Après une première moitié de l’année solide pour la PS5 avec FF7 Rebirth, Helldivers 2, Stellar Blade ou le très récent Black Myth Wukong, PlayStation s’apprête à délivrer ses prochaines cartouches exclusives avant les fêtes. Deux titres majeurs et prometteurs sont encore attendus à l’image d’Astro Bot et de LEGO Horizon Adventures. Mais pour l’instant, la « star » du catalogue PS5, c’est Concord. Un jeu qui, même avant son lancement, était dans une mauvaise posture en raison de bêtas complètement désertes, et qui a vite été considéré comme le canard boiteux de la ludothèque PlayStation 5. Le naufrage anticipé est-il réel et justifié ? 

Un jeu multi Les Gardiens de la Galaxie non officiel ? 

Sony Interactive Entertainment et Firewalk Studios ont ménagé le suspens pendant trois ans autour de Concord. Finalement, ce n’est qu’au cours du PlayStation Showcase de mai 2023 qu’on a pu voir le jeu à travers une cinématique et un trailer de gameplay. Dès la diffusion de la première bande-annonce, il y a eu un consensus sur le fait qu’il y avait une grosse vibe Gardiens de Galaxie au niveau des personnages et du ton général qui se dégageait. Le contexte de l’histoire du jeu y ressemble effectivement énormément. Cette nouvelle licence nous invite à endosser le rôle de Freegunners, une bande de  hors-la-loi aventuriers et marginaux, qui se déplacent dans la galaxie à bord du Milan Northstar et agissent comme des mercenaires. Mais les longs-métrages Marvel et Concord ne boxent pas dans la même catégorie. 

Concord est un jeu de tir par équipe et ne dispose pas de campagne solo. Néanmoins, les développeurs ont créé tout un univers qu’ils comptent bien développer au fur et à mesure. Car pour le moment, c’est bien chiche. Une cinématique d’intro pour présenter très brièvement le groupe, puis une seconde pour la première semaine de sortie du jeu, c’est tout ce que vous aurez. Normalement, il y en aura une nouvelle à un rythme hebdomadaire et la narration s’étalera donc sur le long terme. On salue l’effort de vouloir accorder de l’importance aux personnages et au lore de cette nouvelle franchise, mais les limites sont déjà palpables. Les deux cinématiques sont hyper courtes et ne racontent vraiment pas grand-chose de passionnant. Ce qui fait qu’on passe à côté du background des (anti)héros et de leurs liens. 

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Pourtant, Firewalk Studios a visiblement essayé et a consacré du temps à l’élaboration de cinématiques à couper le souffle. La modélisation des personnages, les animations, les détails sur les visages ou la synchronisation labiale, c’est du très haut niveau. On est même surpris qu’un studio sorti de nulle part offre un tel rendu. Pendant les parties, la technique ne faillit jamais, ou bien à de très très rares exceptions, c’est fluide, joli et très propre en termes de qualité d’image. Pour un premier jeu, c’est du bon boulot, clairement. Mais voilà, comme toujours, la plastique ne fait pas tout. Et une fois qu’on a dit ça, ça devient compliqué de défendre cette dimension narrative finalement très discrète.

Si vous aimez lire, il y a cependant tout un Guide galactique avec des entrées à débloquer en jouant toutes les semaines, en incarnant des nouveaux personnages etc. Honnêtement, s’il y avait au moins eu une carotte avec des cinématiques bien longues et plus palpitantes, pourquoi pas, même si cet aspect reste secondaire dans un jeu multi. Mais on n’a pas eu cette volonté d’aller creuser l’univers et ses protagonistes. À voir dans plusieurs mois, si Firewalk Studios tient sa promesse de raconter une vraie histoire et pas seulement par le biais du Guide. Mais après huit ans de développement, ça reste décevant pour le moment. Et encore plus lorsque l’on voit que des jeux tels qu’Overwatch ou League of Legends ont tous les deux prouvé qu’il était possible de construire un vrai univers avec des héros charismatiques.

Le crash du Concord

Voilà pour ce petit laïus sur la narration, mais ce qui intéresse surtout certains, c’est tout le reste. Le gameplay, les personnages avec leurs forces et faiblesses etc. Au lancement, le casting de base de Concord est composé de 16 laissés-pour-compte, douze principaux et quatre renforts, répartis dans six Rôles différents (Pilier, Fer-de-lance, Spectre, Ranger, Stratège, Sentinelle). Ce n’est ni plus ni moins qu’un système de classes traditionnel avec, à chaque fois, des archétypes qu’on retrouverait ailleurs comme le DPS, le Tank, le Support etc.

