Vous connaissez peut-être l’histoire, mais il faut retracer un peu les événements pour se rendre compte à quel point ce Call of Duty Black Ops 6 fait du bien à la licence. 2003, la franchise débarque sur le sentier de la guerre et prend d’assaut un terrain à l’époque sous le contrôle de Medal of Honor, roi des FPS historiques des années 2000. Rapidement, l’appel du devoir l’emporte, grappille du terrain et distance ses adversaires. 2007, c’est l’effervescence, l’explosion. Infinity Ward donne naissance à Call of Duty 4 : Modern Warfare. Un FPS désormais culte, qui bouscule tous les codes et en impose de nouveaux. Un monument est né et des jeux incontournables comme Modern Warfare 2 ou encore Black Ops premier du nom, ont gravé à jamais leurs noms dans l’histoire.
La licence devient inarrêtable et suit depuis un rythme effréné d’un épisode par an. C’est un raz-de-marée, chaque jeu se vend à des millions d’exemplaires, Call of Duty semble intouchable. Mais si les fans répondent présents et que de nombreux records tombent, une ombre s’installe. Ça commence à lasser certains joueurs, et paradoxalement les quelques tentatives pour sortir des sentiers battus se sont soldées par de cuisants échecs. À partir de Call of Duty Ghost (2013), la franchise prend du plomb dans l’aile. Même si les jeux se vendent bien, le cœur ne semble plus y être, du côté des joueurs tout comme celui des développeurs. Call of Duty n’a cependant pas dit son dernier mot et revient une fois encore en force avec un reboot de Modern Warfare en 2019, et de nouveau, même si la qualité des titres est en dents de scie, la franchise semble prendre un nouveau départ avant de s'écraser une fois de plus avec Modern Warfare 3, un titre opportuniste, ni plus ni moins, aux airs de gros DLC vendu plein pot qu’on n’avait d’ailleurs pas vraiment bien reçu.
Nous voilà en 2024, le voyage nous a pas mal secoué, mais on nous fait de belles promesses. Treyarch, épaulé par une myriade de camarades, donne naissance à Call of Duty Black Ops 6. Une suite directe des événements de Black Ops 2 et Cold War, avec la volonté d'offrir aux joueurs une expérience nouvelle, mais aussi une sorte de retour aux sources. Pari gagné ? Oh que oui.
Welcome back Black Ops
Nous sommes en 1991, Frank Woods est en fauteuil suite à ses mésaventures à la fin de Black Ops 2, Alder est introuvable, et une nouvelle unité Black Ops est constituée. À sa tête, on retrouve un certain Marshall, un vétéran qui a tendance à trop laisser ses émotions le piloter. Suite à une mission risquée au Koweït en pleine crise avec l’Irak, la Black Ops se retrouve Persona non Grata, traquée. Plus que jamais l’heure est aux règlements de compte. Une unité paramilitaire ultra entraînée et suréquipée a infiltré toutes les hautes sphères menaçant l’ordre mondial, alors que de nombreux conflits explosent au Moyen-Orient. Une véritable poudrière que notre nouveau commando va devoir rapidement désarmer, avant qu’il ne soit trop tard.
Pour ce Call of Duty Black Ops 6, il est une nouvelle fois question d’une trame complètement inédite et imaginaire, digne d’un excellent thriller d’espionnage, sur fond d'événements historiques et militaires marquants et malheureusement bien trop réels. Treyarch a toujours su jouer les équilibristes, bien mieux que leurs collègues d’Infinity Ward qui virent très (trop ?) souvent dans le cliché du parfait soldat américain.
Dans Black Ops 6, tout le monde est sale, même lorsque certains essayent d’empêcher de gigantesques drames. Treyarch a réussi à donner du caractère, de la matière et même un certain contraste à ses personnages. Si notre héros “principal” est quant à lui parfaitement muet, nos camarades eux sont sacrément bavards. Inattendu, oui, et pourtant, la campagne de ce Call of a beaucoup de choses à raconter. Bien mieux écrit que n'importe quel autre FPS de la franchise, Black Ops 6 donne la parole à ses protagonistes (et antagonistes), on peut converser avec la plupart des personnes qui nous entourent au quotidien ou lors d’une mission. Plusieurs choix de dialogue s’offrent à nous et si l’on ne nage pas en plein RPG, on ne peut que très clairement saluer l’initiative qui est à la fois cohérente et surtout intéressante.
