Dans les sinistres ténèbres d’un futur lointain, il y a eu beaucoup de jeux Warhammer 40,000 médiocres, quelques pépites, et de très rares élus s’étant élevés au rang de chefs d’œuvre, comme Dawn of War. Avec Space Marine 2, Saber Interactive entend rentrer dans ce glorieux mais fermé panthéon. 13 ans après un sympathique premier opus développé par Relic Entertainment, s’inspirant de grandes licences de shooters à la troisième personne comme Gears of War, l’Empereur-Dieu a-t-il entendu leurs ferventes prières ? Voici notre avis dans ce test de sa version PC, bolter et épée-tronçonneuse à la main.
Initialement prévu l’année dernière, Space Marine 2 a fait l’objet d’un long report, sa massive armure énergétique ayant visiblement besoin d’un peu plus de calibrage. L’Ange de la Mort s’estime désormais fin prêt à exercer son juste châtiment et arrive le 9 septembre sur PC, PS5 et Xbox Series. Un accès anticipé sera par ailleurs lancé le 5 septembre, mais à condition de précommander les forcément plus onéreuses éditions Gold ou Ultra du jeu. Après de nombreux aperçus qui mettaient l’eau à la bouche des fans de Warhammer 40,000 (dont nous faisons partie), qu’en est-il de sa version finale ? Voyons cela ensemble.
Space Marine 2 : Adep-Titus Astartes
Fort de son expérience dans les shooters à la troisième personne sur notamment World War Z, Saber Interactive a ensuite eu l’opportunité de développer un jeu dans l’univers futuriste où il n’y a que la guerre de Games Workshop. À de nombreuses reprises, le studio n’a pas tari d’amour pour Warhammer 40,000 et fait part de son profond enthousiasme à l’idée de travailler sur Space Marine 2. Et autant dire que cela se voit de manière éclatante. Rarement dans un jeu avons-nous pu autant nous imprégner de l’ambiance délicieusement sombre, mais témoin d’une majesté révolue et ravagée par d’éternels conflits, de cette licence iconique.
Le titre est en effet une superbe ode gothique à la gloire du bien connu Imperium de l’Humanité et de ses guerriers les plus emblématiques : les Adeptus Astartes. Qu’il s’agisse de leur apparence ou des nombreux décors que l’on pourra contempler durant notre sainte mission, Space Marine 2 affiche une religieuse fidélité à l’égard de Warhammer 40,000. Grâce aux technologies graphiques modernes, Saber Interactive nous régale ainsi d’un jeu beau à se damner, en tout cas sur notre PC particulièrement robuste équipé d’une RTX 4080 SUPER, d’un Ryzen 7 7800X3D, de 32 Go de RAM et d’un véloce SSD. Le tout nous est donc apparu techniquement très solide, sans presque aucun ralentissement et extrêmement peu de bugs à déplorer. Sur ce terrain d’opération, il s’agit donc d’une retentissante victoire. Même constat s’agissant du sound design, aussi brutal et impactant que les géants que nous incarnons.
Space Marine 2 ne serait en effet rien sans cette faction phare de l’univers futuriste de Games Workshop, et le jeu leur rend totalement justice. On sent bien l’énorme poids de leur armure énergétique, mais également leur inarrêtable puissance une fois dans le cœur de l’action. Leur profession est la mort, il n’existe pour eux que l’éternel service envers l’Empereur et la guerre. Et aucune autre production vidéoludique n’a aussi bien réussi à nous faire autant se sentir dans la peau de ces guerriers proprement divins. Notre premier contact se fait en ce sens, deuxième opus oblige, encore aux commandes de Titus, protagoniste du premier volet par Relic Entertainment. La campagne de ce second épisode se déroule grossièrement un siècle après les premières mésaventures de notre cher Ultramarine. Le jeu peut donc s’apprécier sans avoir connaissance des événements de Space Marine premier du nom. Sachez simplement que, après avoir affronté les peaux vertes et les Forces de la Ruine, son devoir l’appelle à reprendre les armes, cette fois contre l’insatiable menace des Tyranides. Ce avec le soutien de son escouade complétée par Gadriel et Chairon (qui pourront être contrôlés par deux autres joueurs).
