On ne va pas faire comme si on était tous familiers avec l’univers de The First Berserker Khazan tant il appartient à un monde peu familier : Dungeon Fighter Online. Il s’agit pourtant d’un MMORPG coréen vieux de plus de 19 ans et qui a vu passer quelques 850 millions de joueurs au fil des années. Malgré ça, le grand public ne semble pas vraiment connaître le travail de Neople, le studio qui a dédié son existence à sa licence, en tout cas chez nous autres européens. Pourtant, Dungeon Fighter Online tourne toujours à plein régime et a eu le droit à quelques spin-offs. Rien de comparable à The First Berserker Khazan cela dit, puisqu’il dépasse de loin tout ce que le studio a fait et surpasse clairement son statut de simple jeu bonus conçu pour les fans.
Ce n’est pas toujours facile d'accueillir des nouveaux joueurs dans une licence extrêmement bien installée, même si cette dernière est considérée comme étant de niche. Très souvent, les studios passent même par la case accessibilité pour charmer le grand public, mais pas Neople. La boite coréenne préfère faire les choses à l’envers et propose un titre exigeant, vendu volontairement comme étant un jeu d’action hardcore. Un pari risqué, puisque beaucoup n’oseront peut-être pas tenter l’aventure et ça serait vraiment dommage. Bouder The First Berserker Khazan c’est passer à côté d’un solide jeu d’action exigeant, gratifiant, beau et surtout généreux.
Une histoire de vengeance sanglante
Les fans de Dungeon Fighter Online connaissent déjà notre héros, anti-héros, ou antagoniste carrément. Ça dépend des points de vue. Khazan était un général hautement respecté avant de devenir celui que l’on nommera par la suite le Premier Berserker, ou encore, le Dieu de la Destruction. Accompagné d’Ozma, son acolyte de toujours, il a pourtant jadis offert la liberté et la quasi prospérité à son peuple en décimant un dragon titanesque prêt à détruire le monde. Rien que ça ! Malheureusement, le duo sera séparé et trahi par le seigneur et ses proches. Le général Khazan sera déchu de son rang, condamné à l’exil, les tendons des bras tranchés pour lui passer l’envie de se battre. C’est donc condamné à survivre aux portes de la mort, dans les monts glacés, que l’on retrouvera celui que l’on incarnera pendant plusieurs dizaines d’heures.
Alors enfermé dans une cage à destination de ses geôles, Khazan est sauvé par une entité, le Spectrelame, qui compte prendre possession de son corps pour suivre ses propres intérêts. En soignant ses blessures, l’entité démoniaque était loin d’imaginer que la haine et la vengeance pousseraient Khazan à prendre le dessus pour assouvir ses propres desseins. C’est ici que tout commence pour nous.
Une quête de vengeance qui se fera dans le sang, des hectolitres de sang. Les fans de DFO connaissent déjà cette histoire, contée à quelques reprises durant différents évènements en ligne, mais en ignoraient tous les détails. The First Berserker Khazan devrait donc remplir ce vide, en apportant aussi quelques éléments nouveaux et des réponses à certaines questions. Pour les néophytes, le jeu sera un voyage sanglant et impitoyable durant lequel ils pourront découvrir une galerie de personnages charismatiques et un univers plus riche qu’il n’y paraît au premier abord. D’ailleurs, Neople a eu l'excellente idée de nous détailler tout ça.

Un univers riche à découvrir
Toutes les infos concernant les personnages, les créatures, le monde et même le gameplay sont répertoriées dans les menus. Ils sont en prime facilement accessibles, clairs et lisibles, et même imagés. Concernant le bestiaire, on aura également le loisir de faire apparaître les monstres et boss rencontrés dans une aire d'entraînement afin de les affronter ou de simplement les reluquer pour en apprécier le design. Cet espace personnalisable est une aubaine pour un jeu exigeant comme celui-ci. On peut venir expérimenter des combos ou encore trouver les bonnes méthodes pour combattre un type d’adversaire spécifique.
Celles et ceux qui ne jurent que par le lore et son histoire pourront jeter un œil à un grand tableau recensant l’intégralité des personnages forts rencontrés, et leurs relations. Ce dernier se met à jour au fil de l’avancée, nous permettant de voir l’évolution de nos relations en fonction des évènements. Là encore, c’est une excellente idée, très utile pour se rafraîchir la mémoire au besoin et faciliter la compréhension de cet univers déjà bien installé et surtout, tentaculaire. Les non-initiés à Dungeon Fighter Online, et il seront nombreux, ne seront donc pas dépaysé tandis que les fans, même les plus hardcore, trouveront un vrai intérêt à tout ça. Un numéro d'équilibriste parfaitement réussi de la part de Neople qui accueille les nouveaux venus tout en donnant de quoi satisfaire les amoureux de la licence. Personne n’est mis de côté et en termes de gameplay, tout le monde sera mis sur un pied d'égalité.

