Les rogue-like indépendants, ce n'est pas ce qui manque aujourd'hui. On peut même dire qu'il y a en a à tous les coins de rue. Mais combien partent avec les atouts de Moonlighter, à savoir une direction artistique qui tape immédiatement dans l'oeil et une histoire qui permet de mêler exploration de donjons et simulation de vente ? Très peu. Mais cette proposition rare et alléchante, qui a intrigué plus de 5000 contributeurs sur Kickstarter, mérite-t-elle un investissement aveugle ?
Rynoka était une petite bourgade bien paisible, pas très peuplée, voire un peu morte. Mais l'ouverture de quatre donjons non loin attire du monde. Les héros se pressent pour entrer dans ces lieux bondés de monstres et trouver le secret qui permettra d'accéder au cinquième. Will tient une échoppe dans ce village. Et il n'a qu'une envie : partir à l'aventure. D'abord pour la curiosité et l'adrénaline. Enfin, parce que ça sent le loot. Et que c'est bon pour les affaires.
Fourchettes de prix et sac à dos
Avec Moonlighter, vous voilà embarqué dans une routine simple faite d'exploration et de baston le jour, de revendons et d'achetons la nuit. Les premiers pas armé d'un balai dans un donjon de pierre où errent des slimes et créatures à crocs acérés peuvent faire peur et exciter à la foi. Mais avec une bonne maîtrise de l'esquive et des coups portés avec plus ou moins de précaution, les hit boxes pouvant être qualifiées d'aléatoires, ça passe. Et déjà, on commence à se projeter vers l'avenir. Le sac à dos se remplit d'objets. Et une fois plein, on s'imagine déjà de retour au village pour se séparer du superflu. Pour ce faire, il n'y a pas trente-six solutions : soit les pieds devant (et avec seulement 5 objets de son bagage conservés, dur), en faisant appel à une amulette de retour pour une petite somme, un portail d'aller-retour - histoire de reprendre là où on avait abandonné - pour une plus grosse somme, ou en ayant vaincu le boss. La dernière option prendra un peu de temps, dans le sens où il vaut mieux se pointer stuffé convenablement. Comprenez que les bénéfices récoltés seront immédiatement réinvestis dans des protections et armes disponibles chez le forgeron ainsi que des potions et enchantements permanents de la magicienne.
La nuit, je vends ?
Une fois à la maison, on profite de la journée pour vider son sac, exposer les objets dans sa boutique, non sans leur avoir appliqué un prix. Petit jeu dans le jeu, il faudra savoir quels tarifs conviennent pour que tout parte. Un exercice plutôt amusant, contrairement à la phase de vente, rapidement rébarbative. Il s'agira toujours d'attendre qu'un client se pointe à la caisse pour ramasser les deniers (s'il attend trop, il se barre avec l'article) ou qu'un voleur tente sa chance pour qu'on puisse l'attraper la main dans le sac et le rosser comme il se doit. Peu importe comment l'on aborde cette phase, que le lieu de vie se retrouve agrandi, aménagé de bonus, que l'on choisisse de répondre aux requêtes des villageois pour un petit pourliche, on reste assez déçu de l'aspect mécanique et sans rebondissements du début à la fin - d'autant plus pénible que la navigation dans les menus est assez mal pensée. Mais on le fait, parce qu'il faut bien gagner sa vie et voir les choses en grand pour attirer les héros, les pigeons. En aidant à l'arrivée d'autres magasins et en agrandissant le sien pour stocker et exposer toujours plus.
Item le lundi
Le manque d'entrain gagne aussi à mesure que l'on progresse dans les différents stages. N'espérez pas que les 4 donjons, générés aléatoirement, vous procurent des sensations dingues. Chacun des trois étages précédant un boss se compose d'une dizaine de pièces remplies de créatures sans particularités, qu'on connaît rapidement par coeur et qu'on zigouille de façon mécanique. Aucun piège, aucun puzzle. Peut-être un secret sur certaines chutes, mais c'est tout. Une fois les bonnes ressources récupérées et la somme nécessaire récoltée, que l'on soit adepte de la grosse épée, de la lance ou encore de l'arc, les choses se décantent assez vite côté équipement, en engrangeant la thune.
La progression jusqu'aux tous derniers instants, un dénouement tout sauf mémorable au bout d'une dizaine d'heures, s'effectue dans une redondance bien marquée que rien ne semble vouloir briser convenablement sans une contrepartie trop lourde. Laisser l'assistant vendre le jour pendant qu'on profite plus longtemps d'un donjon ? On perd un blé monstre. Le banquier ? Attendre qu'un jour votre placement vous profite ? Le magasin qui vend les ressources qui pourraient vous servir à confectionner ? Autant retourner plusieurs étages d'un donjon avant de programmer un retour, ce sera plus profitable. Pourquoi se compliquer la vie avec des mécaniques qui n'apportent rien ? Là est la question. Beaucoup répondront que c'est parce qu'on est face à un jeu ravissant, porté par de très belles mélodies, à l'univers de prime abord intéressant. Reste que la marchandise Moonlighter, qui faisait tant envie en photos et en vidéo, qui accuse parfois quelques bugs gênants (comme une porte irrémédiablement fermée ou un onéreux portail qui disparaît), n'est pas exactement à la hauteur de ce que l'on imaginait. Dommage.