Officiellement disponible depuis le 18 février, Avowed s’est finalement révélé être un RPG plus profond qu’on pouvait le penser de prime abord, en tout cas de ce que nous en avions vu. Nouveau jeu Obsidian oblige, il était cependant crucial d’arriver au bout de l’histoire principale pour en apprécier pleinement tout le potentiel. S’agit-il donc bien d’une belle entrée en matière pour les exclusivités Xbox de 2025 ? Voici notre test final de sa version PC.
Repoussé de novembre 2024 à février 2025 pour « soulager le backlog des joueurs Xbox », dixit Phil Spencer, Avowed est finalement sorti durant un mois où la concurrence se montre particulièrement rude pour le genre RPG. Il arrive en effet après le très immersif et « historique » Kingdom Come Deliverance 2, et sera suivi par Like a Dragon: Pirate Yakuza in Hawaii et Monster Hunter Wilds côté Japon. Pour autant, il serait peut-être dommage de passer totalement à côté de ce nouveau titre du réputé studio Obsidian, disponible sur PC, Xbox Series et (surtout ?) le Game Pass. Sur le papier, celui-ci propose de mélanger l’univers fascinant de sa licence C-RPG Pillars of Eternity et le gameplay typé Action-RPG en monde ouvert de Fallout New Vegas/The Outer Worlds. Un amalgame en définitive plutôt solide, malgré quelques faux pas plus ou moins rédhibitoires.
Une histoire écrite par nos choix définitivement pas Avowed d’intérêt
Comme dans tout jeu d’Obsidian qui se respecte, notre histoire dans Avowed démarre par la création de notre personnage, qui s’avère ici être un membre de la cour de l’empereur d’Aedyr, faction très puissante dans l’univers de Pillars of Eternity. D’emblée, l’outil proposé peut cependant rebuter. Les différents choix de visages et les options pour les personnaliser sont en effet peu nombreux. On ne peut de plus incarner qu’un humain ou un elfe, dans un univers pourtant riche en espèces très différentes. Autre point qui risque de ne pas être du goût de tout le monde : des appendices pour le moins… exotiques, qui trouvent cependant une justification dans le scénario du jeu. Notre avatar est en effet une sorte d’incarnation d’une divinité visiblement en lien avec la nature. Il est heureusement possible de les cacher, sauf si incarner l’équivalent d’un claqueur dans The Last of Us a toujours été votre rêve inavoué. Une fois son apparence définie, il nous reste à choisir la fonction de notre personnage au sein de l’Empire. Celle-ci servira en quelque sorte de « classe de départ » pour orienter notre style de jeu en fonction de statistiques que sont la Force, la Dextérité, la Constitution, la Perception, la Détermination et l’Intelligence. Tout cela ouvrira diverses options de dialogue, pour incarner notre Aedyrien divin comme dans un véritable jeu de rôle digne de ce nom.

Nous voilà ainsi fin prêt à accomplir notre mission pour l’empereur, à savoir se rendre en tant qu’Émissaire dans les Terres Vivantes, et enquêter sur le Malrêve, une étrange et sombre maladie provoquée par des spores fongiques et transformant les infectés en monstres. Encore une référence à The Last of Us, vous dites ? Naturellement, cette tâche cache un double objectif, l’empire souhaitant étendre son territoire en colonisant cette contrée sauvage, seulement habitée par des renégats et des laissés-pour-compte. C’est donc dans cet univers où les intrigues politiques et le surnaturel se confondent qu’Avowed place son récit. À l’instar des précédents titres d’Obsidian, son histoire est clairement son plus gros point fort, qui donnera une place prépondérante à notre personnage pour la façonner.
Dans les quêtes principales comme secondaires, Avowed nous mettra en effet systématiquement face à des dilemmes moraux plus ou moins cornéliens, avec un impact certain sur le monde qui nous entoure. Le talent d’écriture d’Obsidian répond donc encore bien présent, pour notre plus grand plaisir. Il nous dépeint ici des Terres Vivantes d’une grande cohérence, toutes en nuances, où la frontière entre bien et mal est souvent floue. Un exemple typique en ce sens : doit-on, en tant qu’Aedyrien, servir les intérêts de notre peuple et apporter stabilité et discipline à ces terres sauvages, ou en défendre les habitants face aux ambitions dévorantes d’une faction qui dénature tout ce qu’elle touche ? Le conflit interne de l’Émissaire s’intensifie encore alors que notre personnage commence dès le début de l’aventure à entendre une étrange voix lui susurrant à l’oreille des mots apaisants et des promesses de pouvoir. Qui est cette entité ? Que nous veut-elle et peut-on lui faire confiance ? Encore un élément qui fera grandement évoluer le récit en fonction de nos choix à son égard. À ce sujet, on ne peut s’empêcher de dresser un parallèle avec le mystérieux visiteur de nos rêves dans Baldur’s Gate 3, et ce n’est absolument pas pour nous déplaire.

