L'absence de mode "Histoire", fût-il l'apanage des crus portables, avait été largement critiquée dans les dernières éditions, aux arrières-goûts plus ou moins prononcés d'inachevés d'ailleurs. Fort de son prestigieux (mais lointain) passif en matière de RPG, Camelot se fend donc d'un mode "aventure" qui débute avant même de pouvoir accéder au menu principal, porté par les musiques de Motoi Sakuraba.

Une sombre intrigue de "Rakhet" antique maudite, de facétieux sbires tombés sous son emprise et des gemmes disséminées aux quatre coins du monde, le tout narré par le bien nommé Oservis accompagné d'une courte cinématique en guise de préambule, l'intention est là, indéniablement. L'inspiration... moins. Ainsi l'espoir de plonger dans une grande épopée tennistique ne tarde pas à s'estomper, puisqu'au delà de twists scénaristiques aussi rares que navrants - y compris pour les aficionados du sportif moustachu redevenu plombier - ce bref périple réservé à Mario se résume à suivre un chemin balisé, dont les quelques détours ne servent qu'à se livrer aux défis optionnels, dans l'optique de glaner de l'expérience et des raquettes supplémentaires dotées de caractéristiques supérieures, sans réelle utilité à terme.

RAS (la cas)quête

Celles-ci étant cassables (mais remises à neuf entre les épreuves), il s'agit en somme d'étoffer son équipement et ses compétences, montée en niveau de notre héros à l'appui. Le sympathique travail de mise en scène des arènes (déverrouillées au passage) amène un peu de dépaysement au travers d'éléments parfois assez originaux, tels que la présence d'un mât en plein milieu du court, situé sur le pont d'un bateau pris dans la tempête, ou d'énergumènes qui déambulent inopinément sur le terrain partiellement enneigé. Ces mini-jeux déguisés dévoilent toutefois rapidement leur véritable fonction, à l'instar des (vaines ?) velléités d'énigmes vite effacées pour se recentrer sur les Boss, les vaincre demandant d'élaborer une stratégie spécifique. "Casquette basse" quant à l'imagination déployée pour leur donner des patterns qui rendent ces confrontations à la fois spectaculaires et très malicieuses par rapport au gameplay. Hélas la méthode de progression par l'échec (et sans try again immédiat) se révèle pénible compte tenu du challenge plutôt exigeant, et de son approche globalement scolaire, car elle conduit à apprendre puis appliquer strictement les différentes mécaniques.

Power Instinct

Il faut dire que Mario Tennis Aces introduit nombre de principes additionnels, à commencer par "l'instinct". Une jauge d'énergie se remplit au fil des échanges (un peu comme dans Mario Power Tennis), a fortiori avec les coups chargés, et permet d'exécuter une "frappe instinct", qui arrête le temps pendant que l'on vise un endroit précis du court via le gyroscope ou le stick, façon bullet time. De quoi placer une grosse accélération à distance de l'adversaire, ou directement sur lui dans le but de le toucher et d'abîmer sa raquette. En outre, la "super frappe instinct" la brise instantanément s'il ne parvient pas à l'intercepter avec le timing adéquat, de sorte que la confrontation se solde par un forfait une fois le stock de raquettes épuisé. Une vision pleine de punch et résolument singulière du tennis, voire un tantinet tirée par la moustache, mais qui se justifie par l'opportunité de terminer plus rapidement les matchs - un aspect crucial en ligne. Heureusement, on a toujours loisir de s'écarter de ces balles assassines, ou de les renvoyer grâce aux "courses instinct", très pratiques en défense pour atteindre des balles apparemment hors de portée.

Contre-attaque technique

Idem pour les "frappes techniques", encore plus délicates, qui consistent à effectuer des pirouettes in extremis, avec un bonus ou un malus d'énergie selon l'exactitude du timing. Ce dernier constitue décidément le maître-mot de cet épisode, même s'il aurait probablement gagné à s'exprimer ailleurs que dans l'art du contre. Les acrobaties ainsi réalisées s'inscrivent certes dans la logique sensationnaliste de la saga, mais les interruptions suscitées par les frappes "instinct" cassent le rythme. Évidemment, d'aucuns y verront une réinterprétation des variations de tempo engendrées par les changements de vitesse et de types de coups dans le vrai tennis, ce qui se défend. A ce propos les frappes "chance", soumises à un positionnement dans une zone étoilée et assorties d'effets accentués, demeurent déterminantes, d'autant qu'elles sont en prime la condition nécessaire au déclenchement des frappes "instinct". L'apparition de ces étoiles, théoriquement sur un emplacement idéal du terrain, joue par conséquent un rôle prépondérant, et plus ou moins arbitraire vis-à-vis du déroulement des parties, sensiblement formatées par l'usage éminemment tactique de l'instinct (services canons inclus).

Switch Sports Tennis

Ce Mario Tennis Aces n'a cependant rien perdu de son caractère accessible, en témoignent la prise en main aisée (assistances relativement généreuses obligent), et la rareté des fautes, qui ne surviennent qu'en cas de situation extrêmement déséquilibrée, ou de ciblage raté d'une frappe instinct. Dans la même philosophie, le mode "dynamique" reprend avec brio la recette de Wii Sports, nonobstant les écrans splittés imposés dès qu'il y a deux participants. Un aspect "motion gaming" clairement distinct au sein d'Aces où les erreurs (voire les errances) sont courantes, jusqu'à incorporer le fameux "challenge" afin de contester les annonces des juges. Dommage que ces notions de prise de risque - fondamentales de ce sport - ne figurent pas dans l'ensemble des modes, alors que l'évolution du système de double frappe semblait tout désigné pour flirter avec les lignes. En l'état, il n'occasionne qu'un surcroît de puissance au détriment de l'angle de la trajectoire, un léger manque de profondeur préjudiciable avec les règles "classiques". Autrement dit, son impact n'a guère plus d'influence sur le cours des matchs que les différences de rebond suivant les surfaces, assez diversifiées néanmoins.

Multi-match

Le nombre ridiculement réduit de courts (7 sans compter les versions nocturnes), à l'image du casting de personnages restreint à 16 en l'attente des DLC, n'empêchent pourtant pas de s'amuser joyeusement, et durablement avec ses amis, ou naturellement en ligne, seul comme en équipe de doubles (si besoin avec l'IA très interventionniste quoique toujours pertinente). Cela dit, un choix étendu de matériel non décoratif aurait autorisé là encore de plus grandes ambitions... Malgré la présentation alambiquée de la sélection des paramètres, les parties libres et les tournois se passent dans la bonne humeur. La possibilité avant chaque tour de refuser d'affronter le concurrent proposé aide notamment à éviter les éventuels tricheurs, ou ceux disposant d'une connexion internet trop lente. Sans surprise, le moindre lag s'avère désastreux, surtout avec les ralentissements déjà crées par l'usage de "l'instinct", au point de transformer les rencontres saccadées face à des rivaux puissants ou rusés en cauchemars. Mais dans une configuration normale, l'affichage en 60 images par seconde contribue à faire de Mario Tennis Aces l'une des expériences multijoueur les plus grisantes tous genres confondus, un as de la discipline !