Un J-RPG conçu en partie en France s'attachant les services d'illustres personnalités du jeu vidéo japonais, ayant travaillé entre autres sur la licence Final Fantasy, avec un style visuel qui n'est pas sans évoquer les jeux Vanillaware ? Il n'en fallait pas plus pour que l'on se prenne immédiatement d'affection pour Zodiac Orcanon Odyssey, qui livre aujourd'hui le premier volet d'une épopée dont le potentiel ne s'exprime pas pleinement.
Depuis plusieurs siècles, les différentes races du monde d'Orcanon vivent en paix. Cela en dépit des tensions entre certaines et des jalousies à l'égard des Hyums (peuple humain) dominateurs. Mais l'équilibre est sur le point d'être rompu. La dirigeante Dame Dorothée se meurt et s'apprête à passer le flambeau à Yeuna. Et l'évasion d'un Geckal (homme lézard) belliqueux de la prison d'Arcon va mettre le feu aux poudres. Dans cet univers coloré mais pas enfantin, au bord de la rupture, vous incarnez Cael, guerrier hyum qui, après avoir touché un Eclat Céleste, va se découvrir de nouvelles capacités. A ses côtés, sa soeur, la lancière Ulan, et Kadyn, une bretteuse Fawkon (des humains ailés), partent en quête pour arrêter celui que l'on appelle l'Embrasé...
Beauté fatale
Des geôles d'Arcon au Royaume Calciné des Geckals, en passant par le Pays des Vents des Fawkons, les Terres Inondées de Phyltria, où vivent de paisibles hommes-poissons baptisés Phyltriens, et les Contrés Terrestres des massifs Orsas, le périple qui attend votre équipée va se révéler mouvementé. Juché sur votre Célestion, un tigre à dents de sabre ailé, vous allez pouvoir explorer tous ces lieux d'une façon libre et aérienne qui rappelle Valyrie Profile et Child of Light. Ces décors aux différences marquées, proposant un mélange habile d'architecture fantasy classique et d'éléments emprunts de technologie avancée, subjuguent par leur beauté. CyDesignation, dirigé par Hideo Minaba (Final Fantasy XII), a accompli un travail remarquable. En termes de direction artistique, qui n'est pas sans évoquer Dragon's Crown, rien ne jure. Magnifique et toujours représentatif de l'identité de la peuplade qui y vit, chaque environnement, dessiné à la main, montre un soin du détail qui impose le respect.
Perdu de vue
Le problème, c'est qu'ils sont vastes. Et en dehors des quelques téléporteurs (qui font aussi office de station de régénération) disséminés ici et là, dénués de repères visuels permettant de s'orienter convenablement. L'absence d'une carte ou d'un simple dézoom devient vite problématique et ce qui était d'abord un plaisir peut vite tourner au cauchemar alors que l'on ne parvient plus à distinguer des embranchements somme toute très similaires. De fait, face à l'aspect quelque peu laborieux de l'exploration, s'assurer qu'on a trouvé toutes les caches et Moissoneurs vous confiant de petits trésors et accomplir les quêtes annexes confiées par certains PNJ peut devenir rébarbatif. Et à chercher son chemin ou ce personnage qui détient la clé vers un autre compartiment, on avance en essayant d'éviter les rixes, pourtant nécessaires.
Effet buff
Se déclenchant au contact de bulles translucides, les combats - au tour par tour - mettent en scène deux camps pouvant présenter jusqu'à 3 combattants chacun. Une barre montrant l'ordre des actions se fiche en bas de l'écran et va clairement jouer un rôle déterminant dans ces affrontements qui misent beaucoup sur vos talents de stratège. Pour se montrer efficace, il faudra sans cesse jongler avec les différentes aptitudes de vos ouailles. Outre une frappe simple, on trouve, suivant les profils et classes, surtout de quoi améliorer ou affaiblir temporairement, soigner ou encore retarder l'offensive ennemie. Avec toujours une question d'équilibre, un besoin de peser avantages et inconvénients à moyen terme, la plupart des actions nécessitant quelques tours avant de se voir à nouveau utilisables. A noter que, s'il n'y a pas d'invocation ou de "Limit Break", une fois cinq tours passés, votre monture pourra être convoquée et asséner un coup de griffe dévastateur.
Il suffira d'un signe
Les accompagnateurs du protagoniste répondent tous à un profil précis qui ne bougera pas. Ulan fait diversion et encaisse façon tank , Ecko le Phyltrien joue les soigneurs tandis que Dag fait magicien... Leurs caractéristiques, forces comme faiblesses, sont figées... Cael, quant à lui, va vite se montrer malléable en pouvant changer de classe au cours du combat. A chaque Éclat Céleste touché (il y en a trois dans ce premier chapitre), il débloque un métier, lié à un signe du zodiaque, qui confère une nouvelle approche tactique. D'abord simple guerrier armé d'une épée, il pourra incarner un Mystique (Poissons), un Alchimiste (Sagittaire) ou un Érudit (Capricorne). Tous en lien avec un élément, ils pourront se voir améliorés via des arbres de compétences qui renforceront pouvoirs et caractéristiques de manière appréciable.
Menu défaut
Si le système de combat convainc, il n'est pas parfait, loin de là. La faute à un manque tout bête : les icônes des compétences s'affichant devant le personnage dont c'est le tour ne sont aucunement détaillées en cours de combat. Il faut donc apprendre les effets dans le menu des personnages. De même, avec un bestiaire assez étoffé, on ne sait pas forcément, notamment face à des créatures faisant office de boss, qui est sensible à quoi. Plutôt étrange. Mais même en dehors, cela manque de clarté et d'optimisation. La gestion de l'inventaire, l'interface d'achat, de vente, de récupération, d'amélioration ou de création des armes et des armures (avec des matériaux trouvables un peu partout) n'offre aucun comparatif, aucun rappel, aucune possibilité de tri qui permettrait de ne pas y passer des plombes. Et puis le fait qu'on doive tout acheter, revendre ou transférer un par un... Quant aux possibilités de faire tourner l'effectif, recruter le Cael d'un autre joueur ou proposer le vôtre, bizarre qu'il faille passer obligatoirement par la grand-place d'Arcon et parler à un garde.
A suivre...
Ces problèmes d'interface encaissés en même temps que la progression spatiale un peu chaotique, on se dit qu'il reste au moins l'univers, imaginé par Kazushige Nojima (à l'écriture sur Final Fantasy VII et VIII), et l'histoire pour nous motiver à avancer durant une dizaine d'heures (minimum, si vous êtes du genre à vouloir tester les autres niveaux de difficulté et grinder comme un cochon). Là aussi, on pourrait trouver à redire. Si la tonalité générale a bien ce petit plus qui accroche, avec des PNJ mineurs aux histoires qui expriment souvent des sentiments d'une noirceur surprenante, on reste interloqué par le classicisme du scénario, qui ne décolle pas encore, et une narration qui emploie des cinématiques déroutantes. Assez jolies, quoique très en-deçà du contenu ultra-chiadé du jeu, elles ne présentent aucun bruitage et aucun doublage. Les répliques surgissent en sous-titres et l'on se demande souvent qui s'exprime, quand il n'y a pas de fautes de traduction... Alors oui, cela met en avant la bande-son extraordinaire signée Hitoshi Sakimoto (Final Fantasy Tactics, Final Fantasy XII) qui nous ensorcelle de bout en bout. Mais niveau narration, cela fait malgré tout un peu vieillot. Et bien qu'on puisse voir en Zodiac : Orcanon Odyssey l'influence de nombreux classiques assez âgés, pas sûr que cela soit volontaire.