Après la bonne série Cognition, qui a vu la collaboration du studio de Jane Jensen, Pinkerton Road, et de Phoenix Online Studios, la fameuse créatrice de jeu d'aventure à la Gabriel Knight revient avec Moebius, un nouveau thriller fantastique et épisodique. Hélas, les débuts sont difficiles...
Croyez-vous en la réincarnation ? Non ? Oui ? Pas grave, ce n'est pas le thème de Moebius, qui met en scène Malachi Rector, un homme pourvu d'une mémoire étonnante. Et même d'étranges pouvoirs, qui se manifesteront plus précisément au fur et à mesure qu'il oubliera de prendre son Xanax. En fait, le scénario de Moebius ne tourne pas autour de l'idée de se souvenir d'une vie antérieure, mais plus de la réapparition d'archétypes humains à travers l'histoire. L'intelligence de Malachi lui permet de comparer les biographies des personnages embarqués dans cette aventure avec celles de véritables personnages (plus ou moins) historiques. Alors pourquoi ce sous-titre "Empire Rising" ? Ah, vous verrez bien...
Pas crédible, mon cher Watson
Un thème assez intéressant et entraînant donc, lié à un personnage principal totalement réussi et des répliques qui font mouche. On n'est pas à l'abri d'incohérences et de libertés dignes d'un Indiana Jones, mais c'est le genre qui le permet. C'est sur cette grosse base solide que Phoenix Online a construit... un peu n'importe quoi. Comme pas mal de jeux d'aventure, Moebius propose de la manipulation d'inventaire. Malachi ne ramasse pas n'importe quoi sans bonne raison, même si ça s'annonce utile plus tard. On multiplie donc les allées et venues pour récupérer ce dont on besoin au bon moment. Ce n'est pas trop grave en soi, puisque les déplacements sont rapides, mais Phoenix Online allie des puzzles d'inventaire ridicule à une immersion totalement nulle. Le pauvre Rector va faire le tour de Manhattan pour empocher quelques cents qui se trouvent là et pas ailleurs. Il ira même jusqu'à faire des voyages express en jet privé, entre New York et Washington DC, pour embarquer une boucle d'oreille ou une bouteille oubliée. Totalement absurdes et risibles, ces situations desservent l'histoire dans son ensemble.
J'accuse le game designer !
Le reste des mécanismes ne vaut guère mieux. Le système d'analyse de la personnalités des différentes rencontres ne pose aucune difficulté, si ce n'est d'accepter pas mal de lieux communs tirés par les cheveux. Quant au matchmaking entre la bio d'untel et celle d'une figure historique parmi une liste de candidats potentiels, elle est tout aussi facile, puisqu'on est obligé de bien accumuler les indices auparavant. Et ce n'est pas comme si on perdait quoi que ce soit à se tromper : il suffit de tâtonner un peu, au cas où vous n'auriez pas trouvé du premier coup (genre vous jouez saoul à 4h du mat'). On dirait que Phoenix Online avait quelque chose de plus ambitieux en tête pour ce gameplay d'enquête, mais qu'ils n'ont pas réussi ou pas voulu le mettre en place. On se retrouve donc avec une version édulcorée et sans grand intérêt. Même les pouvoirs psy de Cognition étaient plus intéressants à utiliser.
Rajoutez à cela une réalisation qui ne progresse pas. Elle régresse même sur certains aspect. Les décors sont corrects, mais les modèles des personnages ne riment à rien et je ne parle pas des animations... C'est la première règle des animations dans Moebius : on ne parle pas des animations. Ca fait beaucoup de chose à supporter pour apprécier l'univers pourtant très sympa de Jan Jensen et ce nouveau anti-héros intello délicieusement antiphatique. A réserver donc aux fans indulgents.