The First Berserker Khazan est plus qu'un simple souls-like
The First Berserker Khazan n’a strictement rien à voir avec Dungeon Fighter Online. On est ici face à un action-RPG pur sang, ouvertement volontairement hardcore. Oui, c’est un souls-like. On retrouve donc le système de mort habituel qui nous obligera à retourner là où l’on a trépassé pour récupérer notre expérience, mais également le même fonctionnement de feu de camp. Ce ne sont pas des feux à proprement parler, mais des Lames Nexus qui serviront de checkpoints pour recharger les batteries, à condition de faire apparaître l’intégralité des ennemis. On pourra aussi y améliorer ses statistiques moyennant une quantité de Lacrima, la ressource maison qui fait office d’expérience. Pour ce qui est de la gestion d'équipement, ou des compétences, tout se fait à la volée, mais sans que le jeu ne se mette en pause, ce serait trop facile sinon.
La recette reprend donc les ingrédients principaux des jeux de FromSoftware, mais c’est à peu de choses près tout puisque The First Berserker Khazan va se différencier de ses modèles sur le reste. Le jeu est déjà beaucoup plus tourné vers l’action que ne peut l’être un Dark Souls ou un Bloodborne par exemple. Il sera ici question de combos, d’actions précises à placer au bon moment, de parades et d’esquives au millimètre ainsi que de contre-attaques avec un timing parfait. Si les fenêtres d’opportunités sont relativement flexibles si on s’amuse à le comparer à la concurrence, il ne faut pas croire que ce sera une partie de plaisir. Les adversaires nous harcèlent littéralement de coups et eux aussi ont des combos qu’il faudra obligatoirement apprendre à la dure pour pouvoir les contrer. Le jeu est extrêmement nerveux et les animations parfaitement lisibles que ce soit de la part de notre personnage ou des ennemis. Les patterns sont donc clairs la plupart du temps et la courbe d’apprentissage se fera instantanément ressentir. On voit, on subit, on apprend et on prend le dessus.
Pour vétérans habitués aux souls, The First Berserker Khazan peut désarçonner de par son approche résolument brutale. Oui, il faudra bien entendu esquiver et parer, mais lorsqu’on a la possibilité de frapper, il ne faut plus lâcher sa proie en veillant toujours à avoir assez de ressources (endurance et points de combativité) pour mener ses assauts inlassablement. C’est ici que le jeu se démarque davantage de la concurrence et s’avère être bien plus grisant. Si les ennemis sont capables de ne pas nous lâcher pendant plusieurs secondes, comme dans n'importe quel souls, on est cette fois nous aussi en mesure de lui infliger la même chose. Certains combos peuvent nous permettre de frapper notre cible pendant un long moment en enchaînant les attaques et compétences variées dans un déluge d’effets parfois impressionnants. C’est extrêmement jubilatoire et très graphique. Les sensations sont excellentes et font corps avec notre héros, ce personnage violent débordant de rage. Il est l’incarnation même du berserker originel, qu’il porte des Lames Duales, un Espadon géant ou une Lance, peu importe. Si l’on pourra peut-être pester sur le manque de quantité de l’armement, le jeu compense largement ce manque par des arbres de compétence généreux pour chacune des armes, offrant plusieurs approches possibles à chaque fois. Il existe plusieurs façons de les appréhender, et donc de varier son gameplay, même s'il repose forcément sur trois axes : la parade, l’esquive et la contre-attaque.
Ce qui est génial, c’est qu’en plus de déverrouiller des points de compétence de manière parfaitement naturelle en jouant, il est possible de les distribuer comme bon nous semble et de changer son build à la volée sans aucun coût. L’expérimentation est donc au cœur de l’expérience et l’aire d'entraînement prend alors tout son sens. Changer de capacités et de méthode peut clairement nous permettre d’abattre certains boss autrement compliqués à affronter, car bourrer comme un âne les ennemis les plus coriaces, comme on peut le faire dans Elden Ring avec certaines armes ou magies par exemple, est ici impossible.

D'excellents boss, un bestiaire varié et un système de combat intense
Les catégories d’ennemis sont nettement visibles dans The First Berserker Khazan. On retrouve le menu fretin, souvent en nombre et que l’on peut décimer à tour de bras, puis les ennemis un peu plus retors et enfin les gros monstres redoutables. Au-dessus, on trouvera les adversaires Elite, faisant office de mid-boss, les seuls qui ne réapparaîtront pas lorsque vous vous reposerez à une Lame Nexus. Et puis il y a les boss, nombreux, véritablement dangereux et qui sont une franche réussite tant la plupart des affrontements profitent de mises en scène parfois impressionnante. Les combats sont intenses et montent en gamme au fur et à mesure que l’on avance dans le jeu et en prime il existe toujours une touche signature qui rend chaque combat unique. Un orage qui se lève et plonge l’arène dans le noir ne nous laissant que les flashs des éclairs pour apercevoir les attaques de notre adversaire ou encore un boss capable de condamner une partie de la zone de combats…
En plus d'être difficiles et d’infliger de lourds dégâts, les boss nous obligent à jouer de manière stratégique et surtout à nous adapter à tout un tas d’aléas. Habituellement, on nous demande d’éviter les coups et de gérer notre endurance, mais ici, il se passe toujours quelque chose de plus. Des attaques impossibles à parer qu’il faut absolument éviter, l’environnement qui nous met des bâtons dans les roues ou encore des modifications de l'arène… Les affrontements de boss sont épiques, viscéraux et intenses au possible. Et d’ailleurs, c’est sans compter la bande-son absolument folle qui les accompagne. The First Berserker Khazan propose des morceaux épiques, parfois de rock ou métal qui collent parfaitement à l’univers et aux séquences qu’ils accompagnent. On en redemande clairement.