Cette véritable ruche de créatures similaires aux Zergs de StarCraft 2 et autres xénomorphes dont le seul objectif est de dévorer et assimiler la galaxie, a décidé de poser ses valises chitineuses sur un système au sein duquel repose une arme d’une puissance incommensurable. Les modestes troufions de la Garde Impériale sont bien impuissants face à une telle nuée. Il appartient donc à Titus et ses frères de chapitre de bouter ces monstrueux Xenos et protéger cette installation d’une importance tactique capitale. Mais les vieux démons de notre héros incarné avec classe par Clive Standen (Vikings) semblent le poursuivre. Outre les Tyranides, l'archi ennemi de l’Imperium ourdit également de sombres machinations. Si vous avez joué au premier jeu, vous devriez avoir une petite idée de qui il s’agit. Pour les néophytes, nous vous laissons un peu de surprise.
La campagne de Space Marine 2 se montre en tout cas plutôt plaisante à suivre, notamment grâce à l’énorme soin apporté à sa direction artistique. Elle présente cependant une histoire assez classique qu’on dirait toute droit sortie d’un rapport de bataille du jeu de plateau Warhammer 40,000. Si vous cherchez un scénario profond dans cet univers, on vous renvoie plutôt vers le récent et très solide C-RPG Rogue Trader d’Owlcat Games. Malgré de spectaculaires fulgurances, ce n’est clairement pas l’élément qui marquera le plus les esprits dans ce shooter qui ne fait pas vraiment dans la finesse. D’autant que le tout se montre un brin court à notre goût : une dizaine d’heures en difficulté normale Hélas, à moins de refaire la campagne entre amis ou en plus difficile, aucune forme de rejouabilité n’est à signaler ici.
Une glorieuse effusion de foi(es)
En parlant de jouabilité, penchons-nous sur un autre élément dans lequel Space Marine 2 et ces combattants éponymes excellent : le massacre sanctifié des ennemis de l’Imperium. Là encore, peu d'autres jeux ont autant réussi à nous mettre dans l’armure des fils de l’Empereur. Que l’on se batte à distance ou au corps-à-corps, avec une grande variété d’armes dans les deux domaines. Le gameplay est brutalement jouissif, impactant et gore à souhait, tant clavier/souris que manette en main. On prend un énorme pied à purger les Xenos et les Hérétiques se dressant sur notre chemin aux côtés de nos frères de bataille, nos coups et nos balles pleuvent dans un glorieux carnage, notre armure est recouverte de sang et de tripes, et nous avons un sourire béat aux lèvres. Selon les aspirations de chacun, on pourra cependant déplorer ou non un design des niveaux très à l’ancienne : pas question ici de grandes zones ouvertes à explorer. Nous progressons inlassablement dans des couloirs (aussi beaux soient-ils), avec extrêmement peu de passages dérobés, où l’on peut seulement y récolter de-ci de-là des collectibles pour densifier le lore du jeu et des ressources (grenades, munitions et bonus pour renforcer notre survivabilité). Certains apprécieront le fait que le titre ne se disperse pas outre mesure, d’autres pesteront contre une absence certaine de liberté de manœuvre.
