Larian Studios revient à nous avec Divinity : Original Sin 2, qui fut comme son aîné très bien reçu sur Kickstarter. Forcément ça implique déjà que le public pour le RPG old-school hérité lui-même du RPG papier, ait encore de nombreux fans. Pour autant le jeu ne s'éloigne pas de la modernité et réussit le pari d'être à la fois profondément novateur tout en gardant une ADN qu'un vieux roublard de Donjon et Dragons appréciera.
Un RPG digne de ce nom commence toujours pas la création du personnage. Etape fondamentale et ciment du genre, Divinity Original Sin 2 n'échappe pas à la règle et aura très vite fait de nous plonger dans son vaste univers dès les premiers instants. Au total nous avons le choix entre 5 races. Chacune a évidemment ses propres spécificités et impliquera une fois en jeu différents rapports avec les autres personnages. Hommes, Elfes, Nains, Hommes-lézards et Morts-vivants s'offrent à vous. Le jeu vous laisse toutefois la possibilité de créer un personnage de toutes pièces ou alors de choisir un protagoniste "origine" avec sa propre histoire souvent très complète mais totalement préfabriqué. Evidemment le second choix permettra moult éléments de roleplay au fil de l'aventure mais c'est vers la première option que nous nous sommes tournés à l'occasion de ce test. Dans tout les cas pas d'inquiétudes, car dans Divinity 2 vous n'êtes jamais seul et vous aurez la possibilité de recruter ces fameux personnages "origines" dans votre équipe.
Des choix et de la flexibilité au menu
Car oui DOS II vous permet de commander un groupe de 3 personnages supplémentaires en plus du vôtre. Sachant que le jeu est en plus entièrement jouable en coopération, ça laisse toujours la possibilité d'avoir au moins 1 ou 2 personnages sous vos ordres. Le jeu est évidemment aussi entièrement jouable en solo, mais la coopération permet de vous ouvrir à de nouveaux horizons et cela apporte réellement un plus indéniable. L'entièreté du jeu est de toute façon affaire d'équilibre et de choix. Ainsi même votre rôle en début de partie peut être librement modifié par la suite.
Si vous décidez de vous destiner à la chevalerie lors de la création de votre personnage, rien de vous empêchera par la suite de devenir Pyromancien ou chasseur. DOS II s'inscrit dans la tradition du jeu de rôle papier mais réinvente aussi les codes du RPG classique. Quand on monte de niveau par exemple, les nouvelles compétences ne s'apprennent par "par magie" via un menu dédié. Non, il faut avant cela récupérer un livre de compétences (skillbook) pour pouvoir apprendre tel ou tel skill. Ainsi, rien n'empêche un guerrier d'apprendre des compétences en nécromancie ou un invocateur de se battre à l'épée et au bouclier. Vous pouvez créer le personnage de votre choix, même si cela implique des contradictions et de ce fait des builds qui n'ont aucun sens dans la pratique. Il faut donc bien réfléchir à ses choix si l'on ne veut pas se retrouver avec un personnage sous-exploité et ne pas se laisser déborder par la grande flexibilité du système. D'autant que la difficulté aura très vite raison de vous à bien des égards.
À qui le tour ?
4 modes sont possibles : Exploration, Classique, Tactique et Honorable. Si le mode exploration ne représente quasiment aucun challenge il n'en va pas de même pour le Classique que l'on conseille vraiment dans un premier temps même pour ceux ayant déjà joué au premier jeu. Même en coopération, il arrive très souvent d'être dans une véritable impasse tactique et de devoir rebrousser chemin pour monter en niveau avant de tenter de ré-affronter les adversaires coriaces. Un combat (fonctionnement au tour par tour) même rondement mené peut parfois durer 10, 15 voire 20 minutes selon votre emplacement de départ, vos skills, les compétences de l'adversaire, votre équipement... Après un échec il est parfois nécessaire d'analyser la topographie du terrain pour comprendre la raison de votre défaite qui peut de temps à autre s'expliquer par des choses simples. Un archer ou un mage qui prend de la hauteur via une échelle, un tonneau d'huile inflammable qui explose sous vos pieds... DOS II est un jeu où l'univers reste logique et cohérent et où il est possible d'interagir avec pratiquement tout ce qui vous entoure. Et ce n'est clairement pas le jeu de la précipitation ou du rush, le titre vous le fera vite comprendre. Le combat tout comme résoudre une quête peut être un jeu d'enfant comme un vrai "calvaire". Toujours dans l'optique de coller au plus proche d'un Jeu de rôle papier, il y a de toute façon toujours plusieurs solutions pour un seul et même problème.
1 problème, 36 solutions
Vous êtes coincé dans une prison ? Pourquoi ne pas tenter de détruire la porte avec un puissant sort de feu. Ou alors peut-être est-il plus judicieux de subtiliser la clé à un gardien ? Si l'un de vos compagnons ou vous-même avez le talent de parler aux animaux, pourquoi ne pas demander à un rat de vous aider à trouver la sortie ? Toujours dans cet esprit Larian, le jeu est rempli d'humour et de subtilités. Parler aux animaux est toujours un grand moment et cela peut même donner lieu à de belles récompenses comme la clé d'un coffre ou la découverte d'une zone cachée. C'est sans compter sur le sort de téléportation qui peut parfois nous amener dans des endroits que l'on n'aurait même pas imaginer accessible auparavant. Ce qui donne d'ailleurs naissance à des petits problèmes où notre héros peut se retrouver dans une zone impraticable.
