Ubisoft possède de nombreuses licences vidéoludiques très appréciées à l’image de Splinter Cell, Prince of Persia, Rayman ou Assassin’s Creed. Parmi ces franchises, très anciennes pour la majorité, il y en a une à la renommée moins importante mais qui est chère au cœur des fans : Beyond Good & Evil. Le succès critique a été immédiat en 2003, au point que le jeu est considéré comme l’un des « meilleurs jeux jamais sortis ». Malheureusement, ça a été un immense flop commercial avec moins de 300 000 exemplaires vendus aux États-Unis notamment. Depuis, l’éditeur a mené son entreprise de réhabilitation avec un remaster HD PS3 / Xbox 360, et désormais une édition 20ème anniversaire. Ça vaut le coup / coût de (re)passer à la caisse ?
Parfois, il n’y a besoin d’un succès commercial monumental pour atteindre le statut d'œuvre culte, et Beyond Good & Evil est bien placé pour le savoir. Malgré cet échec dans les ventes, le jeu a su faire vibrer les joueuses et joueurs à travers les époques, y compris lors de sa ressortie HD en 2011. Pour célébrer le 20ème anniversaire d’un titre très spécial dans le catalogue Ubisoft, et pendant que BGE 2 est perdu dans les limbes, l’éditeur a fait revenir Jade et Pey’j sur PS5, PS4, Xbox Series X|S, Nintendo Switch et PC depuis le 25 juin 2024.
Des E.T et du complot, un jeu X-Files non officiel
Beyond Good & Evil 20th Anniversary Edition étant un nouveau remaster pour les consoles actuelles, le fond n’a pas bougé d’un iota. On suit toujours les aventures de Jade, une photojournaliste qui capture la faune et la flore de la planète Hillys, et qui va se retrouver à rejoindre d'une organisation résistante pour mettre fin à une vaste conspiration impliquant des extraterrestres. Si la mise en scène accuse sérieusement de son âge - un constat déjà valable pour Beyond Good & Evil HD -, le scénario fonctionne toujours bien. Que ce soit par son développement, ses rebondissements, ses surprises et thèmes abordés, l’histoire est encore accrocheuse, même 21 ans après la sortie du jeu.
Alors, oui, il faut composer avec cette mise en scène d’époque et un ton tantôt sérieux tantôt beaucoup plus léger pas forcément maîtrisé. Mais on a quand même envie d’avancer dans l’intrigue, et surtout de suivre les personnages de cette aventure, Jade et Pey’j en tête. Après toutes ces années écoulées, le duo est encore la vraie plus value du titre. En même temps, de base, un cochon anthropomorphe qui se retrouve à faire équipe avec une héroïne dont les membres de la famille est une bande de pirates de l’espace, ça vend forcément du rêve, non ? C’est donc l’un des points qui vieillit le mieux, si l’on met de côté les doublages caricaturaux de certains protagonistes, en particulier en VF.
On l’a dit, Beyond Good & Evil 20th Anniversary Edition est un remaster, mais pourtant, les développeurs ont été plus loin en glissant des easter eggs sur BGE 2 qu’il va falloir débusquer à travers une chasse aux trésors. Une quête supplémentaire intéressante pour le lore, et donc se préparer à la suite, mais qui ne va pas chercher loin non plus. Et il est dommage de réserver ces informations additionnelles à cette édition uniquement. À voir si Ubi proposera une alternative pour celles et ceux qui ne voudraient pas repasser à la caisse juste pour cette nouveauté, même si ce n’est pas la seule.
Beyond Good & Evil 20th Anniversary Edition en 4K 60 fps
Beyond Good & Evil 20th Anniversary Edition invite aussi les fans, et les nouveaux venus, à découvrir les coulisses de cette production de Michel Ancel (Rayman) avec une galerie anniversaire très riche. De nombreuses vidéos et images d’archive montrent le jeu au cours des différents stades de sa conception, l’évolution du character design de Jade au fil des années de développement, ou encore les incontournables « Lost Levels ». Des passages qui n’ont finalement pas été retenus pour la version finale et qui ne seront jamais jouables. Pour relancer l’intérêt auprès des vétérans, Ubisoft a également ajouté de nouveaux trophées/succès, des tenues additionnelles mais surtout le mode Speedrun qui ne se déverrouille qu’après avoir terminé le titre.
