Shōnen des plus populaires depuis vingt-cinq ans, Bandai Namco a souhaité marquer le coup pour cet anniversaire symbolique de One Piece avec une nouvelle adaptation du manga qui va s’éloigner des autres jeux produits jusqu’ici.
Bandai Namco change de cap. Après de multiples beat’em up bons qu’à se défouler, des jeux d’action sans saveur, un épisode VR qui n’a rien révolutionné au genre, un monde ouvert complètement raté et une poignée de jeux mobiles, One Piece revient jeter l’ancre dans un nouveau domaine : le RPG. One Piece Odyssey entend proposer un petit vent de fraîcheur sans afficher des ambitions démesurées comme World Seeker, déception de nombreux fans. C’est peut-être cette modestie qui pourrait faire tout son charme. On y a joué pendant plus de 5 heures, voici nos premières impressions.
Un fan service qui fait immédiatement son effet
Escale imprévue pour l’équipage au Chapeau de Paille. Alors que Luffy et ses camarades naviguent sur les mers du Nouveau Monde, leur quête d’aventure les conduit par accident sur une île aussi mystérieuse que légendaire : Waford. Échoué au milieu de nulle part, le Thousands Sunny en piteux état et sans moyen de quitter le lieu de leur naufrage, le pirate part à la recherche de ses amis. Ainsi débute le début de notre prise en main. Une formalité de quelques secondes qui conduit à plusieurs quêtes très linéaires, ponctuées de tutoriels incessants, de combats formateurs et d’allers-retours qui deviennent rapidement rébarbatifs. One Piece Odyssey reprend bien tous les poncifs du RPG classique, pour le meilleur comme le pire sous fond d’histoire originale chapeautée pour l’occasion par l'auteur du manga à succès, Eiichiro Ôda lui-même.
Si le premier JRPG de la licence tente d'apporter sa propre touche, on est sur du classique pur et dur. Le jeu n’ira pas effleurer les standards actuels ou ceux qui sont parvenus à moderniser une formule éculée depuis longtemps comme Persona 5, mais ILCA (Pokémon Diamant Étincelant et Perle Scintillante) aura sans doute le mérite de tenter des choses. Combats en tour par tour, PM remplacés par des TP (points techniques) qui se rechargent à chaque attaque classique, compétences aux animations bien classes, objets en tout genre… On retrouve tout le train-train habituel. La différence viendra sans doute de sa fonctionnalité de placement. À chaque début d’affrontement, ennemis comme alliés sont confinés dans des zones séparées. Impossible d’attaquer un adversaire en dehors, il faudra d’abord se frotter à ce que le personnage a sous les yeux.
On émet encore de grosses réserves sur l’intérêt d’un tel ajout puisqu’il n’a finalement rien apporté de concret lors de notre session de jeu, mais il pourrait nous mettre à défaut si la situation s’y prête. Comme les jeux Pokémon, One Piece Odyssey fonctionnera avec un système de chifoumi. Chaque personnage est affecté d’un attribut (technique, pouvoir, vitesse), chacun ayant une force et une faiblesse. Les attaques de type technique mettent à mal les adversaires de type pouvoir, qui eux feront de plus lourds dégâts contre un combattant orienté vitesse. Il conviendra donc de faire des aménagements de l’équipe selon les situations afin d’être certain de pouvoir prendre l’ascendant. Ce n’est pas transcendant, mais bien exploité lors des combats clés, ça pourrait faire une petite différence. À voir sur la durée donc. Pour pimenter le tout, One Piece Odyssey confrontera les Chapeaux de Paille à des situations « dramatiques », ou autrement dit des événements aléatoires. On a par exemple assisté à un Usopp démuni et entouré d’ennemis qu’il fallait réduire en charpie dans un nombre de tours impartis. Les situations semblent assez variées et devraient permettre d’aborder certains combats routiniers d’une autre façon avec ses objectifs secondaires, mais encore une fois rien qui ne viendra réinventer la roue. Ce n’est de toute façon pas l’objectif du jeu.
