Pendant que les Franciliens prient pour avoir un bus, un métro ou un train, Mosaic rappelle que même lorsque que tout circule correctement, le triptyque métro-boulot-dodo a bien des airs de calvaire. Ce jeu scandinave interroge également sur ce qu'on est en droit d'attendre d'un jeu vidéo, entre pertinence du propos et proposition de jeu.
Développé par Krillbite Studio, studio norvégien développeur d'Among the Sleep, et édité par les Suédois de Raw Fury, Mosaic propose en effet une sombre plongée dans un quotidien aussi commun que routinier. On y incarne un personnage longiligne et dégingandé, prisonnier de son train-train largement partagé par une grande partie de la population mondiale dans la réalité, à notre époque où tout tend à s'harmoniser, et en particulier le pire. Si ce constat vous parait bien pessimiste, celui dressé par Mosaic l'est encore plus. Dépourvus d'yeux, vos contemporains se détournent de votre regard, rendu hagard par la lecture matinale à peine réveillé de vains messages sur votre smartphone, avant, comme tous les jours, de se laver les dents et rentrer dans la danse macabre des journées qui se ressemblent ad nauseam.
L'ennui comme principe directeur
Si d'emblée le propos de Mosaic peut sembler un poil trop caricatural ou dépressif dans sa représentation, l'ambiance dystopique et glaciale du jeu permet de se plonger dans la noirceur (ou plutôt les nuances de gris) d'un quotidien dont bien des éléments sont pertinents et révélateurs de notre société. Pas trop longtemps cependant, trois heures pour être précis. Une durée de vie qui semble tout de même un peu longue pour un jeu dans lequel l'interactivité est réduite à son strict minimum... afin d'intensifier le sentiment d'ennui. Car c'est bien la volonté de Mosaic : proposer un jeu avec l'ennui au coeur, dans lequel l'utilisation d'une appli façon Tinder ou tout autre action est forcément décevante. Mais au final, on se demande si la démonstration n'aurait pas été aussi efficace à travers, par exemple, un court-métrage. Rien ne sera épargné au joueur pour lui faire comprendre qu'il n'est pas ici pour s'amuser mais pour constater de la dénonciation de l'aliénation.capitaliste. Demeure alors la question de savoir si le message transcende la proposition de jeu. De mon point de vue, l'ensemble est trop caricatural et dénué d'ambition ludique pour exprimer son plein potentiel.