Après un premier opus plein de promesses, qui malgré quelques défauts assez agaçants offrait de belles sensations, Shift nous revient plus motivé que jamais dans cette suite, finalement très attendue... Alors y a-t-il ici de quoi faire chavirer le coeur des amateurs de jeux de course ? Faut-il ranger Forza et GT au placard ?
Je garde un souvenir ému du premier Need For Speed Shift. S'il n'avait pas eu ces quelques défauts rageants à l'époque, j'y aurais certainement beaucoup joué au delà du test, notamment parce qu'il offrait des sensations absolument jubilatoires, cristallisées par cette superbe vue cockpit et ces bruitages excellents. Et sur ces deux points particuliers, on peut le dire sans hésiter : Shift 2 : Unleashed représente ce qui se fait de mieux dans le genre, et de loin...
Ça va suer dans le casque !
Pour forcer encore plus l'immersion et maximiser les sensations, les développeurs de Slightly Mad ont ajouté une nouvelle vue intérieure. En plus de la fameuse vue cockpit donc, vous aurez désormais la possibilité d'opter pour la vue "casque" qui, comme son nom l'indique, vous place directement derrière la visière du pilote. Le résultat est incroyable, tout simplement. Même s'il faut un certain temps pour s'y s'habituer... En effet, non seulement cette vue apporte des effets visuels intéressants (comme l'habitacle qui devient flou avec la vitesse, la piste restant nette pour mieux simuler la concentration du pilote sur l'essentiel), mais en plus le regard du pilote n'est désormais plus fixe du tout, puisqu'il va anticiper les trajectoires et légèrement faire pencher le point de vue vers la droite ou la gauche avant même le virage, alors qu'on est encore en ligne droite ! C'est injouable au début, tant ça perturbe nos habitudes, puis en se concentrant sur ce qu'on voit réellement au dessus du volant, ça s'améliore et on finit par s'habituer. Et là c'est le pur bonheur, vraiment, l'immersion totale !
Idem côté bruitages : les développeurs ont simplement tout donné ! Les moteurs rugissent, les boîtes s'emballent, les pots crachent des décibels, le moindre choc fait littéralement sursauter... On est bien loin des timides "poc" de Gran Turismo, autant être clair. Et des détails hallucinants viennent encore embellir ce tableau, avec par exemple ces graviers ramenés sur la piste par votre concurrent d'en face, qui a un peu mordu le bas-côté, ces derniers tintant sous votre propre voiture lorsque vous passez dessus... Le pied. Pour le reste, toutes les bonnes idées du premier opus sont toujours d'actualité, avec par exemple les accidents et autres chocs qui floutent l'écran, ou font carrément passer les couleurs au noir et blanc pendant quelques secondes, le temps que le pilote reprenne ses esprits. Bref, Shift 2 est juste imprenable côté sensations et immersion.
Belles mécaniques
Pour ne rien gâcher, la réalisation graphique n'est pas en reste. Shift 2 propose ainsi des bolides finement modélisés (à l'extérieur comme à l'intérieur), mais aussi et surtout des environnements superbes, agrémentés d'effets spéciaux du plus bel effet. Une fois de plus la version PS3 est certes inférieure à son homologue Xbox 360, avec un aliasing bien plus prononcé et une animation un brin moins fluide, mais globalement c'est un régal pour les rétines, qu'on effectue les courses (jusqu'à 16 en solo, 12 en multi) en plein jour, au coucher du soleil ou de nuit. On regrette cependant qu'une fois de plus les conditions météo ne soient pas de la partie dans un jeu d'une telle qualité esthétique et technique. Les déformations (esthétiques et mécaniques), elles, sont bien sûr de la partie, plutôt bien rendues.
Une simulation plus exigeante...
