Pour les joueurs qui se sont exercés toute la saison sur FIFA 15, EA Sports a des choses à se faire pardonner. Le peu d'améliorations significatives apportées par rapport à l'édition précédente, les différentes bévues qui ont fini par émerger et monopoliser l'attention, comme le tir magique au premier poteau ou les engagements pouvant faire paniquer n'importe quelle défense, le tempo parfois frénétique... Autant de problèmes qui, aujourd'hui, ne pourraient plus passer. Le sursaut d'orgueil a-t-il bien eu lieu avec FIFA 16 ? Oui. Et il fait plus que sauver l'honneur.
C'est la peur au ventre que l'on entame la première rencontre. Le coup de sifflet donné, on redoute l'expédition punitive. La passe directe qui va voir le milieu survolé et la défense aux abois. Le dribble glissant qui provoquera la crispation. L'enchaînement de dribbles inarrêtable. Le placement hasardeux du gardien. Le sursaut moqueur de son camarade assis juste à côté. Rapidement, les craintes se dissipent pour laisser place à... un sentiment de gêne. Il y a du déchet. La bataille pour la terre du milieu fait rage. Les défenseurs prennent l'avantage dans les duels. Propulsés en direction du but, les ballons décollent à peine ou, au contraire, partent retrouver dans l'espace celui frappé par Sergio Ramos sur penalty lors du Real-Bayern de 2012. Quelque chose s'est produit. Certains automatismes ont éclaté. Il faut prendre le temps de réapprendre.
Précision exigée
Dans la prise en mains, on constate des changements qui forcent à revoir sa façon de jouer. Le temps de pression requis pour un résultat adéquat a été légèrement accru. Et ce pour tous les types de passes (courtes, hautes, en profondeur - au sol comme lobées) et les tirs. Trouver le dosage juste comme la direction - la gestion des 360° du stick étant souvent implacable, surtout sur les centres, moins téléguidés - requiert de la pratique. Ainsi que la connaissance d'une nouvelle combinaison de touches qui permet des passes appuyées. On pourrait croire qu'elles existent déjà en maintenant la touche A (Xbox One) ou X (PS4) à fond. Pas du tout. Cette fois, en appuyant sur le bouton de tir en finesse en sus, on observe des balles bien plus puissantes. Celles-ci peuvent franchir une distance moyenne de manière sécurisée. Mais aussi, dans l'urgence, foutre un sacré souk dans votre tiki-taka : le joueur à la réception n'est pas sûr de réussir le contrôle parfait. Atout par moment (qui peut servir à obtenir une touche ou un corner lorsque l'on se trouve isolé), handicap d'autres fois. Une arme à double tranchant que les plus aguerris vont pouvoir user de manière stratégique. Concernant les frappes, le constat est identique. On retrouvera l'instinct du buteur après un certain nombre de tentatives. Est-ce à dire qu'une fois acclimaté, tout devient plus simple ? Les scores fleuves voire océaniques sont de retour ? Que nenni. Car dans l'optique d'une construction efficace, il va falloir du doigté et un bon oeil.
Dur sur l'homme
L'intelligence des footballeurs que vous ne contrôlez pas a aussi grandement à voir avec la sensation d'un FIFA qui a passé un cap. En attaque, il ne semble pas y avoir de bouleversements apocalyptiques. Suivant les capacités de vos avants, et avec un petit coup de pouce de votre part pour les lancer, les appels seront plus ou moins pertinents. A vous ensuite de gérer le timing et éviter le hors-jeu ou le coup de téléphone. Le milieu et la défense, quant à eux, ont gagné en densité. On pourrait presque dire qu'ils sont expérimentés. Vouloir franchir une ligne sans s'être assuré que personne ne rodait relève de la gageure. Car pour couper les trajectoires, il y a du monde. Pour se trouver à proximité d'un potentiel électron libre aussi. Pour coller l'attaquant qui part et le rattraper, avant de vous laisser reprendre la main, pas de problème non plus. Les placements confiés au CPU ont tendance à sonner juste. Vous pourrez souvent lui faire confiance, sans même lui ordonner un pressing. Résultat : on se retrouve avec des rencontres quand même assez disputées pour deux adversaires de niveau équivalent. Et plus on progresse, plus c'est plaisant.
