Midgar, Cloud, Aerith, le Secteur 5... Même sans insérer la lourde galette dans votre console, l'univers de Final Fantasy VII semble déjà si familier, et confère cette drôle de sensation alors que l'écran titre s'affiche : celle de retrouver de vieux amis qui n'auraient pas donné de nouvelles, mais dont le souvenir serait resté intact. Sauf qu'à l'inverse de notre univers, le temps qui passe bonifie la technique dans celui du jeu vidéo, et c'est ainsi un monde transformé, magnifié et pourtant si reconnaissable qui s'offre à nous. Impossible de faire la fine bouche devant l'incroyable ravalement de façade qui se dévoile dès les premières secondes de Final Fantasy VII Remake. L'Unreal Engine 4 fait des merveilles dans les mains de Square Enix, et ne nous fera pas regretter le Luminous Engine maison. S'il ne faudra pas trop s'attarder sur les coulisses, la plastique du jeu lui confère une nouvelle identité, en même temps qu'un supplément de classe, qui transforme la perception que nous pensions avoir de cette ville à complètement redécouvrir, plus dense et complexe que jamais.

En rupture nette avec les angles de caméra fixes de la version de 1997, Final Fantasy VII Remake pousse le joueur à lever la tête, à observer tout autour de lui la triste réalité d'une mégalopole industrielle et son lot de dérives, écrasante et menaçante. La technique est surtout là pour servir une forme de narration environnementale qui offrira de nouvelles clés de lecture à ceux qui s'arrêteront en chemin pour mieux observer leur environnement, et ravira simplement avec justesse les pupilles des autres.

Midgargantuesque

Ce n'est pas faute de l'avoir crié sur tous les toits : avec ce Remake, nous allions pouvoir explorer les bas-fonds de Midgar d'un oeil nouveau, et ainsi prendre la mesure du quotidien de ses habitants désoeuvrés. L'aventure tient sur ce point toutes ses promesses, puisque Cloud sera dès son échappée du réacteur n°1 confronté à la pauvreté qui touche cette partie de la population, mais aussi aux conséquences directes de ses actes. Si rien n'est plus vraiment binaire, l'attentat à tout de même eu des répercussions aussi négatives qu'immédiates sur les habitants des faubourgs attenants, et c'est parmi les victimes plaintives qu'il faudra se frayer un chemin pour retrouver la quiétude du Septième Ciel. Les environs du QG d'Avalanche offriront justement une plongée dans ce quotidien morose, où les rues sont parsemées de détritus, et où les animaux errent sans but, comme certains de leurs maîtres. Les enfants vagabonds du Secteur 6, la luxure isolée d'un Wall Market aux inspirations japonisantes assumées : tous les quartiers de cette monstrueuse cité possèdent une identité marquée, juste, et qui donne l'impression que l'enrichissement de ce drôle d'univers a fait l'objet de toutes les attentions.

Avec beaucoup de justesse, Square Enix a su profiter du fossé technologique qui sépare Final Fantasy VII de ce Remake, en offrant un panorama à la démesure de cette mégalopole aussi bicéphale qu'inégalitaire. Empruntant à Gunnm la supériorité de sa ville haute, Nomura est parvenu à rendre compte en permanence de la permanence d'une forme de domination sociale : il suffit en effet de lever la tête pour se rendre compte de l'écrasante présence des quartiers supérieurs, et à quel point leur seule présence obscurcit durablement les plus pauvres de ses citoyens. La ville est toujours présente, écrasante, et l'infiltration du Secteur 5 qui surplombe les taudis offre une vision aérienne de la folie en proie chez les architectes de la Shinra.

Ce théâtre et les différents quartiers à suivre servent pourtant de décor à de nombreuses séquences inédites qui s'attachent à dépeindre avec justesse la réalité de l'aventure, à savoir de drôles de retrouvailles entre deux amis d'enfance, séparés depuis des années après de bien tragiques événements. Plutôt que de voir Cloud foncer tête baissée récupérer sa paye après avoir allumé son premier pétard, le jeu prend le temps de poser son décor, ses enjeux, et comble habilement les trous de l'original, en réorganisant ses priorités. Le mercenaire prend ainsi le temps d'échanger avec celle qu'il a quitté à l'adolescence, non sans maintenir physiquement et sémantiquement une certaine retenue. Les fans apprécieront, sauf lorsque les situations de fan service gratuit se multiplient jusqu'à l'excès. Au fur et à mesure de sa progression dans les Secteurs 5 à 7, Cloud va ainsi découvrir la misère et la débrouillardise de ses citoyens de seconde zone, et se faire une petite réputation de mercenaire à travers des quêtes annexes plus ou moins passionnantes (plutôt moins), et rendre ainsi plus crédible l'urgence de la situation.

