Adapté d'un excellent jeu de plateau qui date de 1987, Blood Bowl a la lourde tâche de contenter à la fois les fans de cette licence mythique gérée par Games Workshop et de séduire ceux qui n'ont jamais entendu parler de cette variante sanglante du football américain. Cyanide Studio est aux commandes, la balle est au centre, il ne reste plus qu'à compter les points !
Disponible depuis pratiquement un mois dans l'hexagone (on est des rapides, on sait), l'adaptation en jeu vidéo de Blood Bowl divise souvent les fans. La réconciliation entre ceux qui ne jurent que par la version "classique" - à base de figurines et de dés - et les progressistes trop heureux de jouer enfin tranquillement sur PC, semble parfois impossible. Loin de ce débat idéologique de fans hardcore, voyons comment Cyanide Studio s'est débrouillé pour rendre le tout attractif.
Les règles du jeu
Mélange de football américain et de rugby, les règles du Blood Bowl sont simplissimes : marquer des essais (touchdown), comme dans les jeux cités, tout en explosant les joueurs adverses si nécessaire. Et, bizarrement, c'est assez souvent "nécessaire"... Cogner le premier évite (parfois) de voir son équipe se faire étriper. Sur ces bases limpides, Cyanide offre deux modes de jeu : un classique au tour par tour, ainsi qu'un autre en temps réel appelé Blitz. Dans les deux cas, les règles sont basées sur la cinquième édition du jeu de plateau. Et d'après les connaisseurs (pour ne pas dire les coupeurs de cheveux en quatre...) qui me servent de conseillers sur ce test, le tout est très proche de ces règles bibliques pour tout fan qui se respecte. De ce côté là, tout va bien !
Là où ça commence à râler chez les puristes, c'est qu'il n'y a "que" huit races disponibles (humain, nain, skaven, orque, hommes-lézards, gobelin, elfe sylvain, Chaos) alors que l'univers de Games Workshop propose bien plus de choix. Le joueur lambda sera juste frustré de ne pas pouvoir mixer les races au sein d'une équipe, respect des règles originelles oblige. Ce panel offre pourtant largement de quoi faire : des équipes "moyennes en tout" comme les humains, des rois de l'esquive (les elfes) ou des bons gros bourrins (le Chaos, au hasard...).
8 tours et puis s'en vont
En mode classique, votre équipe évolue sur un terrain découpé en cases, et chaque mi-temps va se construire autour de 8 tours par joueur. Tout se corse avec le principe de "Turnover". Ratez une action (passe manquée par exemple), et l'adversaire reprend immédiatement la main, généralement pour punir sévèrement votre maladresse (ou manque de chance). Comme une grosse part du gameplay repose sur cette fameuse chance et ses jets de dés maudits, pas facile de savoir si, par exemple, votre interception tournera à votre avantage. Il est donc primordial de bien vérifier les statistiques de ses joueurs avant chaque action pour limiter la casse. Les dés sont toujours taquins ! Prenez soin de ne pas tenter une esquive avec votre bulldozer de service.
En mode Blitz, tout se déroule en temps réel, pour une action beaucoup plus fluide et permissive, qui met du reste parfois l'IA en déroute. Pour éviter une action trop confuse, il est possible d'appuyer sur espace pour passer en "pause active" et donner des ordres précis alors que l'action se fige. Malgré tout, maîtriser tous les aspects du match, y compris les petits plus comme utiliser des potions, soudoyer l'arbitre, etc. demande beaucoup de pratique et ce n'est pas le didacticiel aussi court que vide qui va vous aider. Préparez-vous à prendre des fessées et des coups de crampons sur la pelouse avant de profiter du jeu si vous êtes nouveaux dans le monde du Blood Bowl.
Un adversaire à toute heure
En solo, vous pourrez faire un championnat, un match simple et surtout une campagne complète, où vous devrez emmener votre équipe de bleus vers la gloire et la fortune (et surtout l'infirmerie). Passionnant pour les mordus du titre, certes, mais ce n'est pas le cœur du jeu. Le top pour le vieux fan de Blood Bowl, c'est évidemment le mode multijoueur. En réseau local, Hot Seat (deux tour à tour sur le même PC) ou carrément en ligue sur Internet, c'est là que les briscards vont prendre leur pied pendant des mois, voire des années. Malheureusement, tout n'est pas rose et cette partie Internet est perfectible, surtout à cause d'une interface vraiment mal pensée. On y trouve malgré tout l'essentiel : des listes d'amis, un salon de discussion et même un mail intégré. On peut browser les ligues et trouver un adversaire facilement. Mais en plus de son ergonomie préhistorique, aucune fonctionnalité de matchmaking pour sauver votre ego du piétinement ! Vos premiers matchs risquent d'être douloureux... Plus sérieusement, le design vieillot de cette interface de gestion du online et son manque de feedback quand on utilise certaines fonctions qui ne sont pas instantanées sont regrettables (on doit même se passer d'un sablier pour savoir que le jeu travaille : au début on pense que c'est planté, et parfois, ça l'est vraiment...). Ça fonctionne la plupart du temps, c'est déjà ça.
Placage brutal
Si les graphismes de ce titre son assez fins pour bien représenter le terrain, les unités et l'action (voire les pom-pom girls...), rien de transcendant non plus. Techniquement, Blood Bowl est même assez faible si on prend en compte les temps de chargement horriblement longs, même sur une bête de course avec 4 Go de RAM. En prime, sur mon PC, l'intro est toujours un écran noir, par exemple et le système de mise à jour automatique ne fonctionnait pas avant que j'update le tout à la main. Ce qui m'a permis au passage de récupérer une résolution en 1920x1200, absente de la version de base. De même, pas de problème de alt-tab intempestif, le retour sur le bureau semble bloqué... ce qui n'arrangera pas forcément les joueurs en tour par tour. En 2009 on a le droit de vouloir jouer en multitâche, non ? Bref, ça sent la programmation un peu légère, même avec le dernier patch en date, et les quelques crashs que j'ai eus ne me feront pas dire le contraire... Quant aux commentaires, malgré l'effort pour les rendre drôles et originaux, ils faudra leur couper le sifflet rapidement pour ne pas devenir vraiment violent.
Cyanide n'en est pas à son coup d'essai avec Blood Bowl. Chaos League en 2004 prouvait l'intérêt du développeur pour le genre et cette licence. Cette adaptation officielle tient ses promesses pour les fans mais risque de manquer de finition pour les néophytes, surtout sur la partie en ligne. Le plus gros obstacle pour ces nouveaux joueurs sera le peu d'aides offertes pour bien en maîtriser les subtilités. Nombreux sont ceux qui risquent de ne pas persévérer. On oscille alors entre jeu moyen, difficile d'accès si vous n'avez pas d'intérêt particulier pour le Blood Bowl, et le titre incontournable si vous êtes fans. Dans ce dernier cas, vos heures de sommeil vont sérieusement se raccourcir, si j'en crois les cernes sous les yeux de mes informateurs accrocs à cette drogue depuis plus de 20 ans !