Le premier Shift réussissait à faire un grand écart plus ou moins réussi entre arcade et simulation, grâce à ses nombreuses aides à activer ou non, et c'est une fois de plus le cas ici... sauf qu'on tend plus qu'avant vers la simulation - ou tout du moins vers l'exigence. Comprenez qu'on vous pardonnera bien moins qu'avant les écarts à haute vitesse sur le bas-côté, ainsi que les chocs avec le décor ou - encore pire - avec les autres concurrents. Sur certaines courses, à moins d'avoir un bolide vraiment plus puissant que celui de vos adversaires, la moindre erreur de votre part pourra être fatale. Enfin, malgré quelques rares incohérences (et quelques soucis de jouabilité dont on parlera plus loin), les modèles physiques sont costauds et réalistes. Le comportement du véhicule est parfois impressionnant de crédibilité, et on "sent" plutôt bien chaque réaction.
... mais des adversaires qu'on voudrait tuer !
Le problème, c'est que côté intelligence artificielle, les choses n'ont pas vraiment été corrigées... Et c'est là le premier gros défaut du jeu. Si vous êtes victime d'un choc ou d'un tête à queue à bonne distance de vos poursuivants, ces derniers feront assez souvent l'effort de freiner et contourner, certes, mais de plus près et donc dans la plupart des cas, notamment en début de course, ils ne le feront simplement jamais. Pire : ils font preuve d'une agressivité (d'une bêtise ?) incroyablement poussée dans les duels serrés, ignorant vos trajectoires et vous fonçant allègrement dessus sans raison. C'est tout simplement rageant, surtout que comme vous avez pu le lire plus haut, simulation oblige, le moindre écart ou le moindre choc peut être fatal dans une course. D'habitude d'un calme olympien j'en ai moi même jeté mon paddle de rage à plusieurs reprises.
Le volant de l'angoisse
Malheureusement la déception ne s'arrête pas là, puisqu'un autre défaut majeur est à mettre au crédit de Shift 2, à savoir cette foutue tendance à mettre de la latence dans la direction. On avait rencontré ce problème dans Need for Speed : Hot Pursuit, et autant on pouvait s'en accommoder dans un jeu très arcade aux routes bien larges, autant ici ça devient très vite pénible. Concrètement, pour donner du poids au véhicules ou je ne sais quelle autre raison, vous remarquerez un tout petit temps de décalage entre le moment ou vous inclinez le stick analogique dans une direction et le moment ou la voiture tourne réellement, à tel point qu'au moindre enchaînement de virages, on passe son temps à compenser de gauche à droite, bataillant avec son propre véhicule pour lui faire prendre la trajectoire souhaitée. Je ne vous cache pas que c'est très agaçant. Et de plus en plus agaçant même. Car quand vous en arriverez à piloter de gros bolides et à devoir gagner sur un Nürburgring extrêmement long et étroit... eh bien ce sera l'angoisse ! D'autant que vos adversaires, vous le savez, n'hésiteront pas à vous envoyer dans le décor.
Côté multi pour finir, notez d'abord que le jeu ne propose pas de mode 2 joueurs en écran partagé, et qu'il faudra donc se contenter du jeu en ligne pour affronter d'autres joueurs. Le reste est assez classique, avec l'organisation d'épreuves de 2 à 12 pilotes sur la piste (16 en solo) dans différents modes (course, time attack, duel...). Une petite originalité tout de même, avec la possibilité d'obliger tous les concurrents à jouer avec telle ou telle vue (dont la fameuse vue casque). Sachez enfin que si vous achetez le jeu en occaze, il faudra certainement acheter un "passe en ligne" pour pouvoir profiter des modes multi.
Sans ses deux défauts majeurs d'IA et de jouabilité (et malgré un mode carrière peu passionnant et des temps de chargement encore un peu longuets), Shift 2 : Unleashed aurait été un vrai petit bijou de jeu de course automobile ! C'est donc avant tout le goût du gâchis qui me reste en bouche... Reste qu'il offre des sensations juste démentielles grâce à sa nouvelle vue dans le casque du pilote, ses bruitages exceptionnels et sa superbe réalisation. C'est triste à dire le jour de la sortie d'un jeu mais... je suis impatient de voir le prochain opus se rapprocher du top niveau !