Notre enquête visant à éradiquer le Malrêve va en tout cas être un fil rouge globalement passionnant pour notre périple dans Avowed. Celle-ci trouve une conclusion plutôt convaincante, mettant bien en avant la somme de toutes nos décisions aux impacts certains. À de nombreuses reprises, le jeu nous mettra en effet face à des dilemmes moraux déchirants, avec des conséquences terribles. Par exemple : doit-on immédiatement éliminer des personnes infectées par le Malrêve, mais sans déraciner le problème à la source, aux commandes d’un zélote sanguinaire de notre propre patrie ; ou les enfermer par la magie, mais au prix de milliers de vies environnantes ? Autant de moments marquants de ce type, qui vont clairement mettre à mal nos convictions, voire nous placer dans le rôle de l'antagoniste, si tel est notre souhait. Cette histoire prenante de bout en bout nous aura en tout cas occupée une bonne cinquantaine d’heures de jeu en ayant fait quasiment toutes les quêtes disponibles. On pourra cependant pinailler vis-à-vis d’un boss final, en tout cas dans notre première partie, manquant d’impact, et d’un épilogue qui nous a quelque peu laissé sur notre… faim. Nous sommes ceci dit assez curieux de voir ce qu’auraient donné des choix différents. Avowed affiche donc un certain potentiel de rejouabilité.
Quoi qu’il en soit le titre exhibe une superbe direction artistique, jonglant habilement entre des décors très colorés et des environnements sombres, voire dérangeants, qui rappellent à s’y méprendre Morrowind. Le tout est porté par un Unreal Engine 5 qui embellit encore l’ensemble. D’un point de vue technique, le jeu s’en sort également assez bien, grâce à une fluidité constante avec tous les paramètres à fond sur notre PC de test. Nous avons cependant rencontré quelques bugs et crashes intempestifs, mais heureusement pas au point de totalement bloquer notre progression.

On peut en revanche déplorer le fait que les PNJ n’aient pas reçu le même niveau d’attention que les décors. Pour revenir aux visages proposés durant la création de notre avatar, on remarque très vite qu’ils ont été copiés-collés et appliqués à tous les humains, elfes et nains que nous croiserons. Les autres espèces ne s’en sortent malheureusement guère mieux. L’ensemble des animations faciales et corporelles manque par ailleurs cruellement de vie. Cela casse franchement l’immersion dans ces Terres Vivantes qui ne portent clairement pas ce nom grâce à leurs habitants. Même constat pour nos quatre compagnons qui rejoindront au fur et à mesure notre groupe. Même si on a apprécié apprendre à les connaître et découvrir leur passé vraiment intéressant à explorer, on est définitivement très loin de la maestria de Baldur’s Gate 3 et des merveilles permises par la motion-capture dans le domaine pour rendre ces interactions plus crédibles. Si interagir avec des PNJ « robotiques » est rédhibitoire pour vous, Avowed risque malheureusement de ne pas vous satisfaire. Un gros point noir bien dommageable au milieu d’un tableau autrement vraiment beau à regarder et à suivre dans la fresque passionnante qu’il nous conte. À noter enfin que le jeu propose un doublage exclusivement en anglais, naturellement sous-titré. S’il se montre globalement de très bonne facture, la chose peut également rebuter les anglophobes ou les puristes de la VF.

