En plein travail sur Call of Duty Advanced Warfare, Brett Robbins, alors creative designer, a une idée. Et si l’on remplaçait les fusils par de la magie ? Les soldats, par des magiciens et les hélicoptères par des dragons ? De cette simple idée va mûrir, au fil des années, un concept et lorsque Robbins sera sûr de lui, il partira accompagné de quelques développeurs et amis pour ouvrir son propre studio, Ascend Studio et se lancera sur un pari risqué.
Le développeurs arrivera en quelques mois à s’entourer d’amis, de connaissances et de vétérans du milieu souhaitant le rejoindre, dont d’ancien de Telltale, et sans compter les petits nouveaux bien décidés à embarquer à bord. Un studio indépendant avec une équipe digne des grandes structures, avec la volonté de sortir des AAA indés. Désormais suivi par EA Originals, qui se positionne ici en tant que simple distributeur, le rêve de Robbins est enfin entre les mains de tous, et il s'appelle Immortals of Aveum.
Un Call of Duty magique saupoudré de Marvel. Recette 100% blockbuster
Un FPS magique, un jeu à la croisée entre Call of Duty et un film Marvel. En gros, un blockbuster qui souhaite proposer une expérience digne des plus grands shooters, mais en faisant les choses à sa façon. Direction Aveum donc, une planète fantastique balafrée par la guerre, au sens propre du terme. Des clans se fracassent depuis des millénaires pour le contrôle de l’Entaille, une énorme faille d’où émanent les trois manas élémentaires (rouge, vert, bleu). Nous, on incarne un certain Jak, un gosse des rues qui coule des jours presque heureux dans un petit patelin caché dans l’ombre des riches. Bien entendu, sa tranquillité est rapidement bousculée, le petit subit un profond traumatisme qui lui déclenche des pouvoirs de fou furieux et la capacité de contrôler non pas un, mais tous les types de magie existants et le voilà recruté dans l’armée avec la ferme intention d’arrêter la guerre.
Le scénario, vu, revu et re-revu, a le mérite d’amener le joueur en terrain conquis. Pas d’intrigue tirée par les cheveux, Immortals of Aveum préfère construire ses personnages autour d’un fil conducteur que tout le monde connaît, et il réussit plutôt bien son pari. Notre beau Jak devient rapidement attachant, même s’il n'échappe pas au cliché de l’ado rebelle qui balance ses petites punchlines et les personnages qui gravitent autour de lui ont eux aussi tous un petit “quelque chose” faisant d’eux plus que de simples acolytes de pixels. Dommage d’ailleurs que l’on ne puisse pas vraiment tisser davantage de liens avec eux. Bien que des dialogues soient présents, plus nombreux que dans les shooters traditionnels avec quelques choix à la clé d’ailleurs, on n'est pas sur du RPG non plus. On reste sur du simple et de l’efficace. C’est amplement suffisant.
En plus, c’est plutôt bien écrit. Ce n’est pas un grand drama plein de poésie, mais c’est plutôt léger, parfois un petit peu drôle même. En revanche, si l'acting en français et en anglais n’est pas mauvais du tout, la synchronisation labiale est totalement à la ramasse, peu importe la langue choisie. De même que les animations faciales pas très naturelles. Une fracture entre une bonne idée bien appliquée, et un cafouillage technique qui se ressent tout au long du jeu, tout le temps et surtout, partout.
Immortals of Aveum, un voyage qui pique les yeux sur PS5
Immortals of Aveum n’est pas un mauvais bougre, bien au contraire, mais il traîne de sacrés soucis, principalement techniques. Sur la version testée (PS5), le jeu n’est pas franchement séduisant graphiquement. C’est un peu flou, certaines textures sont grossières comme mal compressées. Un problème qui rappelle les écueils techniques de Wild Hearts sur consoles, jeu également distribué par EA Originals récemment.
Pourtant, le monde d’Aveum est extrêmement sympa à explorer. Au fil de l’aventure, plutôt linéaire dans son approche, on visite des environnements ouverts, pour la plupart très colorés et agréables à l'œil. La direction artistique est plutôt bonne, bien que le character design reste discutable. Il faut aimer, ce n’est pas vraiment mon cas ici, mais les goûts et les couleurs sont différents pour chacun. Je ne peux toutefois pas dire qu’il n’y a pas eu de travail ou de recherche. Immortals of Aveum a beaucoup d'influences clairement identifiables, les récents Marvel en tête, mais il a tout de même son identité bien à lui, et rien que pour ça, le voyage est très sympa.
En parlant de voyage, on verra du pays. La planète est vaste et les environnements très nombreux. Grottes, forêts, citadelles, royaume magique… on en a pour notre argent et on prend plaisir à farfouiller un peu partout. En prime, le jeu récompense l’exploration avec de nombreux secrets et trésors à dénicher. Généralement, c’est de l'équipement ou des améliorations (barre de vie ou mana), donc on ne crachera pas dessus. Au contraire, même, puisque si c’est rigolo de faire quelques puzzles simplistes ici et là, ce sont surtout les statistiques qui nous intéressent.
