté du titre qui vous aura marqué à l'époque, avec des graphismes beaucoup plus fins et une interface plus confortable. Quant aux petits nouveaux, si vous ne vous prendrez sûrement pas la claque de vos aînés, vous découvrirez tout simplement l'un des tout meilleurs jeux de ces quinze dernières années, toujours fringuant, treize ans après sa sortie originale. Indispensable.