Aperçu entre un bretzel et une bière lors de la Gamescom 2019, Colt Canyon avait su rapidement susciter l'intérêt de votre serviteur, et ce malgré les railleries d'un Tigre a priori bien sobre. Sous ses daux-airs de Hotline Miami en plein Far West, Colt Canyon a-t-il assez de balles en réserve pour tenir la distance ? Enfilez votre poncho et vos bottes de cuir, car nous allons en soulever, de la poussière...
La vie n'est pas toujours facile pour les courageux pieds tendres qui se sont lancés comme tant d'autres à la conquête de la côte Ouest et de ses promesses de fortunes faciles. Soucieux de ne pas y aller par quatre chemins, Colt Canyon expédie en quelques secondes le semblant de motivation en forme de prétexte génocidaire : tranquillement installé au coin du feu, votre partenaire se fait brusquement kidnapper, et il ne tient qu'à vous de braver la mort pour l'arracher aux mains de vils brigands, non faire couler au passage quelques hectolitres d'hémoglobine.
Rumbleweed
Ce prétexte scénaristique expédié, il ne vous restera plus qu'à vous frayer un chemin parmi les centaines d'ennemis qui croiseront votre route, en maniant avec un armement en constante évolution, comme le veut la tradition. Sous ses airs de twin-stick shooter 2D, Colt Canyon emprunte quelques éléments de gameplay au genre du rogue-like, pour proposer un concept hybride : si le jeu de Dennaton exigeait de maîtriser sur le bout des doigts des niveaux déterminés et des adversaires pareillement placés, Colt Canyon renouvelle sans cesse la formule, en générant de façon aléatoire chacun de ses environnements.
Il faudra donc constamment s'adapter à l'inconnu, même si la douzaine de stages ne s'éloigne jamais des paysages ensablés de la côte ouest du continent américain et de ses célèbres virevoltants. La bande-son qui emprunte aux canons du genre s'avère à ce titre extrêment plaisante, même si le déclenchement de certaines phrases accompagnant un gunfight musclé tarde parfois à redescendre une fois votre adversaires gisant dans leur tripes. Et si l'esthétique résolument low pixel confère au titre de Jonathan Mannshoven un charme certain, le camaïeu de marron qui caractérise Colt Canyon lui fait clairement perdre en visibilité. Si les ennemis se détachent clairement, et contrastent violemment avec les gerbes de sang versées, il n'est pas toujours facile de comprendre la matérialité de certains éléments, notamment les rochers, qui ne vous mettent pas toujours à l'abri des regards, contrairement à ce que l'on pourrait penser.
Un six-coups, et au lit
C'est que malgré sa tendance à faire feu de tous bois, Colt Canyon nous apprend d'abord à jouer la carte de l'infiltration : doté d'une pirouette à l'exécution silencieuse, notre héros en poncho peut également se débarrasser de ses adversaires au corps-à-corps, grâce à une arme blanche qui peut one-shot certains ennemis autrement plus costauds en duel. Certains environnements peuvent ainsi être traversés sans faire de bruit, histoire d'économiser les balles. Il faut dire que les balles pleuvent bien vite, puisque les coups de feu attirent bien vite la piétaille aux alentours. Heureusement, notre héros peut ramasser les armes qui jonchent le sol entre deux flaques de sang, et ainsi varier les approches : entre l'arc silencieux, le fusil imparable à courte portée, les tomahawks, ou les long rifles bien fourbes, il y a de quoi varier les plaisirs.
Entre deux combats, vous n'aurez d'autre choix que de looter à tout va les nombreuses caisses et éléments du décor, un exercice rapidement fastidieux qui casse parfois le rythme, mais s'avère indispensable pour ne pas rapidement tomber à cours de munitions. Cette fouille d'orpailleur permet également de mettre la main sur des bâtons de dynamite, aussi pratique que risqués, qui permettent de décimer des groupes entiers, ou d'espérer avoir une chance de sortir victorieux des combats de boss, véritables gouffres de difficulté à chaque fois, sans parler des embuscades aléatoires, qui auront tôt fait de vider vos réserves entre deux niveaux.
Le bon, la brute, et le décoffrage
Heureusement, les runs se suivent, et ne se ressemblent pas, notamment grâce à l'arrivée très rapide de nouveaux personnages, qui à l'instar d'un bon vieux beat'em all proposent des caractéristiques qui affectent véritablement le gameplay : Cade Colt est l'as de la gâchette bien équilibré, Buck Brewer, un tank qui compense sa lenteur par une résistance accrue, Makya May, une agile indienne qui manie l'arc comme personne, et Alice Fox, une bonne représentante du combat à distance grâce à sa maîtrise des long rifles. À force d'essais, ces desperados voient leur arsenal de départ s'enrichir, et la perspective de démarrer avec un arsenal d'emblée bien plus sexy offre ainsi une bonne raison de pousser chaque run, même mal engagé.
Et c'est avec cette variété de paramètres que Colt Canyon réussit à proposer une expérience plaisante, qui pousse à essayer de nombreuses approches pour toujours progresser un peu plus, et apprendre de ses erreurs. On apprendra ainsi à conserver les clés cachées pour ouvrir quelques coffres remplis de loot, ou à l'instar d'un Spelunky choisir les améliorations également aléatoires en fonction de son run, quitte à parfois faire tapis sur un coup de tête. Si l'aventure ne prendra qu'une poignée d'heures aux plus fines lames de l'Ouest Lointain, ceux qui triompheront des vagues d'ennemis toujours plus denses et promptes à se jeter sur vous découvrirons un sympathique twist une fois votre compagnon secouru, qui offre un dernier supplément à Colt Canyon, et lui permet ainsi de ne pas s'étaler plus que de raison.