Outre une inspiration évidente à des références du shooter à la troisième personne comme Gears of War, Space Marine 2 tire également quelques bonnes idées du côté notamment de DOOM Eternal. En plus de notre barre de vie, nous disposons de points d’armure. Même si ceux-ci peuvent partir très vite, exécuter un adversaire étourdi ou placer un tir réflexe en parant ou esquivant au bon moment une attaque nous permettent de les recharger. Même si l’ensemble se montre agréablement dynamique et nerveux, nos griefs préliminaires concernant des combats en mêlée brouillons demeurent encore. Désireux de montrer ses capacités à afficher des énormes vagues d’ennemis à l’écran après World War Z, Saber Interactive a selon nous fait preuve d’un certain excès de zèle sur ce point. Souvent littéralement assaillis par des dizaines d’adversaires au corps-à-corps, notre vie fond extrêmement rapidement, malgré nos tentatives parfois désespérées de recharger nos points d’armure. La chose est surtout flagrante dans les niveaux de difficulté les plus élevés, où la moindre esquive ou parade mal placée sera instantanément punitive, nous laissant sur le carreau et nos deux compagnons bien en peine avec un soldat à terre. D’autant que les moyens de se soigner sont particulièrement rares. À noter cependant que, comme dans un certain Bloodborne, il est possible de récupérer une portion de sa santé perdue en infligeant des dégâts. La fenêtre pour se régénérer par la violence est cela dit réduite et implique fatalement une importante prise de risque.
Heureusement, et même si on aime beaucoup trucider du monstre à coups d’épée-tronçonneuse et autre marteau énergétique, les options pour se battre à distance ne manquent pas dans Space Marine 2. Il est tout à fait possible de rester prudemment en arrière et de réduire nos innombrables opposants en charpie, tant avec des bolters classiques qu’avec des armes lourdes (et diablement jouissives à manipuler) ou encore avec des fusils de sniper. Dans la campagne du jeu, nous pouvons ainsi changer notre équipement à la volée, en fonction des situations et des adversaires ou combats de boss (particulièrement stylés, soit dit en passant) qui nous attendent au détour du prochain couloir. À noter également que chaque personnage dispose d’une capacité « ultime » unique, qui se recharge au fil du temps. Dans le cas de Titus, cela prend la forme de dégâts au corps-à-corps augmentés et d’une santé se régénérant à chaque coup. Attention toutefois à ne pas trop prendre la confiance, en raison des problèmes susmentionnés inhérents à une mêlée générale à double tranchant. La diversité tant au niveau des armes que de cette compétence spéciale prend cependant tout son sens dans l’autre mode majeur de Space Marine 2, baptisé Opérations.
Opération séduction avec le plus simple appareil
Une fois la campagne terminée, Space Marine 2 nous invite en effet très fortement à s’intéresser ensuite à son second mode « JcE ». Et même si l’histoire est de solide facture, on sent clairement que Saber Interactive a porté une attention toute particulière à ses fameuses Opérations. C’est notamment ici que nous pourrons entièrement créer NOTRE propre Adeptus Astartes, selon nous de la manière la plus aboutie jamais vue dans un jeu vidéo. Outre le choix entre six classes (Tactique, Assaut, Avant-garde, Rempart, Tireur d’élite et Lourd) aux équipements et gameplay radicalement différents, nous pouvons également affubler notre avatar d’une armure avec de nombreuses options cosmétiques (à obtenir pour le moment uniquement en jeu, les microtransactions étant a priori considérées comme une hérésie au 41ème millénaire) et la peindre selon notre fantaisie. Si cela n’apporte pas autant de satisfaction que le faire sur de véritables figurines, le titre s’en rapproche grandement et permet véritablement de réaliser un rêve de fan vidéoludique de Warhammer 40,000.
