Annoncée avec un cynisme effarant - en l'occurrence à peine plus de deux semaines après le lancement de Tennis World Tour dont les recettes ont manifestement permis d'en financer la licence - cette édition Roland Garros a des allures de simple ravalement de façade aux tons ocres. La parution simultanée d'un pack éponyme de quelques mégaoctets destiné aux possesseurs de la version initiale confirme cette hypothèse, un DLC hélas payant pour ceux qui ont déjà essuyé les nombreux plâtres de la production du studio Breakpoint (lire notre TEST). S'agirait-il uniquement d'un manque de fair-play de la part de son éditeur Bigben, ou d'une manière pas très élégante d'amortir les frais d'un jeu enfin terminé ?
Au programme des inédits de Tennis World Tour : Roland Garros Edition figurent trois courts de la porte d'Auteuil (Philippe-Chatrier, Suzanne-Lenglen et Simonne-Mathieu), la "Caja Magica" du tournoi de Madrid, Rafael Nadal et Kristina Mladenovic, sans oublier la quinzaine de mises à jour publiées depuis l'année dernière.
Celles-ci avaient en effet préparé le terrain par le biais de nombreuses animations supplémentaires, notamment le fameux coup droit lasso de Rafa, ainsi que l'ajout des glissades sur terre battue. Toutes ces évolutions ont d'abord un intérêt esthétique, à commencer par l'immersion dans les arènes de Roland Garros. Un petit voyage dans le futur d'ailleurs, puisque la (re)construction de deux d'entre elles s'achève tout juste (et le toit amovible du central n'arrivera réellement qu'en 2020). Mais en dépit des améliorations sonores et visuelles pour rendre le public plus vivant, l'ambiance reste fade, de l'entrée en scène des joueurs à leur sortie, guère festives. Leur modélisation demeure inégale concernant les visages, et globalement sommaire, à l'instar de la réalisation. En revanche, la diversification des gestes se montre très appréciable, a fortiori ceux propres à certains champions.
Dérapages (plus ou moins) contrôlés
Dommage que l'inertie des déplacements sur l'ocre ne se manifeste pas de façon assez cohérente au niveau du "freinage" par rapport à la frappe, surtout en bout de course. Ce phénomène aggrave mécaniquement la tendance des échanges à tourner en d'interminables séquences d'essuie-glace, souvent achevées par un coup croisé très court ou le long de la ligne. Les angles ont pourtant été légèrement restreints et la prise de risque augmentée dans ces situations, sujettes à des fautes potentiellement moins rares. De sages décisions qui ne suffisent toutefois pas à en faire une véritable simulation.
Malgré la réduction drastique des chopes automatiques, initialement dévastateurs pour le réalisme, certains coups se déclenchent encore inopinément (par exemple des slices défensifs changés en accélérations liftées, ou l'inverse sans que la balle n'ait systématiquement été au ras du sol). En outre, les sportifs gardent une position très avancée, sans pour autant se risquer trop au filet, les volées manquant toujours de tranchant, contrairement aux contres et autres passing-shots. Enfin, leurs sprints surréalistes et leur prise de balle ultra précoce - des compétences unanimement partagées - font décidément pencher le gameplay vers l'arcade.
Sport individualiste
Les sensations s'avèrent néanmoins satisfaisantes, nonobstant les assistances palpables en termes de mouvements et de préparations, certaines se révélant très, voire trop pratiques à l'image des tweeners ou des smashs (y compris de fond de court). Des scripts rigides et d'éventuelles errances exploitables lors des parties face à de vrais humains, loin des exigences de précision que requiert l'ambitieuse facette eSport, à vocation ici essentiellement promotionnelle. Si les matchs en ligne souffrent moins des balles captées à distance (entre autres soucis de latence), les doubles sont encore tristement absents.
A défaut de briller question convivialité, la dimension solo bénéficie heureusement de moult ajouts dans le mode carrière et les options de customisation de l'éditeur de personnages (avec un quintet de cartes d'aptitudes accompagnées d'un super entraîneur exclusif), tandis que l'IA adopte des comportements plus crédibles, voire un tantinet créatifs. De quoi s'amuser, enfin, avec la petite balle jaune, bien que le prix à payer paraisse plutôt cher, en particulier pour les acheteurs de Tennis World Tour tout court, outrageusement bogué à ses débuts. Une démarche résolument critiquable que l'offre gracieuse de Nadal à télécharger, temporaire en prime, ne saurait excuser.