Les ventes de la 3DS connaissent quelques fuites ? Nintendo peut compter sur son plombier pour resserrer les vis et propulser sa console sur la voie royale à l'approche de ses premières fêtes de fin d'année. Jouant à merveille la carte du relief et ramenant un des déguisements les plus populaires de la saga sur le devant de la scène, ce nouveau Super Mario portable a suscité une attente particulière. Surtout chez les fans, les yeux encore plein d'étoiles depuis le très relevé Super Mario Galaxy 2. Reste à savoir si ce 3D Land est vraiment du même tonneau ou s'il compte séduire de nouveaux joueurs.
Vous n'en auriez pas ras la casquette, vous, de devoir toujours venir en aide à la même fille pendant plus de 25 ans, sans être assuré de la pécho ? Personnellement, je ne comprends pas cette forme de romantisme. Mais Mario ne semble pas s'en lasser. Soit. Aidons-le une fois de plus à secourir cette cruche de Peach, non sans avoir préalablement botté le cul de l'infâme Bowser et de ses rejetons. Après tout, chaque aventure du moustachu fait montre d'excellence dans le domaine de la plate-forme. Et permet de renouer avec un univers aussi familier en termes d'environnements, de bestiaire et de mécaniques que cloqué de petites nouveautés. Donc, pas de problème, vous allez casser des briques, ramasser des pièces, passer dans des tuyaux, découvrir des costumes divers et variés, écrabouiller des Goombas, effectuer des attaques rodéo, bondir sur des dalles mouvantes ou des murs tout en esquivant un piège vicieux et rattraper des sauts désespérés grâce à une maniabilité parfaite. La recette du succès est là, avec ses petites mélodies entêtantes, et elle se voit servie par un game design toujours aussi efficace. Attention toutefois : certains risquent de ne pas vibrer immédiatement.
Challenge Diesel
Si vous faites partie de ceux qui espéraient retrouver les préceptes de difficulté édictés par Super Mario Galaxy 2, vous risquez de déchanter. Car ce Super Mario 3D Land va d'abord vous paraître particulièrement facile. Loin de moi l'idée de vous spoiler mais ce ne sont pas les huit mondes proposés en premier lieu qui vont assouvir votre soif de défis. En ce qui me concerne, adepte de la première heure, je n'ai connu aucune difficulté à atteindre Bowser et à le renvoyer ad patres. Cela m'a pris cinq heures. J'ai trouvé la quasi totalité des pièces étoilées du premier coup et mon compteur de vies affichait le nombre 87. Bref, j'ai été déboussolé. Jusqu'à ce que les mondes secrets apparaissent. Alors j'ai commencé à en baver et à insulter copieusement ma console comme j'aime le faire pour occulter mon incompétence quand on me met face à des niveaux timés ou bourrés de missiles venant de toutes parts. C'est comme ça, c'est la vie, on n'y peut rien : pour un joueur hardcore, le vrai plaisir, celui du challenge, existe, mais il intervient un peu plus tard. Nintendo a décidé de proposer un titre à deux vitesses, dans l'optique de toucher un public plus vaste. Preuve en est de la représentation. Un Mario en 3D, oui, mais avec peu d'exploration et une caméra fixe pour éviter de perdre les novices davantage rassurés par une 2D moins complexe. Et n'oublions pas les nombreuses aides : une invincibilité permanente après cinq décès et un bloc P-Wing (issu de Super Mario Bros. 3) pour vous propulser directement à la fin du stage après dix vous sont proposées. Ces coups de pouce, une hérésie pour les puristes, ne sont pas forcément un mal pour tout le monde. Et nul doute que triompher sans gloire, en oubliant des pièces nécessaires à la progression, fera gamberger les plus fainéants jusqu'à les motiver à retourner au charbon. Et que le Streetpass amusera ceux qui veulent mesurer leur valeur face à des joueurs croisés.
Partition magique
Bon, maintenant, vous allez vous imaginer que Nintendo a pondu un Mario moyen. Ah, je vois déjà les gros titres, l'action boursière chuter... Eh bah en fait, pas du tout. Maintenant que j'ai crevé l'abcès, mettez de côté ces histoires de difficulté tardive et de complaisance vis-à-vis des noobs. Vous pouvez me croire : la magie Mario ne nous a absolument pas déserté. La construction des niveaux, assez courts pour coller à une utilisation nomade peu intensive, demeure excellente. Bien qu'étriqué, parfois en ligne droite, le level design laisse parler des années d'expertise dans le genre. De petites idées simples se laissent apprivoiser avec le sourire. Pêle-mêle, je citerais : les plateformes bleues et rouges qui s'activent alternativement dès que vous sautez, celles sur rails qui bougent vers le côté sur lequel vous vous trouvez, le Mario maudit qui reproduit votre parcours, les blocs qui bondissent comme vous, les plantes vomissant de l'encre sur l'écran, les pièces cachées dans un renfoncement... Il y a pas mal de vieux, un peu de neuf et, même si l'on ne crie pas "wahou", cela constitue un ensemble très agréable. D'aucuns lui reprocheront de réciter une leçon maintes et maintes fois ressassée, sans exploiter les nouveautés à fond ou ajouter les ingrédients pour mettre le feu. Reste que le récital s'avère sans fausse note, totalement maîtrisé, procurant un bonheur à chaque instant via moult secrets et détails à destination des fans.
