Avant la sortie de Dead Space Remake, nous avons eu l'opportunité de nous entretenir avec deux figures à l'origine de cette nouvelle version. Genèse du projet, différences avec l'original, on vous livre quelques coulisses.
Dead Space Remake sera disponible ce vendredi 27 janvier 2023 sur PS5, Xbox Series et PC. Une des grosses sorties du mois - avec Forspoken - pour laquelle nous avons eu l'occasion d'en savoir un peu plus à juste quelques jours du retour de ce désormais classique du survival-horror.
Nous avons en effet eu le droit à un tête-à-tête avec deux figures majeures derrière le jeu : Joel MacMillan, directeur de la réalisation, et l'acteur Gunner Wright, doubleur du héros Isaac Clarke dans Dead Space 2, Dead Space 3. Voici notre entretien complet avec eux.
La genèse de Dead Space Remake
Avant d'entrer dans le vif du sujet de Dead Space Remake, nous avons voulu prendre la température à quelques jours du lancement, savoir quel était l'état d'esprit des deux hommes et connaître la genèse du projet. Et si l'on pouvait un peu s'en douter, cette revisite va voir le jour en partie grâce à... Capcom !
Gameblog : Qu’avez-vous ressenti en revisitant un classique du survival-horror tel que Dead Space ?
Joel MacMillan : Pour ma part, je dirais que nous avons été honorés. Tous les membres de l’équipe de développement étaient de grands fans de l’original, nous nous sommes donc sentis très chanceux de pouvoir saisir cette opportunité unique de nous occuper de ce remake. Nous aimons tous les jeux narratifs et le fait de s’attaquer à l’une des franchises horrifiques les plus appréciées en la transposant à notre époque était une opportunité fantastique. Nous étions tous heureux de nous lancer dans cette aventure.
Gunner Wright : Je devais ça à Joel. Et le fait qu’à bien des égards, je n’ai jamais quitté le rôle d’Isaac. Je ne peux pas vous dire combien de nouvelles personnes ont découvert le jeu et combien de fans m’ont sollicité au fil des années. Sur mon site internet, on me demandait « Est-ce que je peux vous envoyer ma copie de Dead Space 2 ou Dead Space 3 - ou des figurines - afin que vous la signiez ? », sans parler des autres attentions que j’ai reçues. Donc dès que j’ai été appelé pour m'apprendre qu’ils allaient revisiter Dead Space, j’étais impatient.
Gameblog : Après tant d’années loin de la franchise, comment vivez-vous ce retour ?
Gunner Wright : Je n’ai pas eu l’occasion de jouer au jeu mais en voyant certaines des interviews, des artworks et des bouts de la version finale, tout ce que je peux vous dire est que je n’ai rien vu de tel auparavant, d’aussi détaillé. Le rendu réaliste de la combinaison par exemple, du Plasma Cutter. Tout cela me donnait juste envie de tourner (ndlr : les sessions de performance capture), sans me poser de questions, parce que ça a l’air tellement bien.
Gameblog : Dead Space Remake est-il né en raison du succès du remake de Resident Evil 2 ?
Joel MacMillan : Je dirais que ce projet est né d’une réelle envie de l’équipe. Comme je l’ai indiqué, tous les membres sont de grands fans de la franchise. Nous avons eu l’occasion de présenter l’idée d’un remake à EA, et nous avons eu la chance qu’ils acceptent. Ils ont estimé que c’était une bonne opportunité en partie grâce au succès du remake de Resident Evil 2, et à la place qu’occupe l’horreur dans la pop culture qui est un genre beaucoup plus accepté qu’il ne l’était ces dix dernières années. L’horreur a vraiment trouvé son public que ce soit en termes de jeux, de contenus sur les services de streaming et de films. C’est un genre très implanté dans notre culture populaire. Et ce n’est pas quelque chose qui a été imposé à l’équipe par EA, c’est venu comme ça. Nous voulions tous le faire, nous avons pu soumettre l’idée et nous avons eu la chance de pouvoir le faire.