I Am A Materia Girl

Mais si cette entrée en matière fait preuve de pertinence et contribue réellement à enrichir l'expérience, Final Fantasy VII Remake étale parfois sa proposition comme certains étalent leur culture, et tous les chapitres offrant de nouvelles péripéties ne sont pas pour autant égaux en termes de narration. L'infiltration du réacteur n°5 ou la double traversée du n°6 en sont deux exemples criants parmi bien d'autres : malgré l'incontestable richesse des décors, nos héros évoluent dans de bêtes couloirs, qui empêchent de trouver les moments de liberté de 1997. À l'instar de Final Fantasy XIII, l'exploration se limite alors à quelques brefs embranchements, à la recherche d'un coffre ou d'une matéria qui traînait dans un recoin, et la sensation de constamment être remis sur le droit chemin prédomine. Tant pis pour la dimension RPG.

Ces séquences traînent d'autant plus qu'elles voient les même dialogues et ficelles se répéter encore et encore. La petite équipe semble avoir tant besoin de se motiver et de rappeler « qu'il faut y aller » que l'on finit par se demander si un Alzheimer précoce ne s'est pas collectivement abattu sur nos héros. Les coupures de courant finissent par faire hausser un sourcil circonspect passée la quinzième, et l'on ne peut que s'étonner de ne pas voir un certain Georges Rémi dans les crédits, au vu du nombre incroyable d'évanouissements et chutes de containers employés, mille sabords. Tous les personnages ont malgré certains ratés fait l'objet d'un vrai travail d'écriture, d'un background riche et cohérent. Mais pour profiter d'une splendide conversation sur les toits en compagnie d'Aerith, qui laisse deviner au travers d'un mémorable duel de répartie la tension amoureuse qui ne dit pas son nom, il faudra aussi se taper au préalable des phases lourdingues de comic relief, grâce notamment au personnage de Wedge. Trois blagues sur son postérieur protubérant en l'espace de cinq minutes, ça ira comme ça, merci.

Va te faire voir l'encapuchonné !

Mais comment surprendre et réellement créer des enjeux pour les vieux de la vieille, ceux qui connaissant le lore de Final Fantasy VII sur le bout des doigts ? Square Enix y répond de fort belle manière, en créant de nouveaux enjeux, en remaniant d'autres, et comblant avec justesse des trous béants de l'intrigue qui ne gênaient pourtant pas grand monde en 1997. La chronologie de ce drame en trois CD a ainsi été intelligemment repensée, teasant avec brièveté de tragiques événements futurs, le flashback de Nibelheim n'ayant pas le temps d'être évoqué dans ce premier épisode qui ne dit toujours pas son nom. Les docteurs ès Compilation se réjouiront de voir la guerre du Wutai avoir autant d'impact, les autres se demanderont à quel moment le jeu daignera leur fournir un peu plus d'explications. Ces libertés offrent un peu d'ampleur au récit, mais se matérialisent par une foule de détails satisfaisants, comme les invocations proposées bien en amont de la version originale, et qui permettent de déchaîner les Enfers, même intra muros. De nouveaux antagonistes mystiques viennent d'ailleurs semer le trouble durant une bonne partie de l'aventure, et parviennent presque à l'impensable : nous faire oublier que nous connaissons déjà sur le bout des doigts la finalité de ces événements. Plus subtils, certains changements s'amusent ostensiblement avec les attentes des vieux rôlistes, en twistant certaines parties de l'intrigue, même si le jeu finit toujours bien vite par retrouver son respect pour l'oeuvre originale. Et lorsque certaines répliques restent inchangées mot pour mot, on sait à quel point elles sont lourdes de sens...