Le plein de super
Les outils proposés sont aussi variés que solides. En possession, les changements de direction temporisés, les feintes de corps (à l'aide du bouton de sélection de joueur qui se meut en fonction "dribble sans ballon") et les multiples tricks assénés avec assiduité peuvent toujours tabasser. Mais en défense, on dispose d'un combo pressing contenu à 1 mètre et tacle tout à fait efficient, à condition de rester concentré. Idem pour les combats à l'épaule, qui permettent de contenir des accélérations moins cinglantes que par le passé. Sans parler du tacle glissé dont on peut se relever immédiatement avec le bon timing. Et des duels aériens, où l'on sent une plus grande souplesse. C'est que la liberté de déplacement, désarçonnante au premier abord, n'a jamais été aussi grande. N'oublions pas, enfin, les derniers remparts. Autrement plus futés et affûtés, ils n'ont pas d'hésitation à s'imposer dans les airs, ne rechignent pas à s'extirper de la zone de vérité à toute berzingue pour aller à la rencontre du ballon. De bons appuis, des réflexes en or... Ils rendent parfois fou par leur efficacité, qui peut toujours être entachée par quelques cagades bien senties et une propension à laisser passer les frappes enroulées.
La force tranquille ?
Le résultat, donc ? Si l'on ajoute les possibilités stratégiques étoffées, en passant par des menus vraiment très clairs et avenants : un jeu de foot qui s'affirme, match après match, comme un champion. A conseiller à celles et ceux qui aiment s'impliquer, ont un tantinet de patience (et le FIFA Trainer, qui affiche les options de jeu et touches directement sur le millionnaire en short incarné, peut aider à un bon démarrage chez les nouveaux venus) pour avoir le droit non pas de subir le rythme mais l'imposer. Et qui aiment les parties placées sous tension, où une simple erreur peut entraîner un but qui lui-même peut mettre fin à une amitié. Son attrait, il le doit aussi, évidemment, à son rendu impeccable, aussi bien sur le terrain que dans ses alentours, plus vivants que jamais avec, quelque soit le stade choisir parmi plus de 70 proposés, un public assez incroyable - dont les chants, nombreux, filent parfois des frissons. A cette authenticité encore renforcée, avec par exemple l'introduction du spray pour placer mur et ballon sur les coups-francs. A ses modélisations un peu plus réussies pour la plupart, en dépit d'un aspect cartoon qui touche pas mal stars, dont un Angel Di Maria qu'on croirait sorti de Scooby-Doo. A sa palette d'animations vertigineuse, pleine de nouveaux petits gestes fantastiques, des contrôles, reprises et contacts souvent crédibles... Mais pas tout le temps. Si l'on apprécie la profondeur, l'équilibre des forces et les sensations procurées, le tableau est noirci par quelques éléments perturbateurs. Dont certains qui peuvent pousser au ragequit....
De quoi avaler la trompette
On peut le dire, les animations sont, de manière générale, bluffantes. Mais les transitions entre certaines, mal assurées, donnent lieu à des actions parfois confuses. D'autant plus que les corps semblent toujours aussi peu ancrés à la pelouse. Une étrange sensation de légèreté plane sur les 22 acteurs. Et aussi, lors des rediffusions des temps forts ou des petites séquences qui suivent un joueur , on se retrouve avec enchaînements étranges, qui rappellent un peu certains RPG, quand un perso vient de finir sa réplique et qu'il retourne à son expression générique. Le côté naturel de ces petites vignettes, qui font partie d'un habillage complet irréprochable pour faire croire à quelqu'un qu'il s'agit d'une retransmission, en prend un coup. La balle a aussi des réactions pour le moins étrange. Je vais déjà évacuer un sentiment personnel : les poteaux et la transversale ont l'air aimantés. En fait 4-5 par match, plusieurs fois de suite, c'est louche. Et je ne parle pas des claquages et petits pépins qui surgissent sans crier gare. Bref. Concernant les tirs , suivant le placement, l'angle d'attaque, le pied, le pressing adverse, on a souvent un résultat "réaliste". Mais parfois, on peut se retrouver avec des frappes à Mach 2 en lulu alors que le joueur vient de réaliser un plat du pied en l'air dans une position tournoyante et bancale qui s'apparente une version alcoolisée de la technique du héron de Karaté Kid. Très étrange.
Back in black
Mais le pire du pire du pire est ailleurs. Enfin, plutôt au coeur du jeu. L'arbitre. Carton jaune très orangé pour l'homme en noir qui peut - et vous allez me dire que c'est ainsi dans la réalité, surtout en Ligue 1, mais je vais me boucher les oreilles - vous pourrir un match par son excès de zèle - ou sa cécité, c'est selon. Des contacts anecdotiques qui valent qu'on annule un avantage qui allait se concrétiser. Des "pénos mythos" pour des joueurs qui tombent tout seul. Des hors-jeux sifflés deux ou trois secondes après. Une mi-temps ou une fin de match décrétée ALORS QU'ON ÉTAIT A L'ENTRÉE DE SURFACE EN TRAIN D'ARMER UNE FRAPPE LIBÉRATRICE. Désolé pour les majuscules. Mais ce genre de situation est tout simplement incroyable. Délirant. Injuste. Et méritera une correction rapide.
