Parce que les temps changent et que bien des acteurs s'offrent un nouveau blase, le nouveau jeu multi-sports d'Ubisoft Annecy ne s'appellera donc pas Steep 2, mais bien Riders Republic. Après une courte année de campagne, la nouvelle licence s'offre aujourd'hui au verdict des joueurs
Après un report d'une dizaine de mois et pas mal de phases de bêta, Riders Republic est enfin disponible, avec un peu d'avance sur la saison hivernale, synonyme de glisses entre potes et de soirées plus ou moins arrosées. Dès les premières images, Ubisoft avait voulu faire du nouvel effort de son antenne savoyarde un titre coloré et sans prise de tête, histoire de viser un public de riders toujours plus large comme en témoigne les multiples disciplines proposées. Mais à force de vouloir jouer sur tous les tableaux, Riders Republic n'a-t-il justement pas tout du parti attrape-tout ?
La République, c'est lui !
Nul ne sait trop comment ni pourquoi nous nous sommes retrouvés là, mais qu'importe : en ces temps troublés où la république est plus que jamais en danger de mort, Riders Republic espère nous immerger dans un univers dont l'agenda est très clairement dicté par le cool. Installée au beau milieu d'une sorte de Very Best-Of de ce que l'Amérique du Nord a pu produire de parcs nationaux, la République s'enorgueillit d'avoir été fondée par Brett Nale, une sorte de Lincoln du sport extrême, le genre d'athlète qui excelle dans toutes les disciplines, et impose sans mal le respect. Désormais occupé à servir des burgers accompagnés de frites verdâtres entre deux punchlines censées le rendre plus branché qu'il n'en a l'air, Brett nous adoube immédiatement, et nous voilà donc lancés sur ses traces, une discipline à la fois. Il faudra donc se faire la main en VTT, vélo de course, ski, snowboard et autres rocket wingsuit pour tenter de grimper au classement des candidats les plus en vue.
Carte d'électeur et cartes postales
C'est peu dire qu'il y a à boire et à manger dans Riders Republic : entre les différentes disciplines et les modes de jeu qui s'entendent comme autant de variantes potentielles, le jeu ne sait pas toujours où donner de la tête... et nous non plus. Si les débuts progressifs permettent de se faire progressivement la main, la bride est rapidement lâchée, et le rider encore frêle se voit rapidement enseveli sous une avalanche de contenu. Chaque discipline propose en effet sa propre jauge de carrière et ses équipements dédiés, et chaque épreuve – remportée ou non – offre ainsi l'occasion de faire pleuvoir les récompenses et de rendre toujours plus de compétions accessibles au sein d'un terrain de jeu gigantesque, tant et si bien que l'on ne prend même plus le temps de véritablement comparer entre eux les articles proposés... Entre les sommets enneigés, les plaines rocailleuses ou les canyons ocres typiques du relief américain, il y a de quoi faire. Visuellement, le jeu d'Ubisoft Annecy tente de trouver son équilibre entre fluidité et profondeur de champ, mais si l'astuce fonctionne plutôt bien la tête dans le guidon, les disciplines aériennes ont tôt fait de révéler le pot aux roses, en affichant bien tardivement les éléments les plus lointains de ce décor à la croisée des chemins.
La course en tête
Sur le fond comme la forme, Riders Republic ne se prend clairement pas la tête et préfère jouer la carte du fun à tout prix, y compris en termes de gameplay : que ce soit en vélo, en ski ou dans les airs, le maniement des différentes disciplines reste finalement très similaire. La gâchette de droite permet de foncer à toute berzingue, celle de gauche d'opérer des virages bien secs, et les boutons de façade permettent (dans un premier temps) de sortir ses premiers tricks et rotations. Simple et efficace ? Peut-être un peu trop. Heureusement, les amateurs de sensation fortes pourront creuser la formule une fois la phase d'apprentissage passée en désactivant la possibilité de toujours retomber sur leurs pieds ou en assignant les tricks au stick droit, un choix qui offre plus de souplesse, mais qui s’accommode bien mal avec une caméra n'ayant de cesse de mal se placer : cette dernière gène systématiquement la lisibilité du terrain. Comme bien souvent, la meilleure option reste d'opter pour une vue à la première personne, à plus forte raison que les sensations de vitesse s'en trouvent décuplées, et offrent durant certaines descentes de vraies sensations fortes. Du genre de celles qui vous poussent à accompagner les trajectoires avec tout votre corps, quitte à passer pour un imbécile aux yeux de vos amis et/ou collègues.