Pillars of The Outer Worlds
L’histoire d’Avowed et son côté « jeu de rôle » pleinement assumé profitent donc clairement de son lignage à Pillars of Eternity, eux-mêmes héritiers des légendaires Baldur’s Gate de BioWare. Son gameplay s’inspire en revanche davantage des précédents Action-RPG à la première/troisième personne d’Obsidian. Le studio souhaitait cependant profiter de ce nouveau titre pour en dynamiser la formule. Sur ce point, le résultat se montre globalement plutôt réussi. Nous pouvons en effet manier avec une grande liberté un large panel d’armes et accessoires : épées, dagues, lances, haches, masses, le tout à une ou deux mains ; baguette, livre de sorts ; arc, pistolet (avec possibilité d’en avoir un dans chaque main) et fusil. Il y en donc clairement pour tous les goûts. Cet arsenal fourni s’accompagne par ailleurs d’une certaine flexibilité dans l’évolution de notre personnage.

Grossièrement, nous avons le choix entre trois arbres : Guerrier, Rôdeur et Mage. Il est cependant tout à fait possible de mélanger les disciplines, et diversifier grandement notre style de jeu. À noter cependant que le niveau maximal dans Avowed est fixé à 30, et nous ne pourrons donc pas maîtriser pleinement toutes les classes. De même, le développement de notre personnage passe par l’attribution de points dans nos statistiques principales. À partir du niveau 15, nous ne gagnerons en revanche qu’un point tous les deux niveaux. Là encore, il faudra donc forcément faire des choix. Heureusement, nous avons la possibilité, moyennant quelques pièces d’or, de réattribuer tout cela comme on le souhaite. Même constat pour nos compagnons, qui pourront apprendre des compétences uniques et les faire évoluer, avec l’option de tout réinitialiser si besoin. Enfin, notre avatar dispose de plusieurs pouvoirs divins, du fait de son ascendance, que nous pourrons débloquer (ou non, selon nos aspirations) au fil de l’histoire. Ceux-ci ont en tout cas le mérite d’être particulièrement puissants. Mais le jeu en vaut-il la chandelle ? C’est à vous qu’il appartient d’en décider.

Le tout se montre plutôt plaisant dans les combats, avec des contrôles réactifs et des coups bien impactants dans leurs animations et leur sound design. Qu’on aime jouer le gros bras en armure lourde, le combattant agile alternant attaques sournoises, duels avec des armes légères et tirs à distance, le magicien noyant ses adversaires sous une pluie de sorts, ou un mélange des trois, le résultat clavier/souris ou manette en main se montre très satisfaisant. Toutes ces actions nécessitent de l'endurance se rechargeant au fil du temps, et de la mana à recouvrer en consommant des potions ou des aliments pour la magie. Deux ressources avec lesquelles il faudra donc constamment composer. En fonction du style de jeu souhaité, il est donc impératif d’investir un certain nombre de points en Détermination pour l’endurance, et en Intelligence pour la mana. Enfin la Constitution est évidemment primordiale pour avoir une conséquente barre de vie dans l’optique d’une approche principalement portée sur le corps-à-corps. À ce niveau, on peut partir sur la Force ou la Dextérité. La Perception régira quant à elle nos chances de coups critiques pour infliger des dégâts décuplés. Une dynamique qui se veut donc simple, mais somme toute efficace.
Au fil de notre progression, nous trouverons par ailleurs diverses armes et armures « uniques » dotées de pouvoirs particuliers aussi puissants qu’utiles, comme le fait d’infliger des dégâts élémentaires ou nous octroyant de précieux points dans une statistique donnée. Attention toutefois : il faudra collecter diverses ressources pour améliorer leurs capacités, et surtout augmenter leurs statistiques. Sauf que cela constitue l’un des plus gros points noirs du gameplay d’Avowed. Durant l’exploration des Terres Vivantes, le niveau de nos adversaires n’évoluera pas en adéquation avec le nôtre. Nous allons donc obligatoirement tomber à plusieurs moments sur des ennemis beaucoup trop résistants à nos attaques, qui peuvent par contre nous abattre en à peine quelques coups. Une fois notre équipement suffisamment amélioré, la tendance s’inverse en revanche totalement. La faute à une IA globalement pas très maline, un bestiaire qui finit vite par se recycler, et un gros manque de diversité dans les patterns de leurs attaques. Même constat pour les « boss », qui sont généralement juste des versions « sacs à PV qui tapent plus fort » d’ennemis normaux. Autre point dommageable sur l’équilibrage un peu bancal de la difficulté du jeu : les ressources nécessaires pour améliorer la qualité de notre équipement sont parfois difficiles à trouver. Il faut donc généralement choisir une poignée précise d’armes et d’armures à garder, au risque de s’éparpiller et donc se retrouver péniblement ralenti dans notre progression contre des ennemis de plus haut niveau. À noter que la dernière mise à jour du jeu a apporté d’importants changements en ce sens, sans toutefois totalement éliminer le problème.