Tanuki, mon frère
Si l'on aime Mario, c'est aussi à cause de son petit penchant pour le transformisme, avec tous les pouvoirs qui accompagnent sa garde-robe. A côté des classiques champignons et étoiles d'invincibilité, on note le retour d'un "power up" ô combien mythique. Celui du Tanuki (le raton-laveur) apparu dans Super Mario Bros. 3. Ne vous attendez pas à prendre votre élan et vous envoler vers les cieux, la caresse du vent chatouillant vos poils. Une queue tournoyante pour les ennemis (qui en sont parfois, eux aussi, affublés) et la possibilité de planer, très précieuse, sont tout ce que vous tirerez de cet accoutrement qui, dans la seconde partie de l'aventure, pourra se voir adjoindre une petite variante défensive. Que je vous laisse le plaisir de découvrir, parce que je vous aime. Se déniche aussi le pouvoir de Mario Boomerang, emprunté aux frères du même nom. Sa principale vertu, outre occire des ennemis à distance (comme la boule de feu de l'item Fleur) est tout simplement d'obtenir des objets éloignés. Un lancer de ce "cintre à effet rétro" et voilà cette pièce étoilée suspendue au-dessus de la lave (mortelle au premier contact) dans votre besace. Pratique. Viennent ensuite les boîtes, qui confèrent un look so Solid Snake. L'une d'elles balance des deniers à chaque pas. Moyen, mais bon... L'autre, coiffée d'une hélice, se montre plus intéressante puisqu'elle permet de se propulser très haut. Il suffit de maintenir une touche au moment où l'on souhaite s'élever. Vous tombez dans le vide et hop, vous voilà sauvé. En plus, on peut aussi planer. Cet objet ouvre sur des phases de jeu intéressantes, donnant volontiers le vertige.
Profondément beau
J'ai parlé de vertige ? Oui. Parce que je dois l'avouer, j'ai laissé l'effet 3D stéréoscopique activé à fond en permanence. Pas de sensation de mal-être, hein. Juste que, pour la première fois dans un jeu 3DS, j'ai senti les bienfaits réels du relief sans avoir envie de le désactiver. Ici, il a du sens, une utilité, n'est plus assimilé à un gadget sans intérêt. Calibré à la perfection, il permet de s'immerger pleinement dans l'action, avec l'impression que ce petit monde, si coloré et vivant, sort de l'écran. Et je peux aussi vous affirmer que cet effet de profondeur, bluffant, apporte une grande précision dans l'appréciation des trajectoires. Les séquences en 3D isométrique, pour ne citer que l'angle de vue qui me pose le plus de soucis depuis ma plus tendre enfance, paraissent beaucoup moins problématiques. Les blocs et différentes hauteurs se situent mieux pour les mirettes. Et le level-design, au travers de caméras ou de la position de certains éléments, comme de leur épaisseur, en tire partie au mieux. Le confort est réel et vaut que l'on essaie malgré les réticences. En espérant que l'effet ne soit pas, de base, incommodant pour vos sens. Ceux-ci devraient, en tout cas, rester éveillés face à une réalisation de qualité. Il s'agit sans conteste d'un des plus beaux titre disponibles sur 3DS. L'écran supérieur est sans cesse inondé de couleurs vives de personnages aux contours fins et aux animations splendides. On s'étonne aussi parfois de certains effets de propagation de lumière ou de textures à la finition étonnante (notamment le haut du château de Bowser, avec le rendu de ses pierres légèrement humides). Big N prouve de la plus belle des manières que sa bécane en a dans le ventre. Et ça, ça fait rire les oiseaux et chanter les abeilles.
On peut sourciller, voire hurler, à l'idée que Nintendo ait adressé la première partie du jeu à une audience peu aguerrie. Mais l'absence d'un challenge digne de ce nom pour les inconditionnels de l'homme à la salopette, du moins dans l'immédiat, doit-il éclipser ses qualités ? Qu'il accomplisse son travail avec application en intégrant assez peu de nouveautés peut-il faire oublier sa réalisation brillante, son level design impeccable, parfaitement pensé pour une utilisation nomade ? En ce qui me concerne, malgré la troublante facilité de mon premier run, je n'ai pas ressenti la moindre déception. J'ai été heureux de trouver Mario en bonne forme sur 3DS et j'ai fini, après quelques heures, par trouver un challenge qui me convient.