La meilleure campagne de tous les Call of Duty ? Une petite révolution pour la licence
Globalement, c’est toute la structure de la campagne qui est surprenante et dans le bon sens du terme. Le studio n’oublie pas l’essence de la franchise Call of Duty et bien évidemment, on aura notre lot de séquences marquantes, d’action débridée et de mise en scène digne d’un véritable blockbuster. Mais là, pour la première fois de son histoire, Call of Duty tente quelque chose de nouveau et varie les plaisirs d’une mission à l’autre. On a par exemple un QG améliorable que l’on visitera entre deux missions. Ce dernier regorge de secrets, et est animé par quelques scènes de vie de notre commando. On aurait certainement aimé que ce hub soit un peu plus utilisé, mais soit.
C’est d’ici aussi que l’on rejoindra nos missions, toutes rejouables d’ailleurs, et que l’on pourra papoter avec nos camarades. Mais c’est aussi et surtout dans ce lieu que l’on pourra y dépenser de l’argent, qu’il faudra glaner en mission en explorant (oui, en explorant vous lisez bien) afin d’améliorer nos capacités de combats et notre équipement. Les inspirations de Warzone sont toujours palpables, on peut trouver des coffres ça et là, de l’argent, et le système de plaques de blindage fait désormais partie du cœur du gameplay. Néanmoins, c’est enfin imbriqué comme il le faut, et non pas au chausse-pieds, à l’arrache, comme dans Modern Warfare 3. La preuve que c’était faisable.
Une campagne qui nous tiendra en haleine entre 7 et 10h suivant la difficulté choisie, vos facultés à vous en sortir et si vous papillonnez ou non lors de vos sorties. Là, je sais d’office que vous allez être nombreux à vous poser des questions. Exploration ? Liberté ? Plus de 7h de jeu ? On parle bien d’un Call of Duty là ? Un peu mon neveu, et qu’est-ce que ça fait du bien d’avoir du changement, et réussi surtout. Jamais une campagne de Call of Duty n’aura su être aussi diversifiée, et novatrice en termes d'approche et d'écriture. Séquence d’espionnage libre à la Hitman, dans la foule avec une certaine liberté d’approche de nos objectifs, du monde ouvert également, plutôt vaste d’ailleurs, pour une mission de destruction et de renseignements, ou encore un trip à la Bioshock teinté d’horreur et de fantastique parfaitement mémorable (gare à la pédiophobie).
On était jusqu’ici tellement formaté avec des campagnes plutôt classiques, même si certains ont de petits rebondissements, et des missions très scriptées et dirigistes, que Black Ops 6 apparaît ici comme un véritable OVNI. Et merci pour ça, clairement. Call of Duty Black Ops 6 est certainement l’épisode le plus abouti, le plus généreux et ambitieux de toute la licence. Une campagne tout bonnement mémorable, qui restera en mémoire, non seulement parce qu'elle est excellente, mais aussi et surtout parce qu'elle est LE coup de frais dont avait besoin la franchise.
Un gameplay entre évolution et retour aux sources, une réussite totale
Et d’ailleurs, Black Ops 6 ne s’arrête pas là et touche aussi à son gameplay en revoyant carrément les bases. C’est à la fois une évolution logique, une petite révolution et surtout un retour à l’essence même du fast FPS. Le nom de cette pépite : l’omnimouvement. Cette nouveauté permet un déplacement rapide, comme le sprint ou la glissade, dans toutes les directions et sans grosse perte de mobilité. On peut également plonger, se tenir sur le dos au sol, tourner rapidement sur soi-même lorsqu’on est allongé, faire du parkour de manière extrêmement fluide… c’est une sensation de liberté totale lorsqu’on a la manette entre les mains.
Ajoutons à ça quelques détails intéressants, comme la possibilité de rendre le franchissement d'obstacles automatique, ou encore le fait que notre soldat s’incline d’office dans les angles ou face aux obstacles pour garder le champ de vision libre. Avec ces ajouts majeurs, le gameplay change presque du tout au tout. Oui, dans le fond, on court, on tire. C’est un shooter, c’est un Call of Duty. Mais l’omnimouvement apporte un vent de fraicheur qui fait un bien fou et nous permet surtout de rester concentré sur l’essentiel : le tir justement. D’ailleurs sur le gunplay et les sensations de shoot aussi Call of Duty Black Ops 6 réussit parfaitement son affaire.
Là où Black Ops Cold War était plutôt décevant, ce sixième épisode nous sert un gunplay efficace presque viscéral. On ressent bien la force de notre armement, son poids, son impact, mais aussi les améliorations des accessoires que l’on pourra venir greffer à notre équipement. Le sound design de nos pétoires est également très bon, excellent même. L’armement a ce claquement métallique qui manquait cruellement à certains épisodes passés. On a vraiment l'impression de tenir des armes qui crachent du plomb et non pas des paintballs qui tirent des balles en caoutchouc.