L'évolution d'Isaac Clarke
Si Dead Space Remake sera une refonte graphique impressionnante, ce sera également l'occasion d'améliorer un grand nombre de points par rapport à l'original. L'exploration sera plus fluide et le personnage principal du jeu aura plus de consistance avec l'ajout d'une voix, et également exprimer son état psychique ainsi que physique via le système A.L.I.V.E.
Gameblog : Isaac peut maintenant parler et exprimer son état grâce à un nouveau système. Quelles étaient vos intentions vis-à-vis de cette nouveauté ?
Joel MacMillan : C’est une bonne question. Nous voulions accomplir différentes choses en donnant la parole à Isaac. Dans l’original, il ne répondait pas du tout de vive voix aux PNJ, et cela a créé une dissonance et une déconnexion. On avait l’impression qu’il était ignorant, pourquoi ne répondait-il pas ? Nous voulions remédier à ce problème, mais également accorder plus d’autonomie à cette version d’Isaac. Dans le premier jeu, les PNJ lui disaient quoi faire et Isaac s'exécutait. C’était un commis. Nous voulions qu’Isaac prenne un peu plus les rênes et soit davantage actif que passif. De ce fait, pour lui donner cette autonomie et vraiment exploiter son expertise en ingénierie, nous avions besoin d’apporter cette voix à Isaac et Gunner a fait un excellent travail à ce niveau. Et c'est logique car au fil de la franchise, j’ai l’impression que Gunner est devenu l’incarnation d’Isaac.
En interne, nous parlions de Gunner et d’Isaac comme d’une seule et même personne. Nous faisions référence au personnage en tant que Gunner Clark parce qu’il s’adaptait tellement bien au rôle. Par conséquent, quand nous avons décidé d’offrir une voix à Isaac pour notre jeu, Gunner était une évidence. Est-ce qu’on peut faire revenir Gunner ? Est-ce possible ? Est-il disponible ? Est-ce qu’il veut le faire ? Heureusement pour nous, c’était le cas. Mais je ne veux pas parler à sa place.
Gunner Wright : Non, en toute sincérité, ce fut un tel honneur. Et pour être honnête car je n’ai pas eu le temps de te le dire Joel, mais ce que vous avez fait en matière de technologie, d’histoire et de rendu, c’est d’une envoûtante beauté. Je pense que c’est la meilleure manière d’expliquer cela.
Joel MacMillan : Merci à toi. Envoûtant est le bon terme car il peut s’appliquer à l’ensemble du jeu. C’est un jeu très envoûtant.
Gameblog : Quelle est la différence avec le fait d’avoir un visage désormais ? Avez-vous fait de la performance capture pour Dead Space Remake ?
Gunner Wright : Excellente question. Pour ce jeu, j’ai fait de la performance capture et Motive Studios / EA ont fait appel à une équipe extraordinaire dédiée à la capture de mouvements ainsi qu’à des cascadeurs. J’en ai fait beaucoup sur Dead Space 2 et 3 mais compte tenu du budget, du temps et des aspects techniques, ils ont fait appel à une équipe incroyable que je ne qualifierais pas de seconde équipe mais qui a fait un travail phénoménal.
Joel MacMillan : C’était troublant de voir la séquence d’ouverture du jeu. Dans l’original, il y avait cette ancienne version d’Isaac Clark. Maintenant que nous capturons tout, la tête et les mouvements, quand vous jouez cette séquence d’ouverture où vous êtes à bord du Kellion en direction de l’USG Ishimura, la première chose que les personnes font lorsqu’ils réalisent qu’ils ont le contrôle de la caméra, c’est de la faire tourner pour voir le visage de Gunner parce qu’encore une fois, c’est l’incarnation d’Isaac. C’était marrant d’assister à tous les playtests car ils faisaient tous ça. Ils étaient là, à regarder Gunner. C’était vraiment génial et ça faisait chaud au cœur de voir cela.
