Pour Microsoft et son studio canadien The Coalition, Gears of War 4 représentait un double défi. Le premier était de se montrer digne du travail effectué par Epic Games sur la première trilogie Gears of War, et le second était d'en faire l'un des joyaux de la Xbox One, comme l'a été le premier épisode pour la Xbox 360. Ces défis ont-ils été relevés avec succès ? C'est ce que nous allons voir sans plus attendre...
Ce test de Gears of War 4 doit évidemment évoquer son scénario. Mais traiter ce sujet est un exercice pour le moins délicat. Le jeu se déroulant 25 ans après Gears of War 3 et mettant en scène de nouveaux protagonistes, il est extrêmement aisé de sauter à pieds joints dans un spoiler. D'autant plus que le jeu réserve un certain nombre de surprises aussi bien aux novices de la saga qu'aux fans de longue date. Pour faire simple, à l'issue de la guerre contre les Locustes, l'humanité a tant bien que mal tenté de se reconstruire. Mais face à la gestion très militaire des populations par la Coalition des Gouvernements Unis (CGU), qui a décidé de réunir les civils dans des villes fortifiées, des groupes de rebelles ont préféré quitter le joug de la GCU et créer des communautés indépendantes. Si les deux camps se mènent une guerre plus ou moins froide, l'irruption d'une nouvelle menace va obliger les trois nouveaux héros à prendre part à un type conflit qu'ils n'avaient jusqu'à présent vu que dans les livres d'Histoire.
La relève est assurée
Vis-à-vis de l'histoire racontée et son déroulement , il est indéniable que la campagne de ce quatrième épisode numéroté de Gears of War est une belle réussite. Elle jongle habilement entre une impression de familiarité qui réconforte les fans de la première heure tout en parvenant à les surprendre. La nouvelle ère qui s'ouvre ici ne tire pas un trait sur le passé et parvient à ne pas être esclave de ce dernier. Ce nouveau titre accompagne par ailleurs le joueur "en douceur "pendant la transition vers la nouvelle ère de Gears of War et évoque des pans inédits de la mythologie de la série, tout en proposant du fan service en quantité suffisante. Impossible de rentrer dans les détails sans révéler d'éléments que les joueurs auront envie de découvrir par eux-mêmes. Mais il est possible de dire que le découpage des missions ainsi que les différents personnages mis en scène au cours de ces dernières permettent d'alterner entre tradition et modernité (les nouveaux protagonistes n'ont par exemple pas la même manière de s'exprimer et le même état d'esprit que les héros historiques, car ils n'ont pas eu la même vie). Et il est à ce propos amusant de voir que les scénaristes de Gears of War 4 se sont laissés plusieurs options pour le futur Gears of War 5. À n'en point douter, l'accueil que réservera le public au jeu va déterminer le chemin que prendra la prochaine suite.
La campagne de Gears of War 4 peut également être félicitée au sujet de l'expérience de jeu qu'elle procure au joueur. Grâce à la variété des environnements et des situations, le joueur progresse de manière continue sans jamais éprouver la moindre sensation de lassitude. Évidemment, les différents points de sauvegarde et la configuration de certaines zones indiquent aux joueurs habitués quand les choses sont sur le point de dégénérer. Mais ce chipotage mis à part, il est clair que cette campagne est extrêmement maîtrisée. Si les habitués de Gears of War seront évidemment en terrain connu du point de vue de la prise en main, les concepteurs du jeu ont ajouté suffisamment de nouveautés pour les surprendre. Là encore, nous n'entrerons pas dans les détails pour ne pas gâcher la surprise des joueurs, mais il est tout de même possible de dire que les développeurs ont ajouté plusieurs séquences qui sortent des sentiers battus de la série, en termes de mise en scène et de gameplay.
En parallèle à cet élément, les combats contre les boss contribuent eux aussi à diversifier l'expérience. Différents au niveau de leur apparence et de leurs compétences, ces boss peuvent donner fort à faire au joueur. Plus particulièrement en solo dans les niveaux de difficulté les plus avancés (fichus Écumeurs). En ce qui concerne la durée de vie de cette campagne, votre serviteur a mis 13 heures seul, en difficulté Vétéran et en prenant le temps d'éplucher les niveaux (pour récupérer les différents objets à collectionner) pour terminer le jeu. Des joueurs qui ne se soucient pas de ces derniers, ou qui jouent en coopération, pourront donc certainement traverser le mode histoire bien plus rapidement. Dans l'ensemble, la campagne de Gears of War 4 fait honneur à la série et propose le meilleur de ce que la licence a à offrir.