La collection d'armes est comme très souvent déjà généreuse avec plus d’une vingtaine de flingues divisés en plusieurs catégories (fusils d’assauts, PM, mitrailleuses, fusils tactiques ou snipers, etc..). Pour le moment, après plus d’une dizaine d’heures de jeu en ligne, l’équilibrage est plutôt bon, là où encore une fois il pouvait être désastreux dès le lancement de certains épisodes précédents.
Un multijoueur ultra solide malgré quelques pépins, de l'excellent Call of Duty
Le multijoueur de Black Ops 6, l’essence de Call of Duty, est pour l’heure très bon lui aussi. Décidément. Je précise bien, “pour l’heure” puisque dans quelques patchs, avec des packs de skins Nicki Minaj ou Snoop Dog, je ne pourrais certainement plus en dire autant. Mais en l’étant, à sa sortie, COD Black Ops 6 est vraiment un excellent jeu multi, loin du carnaval qu’était Modern Warfare 3. L’arsenal est généreux, il y a encore de très nombreux accessoires et cosmétiques à débloquer, et les classes ont été une fois encore revues. Les atouts peuvent par exemple donner des bonus d’ensemble si vous en équipez trois de la même famille. Ce bonus de set offre des capacités supplémentaires bien senties et permet de varier une nouvelle fois les plaisirs.
Autre nouveauté, l’arme de corps à corps est à part désormais. Ce ne sont plus des armes secondaires, mais tierces que l’on peut aussi prendre en main en jeu à l’instar de Counter Strike ou Valorant. On se doute ici que les cosmétiques vont rapidement venir garnir la collection de beaucoup de joueurs. Quoiqu’il en soit, cet ajout, aussi infime soit-il, fait plaisir à voir. Pour le reste, on est en territoire parfaitement connu. Le gunsmith (l’atelier d'amélioration des armes) a été allégé, au même titre que toute l’interface globalement d’ailleurs, et c’est tant mieux. Les gadgets et accessoires sont nombreux, leur déblocage simplifié (même si les gains d’xp sont un peu plus longs que la moyenne) et les stratégies de jeu sont nombreuses.
Certaines nouveautés sont même bien vues et amusantes, notamment sur les modes à rounds comme Recherche et Destruction. On peut par exemple infiltrer un temps l’équipe ennemie, écouter les conversations vocales et apparaître comme un allié à leurs yeux. Parfait pour prendre les infos ou surprendre l’adversaire. C’est extrêmement varié et tous les profils de joueurs y trouveront leur compte. Il n’y a que les bonus de série de points qui sont plutôt classiques. Drones, bombardements, colis stratégiques, hélicos… on a quelques nouveautés comme un lance-roquette téléguidé, mais rien de bien neuf. En revanche, je ne pardonne pas à Treyarch d’avoir enlevé les chiens d’attaque, c’était quand même leur marque de fabrique !
Oui, Call of Duty Black Ops 6 est beau
Les maps sont nombreuses, on en compte plus d’une douzaine pour les modes principaux et quelques-unes de plus pour les modes plus confidentiels, comme la Confrontation, en milieu restreint. Contre toute attente, la plupart des cartes sont hyper bien construites. C’est fini les cartes à 3 ou 4 couloirs, ou presque puisqu’il y en a tout de même des petites et même des cubiques pour les amoureux du genre qui seraient en manque de Shipment. Ici la plupart se passent sur plusieurs niveaux, sur terre ou sous l’eau, et les chemins sont très nombreux. On s’en fout qu’un joueur puisse poser une tente avec son sniper à une fenêtre puisqu’il existera au moins 5 façons d’aller le déloger ou de l’éviter tout simplement.
Bon, il y a tout de même quelques soucis encore, inhérents à la licence et que l’on aurait bien aimé ne pas voir ici. On pense notamment aux spawns (les points d’apparition) qui sont parfois complètement à l’ouest sur certaines cartes en particulier. Pour l’heure, le problème le plus gênant c’est qu’il est parfois possible de faire du spawn kill (tuer les joueurs dès leur apparition sans leur laisser une seule chance) sur au moins deux cartes bien précises. Là, c’est un problème de conception qui, on l’espère, sera vite réglé. Mais au global, d’autant plus si on le compare aux autres jeux de la licence, ce Call of Duty Black Ops 6 est un bon élève. Loin, très loin devant Cold War par exemple, et encore plus loin devant Modern Warfare 3 à sa sortie.
Le level design est donc globalement très bon malgré les quelques pépins. On se doute d’ailleurs que certaines maps proviennent de la prochaine mouture de Warzone, mais elles sont suffisamment variées, grandes et intéressantes pour ne pas être redondantes. Chacun trouvera midi à sa porte, mais impossible de ne pas noter le travail colossal qu’il y a eu sur la conception de ces cartes. Seule ombre au tableau, elles souffrent parfois d’un manque de lisibilité à cause d’un très grand nombre de détails à l’écran. Puisque oui, on ne vous l’a pas encore dit, mais Call of Duty Black Ops 6 est beau et travaillé.
