Ed Del Castillo, fondateur de Liquid Entertainment et Director sur Rise of the Argonauts, était de passage à Paris pour une présentation plus en détails de son titre. Une grande première pour son éditeur Codemasters, qui ne s'est jamais frotté au genre jusqu'ici. Et s'attaquer au genre du RPG, avec la volonté d'en changer la formule, c'est prendre de sacrés risques... même pour quelqu'un qui a travaillé notamment sur Ultima IX après s'être fait remarquer dans le monde du STR (de Command & Conquer et Red Alert à Star War : Empire at War en passant par LOTR : War of the Ring).
Ed est incontestablement passionné par son propos, et son projet. Pour l'oeil non averti, Rise of the Argonauts semble plus tenir du jeu d'action que du RPG, et pourtant... "La plupart des RPG sont esclaves de l'héritage issu des jeux de rôles pen & paper", explique Del Castillo. Un état de fait qui semble poser problème au développeur, désireux de s'affranchir de certains codes du genre, trop axé sur les statistiques, les niveaux, et compagnie. "On passe 50% de son temps dans des menus", poursuit-il pendant qu'à l'écran, sa version de Jason, librement réinterprétée du mythe de la Toison d'Or, tranche les membres d'ennemis à la manière de ce qu'on a pu voir récemment dans des jeux comme Viking, ou Ninja Gaiden II. C'est incontestable : pour son premier RPG, Codemasters n'a pas choisi la facilité.
Interprétation perso
Dans cette "version" de Jason et les Argonautes, le héros débute sa quête après avoir perdu sa femme, assassinée en plein mariage. Une tragédie qui modifie déjà grandement l'approche du récit qu'a choisi de réinterpréter Liquid Entertainment d'un classique grec, puisque cette fois Jason cherchera à s'emparer de la Toison d'Or pour ressusciter l'amour de sa vie. Et ce n'est qu'une des différences majeures d'avec l'histoire originale. Car les autres personnages qui le rejoindront au fur et à mesure, les fameux Argonautes, ont eux aussi été revisités à la sauce moderne. "Ce sont un peu les X-Men de la mythologie grecque", explique le moulin à paroles Del Castillo, à propos d'Hercule, Achilles ou encore le satyre Pan, membres à venir du groupe accompagnant Jason. Bien évidemment, il y a des choses qu'on ne saurait changer : il s'agit toujours de la Grèce antique, mais "la Grèce telle qu'elle était à l'époque, pas telle qu'elle est aujourd'hui", explique le développeur, qui accuse bien volontiers le design d'autres titres contemporains du sien de représenter des ruines actuelles en lieu et place de décors qui n'étaient pas dans cet état au moment des faits.
L'importance des Dieux
Les libertés narratives, c'est une chose. Mais ce n'est pas la seule que se permet Rise of the Argonauts. Côtés dialogues tout d'abord, à l'exception peut-être du récent Mass Effect, la plupart des RPGs sont mis en accusation une nouvelle fois par Del Castillo. Non seulement ils sont statiques visuellement, avec deux personnages qui se font face et lâchent alternativement leurs répliques, mais les choix qu'ils offrent semblent contraints d'engager sur une parmi trois voies inévitables. "Il y a toujours une mauvaise réponse, une bonne réponse, et une réponse neutre", explique-t-il. "On ne veut pas suivre ce schéma, car comme pour le reste, on s'aperçoit qu'au bout d'un moment, le joueur joue le jeu des designers. Pas le sien. Et le but d'un RPG, c'est de se faire sa propre aventure, pas de suivre celle des designers", explique Ed. Même dans Mass Effect, lâche-t-il, pour lequel "bon" et "mauvais" sont en quelques sortes remplacés par des factions, et où les réponses neutres n'aboutissent finalement à rien. Dans RotA, tout tourne autour des quatre Dieux : Athena, Hermès, Arès et Apollon. Les réponses disponibles traduisent un caractère correspondant plutôt à l'un des Dieux, et aboutissent toujours à une réaction du jeu par rapport au choix du joueur. De même, ces quatre patrons seront ceux auxquels dédier des "actions", sortes de Succès semblables à ceux du Xbox Live, qui une fois dédiés à un Dieu en particulier, feront progresser Jason vers ce Dieu. Les pouvoirs, compétences et autres capacités dépendent toutes d'un de ces quatre Dieux, et choisir de leur dédier ses prouesses, comme dialoguer d'une certaine manière, participe au système "XP-Free" de RotA.
Une quête difficile
Passer après des monuments tels que God of War pour l'aspect mythologique brillamment rendu visuellement, ou de solides RPG traditionnels tels que Mass Effect pour les systèmes principaux, ce ne sera pas facile pour Liquid Entertainment. A bord de l'Argo, le bateau qui sera semble-t-il à RotA ce que le Normandy est à Mass Effect, le joueur naviguera d'île en île, pour y découvrir des personnages que l'équipe s'efforce de rendre le plus humain possible, promettant que chaque personnage avec un nom sera autant de narration à découvrir, et pas seulement une machine à objets ou à quêtes. Les libertés narratives, tout comme celles prises vis à vis du genre, font de Rise of the Argonauts un projet intéressant, c'est incontestable. Même si à l'issue de la bonne heure de présentation en pré-alpha à laquelle nous avons eu droit, il reste énormément de travail d'ici à sa sortie cet automne sur Xbox 360, PS3, et PC. On ne peut en tout cas que lui souhaiter bon courage.