Le jeu reste néanmoins fidèle à un propos plus actuel que jamais, en poursuivant et en enrichissant sa critique du corporatisme, de l'exploitation de ressources limitées pour le privilège de quelques oligarques, ou encore l'impuissance du politique face aux industriels devenus monopolistiques. Mais Final Fantasy VII Remake dessine également en creux une critique de l'actuelle société japonaise, décochant ici une flèche pour l'inébranlable hiérarchie, là une autre pour ceux condamnés à cacher leur vrai visage pour s'en sortir. Bon, la critique marche surtout en version originale, forcément plus juste que les adaptations anglaises et françaises, mais ces dernières ne déméritent pas, bien au contraire, et c'est au vu des standards de l'industrie déjà pas mal. S'il fallait pinailler, et nous ne nous en priverons pas, il aurait été fort sympathique de profiter de sous-titres calés sur le texte, et non le doublage, tant ce dernier prend parfois quelques libertés avec les dialogues japonais. Mais au-delà d'une sincère et juste célébration d'un éternel classique, cette réinterprétation est également le terrain d'affrontement de deux périodes artistiques pas toujours très conciliables : celle du Squaresoft faisant ses premiers pas dans la troisième dimension, expérimentant avec un background technologique encore inédit, et l'ère des fashionistas où le 109 de Shibuya dicte envers et contre tout ses codes. Il suffit de rentrer dans les magasins hipsters du Wall Market pour s'en rendre compte, ou de simplement croiser la route des nouveaux hurluberlus mis en avant pour s'en convaincre : de Chadley au traitement de Johnny en passant par Roche le motard improbable, tous semblent sortis d'une autre galaxie, et jurent trop souvent avec la décoration de bon goût, exception faite de Leslie. En la matière, la mayonnaise entre les deux écoles à vraiment du mal à prendre, et donne l'impression d'assister à une greffe effectuée en dépit du bon sens.

Urbex et orbi

Hérité d'une des plus illustres séries de J-RPG, Final Fantasy VII Remake n'en demeure pas moins largement influencé par les grands jeux d'action/aventure de ces dernières années : n'espérez pas retrouver ici la liberté et l'ouverture d'un Final Fantasy XV, l'inspiration est plutôt à chercher du côté du treizième épisode et de ses jolis tunnels déguisés. Pour autant, l'intrigue étalée vous offrira quelques moments d'errance et de liberté, notamment au coeur des quartiers les plus vivants, qui offrent leur lots de défis, mini-jeux et quêtes en tous genres. Dommage que l'ouverture n'arrive que tardivement dans la progression, et quelle oblige de tout boucler avant de partir à l'assaut de l'interminable tour Shinra. La sensation d'être constamment orienté demeure malgré tout, et l'on sent Square Enix très soucieux de ne jamais perdre personne en route, en témoignent les innombrables répliques d'une confondante évidence qui jaillissent parfois de vos acolytes. Oui Tifa, pour la centième fois, "on y va". Hormis les alentours de vos quelques ports d'attache, il faudra surtout aller de l'avant, et généralement se contenter d'admirer des décors splendides en grimpant des échelles par dizaines, qui ne laissent que trop peu de place à une véritable exploration. Certes, la magie des lieux, leur ambiance sublimée et leur plongée dans la troisième dimension ravit le fan, trop content de découvrir ici et là bon nombre de clins d'oeil appréciables, mais la sensation de constamment avancer sur un chemin bien balisé reste trop présente pour offrir la sensation d'explorer librement cet univers urbain hors du commun.

Alors, pour profiter du travail d'écriture et de modélisation des bas-fonds de Midgar, il reste donc les quêtes annexes, celles qui avaient fièrement été mises en avant par l'éditeur, et qui en avaient fait rire quelques-uns sous cape. L'histoire ne leur donnera pas forcément tort, car si ces dernières permettent de creuser un peu le background et de gratter le vernis de la Shinra, elles prennent le soin de ne jamais vraiment surprendre. Ou alors si, mais en mal, en organisant ainsi un défilé de freaks nomuresques qui piquent les yeux et chatouillent la gorge. Il faudra la plupart du temps revisiter certains environnements pour les débarrasser des nouveaux mobs y ayant élu domicile, mais aussi partir à la chasse aux chats, voire pire : aux enfants (les chats ne parlent pas, et vous font ainsi grâce d'un dialogue mièvre à souhait). Il existe pourtant de bonnes raisons de s'y intéresser : elles offrent d'abord le meilleur moyen de gratter un peu d'expérience supplémentaire, et de se faire la main sur quelques ennemis plus stratégiques que la moyenne, mais donnent parfois accès à des séquences bonus, qui viennent récompenser l'aventurier perfectionniste, et le fan qui sommeille en lui.