En campagne, en multijoueur et même en Zombies, Black Ops 6 en met plein les mirettes. On viendra pinailler sur les animations des visages pas hyper naturelles lors de certaines discussions, mais c’est à peu de chose près tout ce qu’on aura à critiquer. Pour le reste, c’est très joli et toujours extrêmement fluide sur consoles et PC. Les effets de lumière sont hyper propres, c’est extrêmement détaillé (trop en multijoueur du coup) et on aura même le droit à de belles inspirations côté direction artistique pour les parties les plus “fantastiques” de l’expérience. On parle bien entendu principalement du mode Zombies, mais pas que… mais ça c’est une surprise, il y en a un paquet dans Black Ops 6.
A noter également que le sound design est de qualité, parfaitement maîtrisé. L’ambiance générale est vraiment très immersive, en solo comme en multi et en Zombies, mais il y a aussi un vrai travail sur la spatialisation sonore. On entend les ennemis nous arriver dans le dos, au-dessus ou en dessous de nous, même en multijoueur. Les bruits de pas sont hyper importants dans COD, et Black Ops 6 réussi à bien équilibrer la chose. On entend bien nos adversaires, mais pas trop et d’un autre côté les bruits de pas peuvent être étouffés par le son ambiant (crépitements du feu, explosions, tirs…) plutôt réaliste et cohérent donc.
Le mode Zombies, un vrai retour aux sources avec des nouveautés
Dernier pan et pas des moindres, le mode Zombies que l’on peut difficilement louper dans cette nouvelle cuvée. C’est là aussi l’une des marques de fabrique de Treyarch. C’est tout de même grâce à ce studio que l’on a le droit à ce mode depuis des années. Il nous en aura fait voir de toutes les couleurs d’ailleurs, des vertes et des pas mûres, mais avec COD BO6, on tient un excellent mélange de tout ce que l’on a déjà vu. Déjà, qu’on le dise tout net, c’est désormais un roguelite qui s’assume pleinement. Chaque partie est unique et on recommencera depuis le départ lorsque l’on trépassera, n’ayant que notre score pour pleurer. Mais au fil de nos parties, on emmagasine de l’expérience qui nous servira à poursuivre des “recherches”.
Ces recherches, qu’il faudra lancer avant chaque partie, améliorent les atouts que l’on pourra trouver en partie. Juggernaut, pour avoir plus de vie, Passe-passe, pour manier les armes comme un pro, ou encore Marathon, pour courir comme un sportif de haut niveau, tous sont présents, et bien d’autres encore. Ces bonus indispensables pour survivre sont dispatchés sur chaque carte et prennent la forme de distributeur. Ils sont toujours là. Désormais avec les “recherches”, on pourra améliorer leurs effets pour les rendre plus performants et donc par extension, nettement améliorer nos chances de survie. Les premières parties seront donc difficiles, mais petit à petit, on prendra le pli et on ira toujours plus loin jusqu’à résoudre tous les secrets de chaque carte en remplissant les différents objectifs cachés, à l’ancienne.
Pour le moment il n’y a que deux maps de disponibles, mais vu le nombre de choses à faire dessus, et le côté évolutif de la formule, c’est suffisant pour un lancement. Treyarch opte pour un vrai retour aux sources avec une structure plus classique donc, des zones à déverrouiller, des manches à l’ancienne, des boîtes d’armements aléatoires et des ateliers pour améliorer son équipement directement importé de Black Ops Cold War. S’ajoute à cela une dimension de shooter looter, puisque les créatures, toujours en très, très grand nombre, lâchent des objets à gogo que l’on peut utiliser en combat (grenades, gadgets en tout genre…). Quelques défis sont aussi proposés sporadiquement durant les manches, comme des objectifs donnés par un certain S.A.M, des boss à affronter ou encore des vagues d’horreurs à défourailler. Des monstruosités au design savoureux qui n’est pas sans rappeler The Thing d’ailleurs.
Jouable en solo, avec la possibilité de sauvegarder sa progression lors d’une partie, une vraie nouveauté, ou en multijoueur, le mode Zombies est redoutable d’efficacité. Alors lorsqu’on le cumule à une campagne généreuse et mémorable, et un multijoueur aux petits oignons, difficile de venir faire la fine bouche. N’en déplaisent aux détracteurs qui tirent sur la franchise à vue sans prendre le temps de lui donner une chance désormais, Call of Duty Black Ops 6 est un excellent épisode.