Si vous êtes venu ici en espérant lire le test d'un petit jeu pour enfants, qu'on fait machinalement en posant son cerveau à l'entrée, eh bien vous allez être déçu, car malgré les apparences, il s'agit de tout le contraire...
Il y a presque cinq ans, les gars d'Infinite Fall lançaient un kickstarter pour financer ce qui serait leur premier jeu : Night in the Woods. Après le succès phénoménal de la campagne (financée à plus de 400% de leur objectif initial), le titre est sorti en 2017 sur PC, Mac, Xbox One et PS4 et a connu un succès critique certain, un peu partout... sauf sur Gameblog, où il n'a tout simplement pas été testé. Vous vous demandez à juste titre pourquoi on ne vous en a pas parlé au moment de sa sortie ? Eh bien parce que Julo a raté le coche, tout simplement. Il a beau faire son malin à longueur de journée avec sa prétendue supériorité intellectuelle et son audition parfaite, la seule vérité, c'est que le jeu est passé à travers les mailles de son filet. Heureusement, grâce à la Switch et son lot d'adaptations qui arrivent en flux continu, Night in the Woods revient sur le devant de la scène, nous permettant ainsi de saisir l'opportunité de combler ce vide et de pouvoir vous parler de ce titre aussi choupi visuellement que profond intellectuellement.
Mae oh Mae
Night in the Woods est un jeu essentiellement narratif dans lequel on incarne Mae Borowski, jeune chatte de 20 ans et étudiante universitaire qui vient de plaquer les cours pour rentrer chez ses parents, dans sa petite bourgade natale de Possum Springs. Après un long moment d'absence, elle y retrouvera ses habitants et la bande de copains qu'elle fréquentait avant son départ. Parmi ses amis, on retrouvera Bea, une jeune crocodile, Gregg le renard et son compagnon, l'ours Angus.
Teenage Angst
Sous ses airs graphiquement enfantins, Night in the Woods traite de sujets très sérieux, aussi bien sociétaux que d'autres qui touchent plus à l'humain. Mae est confrontée aux angoisses post-adolescentes du passage à la vie adulte, avec notamment des questionnements sur la transmission parentale, l'évolution des rapports parents-progéniture, le déracinement, mais aussi des questions plus globales sur le marché du travail, son évolution ou encore l'industrialisation de la société. Malgré un style graphique innocent, chacun des personnages a sa propre histoire, faite de complexités et de faiblesses qui rendent les discours intéressants et crédibles. Et cela grâce à des dialogues superbement travaillés, lors desquels on passe rapidement de l'humour un peu crétin et absurde, voire régressif, à une séquence à la réflexion vraiment profonde.
En revanche, le jeu ne brille par un gameplay poussé. Comme évoqué plus haut, il s'agit principalement d'un jeu narratif dans lequel les dialogues prédominent largement, et dans lequel on se contentera de déplacer Mae d'un point A à un point B afin qu'elle rencontre un personnage et lance la conversation. Il y a bien quelques mini-jeux, mais ils ne sont pas bien poussés et tiennent plus de la parenthèse rigolote qu'autre chose. En dehors d'une sorte de Guitar Hero où l'on jouera de la basse au sein du groupe composé par Mae et ses amis, ainsi que des scènes de rêves entre chaque journée qui s'apparentent à un jeu de plate-forme classique, le reste tient de l'anecdotique. Néanmoins, étant donné qu'il ne s'agit pas de l'argument du jeu, ce n'est pas quelque chose dont on peut lui tenir vraiment rigueur.
My flowers are beautiful
Cela dit, on pourra lui reprocher ses nombreux aller-retours entre le domicile de Mae et celui de ses copains, qui agacent un peu sur la fin et rendent le titre répétitif. Mais une fois de plus, pour peu que l'on soit un tant soit peu happé par l'histoire- et ça a été notre cas, on lui pardonne bien volontiers. Il est à noter que cette version ne profite pas des capacités spéciales de la Switch. L'écran tactile n'est pas utilisé et il n'y a rien de gyroscopique. En revanche, les deux mini-jeux (Longest Night et Lost Constellation) que les développeurs avaient gratuitement mis à disposition des "backers" pendant le développement ont cette fois été intégrés. Un bonus appréciable, surtout pour Lost Constellation, qui propose une bonne heure de jeu dans une aventure pleine d'onirisme. Enfin, sachez également que l'intégralité du jeu est en anglais dans le texte et sans doublages. Pas de traduction française donc, alors si vous ne possédez pas un minimum de maîtrise de la langue de Mr Bean, vous pouvez passer votre chemin, ce jeu n'est pas pour vous (et j'ai attendu la fin du texte pour vous le dire, c'est dégueulasse, je sais).