Owlboy a surtout fait parler de lui pour son développement à rallonge. Pas loin de 10 ans durant lesquels la petite équipe de D-Pad Studios en aura vu de toutes les couleurs mais n'aura jamais perdu l'espoir de parvenir à proposer son projet à un public affamé d'expériences à l'ancienne. Enfin, donc, ce titre prometteur sur le plan visuel a pris son envol. Et on peut dire qu'il n'est pas loin d'approcher le soleil.
Des projets cherchant à réveiller la fibre nostalgique en revêtant des atours rétro, voilà des années qu'on nous en sert. Et à la louche. Ils nous aguichent avec des sprites adorables qu'on croirait créés sur NES ou Super NES, nous font fondre d'envie en se faisant passer pour des héritiers des Mario, Zelda, Mega Man, Kid Icarus ou Castlevania d'antan... Mais lorsque l'on cherche l'esprit des grands classiques 2D des années 80 et 90, seul un virevoltant passe, propulsé par un vent glacial et antipathique. Owlboy, lui, entre dans la même catégorie que les Cave Story et Shovel Knight, pour ne citer qu'eux. Cela grâce à sa personnalité et sa finition irréprochable. Mais pas que.
Owl Bravo
Lorsque l'on entame l'expédition d'Otus, enfant-hibou vivant dans un monde composé de terres flottantes à la Skyward Sword (derrière lesquelles on peut parfois apercevoir des Tetrominos, bel hommage) amené à contrer les projets d'infâmes pirates, on est ébahi. Les environnements qui se découvrent autour d'un protagoniste capable de voler librement dans toutes les directions font penser à une superproduction 2D de fin de Super NES/début PlayStation, en haute résolution. C'est fin, coloré, ultra détaillé. Et soumis à un cycle jour/nuit fonctionnel qui n'est pas pour déplaire. On s'extasie de voir les minéraux, végétaux et animaux si joliment dessinés. Et arrivé à l'épilogue, on n'a pas le souvenir d'une seule faute de goût. La cohérence et l'excellence se côtoient dans un univers frais mais qui semble néanmoins très familier. Le must reste évidemment le soin apporté aux personnages, dont un Otus muet mais des plus expressifs - tout comme ses compagnons et les différents antagonistes. Le character design se montre des plus réussis et les animations ne font pas clairement pas défaut à l'ensemble. Bref, côté réalisation, c'est sûr, on n'est guère déçu du voyage. Surtout qu'il est soutenu par une bande-son pour laquelle on sera vite à court de superlatifs, les thèmes orchestraux développés, auxquels se joignent parfois des sonorités plus synthétiques, sont simplement brillants et méritent, sans exagération, que l'on fouille dans les Internets pour se procurer la bande-son.
Way down in the Owl
Mais au-delà de la splendeur esthétique et sonore, Owlboy brille surtout par un gameplay et un tempo sans fausse note. Fait essentiellement d'exploration de zones variées, remplies de monstres, pièges et puzzles, et ponctuées de bosses nécessitant quelques bons réflexes, il voit notre très chouette et si mignon héros s'essayer à la plate-forme, à l'infiltration (en se cachant derrière des éléments au premier plan), ainsi qu'au shoot. Flottant à la demande, et répondant au doigt et à l'oeil, il peut déterrer, porter et projeter la plupart des choses qui lui tombent sous la main, histoire de fracasser un obstacle ou opérer un contrepoids sur un interrupteur. Ou se rassasier de fruit et légumes pour remplir sa barre de vie. Mais surtout, pour avancer, il devra compter sur l'amitié, thème central du jeu abordé avec justesse, d'autres personnages bien décidés à lui filer un coup de main.
Là où Otus ne peut que tournoyer pour, au mieux, faire sauter des armures de créatures volantes, d'autres sont équipés d'armes dont les fonctionnalités ouvriront de nouveaux chemins. Et pour en profiter, il faudra les porter, sans hésiter à les lâcher lorsque nécessaire. Il pourra d'abord embarquer Geddy, binoclard un peu gauche, qui lui fera profiter d'un tir basique, court mais rapide et efficace. Par la suite, d'autres lui apporteront un fusil explosif puissant, long à recharger mais capable de générer un petite flamme et un tir gluant faisant également office de grappin pour atteindre rapidement un endroit donné en toute invincibilité. Les armes se manipulent à 360° à l'aide du stick droit, donnant une action qui évoquera un Forgotten Worlds moderne et des interactions avec le décor qui se renouvelleront sans cesse. Tout ce qui fera qu'on ne parvient jamais à décrocher, c'est qu'à la façon de certains jeux Nintendo, les capacités de l'arsenal embarqué, à l'instar des phases citées plus haut, ne seront jamais surexploitées. De fait, chaque niveau - jamais trop long, jamais trop court et conçu de manière à ce que le backtracking ne soit pas un problème - se parcourra avec un vrai plaisir, sans jamais générer le moindre ennui.
Oiseau de choix
Au terme de la dizaine d'heures nécessaires (environ) pour en voir le bout, avec un pad qu'on jurerait scotché aux doigts, on cherche les défauts. Et hormis un dernier boss fight assez décevant par son envergure, rien ne vient à l'esprit. Même ceux qui pourraient trouver à redire sur la durée de vie fermeront leur boîte à camembert dès lors qu'il faudra partir à la recherche de toutes les pièces (qui en s'accumulant débloquent, dans la seule boutique du jeu, plus de vie, de nouveaux pouvoirs ou... des chapeaux) et médailles cachées ou simplement réussir un défi "canon". On en arrive donc à une simple conclusion : celle que Owlboy est joli, inventif, varié, vraiment bien raconté - avec autant d'humour que de noirceur - et parfaitement rythmé et balancé au niveau de sa difficulté. Bref, qu'il s'agit d'un vrai travail d'orfèvre. Et l'on se dit qu'il en faudrait plus souvent, des comme lui.