Sommaire
A cheval entre le naturalisme probant d'un Condemned et les délires introspectifs d'un Eternal Darkness ou d'un Call of Cthulhu : Dark Corners of the Earth, les jeux de cette mouvance balancent en continu entre la représentation parfois sordide d'un quotidien banal, et l'intrusion progressive et inexorable d'éléments surnaturels dans le récit, à l'aide d'un schéma narratif qui sublime l'essence même du Fantastique. S'ils ne sont pas forcément les jeux les plus horrifiques - au sens propre du terme - de ce dossier, ils en sont assurément les représentants les plus "littéraires", ceux qui puisent à même la source du genre.
Alan Wake
Convoquant aussi bien l'effroi naturaliste d'un Stephen King que les bizarreries mystico-déviantes issues de l'univers de la série Twin Peaks, Alan Wake tisse son canevas intriguant au sein d'une machination scénaristique à tiroir, qui n'en finit pas de pousser le joueur vers l'avant, désireux tout comme Alan de connaître le fin mot de l'histoire. Pour ce faire, le studio Remedy a mis les petits plats dans les grands (après cinq années de développement, on en attendait pas moins) et dote Alan Wake d'une ambiance à couper au couteau, appuyée par un moteur graphique à l'avenant, qui fleure bon l'horreur rurale et champêtre. L'autre atout du soft porte sur son gameplay ambivalent, bâtit sur des mécaniques complexes de jeux d'ombres et de lumières. Son cheminement aussi linéaire qu'une intrigue littéraire en fait également sa force, car Alan Wake se savoure d'abord comme un bon thriller surnaturel, le soir au coin du feu...
Project Zero II : Crimson Butterfly
Project Zero II : Crimson Butterfly de Tecmo se nourrit intensément du folklore et de la tradition nippone, et prouve que les jeux vidéo sont tout aussi capables de faire peur qu'un bon livre d'horreur. Il jouit pour se faire d'un concept pertinent hérité du premier épisode, qui s'appuie sur la suppression pur et simple de l'arsenal offensif classique du survival horror - vous laissant alors bien démuni -, afin de le remplacer par un simple et unique appareil photo. On doit dans ces primitives conditions utiliser le viseur de l'appareil pour localiser et exorciser les esprits malveillants, celui-ci symbolisant dès lors l'ultime ancrage dans une réalité contaminée insidieusement par l'horreur de la situation. Et de ce simple constat se dégage tout le génie de l'oeuvre, puisque la commutation soudaine vers ce point de vue à la première personne, qui agit d'abord comme un rempart, force ainsi le joueur à analyser nerveusement son environnement, qui devient à son tour la source constante d'une oppression malsaine. Un principe malin et efficace, qui interdit tout sentiment de confort manette en main, et qui vous poussera même parfois à éteindre la console.