Rend-nous les ballons ♫
Revenons à un peu de douceur avec l'introduction cette année des équipes féminines. Une première. S'agit-il seulement d'un simple coup marketing sans valeur ajoutée, sans caractère propre, destiné à ratisser plus large ? Ne va-t-on pas de se retrouver avec des visages de championnes appliqués sur des corps de mecs ? Les séances de motion capture révélées dans les diverses vidéos promotionnelles n'étaient pas là pour le show : les différences sont réelles, perceptibles. Modélisations comme animations s'avèrent spécifiques. Notées sur une échelle différente de celle des hommes, auxquelles elles ne se mélangeront pas sur le rectangle vert, ces dames offrent des parties au rythme différent, avec des contrôles un chouïa plus compliqués, laissent un peu plus d'espace, ce qui force a un peu plus de concentration mais ne bride pas le spectacle avec un peu de pratique. L'alternative se révèle très plaisante. Dommage qu'on ne trouve, pour cette édition, que 12 équipes nationales et que leur emploi soit limité à une coupe, des matchs amicaux offline et online. Mais l'on peut parier qu'à l'avenir, clubs, compétitions officielles et modes de jeux feront le déplacement, histoire d'être certain que FIFA parle à tout le monde.
Une année pleine
Dans FIFA 16, en solo comme en multi, offline comme online (assez stable au moment du test), on est submergé par tout ce qui nous est proposé. Il n'y a pas que du neuf, à l'instar de ce que proposent les commentaires de Hervé Mathoux et Franck Sauzée, qu'on connait déjà à 80%, mais plein de modes ont été retapés pour éviter la redite avec l'an passé. La navigation, plutôt agréable et claire, avec un onglet de notifications et d'activités en haut à droite, permet d'accéder à des matchs "entre potes", à diverses compétitions, à des jeux techniques refaits, à la fois didactiques, inventifs et plein de challenge. Mais aussi à des tas d'options de paramétrage, de modifications d'une base de données énormissime et pleine de licences, et même à l'activation du contrôle vocal ainsi qu'à la fameuse "Journée en direct", dans l'optique de suivre le vrai foot.
Le mode Carrière se présente comme plus complet avec quelques nouveautés bienvenues. D'abord le tournoi de pré-saison qui peut faire un peu d'argent de poche pour les transferts. Puis l'arrivée d'entraînements hebdomadaires complémentaires, répartis en cinq cases, qui font passer un ou plusieurs joueurs par les ateliers qui leur permettront d'évoluer où vous le souhaitez. Un petit jeune prometteur ? Hop, un peu de boulot et vous aurez une perle qui vaudra des millions. A côté de cela, ce sont surtout les recrutements et les valeurs et budgets qui ont subi un ravalement. Chronophage à souhait. Et s'il n'y avait que ça... Car il ne faut pas oublier : en ligne il y a le mode Saisons, où vous grimpez les divisions au gré des rencontres, ainsi que le Saisons Coop, qui vous voit oeuvrer par paire (chacun chez soi,) le Clubs Pro pour ceux qui préfèrent évoluer à un poste précis, ou encore la FIFA Interactive World Cup, compétition officielle disponible sur PS4 et Xbox One qui peut emmener à la cérémonie du Ballon d'Or... Attendez, ne partez pas, il reste encore un truc.
Toujours à la FUT
Ce truc, c'est le FUT. Le FIFA Ultimate Team, introduit dans FIFA 10, compatible avec une application qui vous laissera tout gérer où vous voulez quand vous voulez, continue de s'étoffer avec fierté. Révisant son habillage, son interface, il continue de vous laisser bâtir une équipe au gré de packs de joueurs et autres bonus offerts aléatoirement et d'un marché des transferts fort actif, plus sécurisé et simplifié par le biais quelques raccourcis de bon aloi. Le collectif est une fois de plus dépendant des nationalités, ligues et clubs dans lesquels vos pensionnaires se trouvent. L'entente et le sens de la gestion prime pour arriver à atteindre son objectif. Le tout continue de s'appréhender, offline et online. Et d'accueillir un tout nouveau mode, le FUT Draft, qui va en quelque sorte servir de laboratoire accéléré. L'idée : vous emmener dans un tournoi de 4 matchs en essayant de composer la meilleure team possible. Vous choisissez une formation parmi cinq imposées, un capitaine, puis, pour chaque poste ainsi que les remplaçants et la réserve, optez pour un joueur parmi cinq propositions. Des équipes de porc sont possibles. Le plaisir est immédiat, les blessures sur un match ne se répercutant pas sur la suite. Un condensé de ce que propose le FUT "normal", qui nécessitera quelques dépenses de crédits FUT ou de points FIFA - dont une partie fait le voyage depuis FIFA 15 - mais qui pourra rapporter gros en dotations... Le FUT demeure redoutable. On pourra parler de drogue. Dont il va être impossible de se sevrer, la faute à une companion App qui peut laisser gérer le tout où que vous soyez...