Vous serez en terrain connu même si votre expérience n’est pas immense dans le domaine. Mais tout de même, au début, c’est déstabilisant de se jeter dans le bain sans trop savoir qui peut faire quoi, et le jeu n’est pas d’une grande aide. Il est impossible de distinguer quel rôle est attribué à chaque héros en se fiant à son apparence à quelques exemples près. N'espèrez pas non plus prendre du temps pour lire les descriptions avant une partie, car vous n'avez que quelques maigres secondes pour faire votre choix. Il faut alors se rendre tranquillement dans le menu des Freegunners qui est tout sauf ergonomique. Pour mieux comprendre les compétences et les attraits des héros, allez plutôt faire un tour en mode entraînement. Vous pourrez passer en revue les propriétés de chacun de manière beaucoup plus simple, et vous aurez la possibilité d’en sélectionner un pour vous faire la main dessus. 

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Chacun des héros est équipé d’une arme, voire plusieurs, de deux compétences actives et d’une capacité passive et sont tous différents. Certains sont parfaits pour briser des défenses comme le tank Stello (Fer-de-lance) avec sa ruée sur plusieurs mètres et son coup final « Onde de choc ». Le soldat Teo (Ranger), qui est le beau-gosse sans charisme de la bande, sera à l’inverse plus polyvalent. Haymar (Sentinelle), qui est la version féminine du Doctor Strange de Marvel, se distingue par ses dégâts de zone et ses déplacements dans les airs en lévitant. Au niveau du character design, c’est aussi le jour et la nuit. Il peut y avoir des looks assez cools comme celui de la diablotine IT-Z, et d’autres complètement random comme Teo ou Haymar. Ca part un peu dans tous les sens.  

En toute logique, il y en a donc pour tous les goûts. Mais malgré cela, on peine réellement à élire notre favori parce qu’il y a toujours quelque chose qui cloche. Par moments, ça manque cruellement de retour lorsqu’on lance un pouvoir qui touche pourtant l’adversaire. À d'autres, c'est la compétence qui va poser des problèmes en elle-même, comme le « Rebond-brouilleur » d’IT-Z qui permet d’inhiber l’arme d’un rival pour surcharger la nôtre et ainsi la rendre plus puissante. Ça met trop de temps à arriver jusqu’à la cible. Même constat avec la téléportation de Lark qui lui permet de déguerpir pour se mettre à l’abri en rejoignant un cocon déployé quelques instants plus tôt. C’est le fonctionnement du perso qui veut ça, mais le temps qu’on valide et que ça s'enclenche lors d'un face à face, on est mort.

haymar combat image

De tels soucis ont des répercussions directes sur l’équilibrage des persos. Comment échapper à un violent assaut si la téléportation de Lark est trop lente ? Eh bien vous pouvez toujours sauter, puis prendre vos jambes à votre cou, sur un malentendu… De manière générale, Concord est mou. On a rarement livré des batailles intenses en raison du feeling de déplacement, du gunplay, du level design ou de certains choix, comme le fait de basculer  d'une vue subjective à la troisième personne en cas d’esquive. Pour réduire un peu certains de ces problèmes, notamment au niveau des déplacements, il y a toutefois plusieurs solutions.

Par exemple, en effectuant des mouvements comme une esquive, un des héros peut recevoir un bonus de vitesse de sprint, quand ceux appartenant à la classe Spectre sont naturellement plus rapides. Des « Effets de statuts » pourront aussi s’appliquer en passant sur les cocons de Lark qui libèrent des spores pour améliorer la dextérité ou encore la vitesse de déplacement - et a contrario, il existe des effets négatifs qui ralentissent, brûlent ou aveuglent. Enfin, il y a le bonus d’équipe. Chaque héros a un avantage qui dépend de son rôle. La classe Spectre sert à augmenter la mobilité, Pilier à avoir des soins plus efficaces, Stratège permet un rechargement plus rapide etc. De ce fait, si un personnage est lent, il pourra revoir un peu à la hausse son agilité. Pour y avoir le droit, il faut… mourir ! À chaque décès, ce bonus sera appliqué aux prochains persos sélectionnés en sachant que vous pouvez en cumuler jusqu’à six, les six des différentes classes donc. 

concord image teo

Alors ça améliore un peu les choses, et c’est intéressant car ça force le joueur à tester divers héros continuellement. Mais cela aura davantage d’utilité dans des modes plus tactiques, sans réapparition, où l’on doit plus réfléchir à l’équipe à composer. Haymar sera plus rapide, oui, mais le sprint demeure lent. L’autre souci que l’on a avec Concord, c’est le TTK (Time to Kill), soit le temps que cela prend pour faire passer l’arme à gauche à nos adversaires. C’est long, trop long, au point où c’est souvent frustrant. Perdre un duel parce qu’on a visé comme un manche, soit, on accepte la sentence. Mais quand on arrive dans le dos d’un ennemi, qu’on l’arrose, qu’il ne meurt PAS et qu’il se retourne pour nous aligner, très peu pour nous. Ce n’est pas Concord qui a inventé les jeux avec un TTK atroce, mais en revanche, le jeu aurait pu éviter de tomber dans ce piège. On sait que c’est le genre qui veut ça, le TTK d’Overwatch étant par exemple plus élevé, mais reste qu’à titre personnel, c’est un gros problème. 