Un RPG old school qui peut avoir du potentiel
One Piece Odyssey sera avant tout une lettre d’amour au manga. Si les développeurs souhaitent accueillir à bras ouvert les nouveaux venus ou celles et ceux qui connaissent peu l’univers original, c’est avant tout aux fans que le jeu s’adresse. Tout ce qui a fait son charme pendant notre session de jeu tient davantage d’un fan service efficace que de ses mécaniques de gameplay. ILCA a eu la bonne idée de mêler histoire originale et arcs les plus emblématiques du manga. Luffy et sa joyeuse bande rencontreront deux nouveaux personnages conçus par Oda en personne pour l'occasion : Adio et Lim. Cette dernière dispose d’un pouvoir étrange qui poussera les Mugiwara à revivre certains de leurs moments les plus forts afin de récupérer leurs souvenirs et leurs compétences les plus poussées par la même occasion. Première halte à Alabasta, qui ne ressemblera pas trait pour trait à ce que l’on peut voir dans l’anime, le jeu utilisant l’excuse de la mémoire qui faillit et des souvenirs entremêlés de chaque membre de l’équipage.
Cette reconstruction de l’environnement est honnêtement plutôt chouette et il nous tarde de voir ce que donnera la narration sur le long-terme. Il sera par exemple intéressant de voir Robin revivre les événements en étant de l’autre côté de l’histoire. En l’absence de Vivi ou de Crocodile dans notre démo, impossible de statuer sur ce point. Le scénario original devrait cependant être plus prometteur qu’espéré en proposant un casting assez plaisant et une histoire qui contient assez de mystères pour nous donner envie d’en voir plus. Il faudra néanmoins réussir à passer outre les débuts poussifs à base de phases d’apprentissages ennuyeuses qui enchaînent les quêtes intéressantes. Comme beaucoup de jeux du genre, One Piece Odyssey semble bien parti pour souffrir d’un problème de rythme. Le level design, constitué de couloirs très étroits avec des cartes de taille moyenne, n’est pas pour aider, on est constamment interrompu par l’action parce qu’un dialogue (sans défilement auto), une cinématique ou un combat se déclenche et qu’il favorise des allers-retours assez rébarbatifs au bout d’une poignée d’heures. Chaque membre de l’équipage pourra être utilisé à bon escient pour progresser vers des zones cachées, Luffy naviguant de plateforme en plateforme en allongeant ses bras ou Chopper se faufilant dans un passage étroit, mais ce n’est clairement pas aussi fluide qu’espéré.
Même son de cloche lors des affrontements, où il était impossible d'accélérer l’action en passant les animations des techniques spéciales et où la fonctionnalité de combat automatique défile à vitesse normale ce qui amenuise tout son intérêt. Bandai Namco a tout de même tenu à nous rassurer quelques changements ont depuis été opérés, preuve à l'appui en image, avec un bouton pour augmenter la vitesse des animations. C'est rassurant et on espère que la build finale s’inspirera de productions récentes qui sont parvenues à améliorer ces défauts inhérents au genre, surtout quand notre démo se termine sur un combat de boss s’apparentant simplement à un sac à PV sans la possibilité de le debuff ou d’utiliser une vraie stratégie. C’était clairement ennuyeux. On a pourtant vu des choses encourageantes, notamment quant à l’évolution des personnages et le système d’équipement qui repose sur un système de cases à la Tetris et qui permettait déjà d’entrevoir des combinaisons intéressantes. En l’absence de certains contenus, comme les attaques groupées aperçues dans des trailers ou les « side episodes », des quêtes annexes scénarisées pour renforcer les liens entre les membres de l’équipage, difficile d’être pleinement enthousiaste et pourtant le fan qui sommeille en nous n’a qu’une hâte : y retourner. Ne serait-ce que pour se délecter à nouveau de cette OST magistrale signée Motoi Sakuraba, connu pour son travail sur la série Dark Souls ou encore les Tales of, qui apporte un véritable cachet au jeu.
On attend One Piece Odyssey … parce qu’on est fans
Difficile d’émettre un avis tranché sur One Piece Odyssey après ces cinq heures tant elles font office de tutoriel à rallonge qui ne permettent pas de voir tout ce que le RPG a dans le ventre. On garde espoir d’avoir un jeu final qui ne repose pas que sur un fan service diablement efficace et qui parviendra à dynamiser un ensemble classique avec quelques surprises et mécaniques ajoutées au fil de la progression. L’utilisation de la licence et des personnages sont irréprochables et font clairement leur petit effet, mais à l’heure où d’autres productions tentent de nouvelles choses, il manque à One Piece Odyssey ce petit quelque chose pour ne pas être trop old school malgré quelques petites subtilités bienvenues. Le frisson devrait cependant être garanti pour les fans inconditionnels à condition d’avoir un minimum d’attrait pour le genre.