Quand je dirai SOLDAT, vous lèverez la main

Final Fantasy VII Remake se donne ainsi bien du mal pour vous faire rester dans la moyenne. Il sera en effet difficile avant l'arrivée au Wall Market de farmer à outrance, les ennemis n'ayant que peu l'occasion de réapparaître, et le jeu prenant un malin plaisir à verrouiller de temps à autre le chemin derrière vous. Il faut ainsi se débrouiller avec un niveau relativement cadré pour progresser dans les différentes phases de donjon. L'astuce est habile (coucou Lost Odyssey), et oblige à exploiter toute la palette d'action de votre fine équipe. L'emprunt à Final Fantasy XIII est connu de longue date, et oblige à penser chaque affrontement en deux temps, puisque vos ennemis nécessiteront d'être "staggés" avant de pouvoir leur infliger de véritables dommages. La capacité d'analyse de Cloud est à ce titre votre meilleure alliée dans la recherche de l'efficacité, et vous permettra également de mener à bien une quête en forme de fil rouge. S'il reste possible de bourriner les mobs de base, les combats de boss prennent la forme de semi-marathons en plusieurs phases, et l'observation sera plus que jamais la clé de la réussite. La variété est assurée grâce aux face-à-face avec les TURKs, plus lisibles et chorégraphiés, qui tranchent avec les gros méchas aux multiples canons et attaques de zone enflammées.

Square Enix a tout de même eu la bonne idée de proposer une option très pratique : celle de revenir juste avant l'affrontement, quel qu'il soit, afin de changer de stratégie. Sans les bonnes matérias préalablement équipées, certains boss vous malmèneront sans ménagement, et il est souvent plus simple de temporairement lever le drapeau blanc pour mieux repartir, préparé et efficace. Mieux vaut d'ailleurs penser à tout, car vos camarades de jeux ne font pas preuve d'un zèle particulier au front, et il faudra bien vite apprendre à passer d'un personnage à l'autre pour optimiser les dégâts. En effet, la jauge d'ATB semble grimper à la vitesse d'un monte-escalier Stana lorsque vous laissez Tifa & Co en roue libre, alors que leur prise en main donne l'impression de grimper les marches quatre à quatre, en plus d'être particulièrement jouissive. Le système de combat s'affine avec les ouvertures proposées au fur et à mesure de la progression, et la maîtrise des différentes compétences finit par offrir une grande variété d'approches, que le système de quasi-pause permet d'apprécier au plus juste. Il n'y finalement rien de plus satisfaisant que de passer plusieurs dizaines de secondes à peaufiner le timing et l'efficacité d'une action en trois temps pour ensuite la voir s'exécuter à la perfection à vitesse réelle, ou de gratter les derniers points de vie d'un boss grâce à l'attaque finale d'Ifrit, qui ponctue un affrontement dantesque de parfois plus d'une dizaine de minutes. Grisant. La publicité n'était d'ailleurs pas mensongère : chaque combattant possède ses caractéristiques propres, mais aussi un maniement qui pousse à examiner chacun d'entre eux à la loupe. Les perfectionnistes profiteront des défis de l'arène Cornéo pour approfondir le gameplay, mais aussi débloquer de nouvelles techniques de Transcendance (les anciennes Limites), histoire de récupérer avec malice les dernières gouttes de jus. Ceux qui n'ont pas touché une manette depuis Final Fantasy VII pourront même opter pour le mode "Classique", qui automatise l'attaque et vous laisse ainsi la main sur les déclenchements de sorts et autres compétences, mais il serait tout de même bien dommage de se couper de la profondeur

Déterrer la hache d'Heidegger

La montée en puissance s'effectue également par le biais de votre armement, qui permet de booster certaines statistiques bien plus vite qu'avec les traditionnels points d'expérience. Chaque arme peut elle aussi monter en niveaux, débloquer de nouvelles améliorations, et s'accompagne d'une technique propre que vous pourrez conserver une fois cette dernière pleinement maîtrisée. Pour voir la jauge de points de vie grimper ou la résistance physique et magique prendre du galon, il faudra s'habituer à faire un tour dans ce nouveau menu littéralement cosmique, et consciencieusement choisir les points à y dépenser. Leur évolution permet également de débloquer des slots de matérias supplémentaires, qui s'avèrent bien pratique pour pimenter vos approches. Les combinaisons des compétences propres aux différents personnages avec les matérias équipées sur leur arme permettent avec astuce de doubler des sorts offensifs (pratique lorsque les Fira & Co. coûtent vite plus de 10 PM) ou de booster les buffs, une sympathique profondeur qui donne envie de s'investir un peu plus. Au moins pour la beauté du jeu. L'aventure reste calibrée, jamais traître, mais laisse à penser que le mode Difficile aurait tout à fait mérité d'être proposé d'entrée de jeu.