Exploration... mon amour
D'ailleurs, l'exploration est toujours mise en avant et tout est fait pour éveiller votre curiosité. En cherchant bien sur une plage on finira par trouver un trésor enfoui, mais pour pouvoir le déterrer il faudra s'équiper d'une pelle. Et c'est en partant à la recherche d'une pelle que vous rencontrerez peut-être un PNJ qui vous donnera une quête, qui elle même vous donnera l'opportunité de trouver un autre trésor... Bref c'est un jeu multi-connexions aux racines bien profondes qui s'étendent à toutes les composantes du jeu. L'exploration mène aux quêtes, les quêtes forcent à l'exploration qui peuvent aussi déboucher sur du combat. L'univers est d'une richesse incroyable et c'est probablement le RPG le plus complet et profond à ce jour. Une simple zone de la taille d'une taverne peut vous manger 1 heure de votre temps tellement les possibilités sont nombreuses, partout, tout le temps. D'autant que la micro-gestion est omniprésente et elle vous force à vous occuper de chacun des membres de votre équipe avec le plus grand soin. Une arme différente ou la moindre pièce d'équipement peut avoir un impact significatif sur le déroulement d'un combat. L'interface a pour l'occasion, reçu un bien beau lifting depuis le jeu précédent, même si ce n'est pas encore tout rose notamment en pleine action où l'on a parfois du mal à comprendre ce qui se passe, notamment lorsque c'est le tour de l'ennemi.
Ce qui impressionnera surtout ceux qui n'ont jamais touché à un jeu Larian, c'est la cohérence du monde qui nous entoure. L'eau conduit l'électricité, le feu s'éteint en sa présence, la glace fond... Bref à vous de découvrir toutes les subtilités des combats, elles sont nombreuses et on vous laisse le plaisir de la surprise.
La quintessence du RPG occidental
Les dialogues sont toujours aussi d'un grand intérêt, avec des choix de réponses nombreux qui dépendent de votre race, de vos origines... Si vous êtes un homme d'origine noble, nul doute que vous aurez des possibilités de dialogues bien différentes que celles d'un nain roturier ou hors-la-loi. Une seule discussion peut aboutir à 3 voire à 4 conclusions différentes selon vos choix narratifs. Coté traduction, si les textes sont entièrement traduits en français, ce n'est pas le cas des voix. Mais le casting d'origine est si bon que ce n'est pas un gros problème. Même avec une très bonne oreille, il est bien difficile d'entendre plusieurs fois la même voix. Chaque personnage semble unique aussi bien dans son caractère que dans le timbre de sa voix, ce qui renforce l'aspect vivant de l'univers. À tel point que l'on peut parfois ressentir de la peine pour un personnage, ce qui est une chose plutôt rare dans les RPG occidentaux à l'exception peut-être des titres de chez Obsidian.
Un jeu hors catégorie
Pour toutes ces raisons, on ne peut pas dire que Divinity Original Sin 2 soit indulgent et accessible à tous. On peut très vite se retrouver perdu sans savoir quoi faire si on ne prend pas le temps de s'impliquer et que l'on souhaite faire tout trop vite. Le jeu est d'une richesse incroyable qui permet de le placer au niveau des RPG papiers, avec ses propres règles et ses propres méthodes. On ne peut pas demander à DOS II de faire du Elder Scrolls. Car si ce dernier possède un univers incroyable avec ses propres composantes, Divinity est d'une profondeur incomparable et il n'a d'ailleurs pas d'opposant direct. Le jeu est tout simplement hors catégorie et c'est pour cette raison qu'il fonctionne. Encore une fois, le seul studio coté RPG qui peut se targuer de proposer une telle profondeur pour ses jeux de rôle est Obsidian. On pourrait même parler d'une certaine fraternité entre les deux équipes (Larian-Obsidian) car elles ont toutes deux le même désir : garder en vie et remettre sur le devant de la scène le jeu de rôle old-school. Prouver au monde vidéoludique que le genre respire encore fièrement et qu'il a toujours un public nombreux et fidèle.
Un sans-faute
DOS II est le genre de jeu dans lequel on prend plaisir à chercher... Fouillant chaque recoin à la recherche d'indices, discutant au gré de nos envies à un brave garde accoudé à une vieille porte en bois ou à un nain réparant frénétiquement une hache sur un établi. Paroxysme même du genre RPG, le jeu offre aux joueurs une liberté depuis trop longtemps perdue. Cerise sur le gâteau, l'univers en plus d'être vaste et vivant est d'une incroyable beauté. En 1080/full ultra c'est somptueux, et en 4K c'est tout bonnement majestueux.
Une bonne vieille GTX 770 ou une R9 280 (100 euros) suffiront pour faire tourner le jeu sans aucun soucis en 1080p dans de très bonnes conditions. Enfin musicalement c'est un sans-faute, le jeu s'offrant même le luxe de proposer le choix d'un instrument principal qui sera joué lors des phases de combat ! Le souci du détail on vous dit.
Enfin, et là on ne peut que s'incliner devant les studios Larian : l'introduction du GM mode dont on avait eu l'occasion de parler il y a quelques mois. Pour dire les choses simplement c'est la transposition stricto-sensu d'un JdR papier en format jeu vidéo. Vous avez un éditeur de cartes, vous pouvez tout créer via un outil très simple et vous pouvez raconter l'histoire que vous souhaitez. Soit vous êtes le GM, soit vous êtes le joueur. Evidemment tout le système jouit de la compatibilité du Steam Workshop qui assure du contenu à foison pour les années à venir. Chapeau bas l'artiste !