Gunner Wright : Je n’ai jamais fait partie de Dead Space, mais ce que j’ai adoré et trouvé intéressant, c’est d’avoir cet individu traumatisé et vieillissant qui évolue de façon linéaire. J’ai trouvé cela intelligent.
Joel MacMillan : Oui ça a apporté une certaine crédibilité au personnage. Isaac traverse beaucoup d’épreuves. Il est torturé, je pense que c’est un mot juste pour décrire l’expérience des joueurs sur l’USG Ishimura. Et je pense que le fait que tous les personnages et les environnements soient plus ancrés dans la réalité, avec plus de consistance, aide vraiment à donner de la crédibilité à ce que le joueur vit. Ce n’est pas que de la poudre aux yeux. Ce n’est pas ce que j’appelle « la beauté Starship Troopers » où tout le monde a l’air d’un top model, constamment, peu importe ce qu’ils traversent. C’est comme s’il n’y avait pas de sang ou de saleté sur leur visage. Nous voulions un peu plus de réalisme et de crédibilité que cela. Je pense que la performance capture, l’éclairage et les différents effets environnementaux aident à renforcer et à transmettre cela
Dead Space Remake : des changements radicaux ?
Cette version devrait énormément la formule initiale jusqu'à quel point ? Fera-t-il beaucoup plus peur que le jeu de 2008 ? Quelle est l'ampleur des modifications apportées à l'ensemble ?
Gameblog : Dead Space Remake penche t-il plus vers l’horreur ou l’action ? Entre les deux ?
Joel MacMillan : C’est une question épineuse, mais je dirais que c'est l'horreur qui prime. L'ADN de la franchise, c'est l'horreur. La franchise a fini par explorer d’autres territoires, mais nous voulions réellement nous en tenir aux fondamentaux, à savoir que l’horreur est la priorité. Et donc, peu importe les rencontres, les expériences, les combats, nous voulions nous assurer d’avoir toujours ce niveau d’horreur, de suspens et d’anxiété. Tout cela était essentiel pour l’expérience du joueur, bien au-delà de l’action.
Par exemple, lors d’un affrontement, vous pouvez démembrer vos ennemis, ça fait partie de la boucle du combat. Mais nous souhaitions appuyer sur l’aspect horrifique en rendant le démembrement aussi gore et inconfortable que possible. Quand vous démembrez des créatures dans notre jeu, vous pouvez voir les tendons, le sang, la peau et les os. Tout est très réaliste. Et c’est justement pour renforcer la dimension horreur qui passe avant tout le reste.
Gameblog : En raison de toutes les nouveautés, est-ce que ce sera plus cinématographique ? Les changements seront-ils massifs ou de l’ordre du détail ?
Joel MacMillan : C’est une autre bonne question qui, encore une fois, nous ramène à l’un des mantras qui n’a cessé de nous animer tout au long du projet. Nous avions tous des ambitions en commençant à travailler sur le projet, mais nous nous demandions constamment « est-ce que ça a besoin d’être changé ? ». Par exemple, qu’est-ce qui a été fait dans l’original et qui était vraiment bien ? Faut-il réellement le changer ou simplement l’améliorer ? Nous nous sommes donc interrogés et donné le défi d’avoir cette réflexion pour chaque séquence, chaque chapitre, chaque expérience du jeu.
Finalement, nous avons jugé que quelques séquences devaient être ajoutées pour combler des lacunes dans la narration. Géographiquement, nous devions emmener Isaac ici et là, mais comment ? Nous avons trouvé des moyens de le faire soit de manière immersive via le jeu, soit via une séquence d’action développée ou dramatique. Notre version est aussi plus portée sur les personnages et l’émotion. Nous avons eu l’occasion de plus nous attarder sur certains personnages et pour ce faire, nous avons dû embellir certaines séquences. Vous verrez cela dans Dead Space Remake alors que ce n’était pas forcément le cas dans la version originale.