Après un Hitman Absolution aux allures de road movie linéaire et assez orienté action, le très charismatique tueur à gages de IO Interactive a décidé de revenir aux fondamentaux, à quelque chose de plus proche de sa prestation la plus mémorable : Blood Money. Back to the bac à sable, donc, pour ce sixième volet sobrement intitulé "Hitman" et qui se voit découpé en format épisodique. Cet "'Intro Pack" donne une bonne indications des forces et faiblesses d'un Agent 47 fidèle à lui-même.
Comment 47 a-t-il été recruté par l'International Contract Agency (ICA) ? C'est ce que vous propose d'apprendre le prologue de ce premier épisode des nouvelles aventures du chauve au code-barre. Ce bond d'une vingtaine d'années en arrière vous voit apprendre comment l'assassin aux yeux d'acier a signé son CDI sous la bonne garde de Diana Burnwood, son agent de liaison historique. On apprend que tout aura commencé par deux missions-tests, "pour du beurre", recréant dans un hangar des contrats passés et permettant au joueur de retrouver ses marques ou de simplement s'acclimater en découvrant les éléments avec lesquels l'homme à la cravate rouge va pouvoir composer. Un bon tuto avant le grand bain.
Comme au bon vieux temps
Dès les deux scénarii d'échauffement - qui vous emmènent dans un paquebot où il faut zigouiller l'hôte omniscient d'une fête privée sacrément sécurisée, puis dans un hangar sous surveillance soviétique dont un joueur d'échec va s'extirper en avion de chasse - les sensations sont bonnes. Voire très bonnes. Guidé par les bons conseils et les remarques de Diana, on redécouvre le plaisir de l'infiltration selon IO Interactive. Une progression bien dissimulée, des éliminations silencieuses, des corps à traîner (oui, le héros, pourtant gaillard, se refuse à les porter comme des sacs à patates façon Big Boss) et planquer, des déguisements qui permettent d'accéder à certaines zones restreintes, à condition de ne pas croiser quelqu'un qui puisse vous identifier au premier coup d'oeil, un peu de grimpette, de ruse... Tout ce qu'on attend est là
Aux mécaniques classiques s'ajoutent évidemment nombre d'objets aux utilisations très variées pour tuer froidement. Que ce soit des ciseaux, une clé anglaise, du poison, une brique, sa corde à piano, un projecteur, une bombe à déclencheur, des gogues, un pied de biche et j'en passe, notre héros sait toujours quoi faire avec ce qui peut passer à portée de ses mimines gantées. Et agir au bon moment. Pas forcément de manière directe, d'ailleurs. Pourquoi pas provoquer des "accidents", comme faire tomber un projecteur ou un lustre, au lieu de risquer de s'exposer ? Ou provoquer un passage aux toilettes pour récupérer le costume d'un personnage dont aucun convive ne connaît l'identité ? Les possibilités sont, déjà dans ces environnements de départ (pas trop vastes), assez nombreuses, et mine de rien, malgré un léger effet de déjà-vu dans certains cas de figure, assez étonnantes. Nous amenant parfois à imaginer comment tirer parti de choses anodines et auxquelles personne n'aura accès en réalité. Reste que les choses sérieuses commencent après ça...
Paris, tout ce que tu veux
Une fois les deux niveaux introductifs passés, retour à notre époque pour un contrat tout ce qu'il y a de plus réel. Direction Paris et un défilé de mode se tenant dans un gigantesque et luxueux bâtiment en bord de Seine. Le mot gigantesque est d'ailleurs assez faible pour décrire l'aire de jeu dont on aperçoit d'abord un rez-de-chaussée où se trouvent le catwalk, différents espaces de réception et cocktail, les loges des modèles, un grand jardin avec hélico, plusieurs parkings. L'endroit s'étend aussi dans la verticalité avec un sous-sol comprenant notamment une cuisine. Et je ne vous parle pas des différents étages supérieurs qui recèlent eux-mêmes d'autres secrets...
