A une époque où les déclinaisons plus ou moins "deluxueuses" et autres remakes tendent à obstruer l'espace vidéo ludique au détriment des nouvelles productions, le retour d'anciennes aventures du plombier moustachu ne saurait étonner, même sous la forme d'une compilation. Toutefois l'annonce de Super Mario 3D All-Stars a suscité une constellation de surprises, pour ne pas dire une certaine consternation, car si la publication séparée de l'opus 3D World se justifie par des suppléments inédits, l'absence de l'étincelant Galaxy 2 en a d'emblée réduit l'éclat. Cette collection se montre-t-elle donc encore assez brillante pour se hisser au niveau de son vénérable homologue en deux dimensions ?
A l'instar de son lancement situé dans le sillage quasi immédiat de son officialisation, Super Mario 3D All-Stars ne dispose que d'une très brève séquence d'introduction en prélude du menu, tout aussi sommaire. Les boîtes de Super Mario 64, Super Mario Sunshine et Super Mario Galaxy semblent ainsi posées sur une étagère, assorties d'une bribe d'informations, aux côtés de leurs fabuleuses bandes originales respectives. Elles rassemblent la bagatelle de 175 pistes - d'une qualité sonore rigoureusement identique à celles d'origine - que l'on a loisir d'écouter d'entrée en intégralité, y compris avec la console éteinte via le bouton moins (une curiosité qui ne fonctionne naturellement qu'en mode portable). Ce dernier sert également à afficher l'interface commune, dont la vocation se limite globalement à lister les commandes de chacun des titres. Autrement dit, point d'option pour sauvegarder en cours de jeu, possibilité pourtant présente dans les applications des catalogues NES et Super NES du Nintendo Switch Online. Une regrettable lacune somme toute assez surprenante, bien qu'il ne s'agisse que de portages de ces différents épisodes.
Super Mario 128/2
À commencer par Super Mario 64, présenté certes en 720p, mais au format 4/3. Évidemment, ce chef-d'oeuvre de la Nintendo 64 n'a jamais été si agréable à l'oeil, grâce à un rendu plus net, un crénelage encore amenuisé, et une fluidité accrue. La pauvreté des textures n'en demeure pas moins criante, voire encore plus visible, de même que la simplicité des éléments polygonaux, la réalisation apparaissant dans son ensemble forcément rudimentaire aujourd'hui. Si l'exploration du château rappelle que ce jeu a posé les bases de la plate-forme dans un univers ouvert en 3D, la taille restreinte des environnements tout comme leur structure biscornue soulignent l'aspect révolutionnaire et néanmoins expérimental de chaque niveau. Idem pour le moteur physique, sophistiqué en son temps, qui se révèle désormais plutôt pesant au regard des exigences contemporaines. En témoigne l'inertie des déplacements, surtout avec la fameuse caméra semi-automatique. Ses errances crispantes n'ont toujours pas été corrigées, à l'image de nombreux bugs devenus célèbres, de sorte que l'authenticité s'avère préservée, quitte à potentiellement décourager les néophytes.
Super Mario Moonshine
À l'inverse, Super Mario Sunshine profite d'un réel travail de mise à jour, illustré par l'élargissement de la fenêtre en 16/9 et une définition rehaussée en 1080p sur station d'accueil. Le bond technologique se montre époustouflant, même carrément éclaboussant avec le recul (a fortiori sans MIPS), ce qui lui a permis de déployer un monde immensément plus riche et spacieux, tant sur le plan horizontal que vertical. En outre, la multiplicité des occupations au sein de cet archipel, à l'architecture plus organique, occulte la facette un tantinet plus linéaire de la progression. Reste que derrière son ambiance paradisiaque débordante de couleurs et ses ambitions narratives sensiblement plus développées, ce volet ne constitue finalement qu'une évolution mineure en terme de gameplay, malgré les multiples mécaniques d'interaction introduites au fil des stages. Car le concept tire essentiellement sa particularité du canon à eau, guère polyvalent dans l'absolu. Et si l'absence de dosage analogique de la gâchette par rapport à la version GameCube paraît anecdotique, la récurrence des soucis d'angles de vue fait encore littéralement tâche, jusqu'à parfois gâcher la fête.
Super Mario Galactic
À n'en pas douter, le contraste n'en est que plus flatteur vis-à-vis de Super Mario Galaxy, véritable star de cette sélection. Une telle adaptation en HD de l'itération Wii - à l'évidence tronquée jadis - étale toute sa superbe, avec sa gestion renversante de la gravité et son level-design stellaire. La partition orchestrale porte magnifiquement l'épopée, à la tournure inévitablement télescopée et cependant menée tambour battant, Joy-Con à l'appui. Leurs détecteurs de mouvements remplacent d'ailleurs efficacement ceux de la Wiimote, avec le concours alternatif de l'écran tactile. Dommage que l'impossibilité de détacher ces manettes sur Nintendo Switch Lite prive les possesseurs de ce modèle du mode coopératif, à moins d'acquérir des contrôleurs additionnels. Et par dessus tout, l'omission nébuleuse et en tout cas décevante de Super Mario Galaxy 2 laisse un trou noir béant parmi cette anthologie des élucubrations du plombier moustachu en trois dimensions, propulsée probablement trop vite dans l'espace pour mettre ces merveilles définitivement en orbite, au beau milieu des étoiles du genre.