Beau mais pas magnifique
Impossible de parler de Gears of War 4 sans évoquer sa réalisation. Vu le pedigree de la série, il était cohérent de s'attendre à ce que ce nouvel épisode devienne immédiatement le mètre-étalon de la Xbox One. Ce rôle reste cependant occupé par Forza Horizon 3. Mais il ne faut pas se méprendre, Gears of War 4 est beau. Très beau même. Mais pas tout le temps. La modélisation des personnages n'est par exemple particulièrement pas marquante, et cette sensation est accentuée par les scènes cinématiques dans lesquelles ces mêmes personnages sont beaucoup plus beaux. La campagne transporte les joueurs dans des environnements très différents et il apparaît qu'ils ne se valent pas tous en termes de beauté et de design. Certains intérieurs de type industriel ne sont par exemple pas très inspirés, alors que le jeu affiche également des extérieurs très fouillés et détaillés. De plus, il est également possible de noter quelques petites baisses de framerate dans cette campagne dont le taux de rafraîchissement a été fixé par les développeurs à 30 images par seconde. Cela étant dit, certaines séquences du TPS parviennent également à être spectaculaires. En particulier grâce à la gestion des effets de lumière et de particules, ainsi que du vent.
Ce dernier ne correspond pas uniquement à un bout de tissu qui vole au vent de manière ininterrompue et scriptée. Le vent fait partie intégrante du gameplay de plusieurs zones. Le joueur, qui voit sa progression gênée par le vent, doit également en tenir compte lorsqu'il envoie des grenades. Il peut de plus l'exploiter pour causer davantage de dégâts aux ennemis. Il est en somme très plaisant de voir les bouts de corps des ennemis ainsi que les morceaux de décor voler au vent et passer à côté des héros alors qu'un gun fight fait rage en pleine tempête. Et pour en finir avec la réalisation de Gears of War 4, il paraît également important de rappeler que, contrairement à Halo 5 : Guardians, le titre de The Coalition permet la coopération à deux en local. Et si des concessions graphiques ont dû être faites afin de permettre le jeu à deux en écran partagé, le studio canadien a bien fait de les faire. Le multijoueur sur canapé a toujours fait partie de l'ADN de Gears of War, et sa présence dans ce nouvel épisode est une excellente chose.
La guerre, c'est meilleur à plusieurs
Un jeu Gears of War, c'est un univers et une campagne scénarisée, mais c'est aussi des modes de jeu multijoueur. Le multijoueur compétitif est donc de retour et il est accompagné d'un certain nombre d'éléments inédits pour la série. Le mode "Dodgeball" reprend par exemple les règles de la balle au prisonnier (qui permet de faire revenir un équipier mort en tuant un membre de l'équipe adverse) tandis que Course à l'Armement demande aux deux équipes d'utiliser la quasi totalité des armes du jeu au cours d'une partie.
À côté de la partie compétitive du multi de Gears of War se trouve bien évidemment le mode "Horde". Ce dernier, qui tourne en 30 images par seconde, permet encore une fois de coopérer avec d'autres joueurs et de faire face à des vagues d'ennemis. Les adversaires tués laissent tomber des crédits qui servent ensuite à fortifier une zone (à l'aide de barbelés, leurres, tourelles, etc.) et donc de mieux affronter l'ennemi. En cours de round, il arrive également que des objectifs temporaires qui pimentent encore plus les parties se déclenchent (comme faire six kills à la tronçonneuse par exemple). Une fois remplis, ces objectifs débloquent des récompenses. Dans cette nouvelle version du mode Horde, le joueur a la possibilité d'associer une des classes suivantes à son personnage : Soldat, Sniper, Ingénieur, Lourd ou Repérage. Comme le veut la logique, les différentes classes ont leurs compétences et spécificités et tenir compte de ces dernières rend plus efficace sur le terrain et permet au joueur d'incarner un avatar qui correspond mieux à son style de jeu.