Agorannecy
Si les courses traditionnelles occupent une bonne partie du temps de jeu de Riders Republic, la formule s'autorise bien des écarts en se déclinant sous diverses formes : il suffit de déambuler dans le hub central du Riders Ridge pour alterner entre Tricks Session où deux équipes s'affrontent pour réaliser le plus grand score dans des arènes thématiques, des courses Free-for-All sans prise de tête, ou la recherche de sponsors bien réels, qui nous rappellent à quel point les sports extrêmes dépendent tristement du bon vouloir de quelques vendeurs de boissons gazeuses trop sucrées. Mais assurément, l'épreuve reine demeure la sacro-sainte Mass Race, une compétition qui réunit entre 50 et 64 concurrents en fonction de votre support (la palme revient évidemment au PC et PS5/Xbox Series) dans un joyeux bordel interdisciplinaire. Comme à l'époque d'un certain SEGA Extreme Sports, on passe du ski à la rocket wingsuit en finissant par une séquence de VTT dans un festival de collisions et d'injustices qui rappelle immanquablement les courses parfois un brin aléatoire de la série Mario Kart. Toutes les demi-heures, ceux qui le désirent pourront ainsi rejoindre l'une de ces foires à l'empoigne version Riders Republic, et tenter de se mesurer à des adversaires pas toujours du même calibre, la faute à un matchmaking peu regardant sur l'équilibre des forces en présence. Chaque rassemblement est également l'occasion de constater que la boutique in-game au prix sacrément élevés ne semblent pas remporter les suffrages des joueurs, tant les tenues de base restent inlassablement présentes, même avec un compteur d'étoiles au firmament.
Late Night Noises
Si elles ne plairont pas forcément à tout le monde, les Mass Races illustrent bien malgré elles l'un des aspects les plus usants de Riders Republic : sa propension à s'afficher comme une expérience à la pointe du cool. Vraisemblablement peu occupé par son activité de cuisinier, le gars Brett et ses infiniment volubiles semblables n'auront de cesse d'enchaîner les pseudo-punchlines râtées, qui semblent parfois sortir du cerveau d'un marketeux parodié par Les Inconnus. Sauf qu'ici, tout est premier degré. Alors que Riders Republic propose déjà une bande-son qui s'apparente souvent à une playlist bien sage de pop-radio grand public, les encouragements inutiles et autres observations vides de sens fusent sans discontinuer, et l'on se demande bien pourquoi le jeu s'acharne ainsi à ne jamais nous laisser respirer.
Heureusement, le joueur champêtre pourra toujours prendre la poudre d'escampette, et partir à la découverte de ce concentré de parcs nationaux offert par Riders Republic, histoire de récolter une liste de collectibles frappée du sceau pléthorique d'Ubisoft. Si la proposition pourrait s'avérer pertinente, la possibilité de se téléporter un peu n'importe où achève de rendre l'exercice optionnel, et l'on se demandera finalement si l'immensité proposée par Ubisoft Annecy n'essayerait pas d'étaler la confiture à tout prix. Entre les insupportables jacasseries de Brett, les pièces d'équipements et les épreuves qui ne cessent de se débloquer, et l'appel régulier de la Mass Race, Riders Republic aurait presque tout du faux cool qui veut toujours trop en faire... C'est qu'il y a des pass saisonniers à vendre, voyez-vous.