Une fois de plus, on regretterait presque que les nouvelles armes n'arrivent que trop tardivement en nombre, comme si Square Enix s'excusait d'un coup d'avoir jusqu'ici souhaité tout contrôler. On se demande d'ailleurs comment tout cet arsenal, ces matérias poussées dans leurs derniers retranchements et ces combinaisons minutieusement confectionnées trouveront un écho dans les épisodes à venir, ou si le niveau de nos protagonistes pourra continuer à grimper, en conservant la progression. Car la dimension roleplay prédomine, même dans cet univers où le grand spectacle mainstream impose souvent sa vision, et il faudra vite rassurer les joueurs consciencieusement sur ce qu'ils pourront conserver de ce premier épisode qui en garde évidemment un peu sous le pied. Une grosse trentaine d'heures dans Midgar, c'est très bien, mais l'envie d'en voir un peu plus, d'aller encore plus loin demeure malgré tout.

On That Day, Twenty-Three Years Ago

Mais s'il est une dimension peut-être encore plus culte que cette oeuvre que l'on pensait intemporelle, ce sont sans aucun doute les incroyables compositions de Nobuo Uematsu, devenues pour la plupart d'entre elles des standards dont l'aura dépasse tout ce que l'on peut imaginer. Heureusement, les mélodies connues de tous ont profité d'un remarquable travail d'arrangement, intelligent et souvent subtil, chacune d'entre elles s'offrant une variété de versions tranchées pour s'adapter à toutes les situations. Conserver la mélodie mais la transformer pour servir le changement d'action ou de lieu : voici ce qui fait de Final Fantasy VII Remake un vrai bonheur pour les oreilles, et cette variété d'approches permet d'entremêler sans cesse les thèmes, de les imbriquer, de les renvoyer l'un à l'autre, pour mieux perdre et surprendre le fan qui pensait mettre les pieds sous la table. Jusqu'au bout, les mélomanes seront ravis du voyage, malgré quelques rares bizarreries un rien hors de propos. La patte caractéristique de Hamauzu se reconnaît au travers des nombreuses nappes de cordes ou de synthétiseurs futuristes qui parsèment bon nombre de scènes, et rappellent par moments le magnifique habillage sonore de Final Fantasy XIII.

Les thèmes s'entremêlent tellement qu'il est parfois difficile de s'y retrouver parmi ce mille-feuille de respectueuses citations, qui parvient pourtant toujours à trouver les justes notes pour évoquer de terribles événements à venir, ou rappeler sans le dire les liens parfois complexes qui lient entre eux ces ex-terroristes destinés à sauver le monde de la catastrophe. Malgré la redondance des leitmotivs, leurs orchestrations se révèlent si variées et souvent si inventives que jamais elles ne lassent, et les arrangeurs se sont autorisés quelques emprunts post-Midgar en forme de clins d'oeils, tout comme l'on se surprendra à découvrir dans ce premier épisode certaines têtes que l'on n'imaginait pas croiser de sitôt. Chaque thème multiplie les variations jusqu'à en donner le tournis, passant de l'exploration au combat en passant par l'habillage narratif, et l'algorithme qui gère cet orchestre adaptatif ne manque jamais le coche. Les reprises de Final Fantasy VII se multiplient tellement depuis les vingt dernières années qu'il était là aussi bien difficile de s'en sortir avec brio, mais le résultat est impeccable, pas forcément parfait, mais trouve sa place entre hommage respectueux et libertés bienvenues.

Autant vous dire que l'on attend déjà la suite rien que pour découvrir le travail réalisé pour le second CD de l'OST, et que l'on se demande surtout combien d'épisodes il faudra attendre avant d'entre résonner les choeurs de One-Winged Angel... Maintenant que le train est enfin en marche, il ne faudrait pas nous laisser trop longtemps dans le flou avant d'annoncer le prochain départ, n'est-ce pas ?