Un avenir déjà sombre ?

Avant chaque match, on doit choisir entre les 16 personnages dans l’équipe « classique ». Au fur et à mesure que l’on progresse, on gagne des points d’expérience pour augmenter notre niveau général, et à partir du rang 4, on a accès au « Créateur d’équipe ». Cela permet de se construire son deck personnalisé de héros. Rien n’est imposé, hormis le fait d’avoir au moins 5 freegunners différents. Mais il est possible d’avoir un personnage en triple exemplaire avec le système de « Variations ». Cela attribue des bonus de munitions, de compétences ou de dégâts aux héros, en plus de changer l’apparence physique avec de nouvelles coupes ou déclinaisons de vêtements.

Teo peut ainsi troquer sa meilleure mobilité après une esquive dans sa variante I, contre des chargeurs plus grands pour ses armes et plus de grenades dans sa variante II. D’après Firewalk Studio, il y en aura une nouvelle par semaine, sachant qu’il faut les débloquer en effectuant plusieurs séries d’actions dans un temps limité comme réaliser des coups critiques etc. C’est sympathique et ça permet de varier un peu les plaisirs, surtout pour un perso qu’on apprécie particulièrement, mais ça reste anecdotique et fouilli. On a obtenu certaines variations sans même savoir comment ni pourquoi. 

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Concord offre 12 cartes pour l’instant, ce chiffre pourrait monter à 13 dès le mois d’octobre. L’objectif de Firewalk Studios est de relancer l’intérêt de leur jeu tous les trois mois avec des cartes voire des modes. On pourrait croire que c’est suffisant, mais le fait est que vous allez peut-être retomber très souvent sur les mêmes. Sans être originale ou d’une solidité à toute épreuve, la direction artistique sait se montrer correcte voire vraiment chouette sur une map telle qu’Aléas aquatiques. Non, là où ça pêche davantage, c’est sur la composition des cartes et le level design. Si la verticalité est appréciable pour les héros les plus mobiles, il y a trop de quasi copié collé avec une répétition de bâtiments aux couloirs labyrinthiques. Parfois, les maps sont aussi  trop grandes pour leur propre bien, et ça agit forcément négativement sur le rythme de l’action. 

Du côté des modes, on n’est pas réellement plus emballé par Concord. C’est du vu et du revu malheureusement. On a le choix entre trois playlists de jeu avec à chaque fois deux modes qui tournent en rotation. En vrac, vous pourrez vous écharper avec du match à mort en équipe (Élimination), jouer l’objectif avant tout avec de la capture de zones ou encore récupérer des primes sur le corps de cadavres pour engranger des points jusqu’à la victoire. Du très classique donc, mais si vous aimez le défi et jouer en équipe, Récupération et Occupation permettent de sortir un peu du classicisme, malgré des objectifs qui ne réinventent rien. Étant donné qu’il est impossible de respawn, c’est plus stratégique et il faut bien choisir ces héros pour avancer et gagner ensemble. Sur Occupation, un personnage avec un bouclier déployable peut être d’une grande utilité par exemple. À la fin de chaque match, peu importe le mode, on débloque des points d’expérience généraux et pour les persos joués durant la partie. Cela permet de pimper les freegunners avec des accessoires, de nouveaux vêtements, de modifier les poses de victoire et d’apparition etc. 

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Si Concord laisse un goût amer en bouche, c’est aussi en raison de son modèle économique. D’un point de vue du battle pass, c’est un sans faute puisque l’intégralité du contenu sera gratuit. Mais, parce qu’il y a un gros mais, contrairement à certains de ces camarades, il est payant ! Certes, le prix de 39,99€, comme Helldivers 2, est raisonnable en soi. Mais le hic, c’est qu’il est en concurrence avec d’autres titres free to play plus aboutis comme Overwatch et Paladins…. Alors bien sûr, le rendre jouable gratuitement n’aurait peut-être pas été la solution miracle, mais ça lui aurait évité d’être dans la situation catastrophique dans laquelle il se trouve. Le jeu est déserté sur PC, et sur PS5, ça n’a vraiment pas l’air mieux. Certains joueurs semblent mettre plus de huit minutes à rentrer des parties, ce qui ne fait qu’empirer les choses. Toutefois, de notre côté, nous n’avons jamais constaté de tel soucis. Un modèle économique gratuit, comme actuellement, mais avec une boutique de skins aurait pu au moins  laisser une marge de manœuvre au studio. Or, à l’heure actuelle, on se dit que le titre est peut-être déjà condamné, d’autant qu’il n’a même pas de système de classement et autre, alors qu’il s’agit d’un jeu compétitif censé durer.