Longtemps restée aussi secrète du grand public qu'assumée par les éditeurs, la pratique du crunch pourrit depuis fort longtemps la vie des développeurs, obligés de composer avec des cadences souvent infernales en fin de projet. Et si la pratique continue, les langues, elles, se délient.
Et pour une fois, ce n'est pas juste après une âpre période de développement que l'une des petites mains de l'industrie prend la parole, bien au contraire : récemment interrogé sur sa longue carrière, l'ex-producteur Shawn Rutland s'est confié sur bien des aspects de sa carrière au micro du podcast Elite Game Developers.
Le fondateur du studio Hutch Games, tournés vers les jeux mobiles, se rappelle en effet des années passées chez Lionhead, sous la direction de Peter Molyneux, alors qu'un certain Fable devait à tout prix sortir à l'automne 2004 :
J'ai commencé dans l'e-commerce pendant quatre ou cinq ans. Mais parce les jeux vidéo me passionnaient, je suis rentré chez Lionhead Studios en tant que producteur assistant. C'était mon rêve de travailler sur Fable avec Peter Molyneux, et j'étais assez épaté par la taille d'une telle production. Il y avait au moins 100 personnes, c'était fou. Et dur : je les ai rejoints dans une mauvaise période de crunch, et j'avais déjà eu ma dose dans mon ancien métier. J'ai été déçu de voir la santé de ces gens se dégrader en travaillant aussi longtemps, et j'ai réalisé que personne n'était vraiment productif s'il devait l'être 14 heures par jour. Alors, puisqu'il fallait que je sois au bureau à 10 heures, je me suis dit qu'il fallait se détendre, et aller parler aux gens avant de me mettre au travail. Et j'ai vite remarqué qu'ils ne faisaient sans doute que trois ou quatre heures de travail vraiment effectif.
Seize ans plus tard, les pratiques ont-elles changé ? Si le studio Lionhead a baissé le rideau en 2016, un toujours nouvel épisode de Fable avait su créer la sensation lors de son annonce il y a quelques jours, à la fin du Xbox Games Showcase. Les nombreux témoignages et enquêtes qui rythment désormais l'industrie du jeu vidéo suffiront-elles à faire évoluer les mentalités autour des conditions de travail des développeurs ? Seul l'avenir (et peut-être Jason Schreier) nous le dira.
Quant au présentéisme...