Attention toutefois, de telles options cosmétiques se méritent. Il faudra pour cela faire monter chaque classe en galons afin de débloquer les différentes pièces d’armure à sa disposition, et récupérer les ressources nécessaires pour acheter peintures et emblèmes des nombreux chapitres Space Marines de la licence (ainsi que ceux du Chaos). Pour cela, il faudra se lancer seul ou avec jusqu’à deux autres joueurs dans diverses missions en lien direct avec la campagne principale. Sur ce point, les vétérans de Vermintide ou encore Darktide seront en terrain connu. Chaque partie nous demande en effet d’avancer vers un objectif donné, en défouraillant tout ce qui bouge, du menu fretin aux ennemis d’élite en passant par des boss, le tout durant une trentaine de minutes… quand tout se passe bien. Profitons-en pour avertir les joueurs purement solo : le mode Opérations montrera rapidement ses limites si vous jouez dans une autre difficulté que la plus basse. Dès le mode « normal », nos adversaires deviennent bien plus dangereux, et nos frères d’armes contrôlés par l’IA se montrent navrants d’inutilité. Même avec une classe très avancée et un équipement de meilleure qualité, vous n’allez pas passer un bon moment, Space Marine 2 encourageant ici clairement la coopération. Hélas, dans notre version de test, nous n’avons que très rarement croisé d’autres joueurs, et avons donc dû majoritairement faire péniblement avec les moyens du bord.
De ce fait, nous n’avons pas pu explorer jusqu’au bout l’arbre de talent de notre classe de prédilection (Assaut, très mobile et ravageuse au corps-à-corps grâce à son réacteur dorsal) ou les options de customisation de l’équipement à sa disposition (à savoir en l’occurrence trois armes de mêlée, deux pistolets… et c’est tout ; les autres classes présentent chacune leurs propres kits préétablis dans cette veine). Améliorer notre épée-tronçonneuse fétiche ou notre bolter nous demandait en effet une ressource que l’on ne peut récupérer qu’à partir de la troisième difficulté (sur quatre) du mode Opérations. Autant dire qu’il s’agit-là d’une mission impossible en compagnie de bots, même si nous avions soit-disant largement le niveau recommandé. Il nous faudra donc attendre que des amis ou d’autres joueurs nous rejoignent pour dispenser la justice de l’Empereur.
Autre point qui nous chagrine avec ce mode autrement de très solide facture : un gros manque de contenu actuellement disponible sur Space Marine 2. En tout et pour tout, nous avons à notre disposition seulement six théâtres d'opération, que nous avons tous fait au moins une fois. Même si ceux-ci se montrent plaisants à parcourir, et que les difficultés supérieures viendront grandement pimenter l’action, on en fait très vite le tour. Ceux-ci ne sont par ailleurs pas procéduraux, avec donc exactement les mêmes cheminements. L’apparition d’ennemis et de hordes est en revanche quant à elle relativement aléatoire, pour tâcher de rendre chaque excursion « fraîche ». Et la seule manière de nous encourager à les refaire sempiternellement est la possibilité de débloquer de nouveaux éléments cosmétiques, de renforcer nos six classes et leurs armes. Tout cela demandant énormément de grind, le titre risque potentiellement de lasser bon nombre de joueurs à la longue, et donc rendre la possibilité de trouver des parties avec des frères de chair et d’os d’autant plus délicate. À noter cependant que Saber Interactive a dévoilé une feuille de route chargée pour garnir son jeu en nouveaux ennemis, équipements et missions au fil du temps. Le studio s’est déjà montré digne de confiance en la matière sur World War Z. Espérons donc que leur engagement envers l’Empereur et la communauté sera aussi résolu ici.
Outre la campagne principale et les Opérations orientées JcE, Space Marine 2 dispose également d’un mode exclusivement multijoueur, qui oppose les Adeptus Astartes à leurs frères pervertis par le Chaos. Malheureusement, du fait d’un nombre très restreint de joueurs présents sur notre version de test, nous n’avons pas eu l’occasion de l’essayer et de juger s’il vaut le coup ou non. Les différents aperçus partagés à son égard se montraient prometteurs, mais impossible de l’affirmer sur pièce en l’état. Il faudra pour cela attendre au moins l’ouverture de l’accès anticipé pour que les serveurs se remplissent un peu. Si l’occasion se présente, nous nous fendrons alors d’impressions plus poussées sur cette Guerre Éternelle entre les fils de l’Empereur et les Traîtres qui ont embrassé l’Hérésie d’Horus il y a de cela 10 000 ans.