Histoire de pousser un peu plus loin la personnalisation des avatars, le joueur a la possibilité de lui attribuer des compétences de classe. Ces compétences, différentes d'une classe à l'autre et améliorables, permettent par exemple d'augmenter le nombre de grenades que le joueur peut porter ou augmenter les dégâts du fusil d'assaut. Les compétences de classe, comme les Primes qui donnent la possibilité de gagner de l'expérience bonus en effectuant certaines actions (ainsi que les éléments de personnalisation esthétique des personnages, comme les skins d'armes par exemple), sont liées à un système de packs de cartes au contenu aléatoire qu'il est possible de débloquer à l'aide de crédits obtenus en cours de partie ou en passant par la case microtransactions. Vue la vitesse à laquelle les crédits s'accumulent et le caractère aléatoire du contenu des packs, le but est d'inciter les joueurs à passer à la caisse. Malgré cela, il apparaît tout à fait possible de profiter des modes multijoueur de Gears of War 4 sans acheter de crédits.
Du point de vue de la réalisation, le mode multi compétitif de Gears of War 4 est marquant car il tourne en 60 images par seconde. L'impact de cette hausse du taux de rafraîchissement de l'image se ressent immédiatement. Les parties sont dynamiques, fluides et rapides. Et contrairement à l'impression que nous avait fait la bêta multijoueur du jeu, le mode multi est graphiquement réussi. Les décors sont sophistiqués, leurs textures sont nettes et ils ont même droit à de jolis effets de feu et d'eau. Si la qualité du gameplay du multi n'a jamais été remis en cause, la réalisation de la version finale est une agréable surprise. Qu'il s'agisse du multi compétitif ou du mode Horde, les modes multijoueurs de Gears of War 4 correspondent clairement à des points fort du titre.
Le changement malgré la continuité
Comme indiqué plus haut, la prise en main de Gears of War 4 se fait immédiatement pour qui a déjà joué à un des précédents épisodes. Et pour ceux qui découvrent ici l'univers de Marcus Fenix, l'initiation devrait se faire en douceur. La qualité du gameplay et le confort de jeu, qui ont fait la renommée de la série, ont été compris et reproduits par les développeurs de The Coalition. Mais cela ne veut pas dire que le jeu est une vulgaire redite de ce qu'Epic Games a fait précédemment. Le studio a créé son titre sur les solides fondations construites par Cliff Bleszinski et compagnie, tout en ajoutant de nombreux éléments inédits. Le célèbre système de couverture de Gears a par exemple été étoffé à l'aide de nouvelles possibilités offensives. Lorsque le joueur est caché et qu'un ennemi se cache de l'autre côté du même objet, il a la possibilité de tenter de surgir de sa cachette et tirer cet adversaire de son côté. S'il réussit, l'ennemi est étourdi un bref instant ce qui permet de l'achever avec une attaque au corps à corps. Mais s'il se rate, il se retrouve alors exposé et donc totalement vulnérable.
Une autre nouveauté, elle aussi liée au système de couverture, permet à un personnage d'exploiter son élan lorsqu'il passe au-dessus d'un muret pour mettre un coup à un ennemi caché derrière ce même obstacle. S'il est réussi, le coup déstabilise l'ennemi et l'expose pendant un instant au courroux vengeur du joueur. Rester caché et tirer à distance n'est donc pas une solution toujours viable dans Gears of War 4. Il faut bien choisir ses mouvements et ne pas imaginer que l'IA n'exploitera pas ces nouvelles possibilités. Car cette dernière n'hésitera pas à les utiliser. Dans certaines situations, il est également possible de tirer sur des cocons du Swarm accrochés au plafond. Ces derniers deviennent alors des couvertures temporaires qui, une fois détruites, peuvent mener à l'apparition d'ennemis supplémentaires.
En plus de ces améliorations apportées au système de couverture, l'équipe de Rod Fergusson a également agrandi l'arsenal auquel ont accès les joueurs. Le lance-disques envoie par exemple des projectiles qui peuvent rebondir contre des parois et tuer plusieurs ennemis en un seul tir. Le fusil Dropshot projette quant à lui de grosses vis que le joueur peut diriger. Si ce dernier vise bien, la vis explose la tête de l'ennemi et le tue donc en un seul coup. La finesse à la Gears, en somme. Ces ajouts collent parfaitement au gameplay de la série et permettent aux fans de longue date d'avoir de nouvelles choses à découvrir et à apprendre à maîtriser/exploiter. Pour qui aime un tant soit peu les jeux de tir à la troisième personne, Gears of War 4 est indéniablement une vraie réussite.