Milestone a entamé une spirale vertueuse depuis MotoGP 18 sorti cet été. La société milanaise continue de rendre hommage au sport moto, avec le troisième volet de la série Ride. Jusqu'ici, cette dernière était restée plutôt en retrait d'un point de vue qualitatif avec RIDE et Ride 2. Déjà découvert à la Gamescom cette année, ce troisième épisode s'annonçait prometteur. Il semble bien en effet que les bases soient excellentes pour qu'on commence à le mettre dans nos projets d'achat.
La communication autour du jeu est ambitieuse. Ride 3 est présenté comme l'équivalent deux-roues de Gran Turismo, et se veut une véritable encyclopédie de la moto. Si on peut raisonnablement penser que Ride 3 possède de sérieux atouts, il reste encore du chemin à parcourir pour atteindre de tels sommets.
Pour l'amour de la moto
Une des caractéristiques de Gran Turismo, c'est l'écosystème qui est créé au travers de son interface utilisateur. Ride 3 a fait le choix de présenter l'ensemble des épreuves du mode Carrière sous forme de collection de magazines. Un choix intéressant qui correspond bien aux fans de moto. Ces derniers sont en effet nombreux à collectionner les publications dédiées, génériques ou consacrés à leurs motos/marques préférées. Il y a de quoi gaver la bibliothèque avec une bonne centaine d'heures de jeu à prévoir pour tout boucler !
Ainsi, on va trouver une série d'épreuves regroupées autour d'un même thème. Par exemple, les motos deux temps des années 70, les 600 sportives ou encore une compétition entre les années 80 et 90. Les courses sont équilibrées grâce à un système d'index de performances, ainsi il n'y a pas de différences trop importantes entre les engins. La description de chaque volume est intéressante et apporte son lot d'informations sur l'évolution des modèles. De la même façon et pour rejoindre ce qui se passe avec Gran Turismo, on dispose effectivement d'une mine d'informations sur chaque engin.
Les motos sont regroupées en catégories qui correspondent au monde réel. On retrouve les versions "naked", les sportives, les supermotard, les café racer, l'endurance... En tout 7 catégories et environ 230 modèles de motos pour 26 marques. Il y a vraiment de quoi faire (avec aussi de l'électrique...) et aucun autre jeu de moto n'a d'équivalent à ce jour. A chaque niveau de course dans le mode Carrière, un numéro spécial est dédié à une machine particulière. Une belle manière d'approfondir son historique. En revanche, on peut s'étonner de ne pas trouver des modèles aussi répandus que l'ER-6N ou autres SV650 chez Suzuki. 77 modèles sont également prévus en DLC avec une route toute tracée. Certains seront gratuits, d'autres payants, le contenu est d'ores et déjà accessible ici.
Mais ne boudons pas notre plaisir, c'est déjà pléthorique en l'état et il y a aussi de nombreuses légendes dans le garage. Notons également que Ride 3 n'a pas encore l'élégance de GT. Notamment en raison de musiques redondantes et d'images de chargement strictement identiques. On comprend que Milestone aime les italiennes, mais avoir les fesses de la Ducati Paningale sous le nez à tout bout de champ devient rapidement pénible. Tout comme la musique qui savonne également pendant les temps de chargement. Ça fait désordre.
La moto de vos rêves
Autre emprunt à GT et à bien d'autres jeux de voitures, le système de permis vous offre de gagner facilement des motos supplémentaires. Grâce à l'argent gagné pendant les épreuves, vous pouvez les modifier dans tous les sens. Tout d'abord sur le plan esthétique en customisant les rétroviseurs, les clignotants et les supports de plaques. Les supports de plaque, chaque motard sait bien que les marques se concurrencent pour fournir les plus moches possibles de série... Une dizaine d'éléments esthétiques peuvent être modifiés pour coller à vos goûts.
Toujours dans le domaine des goûts et des couleurs, l'outil de livrées va vous permettre de repeindre les carénages à votre convenance. Les options à disposition sont équivalentes à ce qui est déjà connu dans Forza et GT, il y a matière à reproduire des livrées qu'on retrouve dans les Grands Prix moto, ou tout simplement donner libre court à la fantaisie.
Enfin, puisqu'il faut aussi être performant, un grand nombre de pièces mécaniques sont modifiables. Du plus classique, avec la ligne d'échappement, au plus poussé, avec des modifications internes au moteur. Tout cela a bien entendu des conséquences directes sur les caractéristiques classiques en la matière : accélération, vitesse de pointe, freinage et tenue de route. Ces modifications sont cohérentes, on ne greffe pas un turbo partout. Tous ces aspects de modifications et de personnalisations s'appliquent également au pilote. Vous pouvez définir son style et même la façon dont il va se déhancher dans les virages. Appréciable.
Ride 3 fournit aux pilotes virtuels tout ce qu'il faut pour se faire plaisir et bichonner leurs bébés. La moto est d'ailleurs mise en valeur dans un studio qui sert aussi bien à dormir, qu'à bricoler la bécane. Sur une étagère près du mur se trouveront les divers trophées que vous aurez pu glaner en course. Des courses qui vont vous emmener tout autour du monde. Dernier clin d'oeil à GT, s'il ne faut pas nettoyer les motos, il faudra changer l'huile de temps en temps sous peine de perdre un peu de puissance. Un voyant s'allume sur le tableau de bord pour vous signaler qu'il est temps de vidanger.