Tout mis bout à bout fait que le sentiment d’accomplissement une fois le monstre vaincu est décuplé. En revanche, il faudra faire avec une difficulté quelque peu inégale par moments. Au sein d’un même niveau, il ne sera pas si rare de se casser les dents à plusieurs reprises sur un monstre en particulier, alors que le reste passera crème. C’est un peu dommage puisque ça risque d’en frustrer certains, alors qu’au final, le jeu n’est pas punitif pour un sou et surtout, terriblement grisant à prendre en main. On sue sang et eau tant les combats sont parfois violents. Marié au gameplay extrêmement nerveux et brutal, c’est un véritable régal.

Une direction artistique au top, mais trop triste
C’est d’autant plus vrai que The First Berserker Khazan ne lésine pas sur les moyens pour nous en mettre plein la vue. Sa direction artistique est un délice pour les yeux. Elle est quelque part entre le cell shading et un rendu très proche des animes que l’on voit se développer de plus en plus. Ça fonctionne en tout cas à merveille ici. L’univers de Khazan est sale, sombre et anxiogène, ce que la direction artistique transmet bien, même un peu trop parfois. On peut reprocher aux couleurs d’être trop grises et ternes et comme étouffées par un effet de grain trop prononcé. L'ambiance est sombre et menaçante, mais aussi particulièrement triste et parfois peu engageante. Il n’en reste pas moins que ça reste cohérent avec tout le reste et donc parfaitement dans le thème. Les personnages et les monstres profitent eux aussi d’un character design très réussi et d’une modélisation au top. Notre héros, Khazan, est très charismatique, bien qu’il soit peu bavard, et il porte fièrement des armes et armures très classes qui lui donnent beaucoup de caractère.
Un level design et une structure très (trop ?) classiques
La vengeance de notre ancien général le mènera aux quatre coins du royaume. On verra quand même pas mal de pays mine de rien, des monts glacés aux villes hantées jusqu’aux châteaux et autres grottes lugubres. Les environnements sont réussis même si le level design reste quelque peu classique, parfois même un poil téléphoné. The First Berserker Khazan s’appuie beaucoup sur ce qui a été fait du côté de Team Ninja avec Nioh ou encore Wo Long Fallen Dynasty. On ne visitera donc pas un vaste monde ouvert, mais plutôt des niveaux plus ou moins vastes. Quelques chemins de traverse saupoudrent le tout, mais on reste vraiment sur quelque chose de relativement linéaire. Ce n’est pas un mal en soi puisque le jeu contrôle son rythme et il le fait bien. Le level design est donc classique, mais maîtrisé, en plus de laisser la part belle aux traquenards vicelards. Pièges mortels et embuscades sont monnaie courante. Il faudra parfois apprendre qu’un trou mène à une mort certaine après être tombé dedans au moins une fois. Certains y verront là un côté punitif, moi je préfère y voir une mise en danger constante qui nous pousse à être sur nos gardes.
Comme Nioh, plusieurs missions annexes se débloquent au fil de l’avancée, nous demandant parfois de refaire un niveau dans de nouvelles circonstances, ou d’affronter de nouvelles versions de boss plus coriaces. Il y a pile ce qu’il faut pour assurer une excellente durée de vie, sans franchir la ligne du remplissage à outrance. En prime, les récompenses valent toujours le coup. Outre des objets utiles à notre développement, on trouvera des recettes uniques à échanger à certains PNJ pour nous permettre d’avoir de l’équipement unique par exemple. Pour les complétistes, il sera même possible de partir en chasse aux collectibles. Là encore, le dosage est excellent : il y en a généralement 4 ou 5 par niveaux maximum, ce qui nous poussera à fouiner sans devenir redondant ou fatigant. Et là encore, il y aura une récompense à la clé : de l’équipement, ou des bonus de statistiques.
The First Berserker Khazan récompense de toute façon presque tout ce que l’on fait, de l’exploration à l'entraînement, en passant par la chasse aux collectibles et plus globalement à la quête du 100%. Notre héros s’en sort toujours gagnant et devient de plus en plus puissant à mesure que l’on maîtrise le gameplay. Le sentiment de montée en puissance est donc exponentiel, même si la courbe d’évolution n’est pas aussi raide que ça finalement. Le jeu nous berne, mais le fait bien. Il nous tend toujours une carotte pour nous pousser à aller plus loin, nous récompense et nous offre de nouveaux objectifs. C’est bien fichu, bien pensé, même si l’abondance de stats pourra en décourager certains de prime abord.
