Pour ceux ayant apprécié Dear Esther, il y a maintenant 3 ans, il était tout à fait normal d'espérer que le nouveau bébé de The Chinese Room puisse offrir une expérience aussi intéressante que ce poème vidéoludique. Everybody's gone to the Rapture faisait ainsi déjà rêver avec ses superbes images et trailers nous entraînant dans un univers intriguant d'une rare beauté. Si le mystère et l'ambiance incroyablement efficace sont au rendez-vous, le jeu ne tient pas forcement toutes ses promesses. En effet, le rythme et la profondeur de l'histoire peuvent gâcher l'expérience qui, même si elle se déroule en un lieu enchanteur, pourra vite vous lasser...
MAJ 11/08/2015 : le créateur du jeu ayant dévoilé une manière (malheureusement assez cachée) de courir, nous augmentons légèrement la note globale qui passe de 2/5 à 2,5/5. Le reste ne change pas néanmoins, l'histoire nous ayant malheureusement trop laissé sur notre faim.
La ville aux papillons de lumière
Tout commence dans la petite ville abandonnée de Yaughton dans l'Angleterre des années 80... Étrangement, tout est ici désert, seul le chant des oiseaux et le bruissement des feuilles troublent le silence, pesant. Dès les premières minutes de jeu, la solitude vous enveloppe et vous plonge dans une atmosphère délicieusement troublante. Le paysage champêtre et le calme qui y règne en maître absolu installent une ambiance propice à l'enquête. Nous voici donc dans la peau d'un illustre inconnu dont on ne sait absolument rien et qui va déambuler dans la ville pour tenter de découvrir les raisons de la disparition des habitants...
Sans aller jusqu'au niveau bluffant de The Vanishing of Ethan Carter, les environnements dans lesquels vous allez évoluer sont splendides : les jeux d'ombres et de lumière sont saisissants, les détails soignés et l'ambiance sonore très efficace. On a envie de se promener, de prendre ce petit sentier qui se perd dans la colline, d'entrer dans cette jolie maison vêtue de blanc, de visiter l'église au charme indéniable. Oui, le décor est propice au dépaysement et à la balade... On sent aussi très nettement l'inspiration subtilisée aux films de science-fiction des années 50 et celle-ci ajoute un véritable cachet à l'aventure. On se sent bien.
La lumière assombrit le tableau
Mais la tranquillité de ce havre de paix est ponctuée de phénomènes pour le moins étranges. Et pour cause, les fantômes des habitants hantent les lieux de manière très poétique... En effet, vous allez rencontrer ces âmes errantes qui apparaîtront ponctuellement sous la forme de petites orbes de lumières. Il faudra alors vous servir de la fonction SIXAXIS de votre manette pour orienter cette dernière dans la bonne direction et déclencher des cinématiques offrant la vision des événements du passé.
Ces visons vous font entendre des bribes de conversations entre les habitants et vous permettent de mieux comprendre les tenants et les aboutissants du scénario. La ville étant divisée en plusieurs zones il vous faudra reconstituer chacune des "histoires" correspondants à celles-ci (on en dénombre une trentaine) pour déclencher l'illumination finale libérant des papillons lumineux et une cinématique de nuit particulièrement bluffante visuellement. Cette dernière signe la fin d'une des phases du scénario, mais notez que rien ne vous oblige à les visualiser dans un ordre précis pour comprendre l'histoire dans sa totalité. En effet, le jeu laisse une liberté totale quant à vos investigations.
Sachez également que le seul moyen de vous repérer dans l'espace sera de checker régulièrement les cartes de la ville disséminées un peu partout dans celle-ci et offrant des indices sur les lieux importants à visiter.
Une expérience au ralenti
Ainsi, au fur et à mesure de sa progression, notre personnage va faire la connaissance de la forme lumineuse des divers protagonistes et apprendre et comprendre ce qui s'est passé. Vous allez également devoir retrouver la trace des divers téléphones que vous entendrez sonner tout au long de votre aventure. De nombreuses radios à allumer vous donneront également des informations sur l'intrigue.
En termes de jouabilité on a presque fait le tour puisque à part marcher (très lentement), interagir avec ces quelques éléments, ou ouvrir quelques portes vous ne pourrez rien faire de plus. En effet, tout comme dans Dear Esther, impossible de courir, pire de marcher vite. Vous irez de rencontres en coups de téléphone, en radios, tout cela au rythme d'un escargot... Et ce qui pouvait passer dans le premier jeu du studio indépendant reste un peu en travers de la gorge dans leur dernière création. En effet, Everybody's gone to the Rapture offre un tableau beaucoup plus vaste que Dear Esther et la lenteur de la marche de votre personnage devient vite une tannée si vous voulez tout visiter....
On pourrait se dire que ce rythme correspond totalement au style du jeu qui reste une expérience narrative, mais en ajoutant ce facteur au manque de dynamisme de l'intrigue qui n'offre aucun rebondissement majeur (de bout en bout), à l'impossibilité d'interagir plus avec l'environnement ou d'examiner des objets, de zoomer tout simplement, ou encore à l'absence de la moindre énigme, cela donne une aventure un tantinet ennuyeuse, manquant de sel pour être totalement savoureuse. Frustrant.
C'est fort dommage car le scénario, sans être fou et magique se révèle bien pensé, et il aurait mérité ces petits moments surprenants dans lesquels le joueur se fait surprendre et où l'excitation est titillée... Fort heureusement la bande-son est incroyablement efficace et ses accents empreints de tristesse et de fatalisme donne une autre dimension au jeu dont le décor sublime pousse à vouloir s'accrocher. Mais au bout du compte la poésie n'est pas suffisante, on finit par s'ennuyer franchement et à espérer la fin. Cette dernière ne consolant pas vraiment d'avoir passé plus de 6 heures à littéralement traîner son personnage.