Cheveux au vent, poignée essorée
Car le choix des tracés à parcourir est à la fois éclectique et cohérent. Éclectique parce que vous aurez des épreuves variées, de la classique course en point à point en passant par de l'endurance et du "dragster" (en fait de la course en ligne). En tout, ce sont 8 types d'épreuves qui vous attendent, assez pour briser la monotonie des enchaînements de courses.
Cohérent ensuite, car la liberté des balades à moto est incarnée par des tracés fictifs empruntés à de véritables routes ouvertes. Pour ce qui concerne les courses plus classiques, on retrouve des circuits qui parlent aux passionnés et qui ont fait l'objet de choix judicieux. A commencer par l'enfer vert de la boucle nord du Nürburgring, en passant par Monza ou Oulton park. On va donc trouver de l'urbain, de la course sur route, du super-motard, bref tout un panel d'épreuves qui couvrent le large spectre des styles de motards. Mention spéciale pour le Grand Prix de l'Ulster qui donne un parfum de Tourist Trophy au jeu. Il y a de tout on vous dit, avec 27 circuits et une bonne quarantaine de variantes le tout de jour, de nuit, sur le sec ou sous la pluie (sans malheureusement que ce soit évolutif).
Graphiquement, Ride 3 est passé à l'Unreal Engine 4. C'est beaucoup plus joli qu'avant, sans pour autant égaler les meilleurs jeux de course (voiture) du moment. Si les motos ont bénéficié d'un soin tout particulier et sont superbement modélisées au boulon près, les décors se révèlent un peu ternes. Le "photoscan" par drone est moins coûteux que le scan laser, mais aussi moins précis lorsqu'il s'agit de reproduire les moindres aspérités de la route. Le résultat global est satisfaisant, mais c'est un compartiment qui pourra progresser à l'avenir. Ce constat est encore plus flagrant en multijoueur avec des mouvements de motos qui sont artificiels en mode spectateur (vous arrivez directement en spectateur dans les parties en cours). Le multi est d'ailleurs également un aspect qui devra évoluer, les options de jeu se cantonnant au strict minimum.
Accessible à tous les motards
Bien entendu, nous terminerons ce tour avec l'aspect le plus important : le pilotage. Il est tout d'abord configurable aussi bien concernant la difficulté que pour la force de l'adversité. Le panel d'aides répond présent à l'appel : ABS, TCS, anti wheeling, trajectoires matérialisées sur la route... Pour profiter à fond du jeu, il faut bien sûr tout désactiver, mais les néophytes pourront s'habituer en douceur au maniement d'une moto. Tous comme les bolides ne se pilotent évidemment pas tous de la même manière, il est beaucoup plus difficile de mettre correctement en courbe une mamie du bitume qu'un monstre bardé de technologie.
Ceci dit, quelle que soit la machine, les principes importants du pilotage moto (oui, une moto, ça se pilote) sont respectés. Un freinage à fond à la limite avec une roue arrière qui cire un peu jusqu'à se soulever, une entrée en virage pour chercher l'apex et une ré-accélération tout en douceur en relevant la moto. Le rythme est très important et une fois vos trajectoires maîtrisées, c'est un véritable bonheur que d'enchaîner les "pif-paf" ou les passages à haute vitesse. Gare aux coups de raquette si vous êtes trop violents sur la poignée en ré-accélération. La conduite est moins fine que sur un TT Isle of Man, mais procure tout de même son lot de sensations.
Les vues disponibles vont du plus réaliste (vue casque et bulle) au plus arcade, avec une caméra en arrière de la moto. Vous serez facilement tentés de sacrifier les sensations de la vue casque contre un champ de vision plus large, pour mieux anticiper les trajectoires des autres coureurs. Surtout avec une I.A. qui, malgré une refonte totale reste bien aux fraises. Non pas qu'elle manque de combativité, mais son comportement est inégal à plusieurs égards. Sur les contacts par exemple, elle résiste bien mieux aux assauts que vous-même, ce qui est agaçant. Vous pouvez en percuter une à l'intérieur d'un virage sans la faire vaciller et vous retrouver au sol. Dans les courbes, justement, leur vitesse n'est pas constante. C'est une succession de freinages et d'accélérations qui sont utilisés pour rester sur la trajectoire. Ainsi les motos de l'ordi "pompent"' sans arrêt dans les courbes à moyenne et faible vitesse.
Ce symptôme est caractéristique d'une maladie bénigne qui pénalise un peu le bilan de Ride 3. Il y a d'excellentes choses, comme les noms affichés des virages par exemple, qui montrent que Milestone a le souci du détail. Mais il y a aussi des grains de sable comme des traductions imprécises ("time" traduit "heure" au lieu de "temps") ou la musique qui savonne pendant les chargements. Le bilan final est cependant très positif. Suffisamment en tout cas pour qu'on puisse parier sur un bel avenir et un beau succès pour le dernier bébé des développeurs italiens.