Vos cibles sont Viktor Novikov, dont le garde personnel n'est jamais loin, et Dahlia Margolis, ancien mannequin encore plus difficile à atteindre. Avant d'entrevoir des failles, vous allez gambader, observer, noter, expérimenter. Profiter d'une vraie sensation de liberté - renforcée par l'abandon du système de checkpoints pour une sauvegarde envisageable à n'importe quel moment. Une sensation qui submerge presque lorsque l'on découvre la foule, massive, avec cette impression que tous les yeux se braquent sur vous dès que vous commencez à mettre un orteil dans une zone réglementée. D'ailleurs, c'est le cas. Mais fort heureusement, les suspicieux vous conseilleront le demi-tour poliment, sans sortir immédiatement les pétoires comme cela pouvait être le cas auparavant. Bref, difficile de savoir par où commencer.
C'est trop bien d'se déguiser
C'est là que l'Agent 47 peut commencer à faire valoir ses facultés incroyables. Outre son instinct qui lui permet de mettre en surbrillance tout ce qui peut avoir de l'importance et de sentir les présences à travers les murs, il dispose d'un sens de l'observation aiguisé qui lui permettra, par moments, d'entendre des conversations importantes ou découvrir des notes le menant à des Opportunités. Il s'agit d'un nouveau système qui va mettre en évidence des marches à suivre, balisées et qu'on peut choisir ou non d'activer (comme toutes les aides), en vue de parvenir à ses fins. Un mannequin vous ressemble ? Celui-ci a en plus un rendez-vous avec Margolis ? Une journaliste s'apprête à avoir une interview ? L'organisateur raffole d'un certain cocktail ? Trouvez un moyen de vous procurer le bon habit et les bons outils pour profiter de ces brèches, en respectant les agendas et les routines, of course. Les bonnes fringues, au passage, ça ne suffit pas toujours. Les PNJ surmontés d'un point blanc, qui connaissent chacun des membres d'une classe, auront immédiatement l'oeil pour vous démasquer. Et devenir suspicieux ou être pris en flagrant délit, croyez-nous, vous n'en aurez pas envie. Car sortir du cadre imposé par le style du jeu, qui exhorte clairement à la jouer fine, mène à de belles désillusions.
Je danse sur l'I.A.
Si l'improvisation et la facétie ont quand même droit de cité, dès que l'on commence à se faire repérer et que l'action s'en mêle, la machine se détraque. Comme à chaque épisode, la liberté d'action, l'ambiance vraiment très réussie et la réalisation d'assez bonne qualité sont contrebalancées par des erreurs un peu gênantes. Cela commence par une intelligence artificielle qui peut vous mettre face à des PNJ au Q.I. compris entre le mouton et l'oursin, qui oublient d'agir ou viennent se faire flinguer à la queue-leu-leu. Et d'autres qui, au contraire, vont communiquer par télépathie pour vous dénicher dans n'importe quel recoin de la map et vous trouer la peau avec l'aisance d'un Keanu Reeves s'entraînant pour John Wick 2. Sauf si vous changez de vêtements. Là, se faire oublier quelques secondes pourra suffire. C'est variable et ça gâche parfois des séquences de jeu qu'on imaginait parfaites, obligeant même à faire des victimes, quand bien même on sait que tuer des innocents entache sérieusement le score final.
Intro n'en faut
Reste qu'au-delà de ces accrocs, et des chargements d'une quarantaine de secondes qui cassent le besoin effréné de retourner au turbin, il y a une formule qui fonctionne du tonnerre et qui pourra vous occuper un moment. Rien que pour cet Intro Pack et ses trois bacs à sable, on trouve un nombre de défis et petits challenges impressionnants. Certes dans des lieux qu'on va finir par connaître par coeur. Mais justement, à force, on en viendra à chercher la difficulté ou tenter en commençant dans d'autres conditions, avec un autre équipement. Outre le plaisir de découvrir d'autres approches et réaliser des exploits spécifiques, il y a les contrats de type Escalade qui vous voient enchaîner divers tâches très spécifiques, ceux que vous pourrez créer et partager en ligne, en marquant et tuant des quidams comme vous le souhaitez avant de fuir la map, et les cibles fugitives qui viendront, 48 heures par semaine, s'offrir à vous. Ce qui constitue une base des plus solides, avec un léger cliffhanger au termes de la quête principale, qui donne envie de savoir ce qui vient ensuite et qui, d'après notre petit doigt, ne compte pas restreindre les espaces à explorer ou les méthodes à employer...