Un supplément judicieux ? Il faut croire que oui car jusqu’à très récemment, des joueuses et joueurs, principalement sur PC, essayaient encore de finir Beyond Good & Evil le plus rapidement possible. Désormais, il y a donc un mode dédié avec un chrono pour suivre de près sa performance. Enfin, une sauvegarde automatique a fait son apparition avec la fonctionnalité cross-save, ce qui signifie que vous pouvez uploader votre progression en ligne et reprendre là où vous vous êtes arrêtés sur une autre plateforme. On peut aussi passer les cinématiques.
Ce remaster est donc plus généreux qu’à l’accoutumée et améliore aussi évidemment la partie technique, même si tout le monde n’y trouvera peut-être pas son compte. Par rapport à Beyond Good & Evil HD sur PS3 / Xbox 360, la différence est bien perceptible à commencer par la bande-son dont certaines musiques ont été réorchestrées. Le jeu tourne maintenant jusqu’en 4K 60fps avec des textures de meilleure qualité. Cela vaut pour les environnements, les éléments du décor, les vêtements des protagonistes, mais également pour les personnages eux-mêmes. Par exemple, ce bon vieux Pey’j a un visage plus détaillé qu’auparavant avec une peau texturée… mais pas Jade. Une inégalité qu'on retrouve par endroits (rares soucis de performance, dialogues qui sautent), et qui prouve que le travail sur le remaster reste limité dans le fond.
Les feuillages gagnent également en détail, tout comme le ciel (surtout la nuit), et l’éclairage a aussi été retouché. Au point où, à certains moments, l’ambiance de la scène change totalement et c’est souvent en bien. La lumière verte émise par la race extraterrestre est par exemple plus vibrante, l’effet des bottes volantes de Pey’j enfin présent etc. En revanche, pour terminer sur la technique, carton rouge pour les temps de chargement. Ils sont très courts mais... ils sont systématiques pour chaque zone, et forcément, on est plus habitué à une exploration aussi hachée.
Du côté du gameplay par contre, on ressent indéniablement le poids des années et pour cause, il n'a pas été retravaillé. Au risque d'en faire fuir certains avant la conclusion, non, ce n'est pas injouable, mais les combats simplistes, répétitifs et trop rigides, sont dans leur jus. Beyond Good & Evil mélange plusieurs genres avec des affrontements au corps à corps, de l'infiltration ou encore des phases en véhicule. Un pêle-mêle qui, pris dans son ensemble, fonctionne étonnamment bien. Mais si on commence à disséquer couche par couche, le vernis s'écaille.
Les combats ne sont donc pas mémorables, et il en est de même pour les phases d'infiltration parfois laborieuses, notamment en raison de l'aspect die & retry. Bien souvent, vous allez peut-être échoué car il n'est pas facile d'identifier le cône de vision des ennemis par exemple. Ce n'est pas un jeu pensé réellement pour l'infiltration, et ça se voit. Et encore, heureusement qu'Ubisoft a eu la bonne idée d'instaurer une sauvegarde automatique en cas d'échec. Un ajout qui ne mange pas et qui apporte un confort supplémentaire.
Des défauts de ce type, on peut en énumérer encore à l'image de la caméra très capricieuse ou de la visée laborieuse lorsqu'on est à bord de l'hovercraft. Oui, ça a vieilli, mais comme tous les jeux de l'époque. Les jeux 3D passent toujours plus mal que ceux en 2D. Pourtant, le plaisir est encore là. Même si nous l'avions déjà fait sur PS3, on n'a pas boudé notre plaisir de retrouver Jade et Pey'j dans un titre d'aventure. Parce que c'est un genre qui se fait trop rare de nos jours, mais aussi parce que Beyond Good & Evil est l'un de ses plus dignes représentants. À moins d'avoir une aversion totale pour les vieilleries, même les plus jeunes devraient y trouver leur compte, ne serait-ce que pour l'univers ou les personnages. Un classique qui reste un classique, avec toutes ses qualités et tous ses défauts d'antan, dans un enrobage plus clinquant sans être renversant.