On entre dans le vif du sujet : l’arsenal magique
Le jeu propose trois types de magies différentes. Si elles ont des significations précises en jeu (que l’on vous laissera découvrir), dans les faits elles ne servent finalement que de “types d’armes”. La bleue, c’est de la précision et du coup par coup, type DRM (pour les amateurs de FPS). La rouge, c’est de la destruction massive façon fusil à pompe ou grosse roquette. Et enfin la verte est principalement axée sur la cadence de tir. Mitraillette ou petit missile, à vous de voir. Chaque magie a besoin de catalyseurs pour fonctionner, et quand ce ne sont pas des objets qui feront office de gadgets, ce sont des gantelets que les mages de guerre que nous sommes utilisent pour se battre. Et c’est ici que les statistiques des équipements trouvés, craftés ou achetés entrent en jeu. Des gantelets, il en existe des dizaines pour chaque type de magie. Idem pour les statistiques et effets associés. Augmentation des dégâts, cadence de tir, capacité, effets supplémentaires sur les projectiles… à vous de voir ce qui vous convient le mieux.
Si je devais vulgariser, vous pouvez trouver l’équivalent magique du fusil de précision, de la mitraillette, de la mitrailleuse, du lance-grenades, de la roquette, des missiles et autres fusils à pompe. Un arsenal que l’on identifiera facilement puisque les sensations de tir sont quasiment similaires à celles des shooters traditionnels. C’était ici la volonté du studio et c’est parfaitement réussi. Les tirs pleuvent et le feeling est excellent. Autre point très important, la fluidité de l’action et la nervosité des affrontements, ici aussi essentielles à ce genre d’expérience. Là par contre, c’est mi-figue, mi-raisin.
Le jeu est extrêmement nerveux et fera constamment appel à votre capacité à réfléchir dans le feu de l’action et à utiliser la totalité de votre arsenal.
En plus de vos trois armes principales, vous pourrez compter sur des sorts dévastateurs (onde de choc, nuée de projectiles, etc…) ou encore des artefacts faisant office de gadgets. Un lasso pour agripper les ennemis et plus tard se propulser dans les airs, un rayon lumineux pour étourdir les ennemis ou contrer les sorts ou encore un pouvoir pour pouvoir figer le temps ou ralentir les ennemis. Je vous ai fait une liste non exhaustive, mais la vérité c’est qu’il existe des dizaines de sorts à combiner ensemble et les possibilités en combat sont énormes. Et c’est sans compter les nombreuses compétences passives à débloquer au fil de notre progression qui nous permettent, là aussi, de devenir une véritable machine de guerre et d’orienter son gameplay. Cerise sur le gâteau, tout cet arsenal magique est utile puisque requis pour des actions spécifiques pendant les combats ou durant l’exploration. Que ce soit pour atteindre des passages secrets, faire tomber le bouclier de certains ennemis, ou rendre vulnérables d’autres adversaires spéciaux. Alors oui, Immortals of Aveum est très nerveux, parfois même autant qu’un Doom Eternal, par exemple.
Pas vraiment AAA, pas vraiment AA... Immortals of Aveum c'est l'entre-deux
Pour ce qui est de la fluidité en revanche, ce n’est pas ça sur PS5. La plupart du temps, le jeu doit tenir ou avoisiner ses 60fps, mais les chutes de framerate sont nombreuses. En combat, ou pas d’ailleurs. Ce qui est curieux, c’est qu'elles interviennent un peu partout sans trop de cohérence. Que l’écran soit chargé ou non ne semble pas impacter les performances. En espérant qu’un patch arrive prochainement, parce qu'entre une fluidité pas optimale et des graphismes en dessous des standards, ce n’est pas la joie. Encore si ces soucis n'impactent pas réellement le gameplay ça irait, mais malheureusement, ça devient vite gênant. Que le jeu ne soit pas fin est une chose, qu’il rame brutalement lorsqu’on a besoin de précision en est une autre.
Et c’est dommage parce que le feeling est excellent, on a vraiment envie d'aimer cet Immortals of Aveum. Les affrontements sont très dynamiques et parfois, les ennemis arrivent de tous les côtés. C’est même un peu le chaos à l’écran lorsque les sorts partent dans tous les sens. La lisibilité en prend même parfois un coup, on ne va pas se mentir, mais c’est sacrément grisant.
Le jeu nous sert aussi quelques moments épiques que je ne spoilerai pas et des affrontements de boss parfois réussis (mais aussi parfois bien ratés). L’OST n’est pas mauvaise, même si elle ne fait pas toujours mouche pour autant. Si les thèmes sont bons, les musiques à base de grosse basse durant les combats, ce n’est pas trop ma came. Chacun trouvera midi à sa porte. Ce n’est pas mauvais, mais en rien marquant en somme.
Globalement, Immortals of Aveum veut tout faire en grand, en très grand même, mais on voit bien qu’il a ses limites. Il y a comme quelques relents old school dans certaines de ses approches. On les ressent par exemple dans la conception des décors, avec des panoramas qui veulent s’étendre à perte de vue, mais n’y arrivent pas forcément et finissent par nous coller de vilaines textures sous les yeux ou des modèles presque low poly à l’horizon. Ou lorsque le jeu veut nous faire croire que de petites villes sont bondées en nous balançant un brouhaha de foule dans les oreilles alors qu’il n’y a pas plus d’une dizaine de personnages à l’horizon, personnages qui ne réagissent même pas si vous leur tirez dessus… des petites choses comme ça qui montrent qu’il y a comme un manque, un souci du détail absent qui font qu’Immortals of Aveum n’arrivera malheureusement jamais vraiment à se hisser sur le haut du panier, sans pour autant finir dans le rang des AA à budget serré. Le cul entre deux chaises donc.