Si on a apprécié la fluidité du gameplay et la liberté qu’il nous propose dans le développement de notre personnage, le paradoxe de devoir se limiter dans le choix de son équipement pour poursuivre plus sereinement l’aventure peut donc constituer un frein certain. À noter toutefois que nous avons de notre côté fait tout le jeu en Difficile (avant-dernier niveau de difficulté). Gageons donc que la situation est plus gérable en Facile ou Normal. Bonne chance en revanche si vous comptez y jouer en « Voie des Damnés », qui doit définitivement bien porter son nom.
Des Terres Vivantes sauvages, mais tout de même accueillantes ?
En parlant de progression, terminons notre tour d’horizon des Terres Vivantes en s’intéressant justement à l’aspect « monde semi ouvert » du jeu. Comme dans The Outer Worlds, il est en effet question ici de grandes zones ou « biomes » à explorer, grossièrement au nombre de quatre. Là encore, le titre nous étale fort joliment sa belle plastique, chaque zone disposant d’une ambiance et d’une direction artistique vraiment uniques. Des forêts luxuriantes à des terres volcaniques dignes du Mordor en passant par des marais glauques ou des déserts cristallins, nous allons clairement voir du pays.

On apprécie également le fait qu’Avowed nous laisse entièrement libre dans notre exploration de son monde, sans tour ou boussole pour nous divulgâcher les mystères qui nous attendent. Cela se fait assez naturellement, en voyant par exemple une structure intrigante au loin, ou en passant par un village ou une ville où nous trouverons logiquement des marchands et des quêtes à accomplir. L’exploration du jeu porte par ailleurs une certaine emphase sur la verticalité, avec un aspect plateforme plutôt réactif et bien exploité pour nous permettre de vraiment fouiller tous les recoins possibles et imaginables. Avec tout cela, nous voilà donc bien occupés, et notre curiosité est généralement appréciablement récompensée par divers trésors pour renforcer encore notre personnage… pendant un temps.

Dans notre cas, le plaisir de l’exploration dans Avowed a en effet commencé à sérieusement s’essouffler à partir de la troisième zone du jeu. À ce moment-là, nous avions déjà un build bien établi et un équipement rôdé. Ainsi, la plupart des armes et armures trouvées ne justifiaient pas l’investissement en ressources rares pour les amener au même niveau, sauf heureusement quelques exceptions. Qui plus est, chaque région est assez vaste, sans aucune monture pour accélérer nos déplacements. Enfin, certains lieux notables sont un peu trop bien cachés, avec à la clé une récompense qui ne valait que rarement l’effort de recherche une fois arrivé vers la fin du jeu. On pourra cela dit saluer le fait que le jeu n’accorde un poids qu’aux armes et armures. Cela nous a ainsi évité de perdre trop de temps superflu à devoir en plus constamment gérer notre inventaire.